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22/11/2022 | FRANCE | N°22NT00226

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 22 novembre 2022, 22NT00226


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " a demandé au tribunal administratif de Rennes :

. sous le n° 1902835, d'annuler l'arrêté du 8 février 2019 par lequel le maire de la commune de Pénestin (Morbihan) a délivré à la SARL Loti Ouest Atlantique un permis de construire pour une maison individuelle sur le lot n° 12 du lotissement du Cofréno, ainsi que la décision rejetant son recours gracieux ;

. sous le n° 1902836, d'annuler l'arrêté du 8 février 2019 par lequel le m

aire de la commune de Pénestin a délivré à la SARL Loti Ouest Atlantique un permis de const...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " a demandé au tribunal administratif de Rennes :

. sous le n° 1902835, d'annuler l'arrêté du 8 février 2019 par lequel le maire de la commune de Pénestin (Morbihan) a délivré à la SARL Loti Ouest Atlantique un permis de construire pour une maison individuelle sur le lot n° 12 du lotissement du Cofréno, ainsi que la décision rejetant son recours gracieux ;

. sous le n° 1902836, d'annuler l'arrêté du 8 février 2019 par lequel le maire de la commune de Pénestin a délivré à la SARL Loti Ouest Atlantique un permis de construire pour une maison individuelle sur le lot n° 13 du lotissement du Cofréno, ainsi que la décision rejetant son recours gracieux ;

. sous le n° 1902837, d'annuler l'arrêté du 8 février 2019 par lequel le maire de la commune de Pénestin a délivré à la SARL Loti Ouest Atlantique un permis de construire pour une maison individuelle sur le lot n° 14 du lotissement du Cofréno, ainsi que la décision rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n°s 1902835, 1902836, 1902837 du 25 novembre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 25 janvier et 7 juillet 2022, l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine ", représentée par Me Dubreuil, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 novembre 2021 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler les trois arrêtés du 8 février 2019 du maire de la commune de Pénestin par lesquels il a accordé à la SARL Loti Ouest Atlantique des permis de construire pour des maisons individuelles d'habitation respectivement sur les lots n° 12, n° 13 et n° 14 du lotissement du Cofréno ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Pénestin la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son action est recevable eu égard à son objet statutaire et à la localisation des permis de construire contestés en zone d'urbanisation diffuse ;

- les arrêtés contestés sont intervenus en violation des articles L. 422-1 et L. 422-27 du code de l'urbanisme en l'absence de publicité de l'arrêté de délégation et du conflit d'intérêts du maire et de son adjoint signataire du fait de leur qualité de membres de l'association foncière urbaine du Loguy ;

- les décisions sont intervenues en violation de l'article R. 431-22 du code de l'urbanisme faute de tout certificat précisant la surface constructible par lot ;

- les arrêtes méconnaissent les articles R. 431-22-1 et R. 442-18 b) du code de l'urbanisme en l'absence de production de certificats attestant de l'achèvement des travaux du permis d'aménager ;

- les décisions sont intervenues en violation de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dès lors que le secteur est séparé de l'agglomération centrale de la commune ; la zone UB d'implantation constitue une poche d'urbanisation qui comporte en son centre un vaste espace non construit qui constitue une rupture d'urbanisation ; la densité des constructions en son pourtour est faible ; le secteur ne constitue pas un village ou une agglomération, sans qu'il y ait lieu de prendre en compte l'existence de maisons mitoyennes, de voies ou le SCOT qui a été adopté avant la nouvelle rédaction de l'article L. 121-3 du code de l'urbanisme ;

- les arrêtés sont intervenus en violation de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme dès lors qu'ils constituent une extension de l'urbanisation dans une zone d'urbanisation diffuse appartenant à un espace proche du rivage ; le plan local d'urbanisme ne justifie pas et ne motive pas une telle extension et l'urbanisation autorisée n'est pas conforme au schéma de cohérence territoriale de 2011 ; l'accord du préfet n'a pas été sollicité ; il convient de prendre en compte les permis déjà délivrés, dont le permis d'aménager délivré pour 22 lots ;

