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17/07/2020 | FRANCE | N°20NT00825

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 17 juillet 2020, 20NT00825


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les deux arrêtés du 17 janvier 2020 par lesquels le préfet de Maine-et-Loire, d'une part, a décidé son transfert aux autorités allemandes, d'autre part, l'a assignée à résidence.

Par un jugement n° 2000828 du 31 janvier 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 mars et 3 juillet 2020, Mme G... B..., représentée par Me

C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 31 ja...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les deux arrêtés du 17 janvier 2020 par lesquels le préfet de Maine-et-Loire, d'une part, a décidé son transfert aux autorités allemandes, d'autre part, l'a assignée à résidence.

Par un jugement n° 2000828 du 31 janvier 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 mars et 3 juillet 2020, Mme G... B..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 31 janvier 2020 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 17 janvier 2020 du préfet de Maine-et-Loire ainsi que la décision d'exécution d'office de son transfert ;

3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, à titre principal, de transmettre sa demande d'asile à l'OFPRA, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours, sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé ce délai, et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

en ce qui concerne l'arrêté de transfert :

- il n'a pas été signé par une autorité compétente ;

- il n'est pas suffisamment motivé ;

- il est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière faute que soit établie une information suffisante de l'intéressée sur la procédure suivie ;

- il est entaché d'une erreur de droit en ce que le fondement de la décision de transfert n'est pas établi ;

- il procède d'une application manifestement erronée de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 qui permet de déroger aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile ;

- il méconnait les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

en ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :

- elle a été signée par une autorité incompétente ;

- elle n'est pas suffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une irrégularité de procédure faute d'examen préalable de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'une méconnaissance de l'article L. 611-2 du même code.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juin 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... se disant B..., ressortissante de la République démocratique du Congo née le 20 février 1995, est entrée irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 11 octobre 2019. Le 13 novembre 2019, elle a déposé une demande d'asile auprès des services de la préfecture de Maine-et-Loire. Suite à la consultation du fichier Visabio, il a été constaté qu'elle était titulaire d'un visa de court séjour périmé depuis moins de six mois délivré par les autorités allemandes. Saisies le 15 novembre 2019 d'une demande de transfert, les autorités allemandes ont fait connaître leur accord explicite le 25 novembre 2019. Par deux arrêtés du 17 janvier 2020 le préfet de Maine-et-Loire, d'une part, a décidé de remettre Mme B... aux autorités allemandes pour l'examen de sa demande d'asile et, d'autre part, l'a assignée à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Mme B... relève appel du jugement du 31 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'incompétence :

2. En premier lieu, l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version issue du décret du 23 janvier 2019, dispose que : " Sans préjudice du second alinéa de l'article 11-1 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004, l'autorité compétente pour renouveler l'attestation de demande d'asile en application de l'article L. 742-1, procéder à la détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile, assigner à résidence un demandeur d'asile en application du 1° bis du I de l'article L. 561-2 et prendre une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 est le préfet de département et, à Paris, le préfet de police (...) ". Par ailleurs, l'article 11 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements dispose que " Le préfet de département est compétent en matière d'entrée et de séjour des étrangers ainsi qu'en matière de droit d'asile. / En matière d'asile, un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre chargé de l'asile peut donner compétence à un préfet de département et, à Paris, au préfet de police pour exercer ces missions dans plusieurs départements ". Enfin, l'article 1er de l'arrêté du 2 octobre 2018 du ministre de l'intérieur, également chargé de l'asile, dispose que : " Par dérogation aux dispositions de l'arrêté du 20 octobre 2015 susvisé, le préfet du département de Maine-et-Loire est l'autorité administrative compétente pour procéder, en application de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la détermination de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile s'agissant des demandes d'asile enregistrées par le préfet du département de la Loire-Atlantique ou par le préfet du département de Maine-et-Loire, et s'agissant des demandes d'asile enregistrées par un autre préfet de département concernant des demandeurs domiciliés dans un département de la région Pays de la Loire ".

