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22/11/2022 | FRANCE | N°20NT02728

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 22 novembre 2022, 20NT02728


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2017 par lequel le maire de Pénestin a délivré à M. et Mme E... un permis de construire pour une maison individuelle sur un terrain cadastré section ZO n° 297 et n° 310, correspondant au lot n° 5 du lotissement Le Cofreno.

Par un jugement n° 1704271 du 3 juillet 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :>
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 2 septembre 2020, 26 novembre 2020, 4 mar...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2017 par lequel le maire de Pénestin a délivré à M. et Mme E... un permis de construire pour une maison individuelle sur un terrain cadastré section ZO n° 297 et n° 310, correspondant au lot n° 5 du lotissement Le Cofreno.

Par un jugement n° 1704271 du 3 juillet 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 2 septembre 2020, 26 novembre 2020, 4 mars 2021, 9 avril 2021 et 18 mai 2021, l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine ", représentée par Me Dubreuil, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 juillet 2020 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2017 du maire de Pénestin ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Pénestin la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle dispose d'un intérêt à agir eu égard à son objet statutaire et à l'objet de l'autorisation ;

- le jugement est irrégulier en ce que le rapporteur public a été dispensé de conclusions alors que la solution de l'affaire ne paraissait pas s'imposer s'agissant de l'interprétation des articles L. 121-8 et L. 121-13 du code de l'urbanisme à un secteur où l'appréciation de la juridiction sur l'existence ou non d'un secteur d'urbanisation diffuse a varié ;

- l'autorisation est intervenue en violation de l'article R. 442-13 du code de l'urbanisme ; il a été procédé à la vente du lot n° 5 avant l'exécution de tout ou partie des travaux prescrits et sans autorisation du maire ;

- la demande de permis de construire était incomplète ; le certificat prévu à l'article R. 442-11 ne figurait pas au dossier ;

- en méconnaissance des articles R. 431-22-1 et R. 442-18 du code de l'urbanisme il n'est pas établi que le dossier de demande de permis des construire comprenait une attestation sur l'achèvement des travaux des équipements desservant les lots ; il n'est pas établi que les équipements de lutte contre l'incendie étaient terminés à la date de délivrance du permis de construire ainsi que les ouvrages de rétention de l'eau enterrés et les avaloirs et les équipements requis par la desserte de la construction ;

- l'autorisation méconnait l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme du fait de l'insécurité de la desserte de la construction ;

- la décision est intervenue en violation de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme dès lors que le maire et l'adjoint signataire étaient en situation de conflit d'intérêts alors qu'ils étaient tous deux membres du bureau du bureau de l'association foncière urbaine libre du Loguy à laquelle a été accordée le permis d'aménager qui a permis la délivrance du permis de construire contesté ; après transfert le permis de construire a été délivré à une autre membre du même bureau de l'AFUL ;

- l'arrêté est intervenu en violation de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dès lors que le terrain d'assiette est situé hors de l'agglomération de la commune, en zone UBb au PLU qui est elle-même scindée en poches et entourée de zones naturelles, agricole ou d'urbanisation diffuse ; le projet s'insère dans une zone à la densité faible faiblement ; ni la mitoyenneté de certaines constructions ni la présence de voies de desserte ne peuvent être prises en compte ; la juridiction dans ses décisions les plus récentes considère qu'il s'agit d'un secteur d'urbanisation diffuse ;

- l'arrêté est intervenu en violation de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme ; il autorise la construction d'une habitation dans une zone d'habitation diffuse ; aucune des trois conditions prévues par cet article et permettant cette construction n'est remplie ;

