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29/03/2022 | FRANCE | N°21NT00606

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 29 mars 2022, 21NT00606


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes :

-sous le n° 1803309, d'une part, d'annuler la décision du 11 avril 2018 par laquelle le chef d'état-major de l'armée de terre a prononcé son exclusion de l'école spéciale militaire de Saint-Cyr et la résiliation de son contrat d'engagement et, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

-sous le n° 1900162, d'une part, d'a

nnuler la décision implicite de rejet de son recours administratif préalable formé le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes :

-sous le n° 1803309, d'une part, d'annuler la décision du 11 avril 2018 par laquelle le chef d'état-major de l'armée de terre a prononcé son exclusion de l'école spéciale militaire de Saint-Cyr et la résiliation de son contrat d'engagement et, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

-sous le n° 1900162, d'une part, d'annuler la décision implicite de rejet de son recours administratif préalable formé le 9 juillet 2018 à l'encontre de la décision du 11 avril 2018 par laquelle le chef d'état-major de l'armée de terre a prononcé la résiliation de son contrat d'engagement et, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

-sous le n° 1901815, d'annuler la décision du 7 février 2019 par laquelle la ministre des Armées a rejeté son recours administratif préalable formé le 9 juillet 2018 et portant résiliation de son contrat d'engagement.

Par un jugement n° 1803309, 1900162, 1901815 du 6 janvier 2021, le tribunal administratif de Rennes a, d'une part, décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 1900162 de M. B... relatives à la décision implicite de rejet de son recours administratif préalable (art 1er) et a rejeté le surplus des conclusions de cette requête (art 2), d'autre part, a rejeté les requêtes n°1803309 et 1901815 (art 3).

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 5 mars 2021 et 2 mars 2022, M. B..., représenté par Me Dubourg, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 6 janvier 2021 en tant qu'il a rejeté ses demandes dirigées, d'une part, contre la décision implicite de rejet de son recours administratif préalable formé le 9 juillet 2018 à l'encontre de la décision du 11 avril 2018 du chef d'état-major de l'armée de terre prononçant la résiliation de son contrat d'engagement et, d'autre part, contre la décision du 7 février 2019 du ministre des Armées rejetant son recours administratif préalable ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet du ministre de la défense confirmant la décision du 13 octobre 2016 du ministre des armées ne renouvelant pas son contrat d'engagement prenant fin le 2 novembre 2017 ;

3°) d'enjoindre à la ministre des armées de renouveler son contrat pour une durée de trois ans dans un délai de 15 jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délais et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité pour omission à statuer sur le moyen tiré de l'erreur de droit ;

- le jugement attaqué est mal fondé en ce qu'il retenu ou écarté les éléments suivants : l'avis rendu par le conseil d'instruction est irrégulier dès lors qu'il ne s'est pas prononcé sur ses résultats scolaires, les notes obtenues par les élèves n'étant pas encore arrêtées, mais sur " des fautes répétées et inexcusables " ; l'avis de ce conseil d'instruction n'était pas requis, le motif tenant " au signalement de cas " qui a justifié sa saisine n'étant pas au nombre des hypothèses prévues par l'article 14 du décret du 12 septembre 2008 et c'est à tort que le tribunal a estimé que le moyen était inopérant ; l'instance administrative de recours ne présente pas les garanties suffisantes pour se substituer à la procédure préalable de la décision initiale ; le conseil d'instruction est une commission pédagogique alors que la commission de recours des militaires ne dispose pas de compétences pédagogiques particulières ; la question des notes comme celle de savoir si celles-ci justifiaient un redoublement ou une exclusion a cependant, comme l'admet d'ailleurs l'intéressé dans ses écritures, été abordée devant la commission de recours des militaires qui bien que n'étant pas composé d'enseignants devant laquelle M. B... a pu s'exprimer à ce propos

