La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/02/2019 | FRANCE | N°17NT01492;17NT01514

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 08 février 2019, 17NT01492 et 17NT01514


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme G...H..., M. et Mme L...E..., M. A... D..., Mme I...D...et Mme B...N...ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision de la commission départementale d'aménagement foncier du Morbihan du 7 novembre 2014 portant rejet de leur réclamation relative aux opérations de remembrement réalisées sur le territoire de la commune de Theix, devenue en 2016 commune de Theix-Noyalo.

Par un jugement n° 1500120 du 10 mars 2017, le tribunal administratif de Rennes, après avoir pris ac

te du désistement d'instance de Mme I...D..., a fait droit à leur demande et a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme G...H..., M. et Mme L...E..., M. A... D..., Mme I...D...et Mme B...N...ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision de la commission départementale d'aménagement foncier du Morbihan du 7 novembre 2014 portant rejet de leur réclamation relative aux opérations de remembrement réalisées sur le territoire de la commune de Theix, devenue en 2016 commune de Theix-Noyalo.

Par un jugement n° 1500120 du 10 mars 2017, le tribunal administratif de Rennes, après avoir pris acte du désistement d'instance de Mme I...D..., a fait droit à leur demande et a annulé dans son article 2 la décision de la commission départementale d'aménagement foncier du Morbihan du 7 novembre 2014.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête et des mémoires enregistrés les 15 mai 2017, 6 septembre 2018, 7 et 8 janvier 2019 sous le n°17NT01492 le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 10 mars 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme H...et autres devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, la réclamation des consorts H...devant la commission départementale d'aménagement foncier du Morbihan était irrecevable car tardive ;

- les premiers juges ont à tort retenu une décision de la commission communale d'aménagement foncier du 13 mai 2009, qui n'existe pas, pour estimer que la demande dont ils étaient saisis était recevable ;

- le transfert de propriété en litige étant intervenu à la suite du dépôt du plan définitif du remembrement en mairie par l'arrêté du préfet du Morbihan du 30 mars 2009 portant clôture des opérations, la commission communale d'aménagement foncier n'était, après cette date, plus compétente pour statuer sur les recours dirigés contre ces opérations ; seul un recours direct devant la commission départementale d'aménagement foncier, fondé sur une omission des apports, ce qui n'était pas le cas ici, pouvait alors être exercé pendant une période de 5 ans ;

- en l'absence de décision les concernant, les demandeurs auraient pu contester devant la commission départementale d'aménagement foncier le plan de remembrement dans le délai d'un mois après la publication en mairie des décisions de la commission communale prévue à l'article R. 121-6 du code rural, c'est-à-dire à compter du 15 décembre 2008, ce qu'ils n'ont pas davantage fait ;

- à supposer que la notification individuelle du procès-verbal des opérations de remembrement constitue une décision susceptible de recours, les intéressés auraient dû former ce recours dans un délai raisonnable ; le délai de 5 ans constaté en l'espèce rend leur réclamation tardive.

Par des mémoires enregistrés les 23 février et 12 septembre 2018 et le 17 janvier 2019 Mme et M.H..., Mme et M.E..., M. D...et MmeN..., représentés par Me C..., concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que les moyens présentés par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt ne sont pas fondés.

II) Par une requête et des mémoires enregistrés les 16 mai 2017 et les 5 et 27 septembre 2018 sous le n° 17NT01514 la commune de Theix-Noyalo, représentée par MeJ..., demande à la cour :

1°) d'annuler le même jugement du tribunal administratif de Nantes du 10 mars 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme H...et autres devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge M. et Mme H...et autres la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors que le tribunal n'a pas répondu à son argumentation tirée de ce que les moyens présentés étaient inopérants ; il n'a ni explicitement ni implicitement examiné ce moyen de défense ;

- c'est à tort que la demande présentée par M. et Mme H...et autres a été jugée recevable par le tribunal ; la saisine de la commission départementale d'aménagement foncier était tardive en application des principes dégagés par le Conseil d'Etat dans sa décision du 13 juillet 2016, n° 387763 Czabaj ; les demandeurs ont indiqué eux-mêmes que la décision de la commission communale d'aménagement foncier du 13 mai 2009 contenue dans le procès-verbal de remembrement leur avait été notifiée individuellement en mai 2009 ;

- l'annulation de la délibération du 9 septembre 2008 créant le chemin rural à l'origine du litige n'a pas d'incidence sur la décision contestée de la commission départementale d'aménagement foncier qui n'en est pas une mesure d'application.

Par des mémoires enregistrés les 23 février et 12 septembre 2018 et le 17 janvier 2019 Mme et M.H..., Mme et M.E..., M. D...et MmeN..., représentés par Me C..., concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que les moyens présentés par la commune de Theix-Noyalo ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 6 septembre 2018, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation fait savoir à la cour qu'il s'en rapporte aux écritures produites dans l'instance 17NT01492.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code rural ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coiffet ;

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;

