La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/06/2022 | FRANCE | N°21NT01523

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 03 juin 2022, 21NT01523


Vu la procédure suivante :

I. Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les arrêtés du 25 mars 2021 par lesquelles le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de se conformer à cette obligation, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français et l'a assigné à résidence.

Par

un jugement n° 2104568 du 3 mai 2021, le tribunal administratif de Nantes a, en premier l...

Vu la procédure suivante :

I. Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les arrêtés du 25 mars 2021 par lesquelles le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de se conformer à cette obligation, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2104568 du 3 mai 2021, le tribunal administratif de Nantes a, en premier lieu, renvoyé à la formation collégiale du tribunal les conclusions relatives au refus de séjour du 25 mars 2021 et, en second lieu, rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 juin 2021, M. A... B..., représenté par Me Ifrah, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2104568 du tribunal administratif de Nantes du 3 mai 2021 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du 25 mars 2021 par lesquelles le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de se conformer à cette obligation, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français et l'a assigné à résidence.

3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe à titre principal de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler dans un délai de quinze jours ou à titre subsidiaire de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours en lui délivrant durant cet examen une autorisation provisoire de séjour, le tout sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocat au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat, subsidiairement s'il ne bénéficie pas de l'aide juridictionnelle, au versement de la même somme à son profit en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre de la première instance et de l'appel.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier, le tribunal administratif ayant méconnu la compétence du magistrat désigné pour statuer sur le refus de séjour ; le préfet a entendu statuer sur le fondement du 3°) de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; s'agissant d'une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et accompagnée d'une assignation à résidence, rien n'obligeait le magistrat désigné à renvoyer l'affaire devant la formation collégiale pour statuer sur le droit au séjour ; il aurait dû soit se saisir de la question de la légalité du refus de séjour, soit renvoyer à la formation collégiale l'examen de l'ensemble des conclusions ;

. en ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- le signataire de la décision n'est pas compétent ne s'agissant pas du préfet désigné par l'article 11-1 du décret du 29 avril 2004 et par l'article R. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; la délégation de signature accordée au secrétaire général de la préfecture de la Sarthe n'est pas expressément et précisément visée, en méconnaissance de l'article 43 du décret du 29 avril 2004 ; le préfet ne produit pas la décision portant nomination du secrétaire général aux fonctions qu'il exerce ; la publication de la délégation de signature n'est pas établie ;

- la décision est insuffisamment motivée en méconnaissance du dixième alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ; le préfet ne précise pas les considérations de droit et de fait permettant d'établir qu'il a procédé à un examen de sa situation particulière ; dès lors qu'aucune juridiction n'avait encore examiné la légalité du refus de séjour dont l'examen a été renvoyé à une formation collégiale, la motivation de l'obligation de quitter le territoire français doit être contrôlée indépendamment du refus de titre de séjour ;

- la décision est entachée d'un vice de procédure en l'absence de possibilité de présenter des observations écrites ou orales en méconnaissance de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration et conformément aux principes généraux du droit de l'Union européenne, tels qu'exprimés au point 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la décision est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour :

o l'auteur de la décision est incompétent ;

o la décision est insuffisamment motivée ;

o le préfet n'a pas procédé à un examen suffisant de sa situation personnelle ;

- la décision est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation :

o le préfet ne justifie pas du motif issu de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lequel il s'est fondé pour adopter la mesure d'éloignement ;

o le préfet n'établit pas en quoi sa présence constituerait une menace réelle et actuelle à l'ordre public ;

o la décision entraine pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité en raison de l'ancienneté de sa présence en France et de l'établissement de ses intérêts dans ce pays, notamment quant à sa formation ; la situation de santé de sa mère nécessite sa présence à ses côtés ainsi que la situation de ses oncles, tantes et cousine ;

o la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il réside en France de manière ancienne et y a une grande majorité de sa famille, dont sa mère malade ; il suit une formation en apprentissage et a des réelles perspectives d'insertion professionnelle ;

o la décision méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

. en ce qui concerne la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :

- il n'est pas établi que la notification de la décision ait été régulière et notamment qu'il ait été informé de sa possibilité d'avertir un conseil, son consulat ou toute autre personne de son choix conformément à l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il n'est pas établi que la décision de refus de départ volontaire fasse l'objet d'une décision juridiquement distincte et d'une motivation spécifique ;

- le préfet n'établit pas le risque de fuite ou si son comportement constitue une menace pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, conformément à l'article 7.1 de la directive du 16 décembre 2008 ; le préfet n'a pas pris en compte la durée de sa présence sur le territoire nationale et la présence de ses proches ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

. en ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision est insuffisamment motivée et ne fait aucune mention ni référence au Cameroun ;

- cette motivation ne permet pas d'établir que le préfet a examiné sa situation notamment au regard des risques éventuellement encourus en cas de retour dans son pays d'origine, au regard des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

. en ce qui concerne l'interdiction de retour :

- le préfet n'a pas procédé à un examen suffisant de sa situation, notamment des éventuelles circonstances humanitaires justifiant qu'une telle décision ne soit pas prononcée ;

- la décision est insuffisamment motivée en méconnaissance du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision est disproportionnée et méconnait le septième alinéa de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

. en ce qui concerne l'assignation à résidence :

- la décision est insuffisamment motivée en méconnaissance des dispositions de l'alinéa 8 de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la décision est injustifiée dès lors qu'il présente les garanties nécessaires, qu'il n'entend pas se soustraire à une obligation et qu'une perspective raisonnable de mise en œuvre de l'éloignement existe ;

- la compétence du signataire de la décision, qui n'est pas le préfet du département, n'est pas justifiée ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation particulière avant de l'assigner à résidence, notamment au regard de sa situation familiale ;

- les dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues dès lors qu'elles prévoient une assignation à résidence jusqu'à ce qu'il existe une perspective raisonnable d'exécution de l'obligation et que l'arrêté souligne qu'il existerait une telle perspective raisonnable ;

- la décision méconnait sa liberté d'aller et venir, alors qu'il n'est pas établi qu'il risque de se soustraite à son obligation de quitter le territoire français et s'est présenté à toutes ses convocations ;

- le préfet n'a pas déterminé avec suffisamment de précision le périmètre dans lequel il est autorisé à circuler.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2022, le préfet de la Sarthe conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 31 mars 2022.

II. Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 1er juin 2021 par laquelle le préfet de la Sarthe a renouvelé son assignation à résidence à son domicile au Mans pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2106213 du 11 juin 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 juillet 2021, M. A... B..., représenté par Me Dalmas, demande à la cour :

1°) d'annuler les jugements n° 2104568 du 3 mai 2021 et n° 2106213 du 11 juin 2021 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du 25 mars 2021 par lesquelles le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de se conformer à cette obligation, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français et l'a assigné à résidence ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe à titre principal de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " en application des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans un délai de quinze jours sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le refus de séjour méconnait l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le refus de séjour est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2022, le préfet de la Sarthe conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Béria-Guillaumie, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 21NT01523 et 21NT01867, présentées pour M. B..., concernent la situation d'une même personne et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un arrêt unique.

2. M. A... B..., ressortissant camerounais né en juin 1996, est entré en France en 2012 à l'âge de seize ans et a été confié à la garde de son oncle, ressortissant français. En juin 2020, il a demandé la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Par des décisions du 25 mars 2021, le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer le titre de séjour demandé, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de se conformer à cette obligation, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français et l'a assigné à résidence. M. B... relève appel du jugement du 3 mai 2021 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a, en premier lieu, renvoyé à la formation collégiale du tribunal administratif de Nantes les conclusions relatives au refus de séjour du 25 mars 2021 et, en second lieu, rejeté le surplus de la demande de M. B... dirigée contre les décisions du même jour. Par une décision du 1er juin 2021, le préfet de la Sarthe a renouvelé l'assignation à résidence de M. B... à son domicile. M. B... relève également appel du jugement du 11 juin 2021 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande contre la décision du 1er juin 2021.