- le principe du respect des droits de la défense a été méconnu puisque ses observations sur ses résultats scolaires n'ont pas été portées devant une commission pédagogique ; son dossier administratif aurait dû lui être communiqué devant le conseil d'instruction ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur de fait car la note moyenne de 9,31/20 au module " formation humaine " du 3ème trimestre résulte pas d'épreuves écrites ou orales ou d'évaluation au sens de l'article 10 de l'arrêté du 19 janvier 2017 ; - la décision contestée est entachée d'une erreur de droit ; il résulte des articles 7, 10, 11 et 14 de l'arrêté du 17 octobre 2012 que les formations militaire, académique et humaine doivent faire l'objet d'un contrôle continu semestriel évalué par des épreuves écrites ou orales ; or la formation humaine essentiellement retenue par le ministre des armées pour l'exclure ne figure pas dans le relevé de note ; il a obtenu de bons résultats et des moyennes de 14,4737 et de 10,3350 pour les formations militaires et académiques ; il n'a pu bénéficier de session de rattrapage ;

- la décision contestée est entachée d'une rupture d'égalité ; il a été sanctionné et la décision litigieuse ne repose pas sur l'appréciation de ses résultats scolaires ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; elle repose sur des notes et non sur des moyennes en méconnaissance des dispositions de l'article 14 de l'arrêté du 19 janvier 2017 ; sa moyenne cumulée des différents semestres est toujours supérieures à 10/20 ; il s'est agi de sanctionner un comportement et non une aptitude ;

Par un mémoire, enregistré le 4 mars 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 juin 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- la loi du 22 avril 1905 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2008-947 du 12 septembre 2008 ;

- l'arrêté du 19 janvier 2017 (DEFT1702322A) ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coiffet,

- les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique,

- et les observations de Me Dubourg, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a été admis à l'École spéciale militaire (ESM) de Saint-Cyr le 18 juillet 2016 et a souscrit un contrat d'engagement en qualité d'élève officier le 1er septembre 2016, prenant effet le 26 août 2016. Le 9 avril 2018, le conseil d'instruction de l'ESM a émis un avis favorable à son exclusion de l'école. Par une décision du 11 avril 2018, le chef d'état-major de l'armée de terre a prononcé son exclusion de l'école spéciale militaire et la résiliation de son contrat d'engagement. Le 9 juillet 2018, M. B... a formé un recours administratif préalable auprès de la commission des recours des militaires. Par une première demande adressée au tribunal administratif de Rennes le 13 juillet 2018 sous le n° 1803309, M. B... a demandé l'annulation de la décision du 11 avril 2018 portant résiliation de son contrat d'engagement. Par une seconde requête enregistrée le 10 janvier 2019 sous le n° 1900162, il a ensuite sollicité l'annulation de la décision implicite de rejet de son recours administratif préalable. Enfin, la ministre des Armées ayant rejeté ce recours administratif par une décision du 7 février 2019 et confirmé la décision de résiliation du contrat d'engagement, M. B... a, le 13 avril 2019, saisi la même juridiction d'une demande enregistrée sous n° 1901815 tendant à l'annulation de cette dernière décision.

2. Par un jugement du 6 janvier 2021, le tribunal administratif de Rennes après jonction des trois demandes a, d'une part, décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 1900162 de M. B... relatives à la décision implicite de rejet de son recours administratif préalable (art 1er) et a rejeté le surplus des conclusions de cette requête (art 2), d'autre part, a rejeté les requêtes n°1803309 et 1901815 (art 3). M. B... doit être regardé comme relevant appel de ce jugement en tant seulement qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre la décision ministérielle du 7 février 2019.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. D'une part, les premiers juges, appréciant la légalité interne de la décision ministérielle contestée, ont dans un premier temps rappelé au point 14 du jugement attaqué les dispositions de l'article L. 4139-14 du code de la défense qui prévoient que la cessation de l'état militaire intervient d'office dans le cas de résultats insuffisants en cours de scolarité pour les élèves des écoles militaires ainsi que les dispositions de l'article 9 du décret susvisé du 12 septembre 2008 fixant certaines dispositions applicables aux élèves militaires des écoles militaires d'élèves officiers de carrière qui énoncent qu'en cas de résultats scolaires insuffisants la proposition de résiliation de contrat est soumis à l'avis du conseil d'instruction. Ils ont, au même point, également rappelé précisément les dispositions des articles 7, 11 et 14 de l'arrêté du 19 janvier 2017 relatif à l'organisation générale de la scolarité des élèves officiers de carrière de l'École spéciale militaire et de l'École militaire interarmes et fixant notamment les conditions de validation d'une année de formation. Dans un second temps, au point 15 du jugement, les premiers juges ont, après avoir estimé que " la ministre avait procédé à une exacte application des dispositions de l'article 7 de l'arrêté précité ", écarté expressément le moyen tiré de l'erreur de droit. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une omission faute de s'être prononcé sur ce moyen.

