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08/04/2022 | FRANCE | N°21NT03445

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 08 avril 2022, 21NT03445


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 26 janvier 2021 par lequel le préfet du Morbihan lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2101106 du 10 juin 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :<

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Par une requête enregistrée le 8 décembre 2021, Mme B..., représentée par Me Dochler Gate, d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 26 janvier 2021 par lequel le préfet du Morbihan lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2101106 du 10 juin 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 décembre 2021, Mme B..., représentée par Me Dochler Gate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 10 juin 2021 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 26 janvier 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Morbihan, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté est entaché d'incompétence ;

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du

7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- cette décision est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- elle est entaché d'erreur de fait ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- cette décision est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 janvier 2022, le préfet du Morbihan conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 octobre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Brisson a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante comorienne née le 13 septembre 1991, est entrée irrégulièrement en France le 10 février 2015, selon ses déclarations. Elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour le 13 septembre 2020. Par un arrêté du 26 janvier 2021, le préfet du Morbihan a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. L'intéressée relève appel du jugement du 10 juin 2021 du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sur le moyen commun à la contestation des différentes décisions :

2. C'est au terme d'une exacte motivation, qu'il y a par suite lieu d'adopter, que les premiers juges ont écarté, au point 2 de leur jugement, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté.

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

3. L'arrêté contesté comporte les considérations de droit et de fait propres à la situation de Mme B... qui constituent le fondement de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour. Par suite cette décision est suffisamment motivée.

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

5. Mme B... fait valoir qu'elle réside en France depuis 2015, qu'elle vit depuis le mois de novembre 2018 avec un compatriote titulaire d'une carte de résident, père de deux enfants français et avec lequel elle a souscrit un pacte civil de solidarité le 20 juillet 2020. Toutefois, l'intéressée ne justifie pas, par les documents qu'elle produit, parmi lesquels figurent des attestations établies par des proches postérieurement à l'arrêté contesté et quelques documents médicaux, de l'existence d'une communauté de vie antérieure au 1er décembre 2019, date à laquelle elle a été intégrée en qualité de co-titulaire au contrat de location du logement occupé par son compagnon. La requérante n'établit pas davantage avoir établi avec les enfants mineurs de son partenaire, à l'égard desquels ce dernier exerce un droit de visite et d'hébergement, des liens d'une particulière intensité. Mme B... se prévaut également de la présence en France de sa famille, qui vit à Marseille et dont certains membres ont la nationalité française et plus particulièrement de ses liens avec sa sœur jumelle, atteinte d'un handicap. Toutefois, l'intéressée, qui ne justifie ni de la situation de son père et de l'un de ses frères sur le territoire français ni de la nécessité de sa propre présence aux côtés de sa sœur jumelle, alors qu'elle-même est domiciliée dans le Morbihan, n'établit pas être dépourvue de toute attache dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-trois ans, alors que plusieurs membres de sa famille, dont sa mère, résidaient déjà en France. En outre, la requérante qui, entrée irrégulièrement en France, s'y est maintenue pendant plus de cinq ans avant de solliciter la délivrance d'un titre de séjour et qui ne produit aucun élément relatif à ses moyens d'existence, ne justifie pas d'une particulière intégration. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment des conditions d'entrée et de séjour en France de Mme B... et du caractère relativement récent de la communauté de vie qu'elle invoque, la décision contestée lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, le préfet du Morbihan n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Compte tenu de l'absence d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour, Mme B... ne saurait exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de sa contestation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

7. En application des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et d'asile, la décision portant obligation de quitter le territoire français, prise sur le fondement des dispositions du 3° du I de cet article L. 511-1, n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision de refus d'un titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté.

8. Si Mme B... fait valoir que le préfet n'a pas fait état de ses liens familiaux en France, cette circonstance n'est pas de nature à établir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait, pour ce seul motif, entachée d'une erreur de fait.

9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante doivent être écartés.

Sur la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire :

10. Compte tenu de l'absence d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour, Mme B... ne saurait exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de sa contestation de la décision fixant le délai de départ volontaire.

11. Il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'insuffisance de motivation dont serait entachée la décision portant refus de délai de départ volontaire par adoption des motifs circonstanciés retenus à bon droit par les premiers juges.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

12. Compte tenu de l'absence d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour, Mme B... ne saurait exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de sa contestation de la décision fixant le pays de renvoi.

13. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E:

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Morbihan.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi, président,

- Mme Brisson, présidente-assesseure,

- M. L'hirondel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 8 avril 2022.

La rapporteure,

C. BRISSON Le président,

D. SALVI

La greffière,

A. MARTIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21NT034452


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT03445
Date de la décision : 08/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : DOCHLER GATE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-04-08;21nt03445 ?
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