- ils sont illégaux en conséquence de l'illégalité du classement en zone UBb au plan local d'urbanisme de la zone du Lomer et de l'orientation n° 1 du plan local d'urbanisme dont relève le projet ; le secteur UBb est entièrement compris dans un espace proche du rivage ; pour sa partie admise comme appartenant à un tel espace la motivation figurant au plan local d'urbanisme est insuffisante ; il existe une contradiction entre le principe général interdisant toute extension spatiale de l'urbanisation et la création d'une zone UBb au Lomer par l'orientation d'aménagement n° 1 ; l'extension de l'urbanisation prévue en conséquence n'est en tout état de cause pas limitée ; le plan local d'urbanisme est illégal en ce qu'il autorise un coefficient d'emprise au sol et des hauteurs supérieures à celles autorisées en espace proche du rivage, alors que toute la zone appartient à un tel espace proche du rivage ; au regard de l'article L. 600-12 du code de l'urbanisme le plan d'occupation des sols de 1984 alors applicable est également illégal au regard de la loi littoral dès lors qu'il crée une vaste zone UCb qui n'est pas en continuité avec une agglomération ou un village en méconnaissance de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme et il ne délimite pas d'espaces proches du rivage ; les dispositions du règlement national d'urbanisme s'opposent alors aux constructions autorisées.

Par des mémoires enregistrés les 4 mai et 20 juillet 2022, la société Loti Ouest Atlantique, représentée par Me Marchand, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable faute d'intérêt à agir de l'association requérante ;

- tous les moyens soulevés au titre de la loi " littoral " sont inopérants dès lors que l'extension de l'urbanisation ne résulte pas des permis de construire mais du permis d'aménager du 2 juin 2015 devenu définitif ;

- subsidiairement, les moyens soulevés par l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense enregistrés les 19 mai et 22 juillet 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la commune de Pénestin, représentée par Me Le Derf-Daniel, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- et les observations de Me Dubreuil, représentant l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine ", et de Me Balloul substituant Me Le Derf-Daniel, représentant la commune de Pénestin.

Considérant ce qui suit :

1. La société Loti Ouest Atlantique a présenté trois demandes de permis de construire pour trois maisons individuelles sur les lots n° 12, 13 et 14 du lotissement du Cofréno à Pénestin (Morbihan). Le maire de la commune a délivré les trois permis de construire sollicités le 8 février 2019. L'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " a saisi le maire de Pénestin de recours gracieux tendant au retrait de ces autorisations le 2 avril 2019. Ces demandes ont été implicitement rejetées. Par un jugement du 25 novembre 2021, dont l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " relève appel, le tribunal administratif de Rennes a rejeté les demandes de l'association tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente pour délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l'objet d'une déclaration préalable est : / a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu (...). ".

3. Les arrêtés contestés ont été signés par M. A... alors adjoint au maire de Pénestin en charge de l'urbanisme. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressé disposait d'une délégation à cet effet, accordée par le maire de la commune le 15 avril 2014. Cet arrêté de délégation a été reçu le même jour en préfecture et affiché en mairie du 16 avril au 16 juin 2014, ainsi qu'il résulte d'une attestation du maire de cette commune du 4 novembre 2019 faisant foi jusqu'à preuve du contraire. Dès lors le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté doit être écarté comme manquant en fait.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme : " Si le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est intéressé au projet faisant l'objet de la demande de permis ou de la déclaration préalable, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune ou l'organe délibérant de l'établissement public désigne un autre de ses membres pour prendre la décision. ". Aux termes de l'article L. 322-1 de ce code : " Les associations foncières urbaines sont des associations syndicales régies par les dispositions de l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires ainsi que par celles de la présente section, constituées entre propriétaires intéressés pour l'exécution des travaux et opérations énumérés à l'article L. 322-2. ".