Sur la régularité du jugement du 3 mai 2021 :

3. L'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, disposait que : " I. ' L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) ". Par ailleurs, l'article L. 512-1 du même code disposait que : " I. ' L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 3°, 5°, 7° ou 8° du I de l'article L. 511-1 ou sur le fondement de l'article L. 511-3-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 ou au sixième alinéa de l'article L. 511-3-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. / (...) Toutefois, si l'étranger est placé en rétention en application de l'article L. 551-1 ou assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, il est statué selon la procédure et dans le délai prévus au III du présent article. / (...) III. ' En cas de placement en rétention en application de l'article L. 551-1, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant, dans un délai de quarante-huit heures à compter de leur notification, lorsque ces décisions sont notifiées avec la décision de placement en rétention (...) ".

4. Ainsi qu'il a été dit au point 2, M. B... a présenté une demande de titre de séjour en juin 2020. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, notamment de la lecture de l'arrêté litigieux du 25 mars 2021, que l'obligation de quitter le territoire français prononcée à l'encontre de M. B... est fondée sur les dispositions, alors en vigueur, du 3° du I. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sur le rejet de sa demande de titre de séjour de juin 2020. Un autre arrêté du même jour prononce par ailleurs l'assignation à résidence de l'intéressé. Dès lors, en application du III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, seules les décisions portant à l'encontre de M. B... obligation de quitter le territoire français sans délai, fixation du pays de destination, interdiction de retour sur le territoire français et assignation à résidence relevaient de la compétence de la magistrate désignée. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement du 3 mai 2021 serait irrégulier en raison du renvoi de l'examen du refus de séjour contenu dans l'arrêté du 25 mars 2021 à la formation collégiale du tribunal administratif de Nantes.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué du 3 mai 2021 :

En ce qui concerne le refus de séjour :

5. Si dans la requête n° 21NT01867, au demeurant relative au jugement du 11 juin 2021 qui rejette la demande de M. B... dirigée contre la décision du 1er juin 2021 portant renouvellement de son assignation à résidence, l'appelant invoque des moyens à l'encontre du refus de séjour du 25 mars 2021, la demande de M. B... dirigée contre le refus de séjour ne relevait pas de la compétence de la magistrate désignée du tribunal administratif de Nantes, ainsi qu'il a été rappelé au point précédent. Dès lors, les moyens soulevés à l'encontre de cette décision doivent être écartés.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, M. Eric Zabouraeff, secrétaire général de la préfecture de la Sarthe et signataire de l'arrêté du 25 mars 2021, disposait d'une délégation de signature en date du 1er mars 2021, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la Sarthe du même jour, à l'effet de signer " tous arrêtés, décisions, saisines juridictionnelles, circulaires, rapports, correspondances, documents et avis relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Sarthe à l'exception des propositions à la Légion d'Honneur et à l'Ordre National du Mérite ". Aucune disposition législative ou réglementaire, et notamment pas celles de l'article 43 du décret du 29 avril 2004, n'impose que cet arrêté vise la nomination de l'agent bénéficiaire de cette délégation. Par suite, les moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté et de la violation de ces dernières dispositions manquent en fait et ne peuvent qu'être écartés.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " I.- L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance (...) d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger (...). La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...) ".

8. Il ressort des pièces du dossier que le refus de séjour opposé à M. B... dans l'arrêté du 25 mars 2021 comporte un exposé détaillé des considérations de droit et de fait qui le fondent. Par ailleurs, ainsi qu'il a été rappelé au point 4, l'obligation de quitter le territoire français prononcée à l'encontre de M. B... est fondée sur le 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, sa motivation se confond avec celle du refus de séjour prononcé concomitamment, lequel est suffisamment motivé. Il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'obligation de quitter le territoire français en méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté.

9. En troisième lieu, l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : /1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 122-1 du même code : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) ".

10. Par ailleurs, aux termes de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne s'adresse uniquement aux institutions et organes de l'Union. Le moyen tiré de sa violation par une autorité d'un État membre est donc inopérant. Toutefois, il résulte également de cette jurisprudence que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il n'implique toutefois pas systématiquement l'obligation pour l'administration d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, l'étranger soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de demander un entretien pour faire valoir ses observations orales. Enfin, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision faisant grief que si la procédure administrative aurait pu, en fonction des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, aboutir à un résultat différent du fait des observations et éléments que l'étranger a été privé de faire valoir.