- la décision est irrégulière eu égard à l'illégalité, soulevée par la voie de l'exception, de la décision de la création de la zone UBb au plan local d'urbanisme de la commune et de l'orientation d'aménagement n° 1 de ce plan approuvé le 11 octobre 2010 ; le secteur UBb du Lomer est intégralement situé en espace proche du rivage ; une justification et une motivation s'imposaient de ce fait au plan local d'urbanisme pour l'ensemble de ce secteur ; l'orientation d'aménagement n° 1 ne prévoit pas le comblement d'une dent creuse mais l'aménagement d'un lotissement ; la création de la zone constitue une extension non limitée de l'urbanisation en espace proche du rivage avec la possibilité de coefficients d'emprise au sol et de hauteur de construction allégés ; le plan d'occupation des sols antérieur de 2006 a été annulé et celui de 1984 remis en vigueur n'autorise pas la construction contestée au regard de son article 2 sur les clôtures et méconnait la loi littoral qui lui est postérieure ; le règlement national d'urbanisme alors applicable interdit les constructions hors des parties urbanisées de la commune.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 janvier et 3 juin 2021, la commune de Pénestin, représentée par Me Le Derf-Daniel, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable faute d'intérêt à agir de la requérante ;

- subsidiairement, les moyens soulevés par l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " ne sont pas fondés.

Par des mémoires enregistrés les 17 mars 2021, 4 mai 2021 et 1er juin 2021, Mme F... D..., représentée par Me Rouhaud, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable faute d'intérêt à agir de la requérante ;

- les moyens soulevés par l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " ne sont pas fondés.

Par des mémoires en intervention enregistrés les 17 mars 2021 et 4 mai 2021, l'association foncière urbaine libre du Loguy, représentée par Me Rouhaud, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable faute d'intérêt à agir de la requérante ;

- les moyens soulevés par l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " ne sont pas fondés pour les motifs exposés par Mme D....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- et les observations de Me Dubreuil, représentant l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine ", de Me Balloul substituant Me Le Derf-Daniel, représentant la commune de Pénestin, et de Me Rouhaud, représentant Mme D... et l'association foncière urbaine libre du Loguy.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme E... ont présenté le 7 février 2017 une demande de permis de construire pour la construction d'une maison d'habitation sur un terrain cadastré section ZO n°s 297 et 310, sur le lot n° 5 du lotissement du Cofréno à Pénestin (Morbihan). Par un arrêté du 13 juillet 2017, le maire de la commune de Pénestin leur a délivré le permis de construire sollicité. Cette autorisation a été transférée à Mme F... D... par un arrêté du maire de Pénestin du 26 février 2018. Par un jugement du 3 juillet 2020, dont l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " relève appel, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur l'intervention de l'association foncière urbaine libre du Loguy :

2. L'AFUL du Loguy, en sa qualité de bénéficiaire du permis d'aménager le lotissement sur lequel est situé le terrain d'assiette du permis de construire en litige, justifie d'un intérêt suffisant au rejet de la requête de l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " dirigée contre l'arrêté du 13 juillet 2017 du maire de Pénestin accordant le permis de construire contesté. Son intervention doit, par suite, être admise.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. D'une part aux termes de l'article L. 7 du code de justice administrative : " Un membre de la juridiction, chargé des fonctions de rapporteur public, expose publiquement, et en toute indépendance, son opinion sur les questions que présentent à juger les requêtes et sur les solutions qu'elles appellent ". Aux termes de l'article L. 732-1 du même code : " Dans des matières énumérées par décret en Conseil d'Etat, le président de la formation de jugement peut dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, d'exposer à l'audience ses conclusions sur une requête, eu égard à la nature des questions à juger ". Aux termes de l'article R. 732-1-1 de ce code : " Sans préjudice de l'application des dispositions spécifiques à certains contentieux prévoyant que l'audience se déroule sans conclusions du rapporteur public, le président de la formation de jugement ou le magistrat statuant seul peut dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience sur tout litige relevant des contentieux suivants : / 1° Permis de conduire ; / 2° Refus de concours de la force publique pour exécuter une décision de justice ; / 3° Naturalisation ; / 4° Entrée, séjour et éloignement des étrangers, à l'exception des expulsions ; / 5° Taxe d'habitation et taxe foncière sur les propriétés bâties afférentes aux locaux d'habitation et à usage professionnel au sens de l'article 1496 du code général des impôts ainsi que contribution à l'audiovisuel public ; / 6° Prestation, allocation ou droit attribués au titre de l'aide ou de l'action sociale, du logement ou en faveur des travailleurs privés d'emploi ".