5. L'association requérante soutient que l'adjoint au maire de la commune de Pénestin, signataire des arrêtés contestés, tout comme le maire de cette commune, étaient intéressés aux projets contestés dès lors qu'ils sont membres du bureau de l'association foncière libre (AFUL) du Loguy, bénéficiaire du permis d'aménager délivré pour la réalisation du lotissement au sein duquel les trois constructions ont été autorisées. Il ressort des pièces du dossier que l'AFUL du Loguy a été constituée en 2014, afin notamment de procéder au réaménagement foncier de diverses parcelles situées au lieu-dit le Loguy dans la perspective de réaliser un lotissement et qu'elle a conclu le 11 février 2014 avec la commune de Pénestin une convention dont il ressort que " L'aménagement foncier a attribué à la commune la parcelle ZO 35 à usage de desserte pour les parcelles de la zone. Cette parcelle est incluse dans le périmètre de l'AFUL, elle constitue un apport et autorise de fait la commune à devenir membre et à participer au projet au même titre que les autres propriétaires. Par délibération du Conseil Municipal en date du 5 août 2013, il a été approuvé à l'unanimité l'adhésion de la commune de Pénestin à l'AFUL du Loguy. ". La circonstance qu'en conséquence de cette convention le maire et son adjoint signataire du permis de construire contesté sont devenus membres du bureau de cette AFUL ne saurait les faire regarder, au sens des dispositions précitées de l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme, comme intéressés aux projets de construction ici en cause, autorisés au bénéfice de tiers. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 422-1 et L. 422-7 du code de l'urbanisme est écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 431-22 du code de l'urbanisme : " Lorsque les travaux projetés portent sur une construction à édifier sur un terrain inclus dans un lotissement, la demande est accompagnée, s'il y a lieu, du ou des certificats prévus à l'article R. 442-11. " et aux termes de l'article R. 442-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque la répartition de la surface de plancher maximale est effectuée par le lotisseur, celui-ci fournit aux attributaires de lots un certificat indiquant la surface de plancher constructible sur le lot. / Dans ce cas, lorsque le versement pour sous-densité prévu à l'article L. 331-36 est institué dans le secteur où est situé le projet, le lotisseur fournit également aux attributaires de lots un certificat indiquant la surface de plancher résultant du seuil minimal de densité. / Ces certificats sont joints à la demande de permis de construire. ". Par ailleurs aux termes de l'article R. 442-10 du même code : " Pour les lotissements soumis à permis d'aménager, la surface de plancher maximale autorisée ainsi que les majorations des règles relatives au gabarit et à la densité prévues par le 3° de l'article L. 151-28 et le deuxième alinéa de l'article L. 151-29 peuvent être réparties entre les différents lots soit par le permis d'aménager, soit par le lotisseur à l'occasion de la vente ou de la location des lots. (...) ".

7. Ainsi qu'il a été exposé les terrains d'assiette des projets contestés sont localisés au sein du lotissement du Cofréno, dont le règlement comprend en son point 14, dans le respect de l'article R. 442-10 du code de l'urbanisme, un tableau des surfaces de plancher maximales autorisées par lot. Ce règlement prévoit ainsi pour les lots n°s 12, 13 et 14 en débat, des surfaces de plancher maximales autorisées respectivement de 200, 200 et 175 m². S'il ne ressort pas des pièces du dossier que le certificat précisant les surfaces de plancher constructibles sur chacun des trois lots requis par application des articles R. 431-22 et R. 442-11 figurait dans chacun des dossiers de demande de permis de construire déposés par la société Loti Ouest Atlantique, ces demandes portaient respectivement sur la construction d'une maison individuelle d'une surface de plancher de 93,60 m², de 93,60 m² et de 95,50 m². Par suite, dès lors que ces surfaces sont largement inférieures aux plafonds autorisés par le règlement du lotissement, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'absence aux dossiers du certificat prévu par l'article R. 442-11 du code de l'urbanisme ait empêché le maire de la commune de Pénestin de prendre ses décisions en toute connaissance des règles applicables. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-22 du code de l'urbanisme est écarté.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 431-22-1 du code de l'urbanisme : " Lorsque les travaux projetés portent sur une construction à édifier sur un terrain inclus dans un lotissement soumis à permis d'aménager, la demande est accompagnée, s'il y a lieu : a) Du certificat prévu par le quatrième alinéa de l'article R. 442-18, quand l'ensemble des travaux mentionnés dans le permis d'aménager n'est pas achevé ; (...) " et aux termes de l'article R. 442-18 du même code : " Le permis de construire des bâtiments sur les lots d'un lotissement autorisé par un permis d'aménager peut être accordé / (...) b) Soit à compter de la délivrance de l'autorisation de procéder à la vente ou à la location des lots avant exécution des travaux, à condition que les équipements desservant le lot soient achevés. / Dans ce cas, le lotisseur fournit à l'acquéreur un certificat attestant, sous sa responsabilité, l'achèvement de ces équipements. Ce certificat est joint à la demande de permis. (...) ".

9. Par un arrêté du 9 mai 2017 le maire le maire de Pénestin a autorisé l'aménageur du lotissement du Cofréno à procéder à la vente des lots n°s 12, 13 et 14 supportant les constructions en litige, en indiquant que les permis de construire ne pourront être délivrés pour les constructions à édifier au sein du lotissement avant que les équipements desservant les lots soient achevés. L'association appelante soutient que divers travaux d'équipement desservant le lotissement n'étaient pas achevés à la date de délivrance des permis de construire contestés. Il est cependant constant que par une attestation du 21 décembre 2016, jointe aux dossiers de demande de permis de construire, le lotisseur a attesté, sous sa responsabilité, de " l'achèvement des équipements desservant les lots n° 1 à 22 tels qu'ils ont été autorisés par le permis d'aménager accordé le 2 juin 2015 ". Dans ces conditions, eu égard à cette attestation du lotisseur, le moyen tiré de la composition irrégulière des dossiers de demande de permis de construire contestés au regard des articles R. 431-22-1 et R. 442-18 du code de l'urbanisme est écarté.

10. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme : " L'extension de l'urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants. (...) ".

11. Il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions. En revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages. Par ailleurs, l'autorité administrative s'assure de la conformité d'une autorisation d'urbanisme avec l'article L. 121-8 de ce code compte tenu des dispositions du schéma de cohérence territoriale applicable déterminant les critères d'identification des villages, agglomérations et autres secteurs déjà urbanisés et définissant leur localisation, dès lors qu'elles sont suffisamment précises et compatibles avec les dispositions législatives particulières au littoral.

12. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles d'assiette des constructions en litige sont situées au sein d'une zone naturelle d'environ 1,4 hectares, sur laquelle un permis d'aménager un lotissement de vingt-deux lots a été accordé par un arrêté du 2 juin 2015 non contesté du maire de Pénestin. Ces trois parcelles sont contiguës et sont toutes mitoyennes de parcelles supportant à l'est des maisons d'habitation situées le long de l'allée de la Grande Ile, laquelle présente sur ses abords une urbanisation dense avec, sur sa partie est, des parcelles construites sur plusieurs rangs. Ces trois parcelles sont également localisées, sur leur flanc nord-ouest, à quelques dizaines de mètres de maisons d'habitation comprises dans un ensemble d'une vingtaine de maisons implantées densément le long des allées de la Grande Ile, des Alouettes et de la Lande du Loguy. L'ensemble ainsi considéré constitue une agglomération, distincte du centre-bourg de la commune, au sens des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme. Par suite, et eu égard aux dispositions du schéma de cohérence territoriale de Cap Atlantique opposable en l'espèce, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions est écarté.

13. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme : " L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés au 1° de l'article L. 321-2 du code de l'environnement est justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. (...) ".

14. Une opération qu'il est projeté de réaliser en agglomération ou, de manière générale, dans des espaces déjà urbanisés ne peut être regardée comme une "extension de l'urbanisation" que si elle conduit à étendre ou à renforcer de manière significative l'urbanisation de quartiers périphériques ou si elle modifie de manière importante les caractéristiques d'un quartier, notamment en augmentant sensiblement la densité des constructions. En revanche, la seule réalisation dans un quartier urbain d'un ou plusieurs bâtiments qui est une simple opération de construction ne peut être regardée comme constituant une extension au sens de la loi.

15. Il ressort des pièces du dossier d'une part que les trois terrains d'assiette des projets, situés à environ 350 mètres du rivage dont ils ne sont séparés que par quelques maisons d'habitation et une vaste zone naturelle, appartiennent à un espace proche du rivage au sens de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme. Les maisons individuelles autorisées se situent au centre de la zone agglomérée identifiée au point 12, en limite immédiate de deux parcelles construites, et sont d'une surface de plancher comprise entre 93,60 m² et 95,50 m². Par suite, ces trois projets n'étendent pas de manière significative l'urbanisation du secteur dans lequel ils s'insèrent, ni n'en modifient de manière importante les caractéristiques. Dès lors, ils doivent être regardés comme de simples opérations de construction et non comme des extensions de l'urbanisation au sens des dispositions précitées de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme. Alors qu'il n'y a pas lieu par ailleurs dans la présente instance d'examiner la légalité de l'arrêté du 2 juin 2015 du maire de Pénestin autorisant l'aménagement du lotissement du Cofréno, lequel est devenu définitif, le moyen tiré de la violation de cet article est en conséquence écarté.

16. En septième lieu, aux termes de l'article L. 600-12 du code de l'urbanisme : " Sous réserve de l'application des articles L. 600-12-1 et L. 442-14, l'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le plan local d'urbanisme, le document d'urbanisme en tenant lieu ou la carte communale immédiatement antérieur. " et aux termes de l'article L. 600-12-1 du même code : " L'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale sont par elles-mêmes sans incidence sur les décisions relatives à l'utilisation du sol ou à l'occupation des sols régies par le présent code délivrées antérieurement à leur prononcé dès lors que ces annulations ou déclarations d'illégalité reposent sur un motif étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet. (...) ".

17. Il résulte de l'article L. 600-12-1 que l'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un document local d'urbanisme n'entraine pas l'illégalité des autorisations d'urbanisme délivrées lorsque cette annulation ou déclaration d'illégalité repose sur un motif étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet en cause. Il appartient au juge, saisi d'un moyen tiré de l'illégalité du document local d'urbanisme à l'appui d'un recours contre une autorisation d'urbanisme, de vérifier d'abord si l'un au moins des motifs d'illégalité du document local d'urbanisme est en rapport direct avec les règles applicables à l'autorisation d'urbanisme. Un vice de légalité externe est étranger à ces règles, sauf s'il a été de nature à exercer une influence directe sur des règles d'urbanisme applicables au projet. En revanche, sauf s'il concerne des règles qui ne sont pas applicables au projet, un vice de légalité interne ne leur est pas étranger.