- les observations de MeM..., substituant MeJ..., représentant la commune de Theix-Noyalo et les observations de MeF..., substituant MeC..., représentant M. et MmeH..., M. et MmeE..., M. D...et MmeN....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 20 mars 2003 le préfet du Morbihan a ordonné un remembrement rural sur le territoire de la commune de Theix et en a fixé le périmètre. Dans le cadre de ces opérations, le conseil municipal de Theix a, par une délibération du 9 septembre 2008, décidé la création d'un chemin rural sur une partie de la parcelle cadastrée ZB120, devenue XB87, propriété alors en indivision de M. et MmeH..., M. et MmeE..., M. et Mme D...et MmeN.... L'enquête publique sur le nouveau parcellaire s'est déroulée du 15 septembre au 15 octobre 2008. La commission départementale d'aménagement foncier du Morbihan a examiné les réclamations formulées sur le projet d'aménagement foncier de Theix au cours de sa séance du 6 février 2009. Le préfet a, par un arrêté du 30 mars 2009, ordonné la clôture des opérations de remembrement et approuvé définitivement le plan de remembrement. Par une lettre du 13 mai 2009, le président de la commission communale d'aménagement foncier a transmis à M. et MmeH..., M. et MmeE..., M. et Mme D...et Mme N...le procès-verbal de remembrement de leur compte de propriété, qui faisait apparaître le transfert d'une partie de la voie d'accès cadastrée ZB120 puis XB87, pour une surface de 552 mètres carrés, dans le domaine privé de la commune de Theix, devenue depuis le 1er janvier 2016 commune de Theix-Noyalo, afin de créer un chemin rural. Les intéressés ont, par une lettre du 19 septembre 2014 reçue le 22 septembre 2014, saisi la commission départementale d'aménagement foncier du Morbihan d'un recours contre ce transfert. La commission a, par une décision du 7 novembre 2014, rejeté ce recours en raison, notamment, de sa tardiveté. M. et MmeH..., M. et MmeE..., M. et Mme D...et Mme N...ont saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à l'annulation de cette décision. Par un jugement du 10 mars 2017, cette juridiction a, après avoir donné acte du désistement de MmeD..., fait droit dans son article 2 à leur demande. Le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, sous le N°17NT01492, et la commune de Theix-Noyalo, sous le n°17NT01514, relèvent appel de ce jugement dans la mesure de l'annulation prononcée. Il y a lieu de joindre ces deux requêtes.

Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué et sur la recevabilité de la demande présentée par M. et MmeH..., M. et MmeE..., M. D...et Mme N...devant le tribunal administratif :

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L.123-16 du code rural et de la pêche maritime : " Sous réserve des droits des tiers, tout propriétaire ou titulaire de droits réels, évincé du fait qu'il n'a pas été tenu compte de ses droits sur des parcelles peut, pendant une période de cinq années à compter de l'affichage en mairie prévu à l'article L. 121-12, saisir la commission départementale d'aménagement foncier aux fins de rectification des documents du remembrement. / Si la commission estime impossible de procéder à ladite rectification, elle attribue à l'intéressé une indemnité correspondant à l'intégralité du préjudice subi par lui. La charge de cette indemnité incombe au département sous réserve, le cas échéant, de l'action récursoire de ce dernier contre les personnes ayant bénéficié de l'erreur commise. Les contestations relatives aux indemnités sont jugées comme en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique. ".

3. Il ressort des pièces du dossier, en particulier des documents produits par le ministre de l'agriculture, que l'arrêté du préfet du Morbihan du 30 mars 2009 ordonnant la clôture des opérations de remembrement et approuvant définitivement le plan de remembrement a été déposé en mairie de Theix ce même 30 mars. Le certificat signé du maire de la commune, daté du 31 mars 2009, établit l'affichage du plan définitif d'aménagement foncier à cette même date du 30 mars 2009. C'est donc également à cette date qu'est intervenu le transfert de propriété en litige, et non à la date du 13 mai 2009 à laquelle la commission communale d'aménagement foncier s'est bornée à communiquer aux consorts H...les nouveaux comptes de propriété et documents cadastraux les concernant. Ainsi et après cette date du 30 mars 2009, seul un recours direct devant la commission départementale d'aménagement foncier pouvait être exercé, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L.123-16 du code rural, par les propriétaires qui s'estimaient évincés. Or la lettre adressée à la commission départementale d'aménagement foncier du Morbihan par les consortsH..., E..., D...et Mme N...est datée du 19 septembre 2014 et a été reçue le 22 septembre 2014 par cette commission, soit après l'expiration du délai de 5 ans qui leur était imparti. C'est, dans ces conditions, à bon droit que la commission départementale d'aménagement foncier du Morbihan a pour ce motif rejeté la réclamation formée par les intéressés, et à tort que le tribunal administratif de Rennes a, par le jugement attaqué, annulé sa décision de rejet du 7 novembre 2014.

4. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation et la commune de Theix-Noyalo sont fondés à demander l'annulation de l'article 2 du jugement attaqué.

Sur les frais de l'instance :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat et de la commune de Theix-Noyalo, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. et MmeH..., M. et MmeE..., M. D...et Mme N...et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sur le fondement des mêmes dispositions, de mettre à la charge de ces derniers le versement à la commune de Theix-Noyalo d'une somme totale de 1 500 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement n°1500120 du tribunal administratif de Rennes du 10 mars 2017 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. et MmeH..., M. et MmeE..., M. D...et Mme N...devant le tribunal administratif de Rennes, ainsi que les conclusions présentées par eux en appel au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 3 : M. et MmeH..., M. et MmeE..., M. D...et Mme N...verseront à la commune de Theix-Noyalo la somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'agriculture et de l'alimentation, à la commune de Theix-Noyalo et à M. et Mme G...H..., M. et Mme L...E..., M. A... D...et Mme B...N....

Délibéré après l'audience du 24 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre

- M. Coiffet, président-assesseur

- M. Berthon, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 8 février 2019.

Le rapporteur

O. CoiffetLe président

I. Perrot

Le greffier

M. K...

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT01492, 17NT01514


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT01492;17NT01514
Date de la décision : 08/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : CABINET LAHALLE - ROUHAUD et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-02-08;17nt01492 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award