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17/06/2022 | FRANCE | N°22NT00208

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 17 juin 2022, 22NT00208


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler notamment l'arrêté du 25 août 2021 du préfet d'Ille-et-Vilaine l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et lui interdisant un retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 2104366 du 7 septembre 2021, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée

le 24 janvier 2022, Mme C..., représentée par Me Cabioch, demande à la cour :

1°) de surseoir à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler notamment l'arrêté du 25 août 2021 du préfet d'Ille-et-Vilaine l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et lui interdisant un retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 2104366 du 7 septembre 2021, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 janvier 2022, Mme C..., représentée par Me Cabioch, demande à la cour :

1°) de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de la question préjudicielle suivante : " La charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et plus particulièrement les termes de son préambule mais également ceux de ses articles

7 et 8 qui disposent que " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications " et que " 1 - Toute personne a droit à la protection des données à caractère personnel la concernant. 2 - Ces données doivent être traitées loyalement, à des fins déterminées et sur la base du consentement de la personne concernée ou en vertu d'un autre fondement légitime prévu par la loi. Toute personne a le droit d'accéder aux données collectées la concernant et d'en obtenir la rectification. 3 - Le respect de ces règles est soumis au contrôle d'une autorité indépendante. ", s'opposent-ils à la jurisprudence administrative française appliquant les articles R. 142-4 et R. 142-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui retient qu'en l'absence de d'élément objectif transmis par le requérant le moyen tiré de l'absence d'habilitation de l'agent ayant consulté les fichiers doit être écarté ' " ;

2°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes du 7 septembre 2021 ;

3°) d'annuler cet arrêté du 25 août 2021 ;

4°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de procéder au retrait de son signalement aux fins de non admission dans le système d'information Schengen dans le délai de quatre jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire de réexaminer sa situation, le tout dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

6°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;

- l'absence de justification de la désignation et de l'habilitation de l'agent ayant procédé à la consultation des traitements automatisés " VISABIO " et " AGDREF2 ", entache la décision contestée d'un vice de procédure ;

- les juridictions administratives font peser sur l'administré la charge de la preuve de l'irrégularité de la consultation de ces fichiers, en violation du droit de l'Union européenne ; la Cour de justice l'Union européenne doit être saisie d'une question préjudicielle sur ce point ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur de fait ;

- cette décision est illégale au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- compte tenu de la relation de couple qu'elle entretient avec un ressortissant communautaire, elle bénéficie du droit au séjour applicable aux personnes mentionnées à l'article 3 de la directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 ;

- la décision portant refus de délai de départ volontaire est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- en prenant cette décision le préfet a commis une erreur de fait et une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

- la décision de signalement aux fins de non-admission dans l'espace Schengen est illégale du fait de l'illégalité de la décision lui interdisant le retour sur le territoire français.

La requête a été communiquée le 24 février 2022 au préfet d'Ille-et-Vilaine qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Mme C... été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 janvier 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les observations de Me Renaud représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante béninoise, née le 22 mars 1989, déclare être entrée en France en 2014. A la suite d'une retenue administrative dont elle a fait l'objet le 25 août 2021, le préfet d'Ille-et-Vilaine a, par arrêté du même jour, obligé l'intéressée à quitter le territoire français sans délai, fixé le pays de renvoi et prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Mme C... relève appel du jugement du 7 septembre 2021 du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. La décision portant obligation de quitter le territoire français que comporte l'arrêté contesté, qui énonce les considérations de droit et les circonstances de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet d'Ille-et-Vilaine, qui a fait état des principaux éléments de la situation administrative, personnelle et familiale de Mme C..., n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation préalablement à l'édiction de la décision contestée.

3. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ".

4. S'il ressort des pièces du dossier et notamment de la copie de son passeport que Mme C... est entrée en Allemagne le 24 décembre 2014 sous couvert d'un visa Schengen valable jusqu'au 11 janvier 2015 pour un séjour d'une durée de vingt-et-un jours, l'intéressée ne justifie ni de la date ni des conditions de son entrée en France et, par suite, n'apporte pas la preuve qui lui incombe de ce qu'elle serait entrée régulièrement sur le territoire français. Elle ne justifie pas davantage de la régularité de son séjour. Dans ces conditions, le préfet d'Ille-et-Vilaine étant fondé pour ces seuls motifs à constater que la requérante entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, Mme C... ne peut utilement se prévaloir de l'irrégularité qui entacherait selon elle les conditions dans lesquelles il aurait été procédé à la consultation des fichiers " VISABIO " et " AGDREF2 " aux fins de vérification des conditions de son entrée en France.

5. Contrairement à ce que soutient la requérante, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision contestée, notamment en ce qu'elle fait état de l'absence de remise de son passeport aux services de police, serait entachée d'erreur de fait.

6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors en vigueur : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et

L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article

L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine (...) ".

