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24/09/2021 | FRANCE | N°21NT00378

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 24 septembre 2021, 21NT00378


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 6 août 2020 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 10 janvier 2020 des autorités consulaires françaises en poste à Madagascar rejetant sa demande de visa de long séjour.

Par un jugement n° 2005030, 2009751 du 14 décembre 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant

la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 février 2021, Mme C..., représentée par Me ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 6 août 2020 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 10 janvier 2020 des autorités consulaires françaises en poste à Madagascar rejetant sa demande de visa de long séjour.

Par un jugement n° 2005030, 2009751 du 14 décembre 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 février 2021, Mme C..., représentée par Me Pierrot, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 14 décembre 2020 ;

2°) d'annuler la décision contestée du 6 août 2020 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer le visa de long séjour sollicité, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en estimant qu'elle n'était pas à la charge de ses enfants français, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le refus de visa qui lui est opposé méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 avril 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Bougrine a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante malgache née le 26 août 1951, a sollicité la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en se prévalant de sa qualité d'ascendante à charge de ses enfants de nationalité française. Le recours formé contre le refus opposé le 10 janvier 2020 par les autorités consulaires françaises en poste à Madagascar a été rejeté par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France par une décision du 6 août 2020. Mme C... relève appel du jugement du 14 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 6 août 2020.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Pour refuser le visa de long séjour demandé par Mme C... en qualité d'ascendante à charge de Français, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée, d'une part, sur l'incomplétude du dossier de la demande, en l'absence d'assurance-maladie couvrant l'intégralité du séjour et, d'autre part, sur la circonstance que l'intéressée, qui ne justifiait pas être dépourvue de ressources, ne pouvait être regardée comme à la charge de son fils dont les virements financiers ne présentaient ni consistance ni régularité sur une période significative.

3. En premier lieu, lorsqu'elles sont saisies d'une demande tendant à la délivrance d'un visa de long séjour par un ressortissant étranger faisant état de sa qualité d'ascendant à charge de ressortissant français, les autorités consulaires peuvent légalement fonder leur décision de refus sur la circonstance que le demandeur ne saurait être regardé comme étant à la charge de son descendant, dès lors qu'il dispose de ressources propres, que son descendant de nationalité française ne pourvoit pas régulièrement à ses besoins ou qu'il ne justifie pas des ressources nécessaires pour le faire.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... D..., fils de A... C... qui s'engage à l'héberger, lui a adressé à de nombreuses reprises entre février 2018 et décembre 2019, en dehors des périodes où la requérante séjournait en France chez ses enfants, des sommes d'argent dont le montant total dépasse 3 000 euros. L'avis d'imposition de M. D... au titre de l'année 2018 fait d'ailleurs apparaître des pensions alimentaires. Ainsi, contrairement à ce qu'a estimé la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, Mme C... bénéficie de virements financiers réguliers et significatifs de la part de son fils, lesquels s'ajoutent aux envois moins nombreux adressés par ses deux autres fils de nationalité française. Toutefois, si la requérante soutient que ses revenus locatifs, qui s'élèvent à 600 000 ariary par mois, ne lui permettent pas de pourvoir à ses besoins et, produit, au soutien de son propos, la justification d'importantes dépenses médicales, au demeurant postérieures à la date de la décision en litige, il ne ressort pas des pièces du dossier que toutes ces dépenses, en particulier celles exposées au titre d'analyses biologiques et de consultation d'un médecin cardiologue ainsi que des déplacements y afférents, dont le total s'élève à 430 100 ariary, devraient être engagées chaque mois. En outre, s'il ressort du certificat médical du 28 novembre 2020 que l'état de santé de la requérante exige l'intervention d'une aide à domicile, la nécessité de l'emploi, en plus d'une aide à domicile, d'un " homme à tout faire / gardien ", représentant une dépense mensuelle de 100 000 ariary, n'est pas démontrée. Dans ces conditions, en estimant que Mme C... disposait de ressources propres de sorte qu'elle ne pouvait être regardée comme ascendante à charge d'un ressortissant français, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation. Il résulte de l'instruction que la commission aurait pris la décision de rejet en litige au regard de ce motif sans se fonder sur celui tiré de l'incomplétude du dossier de la demande de visa.

5. En second lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Il ressort des pièces du dossier que les cinq enfants de A... C..., qui est veuve, résident en France. Trois d'entre eux sont de nationalité française tandis que sa fille est titulaire d'une carte de résident de dix ans. Toutefois, son plus jeune fils séjournait en France, à la date de la décision contestée, sous couvert d'un titre de séjour d'un an portant la mention " étudiant ". Il ne ressort ainsi pas des pièces du dossier que celui-ci ait vocation à demeurer sur le territoire français. Par ailleurs, Mme C... bénéficie depuis 2014 de visas de circulation lui permettant de visiter régulièrement sa famille en France. Si le dernier visa de circulation, qui lui a été délivré en février 2019 et qui lui a permis de séjourner en France du 19 février 2019 au 14 mai 2019, a été " annulé ", pour une raison qu'aucune des parties n'apporte au débat, rien ne fait obstacle à ce que la requérante, munie de tels visas de circulation, séjourne en France, pour des durées inférieures à 90 jours, auprès de sa famille. Dès lors, le refus opposé à la demande de visa de long séjour de Mme C... ne porte pas au droit de cette dernière au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquelles cette décision a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit ainsi être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur le surplus des conclusions :

8. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de Mme C... aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 7 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Douet, présidente-assesseure,

- Mme Bougrine, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 septembre 2021.

La rapporteure,

K. BOUGRINE

Le président,

A. PEREZLa greffière,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 21NT00378


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00378
Date de la décision : 24/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : PIERROT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-09-24;21nt00378 ?
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