4. Par ailleurs, aux termes de l'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, prise sur habilitation donnée par la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 : " Le président de la formation de jugement peut dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, d'exposer à l'audience des conclusions sur une requête ". L'article 2 de la même ordonnance prévoit que ces dispositions sont applicables " durant la période comprise entre le 12 mars 2020 et la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l'article 4 de la loi du 23 mars 2020 ", soit le 10 juillet 2020.

5. Il résulte du jugement attaqué que devant le tribunal administratif de Rennes le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa demande, lors de l'audience du 19 juin 2020, de prononcer ses conclusions sur le fondement de l'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020 citée au point précédent. S'il appartient au juge d'appel saisi d'un recours dirigé contre un jugement rendu dans ces conditions, de vérifier que le litige entrait dans le champ d'application des dispositions de l'article 8 de cette ordonnance, il ne peut en revanche être utilement soutenu en appel que les particularités de la requête ne permettaient pas de dispenser le rapporteur public de prononcer des conclusions. Par suite, le moyen tiré de ce qu'en raison des particularités de la requête de l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine ", le rapporteur public ne pouvait être dispensé de prononcer des conclusions à l'audience est écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente pour délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l'objet d'une déclaration préalable est : / a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu (...) " et aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. Pour les décisions individuelles, cette transmission intervient dans un délai de quinze jours à compter de leur signature. / (...) Le maire peut certifier, sous sa responsabilité, le caractère exécutoire de ces actes. (...) ".

7. L'arrêté contesté a été signé par M. B..., alors adjoint au maire de Pénestin en charge de l'urbanisme. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressé disposait d'une délégation à cet effet accordée par le maire le 15 avril 2014. Cet arrêté de délégation a été transmis le même jour en préfecture et affiché en mairie du 16 avril au 16 juin 2014 ainsi qu'il résulte d'une attestation du maire de cette commune du 4 novembre 2019 faisant foi jusqu'à preuve du contraire. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté est écarté comme manquant en fait.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme : " Si le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est intéressé au projet faisant l'objet de la demande de permis ou de la déclaration préalable, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune ou l'organe délibérant de l'établissement public désigne un autre de ses membres pour prendre la décision. ". Aux termes de l'article L. 322-1 de ce code : " Les associations foncières urbaines sont des associations syndicales régies par les dispositions de l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires ainsi que par celles de la présente section, constituées entre propriétaires intéressés pour l'exécution des travaux et opérations énumérés à l'article L. 322-2. ".

9. L'association requérante soutient que l'adjoint au maire de la commune de Pénestin, signataire des arrêtés contestés, tout comme le maire de cette commune, étaient intéressés aux projets contestés dès lors qu'ils sont membres du bureau de l'association foncière libre (AFUL) du Loguy, bénéficiaire du permis d'aménager délivré pour la réalisation du lotissement au sein duquel les trois constructions ont été autorisées. Il ressort des pièces du dossier que l'AFUL du Loguy a été constituée en 2014, afin notamment de procéder au réaménagement foncer de diverses parcelles situées au lieu-dit le Loguy dans la perspective de réaliser un lotissement et qu'elle a conclu le 11 février 2014 avec la commune de Pénestin une convention dont il ressort que " L'aménagement foncier a attribué à la commune la parcelle ZO 35 à usage de desserte pour les parcelles de la zone. Cette parcelle est incluse dans le périmètre de l'AFUL, elle constitue un apport et autorise de fait la commune à devenir membre et à participer au projet au même titre que les autres propriétaires. Par délibération du Conseil Municipal en date du 5 août 2013, il a été approuvé à l'unanimité l'adhésion de la commune de Pénestin à l'AFUL du Loguy. ". La circonstance qu'en conséquence de cette convention le maire et son adjoint signataire du permis de construire contesté sont devenus membres du bureau de cette AFUL ne saurait les faire regarder, au sens des dispositions précitées de l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme, comme intéressés aux projets de construction des trois maisons d'habitation ici en cause, autorisés au bénéfice de tiers. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 422-1 et L. 422-7 du code de l'urbanisme est écarté.

10. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 442-13 du code de l'urbanisme : " Le permis d'aménager ou un arrêté ultérieur pris par l'autorité compétente pour délivrer le permis autorise sur sa demande le lotisseur à procéder à la vente ou à la location des lots avant l'exécution de tout ou partie des travaux prescrits, dans l'une ou l'autre des hypothèses suivantes : / a) Le demandeur sollicite l'autorisation de différer, en vue d'éviter la dégradation des voies pendant la construction des bâtiments, la réalisation du revêtement définitif de ces voies, l'aménagement des trottoirs, la pose de leurs bordures, la mise en place des équipements dépendant de ces trottoirs ainsi que les plantations prescrites ; / Dans ce cas, cette autorisation est subordonnée à l'engagement du demandeur de terminer les travaux dans les délais que fixe l'arrêté et, si le lotisseur n'est pas une collectivité publique, à la consignation à cette fin, en compte bloqué, d'une somme équivalente à leur coût, fixé par ledit arrêté, ou à la production d'une garantie d'achèvement desdits travaux établie conformément à l'article R. 442-14 ; le déblocage de la somme représentative du montant des travaux peut être autorisé en fonction de leur degré d'avancement par l'autorité qui a accordé l'autorisation de lotir ; (...) ".

11. Par un arrêté du 9 mai 2017 le maire de Pénestin a autorisé l'aménageur du lotissement comprenant le terrain d'assiette de la construction contestée à procéder à la vente du lot correspondant. La circonstance que son adjoint en charge de l'urbanisme a dès le 13 février précédent donné un avis favorable au projet de construction de cette habitation dans le cadre de l'instruction de la demande de permis de construire déposée le 7 février 2017 par M. et Mme E... n'est pas de nature à établir que, dès avant le 9 mai 2017, le lot correspondant qui appartenait à Mme D... aurait été vendu aux époux E.... Du reste Mme D... soutient sans être contredite que cette vente aux époux E... n'est jamais intervenue. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 442-13 du code de l'urbanisme est écarté.

12. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 431-22 du code de l'urbanisme : " Lorsque les travaux projetés portent sur une construction à édifier sur un terrain inclus dans un lotissement, la demande est accompagnée, s'il y a lieu, du ou des certificats prévus à l'article R. 442-11. " et aux termes de l'article R. 442-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque la répartition de la surface de plancher maximale est effectuée par le lotisseur, celui-ci fournit aux attributaires de lots un certificat indiquant la surface de plancher constructible sur le lot. / Dans ce cas, lorsque le versement pour sous-densité prévu à l'article L. 331-36 est institué dans le secteur où est situé le projet, le lotisseur fournit également aux attributaires de lots un certificat indiquant la surface de plancher résultant du seuil minimal de densité. / Ces certificats sont joints à la demande de permis de construire. ". Par ailleurs aux termes de l'article R. 442-10 du même code : " Pour les lotissements soumis à permis d'aménager, la surface de plancher maximale autorisée ainsi que les majorations des règles relatives au gabarit et à la densité prévues par le 3° de l'article L. 151-28 et le deuxième alinéa de l'article L. 151-29 peuvent être réparties entre les différents lots soit par le permis d'aménager, soit par le lotisseur à l'occasion de la vente ou de la location des lots. (...) ".

