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05/02/2019 | FRANCE | N°17NT03628

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 05 février 2019, 17NT03628


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D...ont demandé au Tribunal Administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté en date du 1er février 2016 par lequel le maire de Saint-Ay a fait opposition à leur déclaration préalable de travaux en vue de la réalisation d'une clôture.

Par un jugement n° 1600842 du 10 octobre 2017, le Tribunal Administratif d'Orléans a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 décembre 2017 et le 6 juin 2018, M. et MmeD..., représentés

par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 octobre 2017 ;

2°) d'annuler ce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D...ont demandé au Tribunal Administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté en date du 1er février 2016 par lequel le maire de Saint-Ay a fait opposition à leur déclaration préalable de travaux en vue de la réalisation d'une clôture.

Par un jugement n° 1600842 du 10 octobre 2017, le Tribunal Administratif d'Orléans a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 décembre 2017 et le 6 juin 2018, M. et MmeD..., représentés par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 octobre 2017 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 1er février 2016 du maire de Saint-Ay ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Ay une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté d'opposition a été signé par le maire de Saint-Ay qui était intéressé à l'affaire, dès lors qu'il est propriétaire d'un terrain situé aux abords du chemin rural litigieux et qu'il a manifesté constamment sa volonté de maintenir une servitude de passage sur ce chemin ; la décision méconnaît ainsi l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme ; la décision est entachée à cet égard d'un détournement de pouvoir ;

- ils sont propriétaires des parcelles sur lesquelles ils souhaitent édifier une clôture ; aucune contestation sérieuse ne s'est élevée sur leur propriété ; ils pouvaient déposer leur déclaration ; le tribunal et le maire ont commis une erreur de droit en se fondant sur les dispositions des articles L. 161-1 à L. 161-4 du code rural et de la pêche maritime et sur le rapport d'un géomètre expert ;

- le seul rapport du géomètre expert ne suffit pas à apporter la preuve que le chemin de la Hausseraie serait entretenu régulièrement par la commune ; la commune ne s'est jamais comportée comme propriétaire de ce chemin mais a prétendu bénéficier d'une servitude de passage ;

- aucune délibération n'a classé le chemin litigieux comme chemin rural appartenant à la commune ; aucune pièce, n'établit que ce chemin, qui coupe leur propriété, appartiendrait à la commune, en dépit de leur titre de propriété ; leur titre de propriété ne désigne pas le chemin de la Hausseraie comme une servitude ; le chemin de la Hausseraie constitue en fait une ancienne servitude qui a disparu et qui fait partie intégrante de leur propriété, tout comme pour les propriétaires voisins ; ce chemin est régulièrement envahi par la végétation et entretenu par les différents propriétaires, pour partie il débouche sur des parcelles privées et pour partie mène à une impasse au niveau de la parcelle 659 son tracé est incorporé dans leur propriété et supporte des canalisations depuis plus de 10 ans, une clôture ancienne était implantée sur son assiette avec la mention propriété privée au niveau des parcelles 671 à 676 ; dès lors la présomption fondée sur l'article L. 161-3 du code rural et de la pêche maritime est renversée.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 26 avril 2018 et le 24 octobre 2018, la commune de Saint-Ay, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. et Mme D...une somme de 5000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. et Mme D...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Degommier,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant M. et MmeD..., et de MeF..., représentant la commune de Saint-Ay.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D...relèvent appel du jugement du 10 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 1er février 2016 du maire de Saint-Ay faisant opposition à leur déclaration préalable de travaux en vue de la réalisation d'une clôture sur un terrain situé 38 rue de la galère.

Sur la légalité de l'arrêté du 1er février 2015 du maire de Saint-Ay :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. Aux termes de l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme : " Si le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est intéressé au projet faisant l'objet de la demande de permis ou de la déclaration préalable, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune ou l'organe délibérant de l'établissement public désigne un autre de ses membres pour prendre la décision. ". S'il est soutenu que le maire de Saint-Ay est propriétaire d'un ensemble immobilier aux abords du chemin de la Hausseraie, cette seule circonstance ne suffit pas à établir qu'il aurait été intéressé au projet de clôture en litige. Si le maire a manifesté à plusieurs reprises sa volonté de maintenir le passage des piétons sur ce chemin, il ressort des pièces du dossier que le maire a, ce faisant, agi dans le cadre de l'exercice de son mandat et non en son nom personnel, au sens des dispositions de l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme. Ce moyen doit donc être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne :

3. Le maire s'est opposé à la déclaration préalable déposée par M. et Mme D...pour la construction d'une clôture, au motif que les intéressés ne disposaient pas de droit à déposer cette déclaration et que le projet conduisait à créer un obstacle sur le chemin rural de la Hausseraie.

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 161-1 du code rural et de la pêche maritime : " Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune ". Selon l'article L. 161-2 de ce code : " L'affectation à l'usage du public est présumée, notamment par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ou par des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale. La destination du chemin peut être définie notamment par l'inscription sur le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée. ". L'article L. 161-3 du même code dispose : " Tout chemin affecté à l'usage du public est présumé, jusqu'à preuve du contraire, appartenir à la commune sur le territoire de laquelle il est situé ".

5. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport du géomètre-expert dressé le 29 mai 2015 à la demande de la commune, que le chemin de la Hausseraie, identifié dans le cadastre napoléonien de 1829 comme un ancien chemin de halage, part à l'ouest du sentier rural n°24 dit du Carrefour pour aboutir à l'est sur le chemin de la commune reliant la rue de la Galère à la Loire. Ce chemin de terre parfois enherbé, d'une largeur d'environ 2 mètres, sépare les propriétés bâties en façade sur la rue de la Galère des parcelles de terres qui descendent jusqu'à la Loire, est clôturé par des murs de soutènement côté nord et par des haies ou des clôtures côté sud, des portillons installés depuis les propriétés bâties permettant d'accéder à ce chemin et aux terrains côté Loire. Ce chemin figure sur tous les plans cadastraux produits. Par délibération du 3 octobre 1972, le conseil municipal de Saint-Ay, considérant que le chemin de la Hausseraie fait " partie intégrante du domaine privé de la commune ", a décidé que ce chemin resterait affecté à la circulation pédestre. Par arrêté du 18 octobre 1972, le maire de Saint-Ay a demandé aux habitants riverains de ce chemin de faire disparaître tout obstacle pouvant entraver la libre circulation des piétons. Il résulte tant du rapport du 29 mai 2015 du géomètre expert que des plans et photographies produits, que ce chemin est entretenu, praticable, qu'il a fait partie du chemin de randonnée GR3 jusqu'à une époque récente, que la commune a constamment eu le souci, réaffirmé par la délibération précitée du 18 octobre 1972 et par divers courriers notamment du 6 avril 2000, qu'il soit ouvert au public, qu'il est fréquenté par les habitants du quartier et que le chemin est entretenu par les services municipaux. Le maire y a en outre régulièrement exercé ses pouvoirs de police, notamment en constatant, le 9 février 2015, la fermeture dudit chemin par M. et MmeD.... Il en résulte que le chemin en cause est affecté à l'usage du public.

6. Par ailleurs, M. et Mme D...font valoir qu'ils sont propriétaires des parcelles sur lesquelles ils souhaitent édifier la clôture litigieuse et que ces parcelles ne sont grevées d'aucune servitude liée au chemin de la Hausseraie. Il ressort toutefois des mentions de leur acte de propriété que les intéressés ont acquis une maison d'habitation cadastrée D 251 ainsi que le jardin D 249 et D 250, l'acte précisant que ce jardin est situé " au sud du chemin de la Hausseraie ". Cette mention ne permet nullement d'établir le droit de propriété invoqué par les intéressés sur cette portion de chemin. Si les requérants soutiennent que la contenance totale de leur jardin indiquée dans l'acte notarié inclut la portion de chemin litigieuse, cette circonstance, au demeurant non établie, ne permet pas davantage d'établir que l'assiette du chemin aurait été intégrée à leur propriété. Les titres de propriété voisins, que le géomètre expert a pu consulter, identifient tous le chemin de la Hausseraie. Le plan cadastral actuel et l'extrait de plan cadastre napoléonien produits font au surplus apparaître le chemin de la Hausseraie. La circonstance, à la supposer établie, qu'une servitude de marchepied ait existé sur ce terrain et ait été supprimée est sans incidence sur ces constats. Dans ces conditions, le chemin, qui, ainsi qu'il a été dit au point précédent, est affecté à l'usage du public, doit être regardé, sans contestation sérieuse, comme appartenant à la commune.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux (...) ".

8. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Ainsi, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande. Il résulte de ce qui précède que les tiers ne sauraient utilement invoquer, pour contester une décision accordant une telle autorisation au vu de l'attestation requise, la circonstance que l'administration n'en aurait pas vérifié l'exactitude. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une telle demande de permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif.

9. Il ressort des termes de la déclaration déposée par M. et Mme D...et de la notice jointe que la clôture projetée s'implante en limites séparatives est et ouest des parcelles cadastrées D 249 et D 250, jusqu'au niveau de la parcelle cadastrée D 251 de M. et MmeD..., et en travers du chemin dit de la Hausseraie, qui borde la parcelle D 251. Il résulte de ce qui a été indiqué aux points 5 et 6 que la commune disposait, au moment où elle statuait, d'informations lui permettant d'affirmer, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que les déclarants ne disposaient d'aucun droit à déposer cette déclaration au sens de l'article R. 423-1 précité. Le maire a donc pu légalement, pour ce motif, s'opposer à la déclaration de M. et MmeD....

10. Enfin, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

11. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Ay, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme D...demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. et Mme D...une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la commune et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme D...est rejetée.

Article 2 : M. et Mme D...verseront à la commune de Saint-Ay une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D..., à Mme B... D...et à la commune de Saint-Ay.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Dussuet, président de chambre,

- M. Degommier, président assesseur,

- M. Mony, premier conseiller.

Lu en audience publique le 5 février 2019.

Le rapporteur,

S. DEGOMMIER

Le président,

J-P. DUSSUETLe greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT03628


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT03628
Date de la décision : 05/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUSSUET
Rapporteur ?: M. Sébastien DEGOMMIER
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : SELARL ACTE AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-02-05;17nt03628 ?
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