3. D'une part, en vertu de l'arrêté du 2 octobre 2018 portant régionalisation de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile dans la région Pays de la Loire, le préfet de Maine-et-Loire est l'autorité administrative compétente pour procéder à la détermination de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile s'agissant notamment des demandes d'asile enregistrées dans le ressort de ce département ainsi que, dans ce cadre, pour assigner les demandeurs d'asile à résidence et prendre les décisions de transfert en application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. D'autre part, les arrêtés du 17 janvier 2020 ont été signées par Mme F... E..., directrice de l'immigration et des relations avec les usagers à la préfecture de Maine-et-Loire, et comportent la mention du prénom, du nom et de la qualité de celle-ci. En outre, par arrêté du 27 novembre 2019 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 29 novembre 2019, le préfet de Maine-et-Loire a accordé une délégation à Mme E... lui permettant de signer notamment les décisions de remise aux autorités en application du règlement dit " Dublin III " et les assignations à résidence. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté comme manquant en fait.

En ce qui concerne la décision de transfert :

5. En premier lieu, en application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre Etat membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Pour l'application de ces dispositions, est suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre Etat membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application.

6. La décision prononçant le transfert de Mme B... aux autorités allemandes vise notamment le règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle relève le fait que la consultation du système Visabio a fait apparaître qu'elle était en possession d'un visa périmé depuis moins de six mois, délivré par les autorités allemandes, et que ces mêmes autorités, saisies le 15 novembre 2019 d'une demande de prise en charge de l'intéressée, ont explicitement donné leur accord le 25 novembre suivant. En outre, le préfet mentionne que Mme B... ne relève pas des dérogations prévues aux articles 3-2 et 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et n'établit ni être exposée à des peines ou traitement contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni que la décision de transfert porte une atteinte disproportionnée à sa vie familiale et privée, dès lors qu'elle se déclare célibataire sans enfant et sans famille sur le territoire français. Il procède également à un examen de la situation de santé de l'intéressée. Il en résulte que cette décision, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent, permet d'identifier le critère de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile dont le préfet de Maine-et-Loire a fait application et atteste d'un examen suffisant de sa situation personnelle. Par suite le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision manque en fait.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; /e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3 / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. (...) ". Aux termes de l'article 5 du même règlement : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4 (...) ".

8. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre l'ensemble des éléments d'information prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. La remise de ces éléments doit intervenir en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations, c'est-à-dire au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, entretien qui doit notamment permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations. Eu égard à leur nature, la remise par l'autorité administrative de ces informations prévues par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie.

9. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a reçu, le 13 novembre 2019, la brochure A intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de ma demande d'asile ", et la brochure B intitulée " Je suis sous procédure Dublin - Qu'est-ce-que cela signifie ' ". L'intéressée, qui a signé le résumé de l'entretien individuel du même jour, réalisé à l'aide d'un traducteur en lingala, doit être regardée comme ayant reconnu, ainsi que cela est précisé dans ce document, que ces informations lui ont été remises dans une langue qu'elle comprenait. La requérante ne conteste pas sérieusement que les documents ainsi remis et précisés avec l'aide de l'interprète comportaient l'ensemble des informations prévues par les dispositions précitées de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 et qu'elle a pu s'informer complétement sur la procédure suivie. Par suite, et alors que les conditions de notification de la décision litigieuse sont sans incidence sur sa légalité, le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

10. En troisième lieu, il résulte de l'article 12 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 4. Si le demandeur est seulement titulaire d'un ou de plusieurs titres de séjour périmés depuis moins de deux ans ou d'un ou de plusieurs visas périmés depuis moins de six mois lui ayant effectivement permis d'entrer sur le territoire d'un État membre, les paragraphes 1, 2 et 3 sont applicables aussi longtemps que le demandeur n'a pas quitté le territoire des États membres. (...) / 5. La circonstance que le titre de séjour ou le visa a été délivré sur la base d'une identité fictive ou usurpée ou sur présentation de documents falsifiés, contrefaits ou invalides ne fait pas obstacle à l'attribution de la responsabilité à l'État membre qui l'a délivré. Toutefois, l'État membre qui a délivré le titre de séjour ou le visa n'est pas responsable s'il peut établir qu'une fraude est intervenue après la délivrance du document ou du visa. ".