4. D'autre part, si M. B... soutient que les premiers juges ont irrégulièrement écarté comme inopérants les moyens tirés du caractère irrégulier de la procédure suivie devant le conseil d'instruction et de la méconnaissance de son droit à la communication de son dossier aux motifs que la décision ministérielle du 7 février 2019 s'était entièrement substituée à celle du chef d'état-major de l'armée de terre du 11 avril 2018, cette contestation qui porte sur le bien-fondé du jugement attaqué est étrangère à l'examen de sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la légalité de la décision ministérielle du 7 février 2019 :

5. Par la décision ministérielle contestée du 7 février 2019, la ministre des Armées, après avoir rejeté le recours formé par M. B... devant la commission de recours des militaires contre la décision du 11 avril 2018 du chef d'état-major de l'armée de terre prononçant son exclusion de l'école spéciale militaire et la résiliation de son contrat d'engagement, a résilié d'office ce contrat faute pour l'intéressé " d'avoir obtenu en cours de scolarité des résultats suffisants ".

S'agissant de la légalité externe de la décision ministérielle du 7 février 2019 :

6. En premier lieu, M. B... soutient que la décision ministérielle contestée est entachée d'un vice de procédure, l'avis rendu par le conseil d'instruction étant irrégulier dans la mesure où ce conseil ne s'est pas prononcé sur ses résultats scolaires mais sur " des fautes répétées et inexcusables " ayant trait à son comportement et ce, en méconnaissance de l'article 9 du décret du 12 septembre 2008.

7. L'institution par les dispositions de l'article R. 4125-1 du code de la défense d'un recours administratif préalable, obligatoire à la saisine du juge, a pour effet de laisser à l'autorité compétente pour en connaître le soin d'arrêter définitivement la position de l'administration. Il s'ensuit que la décision prise à la suite du recours se substitue nécessairement à la décision initiale et qu'elle est seule susceptible d'être déférée au juge de la légalité. Cette substitution ne fait toutefois pas obstacle à ce que soient invoqués à son encontre des moyens tirés de la méconnaissance de règles de procédure applicables à la décision initiales qui, ne constituant pas uniquement des vices propres à cette décision, sont susceptibles d'affecter la régularité de la décision soumise au juge. Il en résulte que M. B... peut utilement critiquer la procédure suivie devant le conseil de l'instruction à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision ministérielle du 7 février 2019 qui s'est substituée à la décision du 11 avril 2018 du chef d'état-major de l'armée de terre.

8. Aux termes de l'article 9 du décret du 12 septembre 2008 fixant certaines dispositions applicables aux élèves militaires des écoles militaires d'élèves officiers de carrière : " Sont soumises à l'avis du conseil d'instruction : 1° En cas de résultats scolaires insuffisants, les propositions de redoublement d'une année scolaire, d'exclusion de l'école et de résiliation de contrat ; (...) L'élève officier de carrière concerné est, dans tous les cas, convoqué par le conseil d'instruction. Il peut demander à être assisté par un militaire ou un de ses professeurs de son choix. ". L'article 7 de l'arrêté du 19 janvier 2017 relatif à l'organisation générale de la scolarité des élèves officiers de carrière de l'École spéciale militaire et de l'École militaire interarmes : " La scolarité des élèves officiers comprend : - une formation militaire qui les prépare à l'état d'officier, notamment en matière de connaissance du milieu dans lequel ils seront employés ; - une formation académique dont la dominante est fonction du cursus de formation suivi ; - une formation humaine préparant les élèves officiers à l'exercice de l'autorité, à l'éthique et à la déontologie du métier des armes ". Selon les dispositions de l'article 14 du même arrêté du 19 janvier 2017 : " Est soumise au conseil d'instruction (...) la situation de l'élève officier qui : - soit n'a pas obtenu, à l'issue d'un semestre de sa scolarité la moyenne de dix sur vingt dans une plusieurs des trois composantes de formation définies par l'article 7 du présent arrêté ; / - soit n'a pas obtenu la moyenne générale de sur l'ensemble de la scolarité ".

