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13/01/2023 | FRANCE | N°22NT03018

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 13 janvier 2023, 22NT03018


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 19 août 2022 par laquelle le préfet de l'Orne l'a obligé à quitter le territoire sans délai et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit.

Par un jugement n° 2201969 du 13 septembre 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 septembre 2022, M. D..., représenté par Me Bisalu, demande à la cour :

1°)

d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 13 septembre 2022 ;

2°) d'annuler la décisi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 19 août 2022 par laquelle le préfet de l'Orne l'a obligé à quitter le territoire sans délai et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit.

Par un jugement n° 2201969 du 13 septembre 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 septembre 2022, M. D..., représenté par Me Bisalu, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 13 septembre 2022 ;

2°) d'annuler la décision du 19 août 2022 du préfet de l'Orne ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Orne ou à l'autorité territorialement compétente de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lui est bien applicable, dès lors qu'il justifie résider en France depuis plus de dix ans et qu'il pouvait solliciter un titre de séjour sur le fondement des articles L. 423-12 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la commission du titre de séjour aurait dû être consultée en application de l'article L. 423-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision attaquée méconnaît l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ainsi que le 6° de l'article L. 511-4 devenu 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle porte enfin une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, dès lors que la menace à l'ordre public qu'il représenterait n'est pas établie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 octobre 2022, le préfet de l'Orne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par B... ne sont pas fondés.

Vu les pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 20 juin 1985, entré en France en 2008, a été titulaire d'une carte de résident d'une durée de dix ans valable du 18 novembre 2008 au 17 novembre 2018. Il a été incarcéré en 2018 en exécution d'une peine de cinq ans de prison confirmée par arrêt de la cour d'appel de Versailles du 25 février 2019. Pendant l'exécution de cette peine, le préfet de l'Orne, constatant l'irrégularité de sa situation administrative, a informé M. B... qu'eu égard aux condamnations pénales prononcées à son encontre, il était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français, éventuellement assortie d'une interdiction de retour en France. Après l'avoir fait entendre par un agent de la préfecture, le préfet de l'Orne, par une décision du 19 août 2022, a obligé M. B... à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il serait éloigné d'office, et lui a interdit le retour en France pour une durée de trois ans. Par un jugement du 13 septembre 2022, dont M. B... relève appel, le président du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 19 août 2022.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) /5° Le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public ; ".

3. En premier lieu, en vertu des dispositions de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet est tenu de consulter la commission du titre de séjour lorsqu'il envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour prévus notamment par les articles L. 423-12 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou lorsqu'il statue sur une demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par un étranger justifiant de plus de dix ans de présence sur le territoire. Toutefois, par l'arrêté attaqué, le préfet de l'Orne n'a pas refusé à M. B... ni la délivrance d'un titre de séjour ni son admission au séjour à titre exceptionnel mais s'est borné à prendre à son encontre, sur le fondement des dispositions citées au point précédent, une obligation de quitter le territoire français au motif que son comportement constituait une menace pour l'ordre public. Dès lors, le requérant ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; "

5. En l'espèce, contrairement à ce qu'il indique, M. B... n'apporte pas d'élément pour justifier qu'il contribue à l'éducation et à l'entretien de son enfant de nationalité française, ni qu'il a maintenu avec lui des liens affectifs. Il ressort à cet égard des pièces du dossier, en particulier du rapport établi par le service pénitentiaire d'insertion et de probation qui l'a suivi en détention, que M. B... n'a plus de nouvelles de son fils depuis son incarcération en 2018. Dès lors, l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre ne méconnaît ni l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, ni le 5° de l'article L. 611-3 cités au point précédent.

6. En troisième lieu, s'il ressort des pièces du dossier que M. B... réside depuis 2008 sur le territoire français et qu'il a bénéficié à son arrivée d'une carte de résident valable jusqu'en 2018, il ressort de ces mêmes pièces que le requérant a été condamné à deux reprises à des peines d'emprisonnement pour des faits de violences sur conjoint ou concubin, par jugements des tribunaux correctionnels de Paris et de Pontoise des 29 octobre 2015 et 15 mars 2018, et qu'il a en outre été condamné par arrêt de la cour d'appel de Versailles du 25 février 2019 à une peine de cinq ans d'emprisonnement pour des faits d'agression sexuelle. En dépit de l'ancienneté de son séjour sur le territoire, il ne justifie d'aucune insertion professionnelle. En outre, ainsi qu'il a été dit au point précédent, il n'apporte pas d'éléments pour justifier qu'il contribuerait à l'entretien et à l'éducation de son enfant de nationalité française, ni qu'il aurait maintenu des liens avec cet enfant. Au regard de l'ensemble de ces éléments, et alors qu'il a aussi dans son pays d'origine un autre enfant mineur, la mesure d'éloignement litigieuse n'a pas porté une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquelles elle a été prise. Elle ne méconnaît donc pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que sa demande présentée au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article

37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Une copie en sera adressée, pour information, au préfet de l'Orne.

Délibéré après l'audience du 15 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi, président

- Mme Brisson, présidente-assesseure,

- Mme Lellouch, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 janvier 2023.

La rapporteure,

J. C...

Le président,

D. Salvi

La greffière,

A. Martin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT03018


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03018
Date de la décision : 13/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: Mme Judith LELLOUCH
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : BISALU

Origine de la décision
Date de l'import : 18/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-01-13;22nt03018 ?
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