11. Toutefois, M. B..., qui a été à même de faire valoir tout élément utile tenant à sa situation personnelle à l'occasion du dépôt de sa demande de titre de séjour et tout au long de l'instruction de sa demande et qui ne fait état d'aucun élément pertinent qu'il aurait été empêché de porter à la connaissance de l'administration et qui aurait été susceptible d'influer sur le prononcé de la mesure prise à son encontre, n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé de son droit à être entendu dans des conditions de nature à caractériser une méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne auquel se rattache le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle défavorable ne soit prise à son encontre.

12. En quatrième lieu, M. B... invoque, à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français du 25 mars 2021, l'exception d'illégalité du refus de séjour du même jour.

13. Tout d'abord, le moyen tiré de l'incompétence du signataire du refus de séjour doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6.

14. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 8, le refus de séjour opposé le 25 mars 2021 comporte l'exposé très détaillé des considérations de droit et de fait qui le fondent et est ainsi suffisamment motivé. Une telle motivation démontre par ailleurs que le préfet de la Sarthe a procédé à un examen de la situation particulière de l'intéressé.

15. Enfin, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ". Par ailleurs, l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur disposait que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

16. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France en 2012 à l'âge de seize ans après que l'autorité parentale a été confiée par sa mère à un de ses oncles de nationalité française. Néanmoins, l'intéressé ne justifie d'aucun lien particulier avec cet oncle, ni même avoir résidé longuement avec ce dernier qui vit en région parisienne. Postérieurement à sa majorité en 2014, il n'établit aucunement avoir bénéficié d'un titre de séjour l'autorisant à séjourner en France et s'est vu au contraire opposer un refus de séjour puis une mesure d'éloignement. Par ailleurs, si sa mère réside désormais régulièrement en France et souffre d'une grave pathologie, M. B..., qui n'a jamais résidé avec elle depuis son entrée en France en 2012 ni fait état de sa présence, n'établit aucunement le caractère indispensable de sa présence aux côtés de sa mère. Enfin, la circonstance que M. B... suit désormais une formation professionnalisante pour devenir concepteur développeur d'applications web, formation dont il n'est ni établi ni même soutenu qu'elle ne serait pas dispensée dans son pays d'origine, ne permet pas, à elle seule, de caractériser une atteinte excessive à son droit à une vie privée et familiale normale. M. B... n'est donc pas fondé à soutenir que le refus de séjour qui lui a été opposé le 25 mars 2021 méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, le refus de séjour n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

17. Il résulte de ce qui précède que l'exception d'illégalité du refus de séjour du 25 mars 2021 invoquée à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français du même jour n'est pas fondée et doit être écartée.

18. En cinquième lieu, ainsi qu'il a été rappelé et qu'il ressort de la motivation en droit de l'arrêté du 25 mars 2021, le préfet de la Sarthe a fondé l'obligation de quitter le territoire français notifiée à M. B... sur le refus de séjour qui lui a été opposé dans le même arrêté et sur le 3° du I. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il suit de là d'une part que, contrairement à ce que soutient l'appelant, l'autorité administrative a bien précisé le fondement de la mesure d'éloignement prononcée et, d'autre part, que cette mesure d'éloignement n'étant pas fondée sur un motif d'ordre public, le préfet de la Sarthe n'avait pas à justifier ou préciser en quoi la présence de M. B... sur le territoire français constituait une menace réelle et actuelle pour l'ordre public.

19. En sixième lieu, les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation qui entacherait l'obligation de quitter le territoire français du 25 mars 2021 et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 16.

20. En dernier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne fixant pas par elle-même le pays à destination duquel M. B... pourrait être reconduit d'office, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté comme inopérant.

En ce qui concerne la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :

21. L'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur, disposait que : " II. ' L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / Le délai de départ volontaire accordé à l'étranger peut faire l'objet d'une prolongation par l'autorité administrative pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / L'étranger est informé par écrit de cette prolongation. / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; / (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) ".