9. Il ressort des pièces versées au dossier, d'une part, du relevé global de notation de M. B... du semestre 3, établi le 4 avril 2018 que ce dernier a obtenu 8 de moyenne semestrielle au titre de la formation militaire, 10,1614 de moyenne semestrielle au titre de la formation académique et 9,3180 de moyenne semestrielle au titre de la formation humaine. N'ayant pas obtenu la moyenne dans l'une au moins des trois composantes de la formation à l'issue d'un semestre de sa scolarité, la situation de M. B... pouvait ainsi, conformément aux dispositions rappelées au point précédent, être soumise, au conseil d'instruction qui s'est réuni le 9 avril 2018. La convocation qui lui a alors été adressée lui précisait d'ailleurs que ses résultats scolaires étaient à l'origine de sa convocation devant cette instance. Si le procès-verbal établi le lendemain relève les " fautes répétées et inexcusables " de l'intéressé, cette mention comme d'ailleurs les remarques - qui y figurent également - sur le " manque de discernement " et " l'inaptitude flagrante à devenir officier " ne font que confirmer les lacunes de l'intéressé en matière de comportement militaire, révélées par sa note de 8/20 évoquée ci-dessus dans l'une des composantes de la formation. La circonstance que le même procès-verbal rappelle que ce conseil s'est réuni pour " examiner le cas des élèves officiers ayant obtenu au cours de l'année écoulée une moyenne générale inférieure à 10 sur 20 " - ce qui n'est pas la situation de M. B... - " ou dont les cas ont été signalés par le commandement ou un ou plusieurs des directeurs en charge des études ", expression pouvant se rattacher aux cas envisagés par l'article 14 de l'arrêté du 19 janvier 2017 et qui ont été rappelés plus haut, demeure, et en tout état de cause, sans incidence sur la régularité de la procédure suivie à l'égard de l'intéressé. Le moyen tiré d'un vice de procédure sera écarté.

10. En second lieu, M. B... soutient que le principe du respect des droits de la défense a été méconnu puisque ses observations sur ses résultats scolaires n'ont pas été portées devant le conseil d'instruction, qui seul présente le caractère d'une commission pédagogique, et que son dossier administratif aurait dû lui être communiqué à ce stade de la procédure.

11. Aux termes de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 : " Tous les fonctionnaires civils et militaires (...) ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardés dans leur avancement à l'ancienneté ". En application de l'article R. 4125-8 du code de la défense : " La procédure d'instruction des recours est écrite. La commission ne peut statuer qu'après que l'intéressé a été mis à même de présenter des observations écrites sur les éléments recueillis auprès de l'autorité (...) dans un délai de quinze jours à compter de leur réception par lui ". La décision prise par le ministre compétent, après avis de la commission des recours des militaires, sur un recours administratif formé par un militaire à l'encontre d'une décision prise en considération de sa personne revêt elle-même ce caractère et un agent public faisant l'objet d'une telle mesure, qu'elle soit ou non justifiée par l'intérêt du service, doit être mis à même de demander la communication de son dossier, en étant averti en temps utile de l'intention de l'autorité administrative de prendre la mesure en cause. Le droit à la communication du dossier prévu par cet article comporte pour l'agent intéressé, à moins que sa demande ne présente un caractère abusif, celui d'en prendre copie. Il peut exercer ce droit avant l'examen de son recours par la commission.