7. Mme C... fait valoir qu'elle réside en France depuis 2014 et qu'elle entretient depuis le mois de mai 2021 une relation de couple avec un ressortissant portugais établi en France sous le statut de travailleur. Toutefois l'intéressée, ne justifie ni de la date de son entrée sur le territoire français, ainsi qu'il a été dit précédemment, ni de l'ancienneté, de l'intensité et, par suite, de la stabilité de la relation qu'elle invoque. La requérante, célibataire et sans enfant, qui ne dispose pas d'un logement stable et ne se prévaut d'aucune perspective d'insertion professionnelle, n'établit pas davantage avoir tissé des liens d'une particulière intensité en France, ni être dépourvue de toute attache dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions de séjour en France de Mme C..., la décision contestée l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Si tout justiciable peut se prévaloir, à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d'une directive, lorsque l'Etat n'a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires, Mme C... ne saurait se prévaloir de la méconnaissance de l'article 3 de la directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 susvisée, aux termes duquel l'État membre d'accueil favorise, conformément à sa législation nationale, l'entrée et le séjour du partenaire avec lequel le citoyen de l'Union a une relation durable dûment attestée, dès lors que les dispositions de cette directive ont fait l'objet d'une transposition dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 et par le décret n° 2007-371 du 21 mars 2007. Par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance de la directive précitée doit être écarté.

Sur la légalité de la décision portant refus de délai de départ volontaire :

9. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) / 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) / 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; (...) / 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5 ".

10. Pour refuser d'assortir la décision obligeant Mme C... à quitter le territoire français d'un délai de départ volontaire, le préfet d'Ille-et-Vilaine s'est fondé sur les circonstances que l'intéressée ne justifiait ni d'une entrée régulière, ni de la présentation d'une demande de régularisation, qu'elle avait déclaré ne pas vouloir se soumettre à la mesure d'éloignement prise à son encontre, qu'elle ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes, en raison notamment de l'absence de domicile stable établi et de remise de l'original de son passeport aux services de police et qu'elle entrait, par suite dans le champ d'application des dispositions précitées des 1°, 4° et 8° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. En premier lieu, cette décision portant refus de délai de départ volontaire comporte les considérations de droit et de fait qui en constitue le fondement. Elle est, par suite, suffisamment motivée.

12. En deuxième lieu, si Mme C... soutient que la mention d'une intention de ne pas se soumettre à la mesure d'éloignement est erronée, cette inexactitude, à la supposer même établie, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet d'Ille-et-Vilaine aurait pris la même décision en se fondant sur les seules dispositions précitées des 1° et 8° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

13. Enfin, en se bornant à invoquer en des termes généraux le contexte de crise sanitaire, la requérante ne justifie pas de circonstances particulières telles qu'en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, le préfet d'Ille-et-Vilaine aurait fait une inexacte application de ces mêmes dispositions.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

14. La décision fixant le pays de renvoi qui, contrairement à ce que soutient la requérante, mentionne notamment sa nationalité béninoise, comporte les considérations de droit et de fait qui en constitue le fondement. Elle est, par suite, suffisamment motivée.

15. Compte tenu de l'absence d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, Mme C... ne saurait exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de sa contestation de la décision fixant le pays de renvoi.

Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :

16. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour (...) ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

17. Pour prononcer à l'encontre de Mme C... une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, le préfet d'Ille-et-Vilaine, qui a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, s'est fondé sur la présence relativement récente de l'intéressée et l'absence de liens intenses et stables en France, sur l'existence d'attaches dans son pays d'origine, ainsi que sur l'absence de menace à l'ordre public, de précédente mesure d'éloignement et de circonstances humanitaires.

18. En premier lieu, cette décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an comporte les considérations de droit et de fait qui en constitue le fondement. Elle est, par suite, suffisamment motivée.

19. En second lieu, Mme C... n'établit, ainsi qu'il a été dit au point 7, ni l'ancienneté alléguée de sa présence en France, ni l'intensité et la stabilité de la relation de couple dont elle se prévaut. Par suite en prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an pour les motifs exposés au point 17, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a ni porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel que garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni fait une inexacte application des dispositions citées au point 16.

En ce qui concerne le signalement aux fins de non-admission dans l'espace Schengen :

20. Aux termes de l'article L. 613-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel est notifiée une interdiction de retour sur le territoire français est informé qu'il fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, conformément à l'article 24 du règlement (UE) n° 2018/1861 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du système d'information Schengen (SIS) dans le domaine des vérifications aux frontières, modifiant la convention d'application de l'accord de Schengen et modifiant et abrogeant le règlement (CE) n° 1987/2006. / Les modalités de suppression du signalement de l'étranger en cas d'annulation ou d'abrogation de l'interdiction de retour sont fixées par voie réglementaire. ". Aux termes de l'article

R. 613-7 du même code : " Les modalités de suppression du signalement d'un étranger effectué au titre d'une décision d'interdiction de retour sont celles qui s'appliquent, en vertu de l'article 7 du décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées, aux cas d'extinction du motif d'inscription dans ce traitement ".

21. Lorsqu'elle prend à l'égard d'un étranger une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français, l'autorité administrative se borne à informer l'intéressé de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen. Une telle information ne constitue pas une décision distincte de la mesure d'interdiction de retour et n'est, dès lors, pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Par suite, les conclusions tendant à l'annulation du signalement de Mme C... aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées.

22. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer pour poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi, président,

- Mme Brisson, présidente-assesseure,

- M. L'hirondel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 17 juin 2022.

La rapporteure,

C. A...

Le président,

D. Salvi

La greffière,

A. Martin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22NT002082


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT00208
Date de la décision : 17/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : SELARL DESMARS BELONCLE BARZ CABIOCH

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-06-17;22nt00208 ?
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