13. Ainsi qu'il a été exposé le terrain d'assiette du projet contesté est localisé au sein du lotissement du Cofréno dont le règlement comprend en son point 14, dans le respect de l'article R. 442-10 du code de l'urbanisme, un tableau des surfaces de plancher maximales autorisées par lot. Ce règlement prévoit pour le lot n° 5 en débat une surface de plancher maximale autorisée de 150 m². S'il ne ressort pas des pièces du dossier que le certificat précisant la surface de plancher constructible sur le lot requis par application des articles R. 431-22 et R. 442-11 figurait dans le dossier de demande de permis de construire déposé par M. et Mme E..., cette demande portait sur une construction d'une surface de plancher de 83,70 m². Par suite, dès lors que cette surface est largement inférieure au plafond autorisé par le règlement du lotissement, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'absence au dossier du certificat prévu par l'article R. 442-11 du code de l'urbanisme ait empêché le maire de la commune de Pénestin de prendre sa décision en toute connaissance des règles applicables. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-22 du code de l'urbanisme est écarté.

14. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 431-22-1 du code de l'urbanisme : " Lorsque les travaux projetés portent sur une construction à édifier sur un terrain inclus dans un lotissement soumis à permis d'aménager, la demande est accompagnée, s'il y a lieu : a) Du certificat prévu par le quatrième alinéa de l'article R. 442-18, quand l'ensemble des travaux mentionnés dans le permis d'aménager n'est pas achevé ; (...) " et aux termes de l'article R. 442-18 du même code : " Le permis de construire des bâtiments sur les lots d'un lotissement autorisé par un permis d'aménager peut être accordé / ...b) Soit à compter de la délivrance de l'autorisation de procéder à la vente ou à la location des lots avant exécution des travaux, à condition que les équipements desservant le lot soient achevés. / Dans ce cas, le lotisseur fournit à l'acquéreur un certificat attestant, sous sa responsabilité, l'achèvement de ces équipements. Ce certificat est joint à la demande de permis. (...) ".

15. Par un arrêté du 9 mai 2017 le maire de Pénestin a autorisé l'aménageur du lotissement du Cofréno à procéder à la vente du lot n° 5 supportant la construction en litige en indiquant que les permis de construire ne pourront être délivrés pour les constructions à édifier au sein du lotissement avant que les équipements desservant le lot soient achevés. L'association appelante soutient que divers travaux d'équipement desservant le lotissement n'étaient pas achevés à la date de délivrance du permis de construire contesté. Il ressort toutefois de l'attestation du 21 décembre 2016 jointe au dossier de demande de permis de construire que le lotisseur a attesté, sous sa responsabilité, de " l'achèvement des équipements desservant les lots n° 1 à 22 tels qu'ils ont été autorisés par le permis d'aménager accordé le 2 juin 2015 ". Dans ces conditions, eu égard à cette attestation du lotisseur, le moyen tiré de la composition irrégulière du dossier de demande de permis de construire contesté au regard des articles R. 431-22-1 et R. 422-18 du code de l'urbanisme est écarté.

16. En sixième lieu, la commune de Pénestin étant dotée d'un plan local d'urbanisme, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme est inopérant en application des dispositions de l'article R. 111-1 du même code.

17. En septième lieu, aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme : " L'extension de l'urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants. (...) ".

18. Il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions. En revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages. Par ailleurs, l'autorité administrative chargée de se prononcer sur une demande d'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol s'assure, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de la conformité du projet avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral.

19. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle d'assiette de la construction en litige est située au sein d'une zone naturelle d'environ 1,4 hectares, pour laquelle un permis d'aménager un lotissement de vingt-deux lots a été accordé le 2 juin 2015 par un arrêté du maire de Pénestin devenu définitif à défaut d'avoir été contesté. La parcelle d'assiette en litige est contiguë, sur sa limite ouest en direction de la mer, à un secteur groupant une vingtaine de maisons d'habitations, dont certaines mitoyennes du terrain d'assiette du projet et densément implantées en partie nord, sises le long de trois voies. Cette même parcelle n'est séparée que de quelques dizaines de mètres d'une zone comprenant plusieurs dizaines de maisons regroupées, situées à l'est et au sud, le long essentiellement des allées de la Grande Ile et du Cofréno, et dont certaines sont implantées sur plusieurs rangs. L'ensemble ainsi considéré constitue une agglomération, distincte du centre-bourg de la commune, au sens des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions est écarté.

20. En huitième lieu, aux termes de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés au 1° de l'article L. 321-2 du code de l'environnement est justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. (...) ".

21. Une opération qu'il est projeté de réaliser en agglomération ou, de manière générale, dans des espaces déjà urbanisés ne peut être regardée comme une "extension de l'urbanisation" que si elle conduit à étendre ou à renforcer de manière significative l'urbanisation de quartiers périphériques ou si elle modifie de manière importante les caractéristiques d'un quartier, notamment en augmentant sensiblement la densité des constructions. En revanche, la seule réalisation dans un quartier urbain d'un ou plusieurs bâtiments qui est une simple opération de construction ne peut être regardée comme constituant une extension au sens de la loi.

22. Il ressort des pièces du dossier d'une part que le terrain d'assiette du projet, situé à moins de 400 mètres du rivage dont il n'est séparé que par quelques maisons d'habitation et une vaste zone naturelle, appartient à un espace proche du rivage au sens de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme. La maison individuelle autorisée se situe au centre de la zone agglomérée identifiée au point 19, en limite immédiate de trois parcelles construites, et est d'une surface de plancher limitée de 83,70 m². Par suite, le projet n'étend pas de manière significative l'urbanisation du secteur dans lequel il s'insère, ni n'en modifie de manière importante les caractéristiques. Dès lors, il doit être regardé comme une simple opération de construction et non comme une extension de l'urbanisation au sens des dispositions précitées de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme. Le moyen tiré de la violation de cet article est en conséquence écarté.

23. En neuvième lieu, aux termes de l'article L. 600-12 du code de l'urbanisme : " Sous réserve de l'application des articles L. 600-12-1 et L. 442-14, l'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le plan local d'urbanisme, le document d'urbanisme en tenant lieu ou la carte communale immédiatement antérieur. " et aux termes de l'article L. 600-12-1 du même code : " L'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale sont par elles-mêmes sans incidence sur les décisions relatives à l'utilisation du sol ou à l'occupation des sols régies par le présent code délivrées antérieurement à leur prononcé dès lors que ces annulations ou déclarations d'illégalité reposent sur un motif étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet. (...) ".

24. Il résulte de l'article L. 600-12-1 que l'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un document local d'urbanisme n'entraine pas l'illégalité des autorisations d'urbanisme délivrées lorsque cette annulation ou déclaration d'illégalité repose sur un motif étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet en cause. Il appartient au juge, saisi d'un moyen tiré de l'illégalité du document local d'urbanisme à l'appui d'un recours contre une autorisation d'urbanisme, de vérifier d'abord si l'un au moins des motifs d'illégalité du document local d'urbanisme est en rapport direct avec les règles applicables à l'autorisation d'urbanisme. Un vice de légalité externe est étranger à ces règles, sauf s'il a été de nature à exercer une influence directe sur des règles d'urbanisme applicables au projet. En revanche, sauf s'il concerne des règles qui ne sont pas applicables au projet, un vice de légalité interne ne leur est pas étranger.