22. En premier lieu, les conditions de notification d'une décision administrative sont sans incidence sur sa légalité. Dès lors, la circonstance, à la supposer établie, que M. B... n'aurait pas été informé de sa possibilité d'avertir un conseil, son consulat ou une personne de son choix conformément aux dispositions de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée.

23. En deuxième lieu, au sein de l'arrêté du 25 mars 2021, la décision refusant à M. B... un délai de départ volontaire est clairement identifiée et comporte l'exposé des considérations de droit et de fait qui la fondent. Par ailleurs, il résulte clairement de la motivation de cette décision qu'elle est fondée sur la soustraction de M. B... à la précédente mesure d'éloignement prononcée à l'encontre de l'intéressé en 2019. Dès lors que le refus de lui accorder un délai de départ volontaire n'est pas fondé sur une menace à l'ordre public, M. B... ne peut utilement invoquer la circonstance que le préfet n'aurait pas caractérisé une telle menace. Par ailleurs, le préfet, ayant rappelé que l'intéressé s'était soustrait à une précédente mesure d'éloignement en janvier 2019, a suffisamment caractérisé le risque de fuite en application du d) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

24. En dernier lieu, compte tenu des faits rappelés au point 16, d'une part que les liens de M. B... avec son oncle et avec sa mère ne sont pas établis et d'autre part qu'il n'est ni établi ni même soutenu qu'il ne pourrait poursuivre la formation débutée dans son pays d'origine, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation n'est pas fondé et doit être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays d'éloignement :

25. L'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, disposait que : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

26. L'arrêté litigieux vise les dispositions de l'article L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, rappelle la nationalité camerounaise de l'intéressé, rappelle qu'il a vécu la majeure partie de sa vie au Cameroun et qu'il n'y est pas dépourvu d'attache familiale puisque son frère y réside encore. Il relève également que M. B... n'établit pas ne pouvoir regagner le pays dont il a la nationalité ni se rendre dans un autre pays. Il suit de là, d'une part, que la décision fixant le pays d'éventuel éloignement de M. B... est suffisamment motivée et, d'autre part, que cette motivation démontre que le préfet de la Sarthe a effectivement procédé à un examen de la situation particulière de l'intéressé au regard du pays d'éloignement et des risques éventuellement encourus dans ce pays.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

27. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " (...) III. L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / Sauf s'il n'a pas satisfait à une précédente obligation de quitter le territoire français ou si son comportement constitue une menace pour l'ordre public, le présent III n'est pas applicable à l'étranger obligé de quitter le territoire français au motif que le titre de séjour qui lui avait été délivré en application de l'article L. 316-1 n'a pas été renouvelé ou a été retiré ou que, titulaire d'un titre de séjour délivré sur le même fondement dans un autre Etat membre de l'Union européenne, il n'a pas rejoint le territoire de cet Etat à l'expiration de son droit de circulation sur le territoire français dans le délai qui lui a, le cas échéant, été imparti pour le faire. / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. / L'étranger à l'encontre duquel a été prise une interdiction de retour est informé qu'il fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, conformément à l'article 24 du règlement (CE) n° 1987/2006 du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du système d'information Schengen de deuxième génération (SIS II). Les modalités de suppression du signalement de l'étranger en cas d'annulation ou d'abrogation de l'interdiction de retour sont fixées par voie réglementaire. (...) Lorsque l'étranger faisant l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire ou alors qu'il était obligé de quitter sans délai le territoire français ou, ayant déféré à l'obligation de quitter le territoire français, y est revenu alors que l'interdiction de retour poursuit ses effets, l'autorité administrative peut prolonger cette mesure pour une durée maximale de deux ans. / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Sauf menace grave pour l'ordre public, la durée totale de l'interdiction de retour ne peut excéder cinq ans, compte tenu des prolongations éventuellement décidées (...) ".

