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21/09/2021 | FRANCE | N°20NT02595

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 21 septembre 2021, 20NT02595


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans de condamner la commune de Nogent-le-Phaye à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation des préjudices qu'il a subis du fait d'actes de harcèlement moral dont il estime avoir été victime.

Par un jugement n° 1801508 du 25 février 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 21 août 2020, 18 décembre 2020 et 12 février 2

021, M. A..., représenté par Me Pierrat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans de condamner la commune de Nogent-le-Phaye à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation des préjudices qu'il a subis du fait d'actes de harcèlement moral dont il estime avoir été victime.

Par un jugement n° 1801508 du 25 février 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 21 août 2020, 18 décembre 2020 et 12 février 2021, M. A..., représenté par Me Pierrat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la commune de Nogent-le-Phaye à lui verser la somme de 50 000 euros ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Nogent-le-Phaye une somme de 12 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé dès lors que les premiers juges n'ont pas répondu aux moyens qu'il a présentés par une motivation détaillée en ce qui concerne les actes de harcèlement dont il a été victime ;

- il a été victime d'agissements de harcèlement moral ayant conduit à une dégradation de son état de santé ; les premiers juges ont estimé, à tort, que les éléments qu'il a produit ne permettait pas d'établir une présomption.

Par des mémoires, enregistrés les 20 novembre 2020, 4 mars 2021 et 5 mars 2021, la commune de Nogent-le-Phaye, représentée par Me Bordier, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. A... une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,

- et les observations de Me Sayegh, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., adjoint administratif de deuxième classe employé par la commune de Nogent-le-Phaye, a sollicité, par courrier du 7 décembre 2017, la réparation des préjudices qu'il a subis en conséquence des faits de harcèlement moral dont il estime avoir été victime. Après le rejet de cette demande, par décision du 14 décembre 2017, il a sollicité auprès du tribunal administratif d'Orléans la condamnation de la commune de Nogent-le-Phaye à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation de ces préjudices. Il relève appel du jugement du 25 février 2020 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, le tribunal administratif d'Orléans a indiqué, au point 3 du jugement attaqué, après avoir rappelé les éléments de fait mis en avant par M. A..., que " le requérant ne fournit aucun élément susceptible d'établir une présomption d'acte de harcèlement moral dont il serait victime alors qu'en défense la commune s'emploie à démontrer les difficultés auxquelles elle est confrontée dans la gestion de son agent et les mesures mises en place pour répondre à ses demandes. ". Il a ainsi mentionné, avec une précision suffisante, la raison pour laquelle il a estimé que la situation de harcèlement moral invoquée n'était pas constituée. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement est irrégulier faute de motivation suffisante en réponse à ce moyen.

Sur la responsabilité de la commune de Nogent-le-Phaye pour faits de harcèlement moral :

3. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : /1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; (...) ".

4. D'une part, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

5. D'autre part, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé.

6. M. A... soutient qu'il souffre d'un syndrome anxio-dépressif en lien direct avec la dégradation de ses conditions de travail et qu'il était victime d'agissements de harcèlement moral depuis 2014 caractérisés par une modification de ses missions avec perte de responsabilités, un contrôle plus important dans la réalisation de ses missions, un rythme de travail soutenu, une mise à l'écart, des mesures vexatoires, un refus de paiement de ses heures supplémentaires et frais de mission, un refus de lui communiquer son dossier individuel ainsi que des retards dans la transmission de ses bulletins de salaire et document nécessaire au maintien de son revenu.

7. En premier lieu, alors que la fiche de poste de M. A... qui a été annexée à son compte-rendu d'évaluation professionnelle pour l'année 2017 décrit de manière très précise les missions qui lui sont dévolues en sa qualité d'agent polyvalent des services administratifs, le requérant n'apporte aucun élément précis quant aux missions qui lui auraient été retirées ou mises en suspens et ne produit aucun document probant à l'appui de ces allégations, les témoignages produits d'amis ou de membres de famille ne pouvant se borner qu'à relater ses dires. Il ne précise pas davantage quelles missions relevant de la catégorie A la commune de Nogent-le-Phaye lui aurait demandé d'accomplir, en méconnaissance de son grade. Il ne justifie pas non plus que des tâches d'entretien ou d'autres tâches, non conformes à son grade, lui auraient été confiées. Par suite, la modification de ses missions, au-delà de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, assortie de la perte de responsabilités n'est pas établie.

8. En deuxième lieu, à l'exception des attestations de proches n'ayant, du fait de cette qualité, pas été présents sur le lieu de travail de M. A..., aucun élément n'est produit justifiant d'un contrôle plus resserré, excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, de l'activité de l'intéressé ou de propos ou mesures vexatoires.

9. En troisième lieu, aucun élément n'est produit à l'appui des allégations selon lesquelles M. A... aurait vu sa charge de travail augmentée dans des proportions importantes. Il en va de même s'agissant des allégations portant sur l'absence de remboursement de frais de mission engagés pour le compte de la commune de Nogent-le-Phaye. Par ailleurs, si M. A... évoque un nombre important d'heures supplémentaires effectuées en 2013, 2014 et 2015 lors d'actions culturelles qu'il organisait et qui n'ont pas été prises en compte, il ressort des courriers des 25 septembre 2017 et 25 janvier 2018 du maire de Nogent-le-Phaye qu'il a été invité, après en avoir justifié le détail, à les prendre en repos compensateur.

10. En dernier lieu, en admettant même que la commune de Nogent-le-Phaye n'aurait pas formellement rempli l'ensemble des obligations qui lui incombaient en matière d'accès au dossier administratif et aurait manqué de diligence, pendant son arrêt de travail, dans la transmission de bulletins de salaire ou d'un décompte de jour de congés au titre des congés maladie ordinaire, ces faits ne caractérisent pas à eux seuls, eu égard à leur portée, des agissements répétés de harcèlement moral.

11. Il résulte de tout ce qui précède que les éléments de fait présentés par M. A... ne sont pas susceptibles de faire présumer l'existence d'agissements répétés de harcèlement moral. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses conclusions tendant à l'engagement de la responsabilité pour faute de la commune de Nogent-le-Phaye.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Nogent-le-Phaye, partie gagnante, la somme sollicitée par M. A... sur ce fondement. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A..., la somme que réclame la commune de Nogent-le-Phaye sur ce fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Nogent-le-Phaye présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Nogent-le-Phaye.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président assesseur,

- Mme C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 septembre 2021.

La rapporteure,

F. C...Le président,

O. GASPON

La greffière,

P. CHAVEROUX

La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 20NT02595 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02595
Date de la décision : 21/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : CABINET PIERRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-09-21;20nt02595 ?
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