25. Lorsque le document local d'urbanisme sous l'empire duquel a été délivrée l'autorisation contestée est annulé ou déclaré illégal pour un ou plusieurs motifs non étrangers aux règles applicables au projet en cause, la détermination du document d'urbanisme au regard duquel doit être appréciée la légalité de cette autorisation obéit, eu égard aux effets de la règle posée à l'article L. 600-12 du code de l'urbanisme, aux règles suivantes : - dans le cas où ce ou ces motifs affectent la légalité de la totalité du document d'urbanisme, la légalité de l'autorisation contestée doit être appréciée au regard de l'ensemble du document immédiatement antérieur ainsi remis en vigueur ; - lorsque ce ou ces motifs affectent seulement une partie divisible du territoire que couvre le document local d'urbanisme, ce sont les dispositions du document immédiatement antérieur relatives à cette zone géographique qui sont remises en vigueur ; - si ce ou ces motifs n'affectent que certaines règles divisibles du document d'urbanisme, la légalité de l'autorisation contestée n'est appréciée au regard du document immédiatement antérieur que pour les seules règles équivalentes nécessaires pour assurer le caractère complet et cohérent du document. En outre, lorsqu'un motif d'illégalité non étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet est susceptible de conduire à remettre en vigueur tout ou partie du document local d'urbanisme immédiatement antérieur, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du document local d'urbanisme à l'appui d'un recours en annulation d'une autorisation d'urbanisme ne peut être utilement soulevé que si le requérant soutient également que cette autorisation méconnaît les dispositions pertinentes ainsi remises en vigueur.

26. L'association requérante soutient, par la voie de l'exception, que le classement en secteur Ubb de la zone dite du Lomer au plan local d'urbanisme de la commune de Pénestin, ainsi que la définition d'une orientation d'aménagement n° 1 dans ce même document, méconnaîtraient l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme, faute de qualifier la totalité de cette zone comme appartenant à un espace proche du rivage et par suite de justifier et motiver l'extension de l'urbanisation ainsi permise. Il est également soutenu que ce classement et cette orientation sont contraires au principe posé par le plan local d'urbanisme d'interdire toute extension spatiale de l'urbanisation en espaces proches du rivage, que ces choix d'urbanisme conduisent à une extension non limitée de l'urbanisation et qu'ils permettent à la commune de se dispenser d'appliquer certaines règles, dont celles régissant les coefficients d'emprise au sol, opposables en espaces proches du rivage. Il est enfin soutenu que les dispositions antérieures remises alors en vigueur du fait de l'illégalité de ces dispositions du plan local d'urbanisme interdisent l'autorisation contestée au regard de ses dispositions relatives aux clôtures et que ce document d'urbanisme est par ailleurs contraire aux dispositions de la loi Littoral, dont l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme.

27. Il résulte de ce qui a été exposé au point 22 que les autorisations de construire contestées ne s'analysent pas comme des extensions de l'urbanisation au sens de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme. Par voie de conséquence le moyen, soulevé par la voie de l'exception, tiré de l'illégalité du plan local d'urbanisme de la commune de Pénestin en tant qu'il n'inclut pas les parcelles en litige en espace proche du rivage où l'extension de l'urbanisation est limitée, repose sur un motif étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet. Il est donc inopérant et ne peut qu'être écarté.

28. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine ", que cette association n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juillet 2017 du maire de Pénestin accordant à M. et Mme E... un permis de construire pour une maison individuelle sur le lot n° 5 compris au sein du lotissement du Cofréno.

Sur les frais d'instance :

29. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine ". Dans les circonstances de l'espèce il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes présentées sur le même fondement par la commune de Pénestin, Mme F... D... et l'AFUL du Loguy.

D E C I D E :

Article 1er : L'intervention de l'association foncière urbaine libre du Loguy est admise.

Article 2 : La requête de l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Pénestin, Mme F... D... et l'AFUL du Loguy sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine ", à la commune de Pénestin, à Mme F... D..., à M. et Mme A... E... et à l'association foncière urbaine libre du Loguy.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- M. Frank, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 novembre 2022.

Le rapporteur,

C. C...

Le président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT02728


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02728
Date de la décision : 22/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : DUBREUIL

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-11-22;20nt02728 ?
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