28. En premier lieu, l'arrêté litigieux vise les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et rappelle l'articulation de ces dispositions avec l'application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par ailleurs, l'arrêté relève l'âge auquel M. B... est entré en France, le fait qu'il a passé la majeure partie de sa vie hors de France, l'état de ses attaches privées et familiales en France et dans son pays d'origine. Dans ces conditions, la décision interdisant à M. B... de revenir en France pendant un délai d'un an est suffisamment motivée au regard des exigences du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier de cette motivation précise de l'arrêté du 25 mars 2021, que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. B... avant de fixer à une année la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français.

29. En second lieu, ainsi qu'il a été rappelé au point 16, M. B... n'établit aucunement l'intensité des liens l'unissant à son oncle de nationalité française qui s'était vu confier l'autorité sur lui en 2012 et avec lequel il ne réside pas depuis plusieurs années, ni les liens conservés avec sa mère qu'il a quittée en 2012 et qui ne bénéficie d'un titre de séjour l'autorisant à résider en France que depuis quelques mois à la date des décisions contestées. Par ailleurs, il n'est ni établi ni même soutenu que sa formation de concepteur développeur d'applications ne pourrait être poursuivie au Cameroun. Dans ces conditions, et alors que le préfet de la Sarthe a limité à une année la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français, laquelle pouvait être prononcée pour une durée de trois années en application du III de l'article L. 511-1 précité, l'interdiction prononcée le 25 mars 2021 à l'encontre de M. B... n'apparait pas disproportionnée et ne méconnait pas ces dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne l'assignation à résidence du 25 mars 2021 :

30. L'article L. 561-2, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile disposait que : " I.- L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) 5° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) / Les huit derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve que la durée maximale de l'assignation ne puisse excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois pour les cas relevant des 1° et 2° à 7° du présent I, ou trois fois pour les cas relevant du 1° bis. (...) ". Par ailleurs, les huit derniers alinéas de l'article L. 561-1 du même code, alors en vigueur, disposaient que : " La décision d'assignation à résidence est motivée. Elle peut être prise pour une durée maximale de six mois, renouvelable une fois dans la même limite de durée, par une décision également motivée. / Par exception : / a) Dans le cas prévu au 4° du présent article, la décision d'assignation à résidence peut être renouvelée tant que l'interdiction de retour ou l'interdiction de circulation sur le territoire français demeure exécutoire ; / b) Dans les cas prévus aux articles L. 523-3 à L. 523-5 et au 6° du présent article, la durée maximale de six mois ne s'applique pas ; / c) Dans le cas prévu au 5° du présent article, la durée maximale de six mois ne s'applique pas. Au-delà d'une durée de cinq ans, le maintien sous assignation à résidence fait l'objet d'une décision spécialement motivée faisant état des circonstances particulières justifiant cette prolongation au regard, notamment, de l'absence de garanties suffisantes de représentation de l'étranger ou si sa présence constitue une menace grave pour l'ordre public. / L'étranger astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés par l'autorité administrative doit se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie. Il doit également se présenter, lorsque l'autorité administrative le lui demande, aux autorités consulaires, en vue de la délivrance d'un document de voyage. L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion ou d'une interdiction judiciaire ou administrative du territoire prononcés en tout point du territoire de la République peut, quel que soit l'endroit où il se trouve, être astreint à résider dans des lieux choisis par l'autorité administrative dans l'ensemble du territoire de la République. L'autorité administrative peut prescrire à l'étranger la remise de son passeport ou de tout document justificatif de son identité dans les conditions prévues à l'article L. 611-2. Si l'étranger présente une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public, l'autorité administrative peut le faire conduire par les services de police ou de gendarmerie jusqu'aux lieux d'assignation. / L'autorité administrative peut également, aux fins de préparation du départ de l'étranger, lui désigner, en tenant compte des impératifs de la vie privée et familiale, une plage horaire pendant laquelle il doit demeurer dans les locaux où il réside, dans la limite de trois heures consécutives par période de vingt-quatre heures. Lorsque l'étranger est assigné à résidence en application des 5° ou 6° ou au titre d'une des mesures prévues aux articles L. 523-3 à L. 523-5 ou si son comportement constitue une menace pour l'ordre public, la durée de cette plage horaire peut être portée à dix heures consécutives par période de vingt-quatre heures. / Le non-respect des prescriptions liées à l'assignation à résidence est sanctionné dans les conditions prévues à l'article L. 624-4 ".

31. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence du secrétaire général de la préfecture de la Sarthe, signataire de la décision d'assignation à résidence du 25 mars 2021, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6.

32. En deuxième lieu, l'arrêté du 25 mars 2021 assignant M. B... à résidence à son domicile du Mans et l'obligeant, conformément à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à demeurer dans son logement tous les jours entre 13 heures et 16 heures comporte l'exposé détaillé des considérations de droit et de fait qui le fondent. La décision est ainsi suffisamment motivée au regard des exigences du huitième alinéa de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable par renvoi de l'article L. 561-2 du même code. Par ailleurs, cette motivation démontre que le préfet de la Sarthe a procédé à un examen de la situation particulière de la situation de M. B....

33. En troisième lieu, contrairement à ce que soutient M. B..., l'arrêté litigieux délimite précisément le périmètre au sein duquel il est assigné puisque l'article 4 de l'arrêté du 25 mars 2021 précise qu'il est autorisé à circuler au sein de sa commune de résidence, soit la commune du Mans, et l'article 5 de l'arrêté lui permet de solliciter l'établissement d'un sauf-conduit auprès du préfet de la Sarthe pour tout déplacement en dehors de cette commune. Par ailleurs, l'arrêté litigieux lui notifie une obligation périodique de présentation au commissariat central du Mans, les lundi, mercredi et vendredi, et l'oblige à être présent à son domicile quotidiennement entre 13 heures et 16 heures. Dans ces conditions, le moyen tiré du caractère imprécis de l'arrêté litigieux n'est pas fondé et doit être écarté.

34. En quatrième lieu, l'assignation à résidence prévue par les dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile constitue une mesure alternative au placement en rétention prévu par les dispositions de l'article L. 551-1 du même code, dès lors que la mesure d'éloignement demeure une perspective raisonnable et que l'étranger présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à celle-ci. M. B... ne peut dès lors invoquer l'illégalité de l'assignation à résidence du 25 mars 2021 au motif précisément qu'une perspective raisonnable de mise en œuvre de l'éloignement existerait, ainsi que l'a souligné d'ailleurs l'arrêté litigieux, et qu'il présenterait des garanties de représentation.

35. En dernier lieu, alors qu'il est constant que M. B... n'a pas exécuté la mesure d'éloignement prononcée en janvier 2019 et que l'arrêté fixe la commune du Mans comme périmètre de l'assignation à résidence décidée, l'arrêté litigieux apparait adapté, nécessaire et proportionné à la finalité qu'il poursuivait et ne porte pas de ce fait une atteinte excessive à la liberté d'aller et venir de M. B....

Sur le bien-fondé du jugement attaqué du 1er juin 2021 :

36. M. B... ne soulève aucun moyen spécifiquement dirigé contre l'arrêté du 1er juin 2021 portant renouvellement de son assignation à résidence. A supposer qu'il ait entendu soulever un moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de séjour, ce moyen doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 12 à 17.

37. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, les magistrates désignées par le président du tribunal administratif de Nantes ont rejeté ses demandes dirigées contre les arrêtés du préfet de la Sarthe des 25 mars 2021 et 1er juin 2021. Il suit de là que ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence.

Sur les frais du litige :

38. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. B... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Ifrah, à Me Dalmas et au ministre de l'intérieur.

Une copie sera adressée pour information au préfet de la Sarthe.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Rivas, président-assesseur,

- Mme Béria-Guillaumie, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 juin 2022.

La rapporteure,

M. BÉRIA-GUILLAUMIELe président,

L. LAINÉ

La greffière,

S. LEVANT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT01523, 21NT01867


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT01523
Date de la décision : 03/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie BERIA-GUILLAUMIE
Rapporteur public ?: M. PONS
Avocat(s) : SCP GALLOT LAVALLEE IFRAH BEGUE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-06-03;21nt01523 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award