18. Lorsque le document local d'urbanisme sous l'empire duquel a été délivrée l'autorisation contestée est annulé ou déclaré illégal pour un ou plusieurs motifs non étrangers aux règles applicables au projet en cause, la détermination du document d'urbanisme au regard duquel doit être appréciée la légalité de cette autorisation obéit, eu égard aux effets de la règle posée à l'article L. 600-12 du code de l'urbanisme, aux règles suivantes : - dans le cas où ce ou ces motifs affectent la légalité de la totalité du document d'urbanisme, la légalité de l'autorisation contestée doit être appréciée au regard de l'ensemble du document immédiatement antérieur ainsi remis en vigueur ; - lorsque ce ou ces motifs affectent seulement une partie divisible du territoire que couvre le document local d'urbanisme, ce sont les dispositions du document immédiatement antérieur relatives à cette zone géographique qui sont remises en vigueur ; - si ce ou ces motifs n'affectent que certaines règles divisibles du document d'urbanisme, la légalité de l'autorisation contestée n'est appréciée au regard du document immédiatement antérieur que pour les seules règles équivalentes nécessaires pour assurer le caractère complet et cohérent du document. En outre, lorsqu'un motif d'illégalité non étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet est susceptible de conduire à remettre en vigueur tout ou partie du document local d'urbanisme immédiatement antérieur, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du document local d'urbanisme à l'appui d'un recours en annulation d'une autorisation d'urbanisme ne peut être utilement soulevé que si le requérant soutient également que cette autorisation méconnaît les dispositions pertinentes ainsi remises en vigueur.

19. L'association requérante soutient, par la voie de l'exception, que le classement en secteur Ubb de la zone dite du Lomer au plan local d'urbanisme de la commune de Pénestin, ainsi que la définition d'une orientation d'aménagement n° 1 dans ce même document, méconnaîtraient l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme, faute de qualifier la totalité de cette zone comme appartenant à un espace proche du rivage et par suite de justifier et motiver l'extension de l'urbanisation ainsi permise. Il est également soutenu que ce classement et cette orientation sont contraires au principe, posé par le plan local d'urbanisme, d'interdire toute extension spatiale de l'urbanisation en espaces proches du rivage, que ces choix d'urbanisme conduisent à une extension non limitée de l'urbanisation et qu'ils permettent à la commune de se dispenser d'appliquer certaines règles, dont celles régissant les coefficients d'emprise au sol, opposables en espaces proches du rivage. Il est enfin soutenu que les dispositions antérieures remises alors en vigueur du fait de l'illégalité de ces dispositions du plan local d'urbanisme interdisent l'autorisation contestée au regard de ses dispositions relatives aux clôtures et que ce document d'urbanisme est par ailleurs contraire aux dispositions de la loi littorale, dont l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme.

20. Il résulte de ce qui a été exposé au point 15 que les autorisations de construire contestées ne s'analysent pas comme des extensions de l'urbanisation au sens de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme. Par voie de conséquence le moyen, soulevé par la voie de l'exception, tiré de l'illégalité du plan local d'urbanisme de la commune de Pénestin en tant qu'il n'inclut pas les parcelles en litige en espace proche du rivage où l'extension de l'urbanisation est limitée, repose sur un motif étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet. Il est donc inopérant et ne peut qu'être écarté.

21. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir tirée de l'absence d'intérêt à agir de l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine ", que cette association n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des trois arrêtés du 8 février 2019 du maire de Pénestin accordant à la société Loti Ouest Atlantique trois permis de construire des maisons individuelles sur les lots n° 12, 13 et 14 compris au sein du lotissement du Cofréno.

Sur les frais d'instance :

22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine ". Dans les circonstances de l'espèce il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes présentées sur le même fondement par la commune de Pénestin et la société Loti Ouest Atlantique.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine " est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Pénestin et par la société Loti Ouest Atlantique sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association " Les amis du pays entre Mès et Vilaine ", à la commune de Pénestin et à la société Loti Ouest Atlantique.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- M. Frank, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 novembre 2022.

Le rapporteur,

C. B...

Le président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT00226


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT00226
Date de la décision : 22/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : SELARL CORNET VINCENT SEGUREL

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-11-22;22nt00226 ?
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