12. Il ressort des pièces versées au dossier, en particulier de la convocation qui lui a été adressée en vue de sa présentation le 9 avril 2018 devant le conseil d'instruction, que M. B... a été précisément informé de la possibilité qui lui était offerte d'être accompagné d'un militaire ou d'un professeur de son choix et de présenter d'éventuelles observations. La même convocation lui précisait également, en rappelant ses moyennes inférieures à 10/20 au semestre 3, que ses résultats scolaires étaient à l'origine de sa convocation devant cette instance et que la résiliation de son contrat figurait parmi les mesures envisagées à son encontre. Il ne ressort pas davantage en appel qu'en première instance des éléments du dossier que l'intéressé n'a pas été mis à même, compte tenu des informations portées à sa connaissance et ci-dessus rappelées, de demander la communication de son dossier individuel avant l'examen de son recours par la commission des recours des militaires ou que l'administration lui aurait refusé une telle communication. Les pièces du dossier établissent au contraire que M. B... a eu communication du procès-verbal de la réunion du conseil d'instruction de l'école spéciale militaire de Saint-Cyr du 9 avril 2018 et qu'il a donc pu, dans son recours administratif préalable devant la commission des recours des militaires, en discuter précisément les termes et contester les conditions dans lesquelles la séance du conseil a pu se dérouler. De plus, il est constant qu'il avait déjà connaissance de ses relevés de notes et a donc pu utilement présenter sa défense et ses observations. Enfin, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la décision ministérielle du 7 février 2019, qui ne revêt aucun caractère disciplinaire et s'est, ainsi qu'il a été rappelé au point 6, substituée à la décision du 11 avril 2018 du chef d'état-major de l'armée de terre, se fonderait sur des éléments dont M. B... n'aurait pas eu connaissance. Le moyen sera écarté.

S'agissant de la légalité interne de la décision ministérielle du 7 février 2019 :

13. M. B... soutient, tout d'abord, que la décision ministérielle contestée est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur de droit.

14. En premier lieu, aux termes de l'article 10 de l'arrêté du 19 janvier 2017 : " Durant chaque semestre de formation, les résultats des élèves officiers sont appréciés dans le cadre d'un contrôle continu des connaissances au moyen d'épreuves écrites et orales, d'examens militaires, académiques et sportifs, et, le cas échéant, de l'évaluation de stages ou de projets. Des enseignements peuvent, en cas de résultats insuffisants de l'élève officier, être validés, le cas échéant après épreuves de rattrapage. (...) ". D'une part, si la note de 9,3180/20 attribuée au module " formation humaine " de l'élève n'apparait pas sur l'édition du relevé de notes du semestre 3 du 4 avril 2018, cette note est toutefois mentionnée sur le relevé de notes général de scolarité produit à l'appui du mémoire en défense du 29 juillet 2020 de première instance. D'autre part, il ne ressort pas des éléments du dossier que la note en question de 9,3180/20 n'aurait pas été obtenue dans les conditions et selon l'une des modalités envisagées par les dispositions précitées de l'article 10 de l'arrêté du 19 janvier 2017. Le moyen tiré de l'erreur de fait sera écarté.