11. Il ressort des pièces du dossier, corroborées par ses déclarations, que Mme B... était en possession d'un visa périmé depuis moins de six mois, délivré par les autorités allemandes, sous une identité falsifiée, lorsqu'elle a déposé sa première demande d'asile en France. Les autorités allemandes ont par ailleurs explicitement admis leur responsabilité dans l'examen de la demande d'asile de Mme B... pour ce motif, ainsi que sa prise en charge. Celle-ci déclare par ailleurs ne pas avoir quitté le territoire des Etats membres de la convention depuis son arrivée en Belgique le 1er janvier 2019. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté litigieux serait intervenu en méconnaissance du règlement cité.

12. En quatrième lieu, aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...)". Il résulte de ces dispositions que si une demande d'asile est examinée par un seul Etat membre et qu'en principe cet Etat est déterminé par application des critères d'examen des demandes d'asile fixés par son chapitre III, dans l'ordre énoncé par ce chapitre, l'application de ces critères est toutefois écartée en cas de mise en oeuvre de la clause dérogatoire énoncée au paragraphe 1 de l'article 17 du règlement, qui procède d'une décision prise unilatéralement par un Etat membre. Cette faculté laissée à chaque Etat membre est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

13. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Maine-et-Loire n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme B... et des conséquences de son transfert en Allemagne, au regard notamment des garanties exigées par le respect du droit d'asile et de son état de santé, et qu'il aurait appliqué le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 de manière automatique. D'autre part, Mme B... ne produit pas de documents médicaux qui permettent de démontrer que son état de santé la placerait dans une situation de particulière vulnérabilité alors même qu'elle justifie de traitements médicaux pour une pathologie diabétique de type I diagnostiquée pour la première fois en France, ainsi que d'une hépatite C. Dans ces conditions, et alors qu'il n'est pas établi que les autorités allemandes ne pourraient lui assurer les soins requis par sa situation de santé ou procéder à l'examen complet de sa demande d'asile alors même qu'elle ne parlerait pas la langue allemande, il n'est pas établi que le préfet de Maine-et-Loire aurait entaché la décision de transfert d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement précité.

14. En cinquième lieu, d'une part, pour les motifs exposés au point précédent et alors même que les autorités allemandes accueilleraient de nombreux demandeurs d'asile, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse serait intervenue en violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. D'autre part, alors notamment que Mme B... ne serait, selon ses déclarations, entrée en France que trois mois avant la décision litigieuse, et qu'elle indique n'avoir aucune famille en France, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la même convention ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne l'arrêté portant assignation à résidence :

15. En premier lieu, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du vice de procédure, que Mme B... reprend en appel, doivent être écartés par adoption des motifs retenus au point 16 du jugement attaqué.

16. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) 1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ou d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ; (...) ".

17. A la date de l'arrêté litigieux il ressort des pièces du dossier que la perspective d'éloignement de Mme B... demeurait une perspective raisonnable et ce même arrêté fixe le département de la Sarthe comme périmètre de l'assignation à résidence décidée. Il apparait alors adapté, nécessaire et proportionné à la finalité qu'il poursuivait.

18. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les huit derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve que la durée maximale de l'assignation ne puisse excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois pour les cas relevant des 1° et 2° à 7° du présent I, ou trois fois pour les cas relevant du 1° bis. " et aux termes de l'antépénultième alinéa de l'article L. 561-1 du même code : " L'autorité administrative peut prescrire à l'étranger la remise de son passeport ou de tout document justificatif de son identité dans les conditions prévues à l'article L. 611-2. (...) ". Aux termes de l'article L. 611-2 de ce code : " L'autorité administrative compétente, les services de police et les unités de gendarmerie sont habilités à retenir le passeport ou le document de voyage des personnes de nationalité étrangère en situation irrégulière. Ils leur remettent en échange un récépissé valant justification de leur identité et sur lequel sont mentionnées la date de retenue et les modalités de restitution du document retenu. ".

19. L'arrêté litigieux impose à Mme B... de " remettre son passeport ou tout autre document justifiant de son identité ". Eu égard aux dispositions citées de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile une telle obligation n'est pas entachée d'une erreur de droit.

20. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 17 janvier 2020 du préfet de Maine-et-Loire. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié Mme G... B... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. D..., président assesseur,

- M. Jouno, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 juillet 2020.

Le rapporteur,

C. D...

Le président,

L. Lainé

La greffière,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT00825


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT00825
Date de la décision : 17/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : SCP GALLOT LAVALLEE IFRAH BEGUE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-07-17;20nt00825 ?
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