15. En second lieu, aux termes de l'article L. 4139-14 du code de la défense : " La cessation de l'état militaire intervient d'office dans les cas suivants : 5° Pour résultats insuffisants en cours de scolarité, pour les élèves des écoles militaires (...) ". Il résulte de ces dispositions législatives ainsi que de celles de l'article 9 du décret du 12 septembre 2008 fixant certaines dispositions applicables aux élèves militaires des écoles militaires d'élèves officiers de carrière et de l'article 7 de l'arrêté du 19 janvier 2017 relatif à l'organisation générale de la scolarité des élèves officiers de carrière de l'École spéciale militaire et de l'École militaire interarmes, qui ont été précisément rappelées au point 7, que la résiliation d'office du contrat d'engagement d'un élève d'une école militaire peut légalement intervenir dans le cas de résultats insuffisants en cours de scolarité, lorsque l'élève officier n'a pas obtenu, à l'issue d'un semestre de sa scolarité, la moyenne de dix sur vingt dans une ou plusieurs des trois composantes de formation. Ainsi qu'il a été rappelé au point 9, le relevé global de notation de M. B... du semestre 3, en date du 4 avril 2018, établit que ce dernier a obtenu 8 de moyenne semestrielle au titre de la formation militaire, 10,1614 de moyenne semestrielle au titre de la formation académique et 9,3180 de moyenne semestrielle au titre de la formation humaine. Le ministre pouvait ainsi, sur le fondement des dispositions légales et réglementaires qui ont été rappelées, et dès lors que M. B... n'avait pas obtenu la moyenne de dix sur vingt dans une au moins des trois composantes de sa scolarité, décider de prononcer la résiliation du contrat d'engagement de l'intéressé faute pour ce dernier " d'avoir obtenu en cours de scolarité des résultats suffisants ". Les circonstances que la situation de M. B... n'aurait pas été appréciée au terme de son année de scolarité ou que sa moyenne de 9,3180 obtenue au titre de sa formation académique ne résulterait pas d'épreuves écrites ou orales demeurent, à cet égard, sans incidence. Le moyen tiré de l'erreur de droit sera écarté.

16. M. B... soutient, ensuite, que la décision ministérielle contestée est intervenue en méconnaissance du principe d'égalité dans la mesure où ses camarades de promotion réprimés pour leur comportement ou ayant obtenu des résultats insuffisants n'ont pas fait l'objet d'un avis d'exclusion par le conseil d'instruction. Cependant, à défaut de produire les dossiers complets de scolarité de ses camarades de promotion, il n'établit pas davantage en appel qu'en première instance que d'autres élèves-officiers se trouvant dans une situation strictement identique à la sienne auraient fait l'objet d'un simple redoublement. A cet égard, la circonstance que des élèves-officiers ayant obtenus de moins bons résultats scolaires que lui auraient été admis à redoubler ne signifie pas que ces autres élèves seraient dans une situation identique, notamment sur le plan du comportement de l'élève officier dont il est loisible légalement de tenir compte, notamment au titre des composantes " formation militaire " et " formation humaine " de la scolarité en cause.

17. M. B... soutient, enfin, que la décision ministérielle contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans la mesure où il n'a pu terminer son année scolaire et n'a pas été autorisé à redoubler alors " qu'il présente d'indiscutables qualités militaires et humaines pour devenir officier ".

18. Il ressort des pièces du dossier que, lors de sa première année de scolarité, et ainsi que l'établit le relevé de notes du 5 juillet 2017, M. B... a obtenu une moyenne de 9 sur 20 dans le module " formation militaire " et qu'il a été convoqué une première fois devant le conseil d'instruction, avec mention dans son bulletin de notation pour l'année 2017, d'" une nature désinvolte, un manque de jugement et de rigueur formelle qui nuisent à sa crédibilité, des résultats académiques perfectibles et un manque d'attention en cours ". Lors de sa seconde année de scolarité, les notes obtenues à l'issue du semestre 3 ont révélé une insuffisance certaine au titre de la formation militaire et dans certains modules significatifs quant à la poursuite d'une carrière en qualité d'officier - 6/20 en aptitude militaire, 6/20 en aptitude au commandement, 9/20 en élément de balistique. L'appréciation de la composante " formation humaine " qui tient compte notamment de l'attitude générale de l'élève au sein de l'école révèle également, au regard des qualités attendues d'un futur officier, des insuffisances dans le comportement de M. B.... Sur la base de l'ensemble de ces éléments, le ministre des armées n'a pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation sa décision de prononcer la résiliation du contrat d'engagement de M. B....

19. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande dirigée contre la décision ministérielle du 7 février 2019.

Sur les frais liés au litige :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. B... C... la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 11 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2022.

Le rapporteur,

O.COIFFETLe président,

O.GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne à la ministre la ministre des armées en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°21NT00606 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00606
Date de la décision : 29/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: Mme MALINGUE
Avocat(s) : CABINET GERVAISE DUBOURG

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-03-29;21nt00606 ?
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