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25/04/2023 | FRANCE | N°22NT03793

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 25 avril 2023, 22NT03793


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2022 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités portugaises, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2213885 du 10 novembre 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 décembre 2022, Mme A..., représentée par Me Chatelais, deman

de à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 10 novembre 2022...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2022 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités portugaises, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2213885 du 10 novembre 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 décembre 2022, Mme A..., représentée par Me Chatelais, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 10 novembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2022 ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer une attestation de demandeur d'asile dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté de transfert est insuffisamment motivé ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'alinéa 2 de l'article 12.4 du règlement du 26 juin 2013 dès lors qu'elle n'a pas utilisé son visa délivré par les autorités portugaises pour entrer en France ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013 ;

- l'arrêté portant assignation à résidence est insuffisamment motivé et révèle un défaut d'examen de sa situation personnelle ; le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 mars 2023, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B..., a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante bissau-guinéenne, relève appel du jugement du 10 novembre 2022 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 octobre 2022 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités portugaises, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus par le premier juge, le moyen invoqué par la requérante, tiré de ce que la décision contestée serait insuffisamment motivée, que l'intéressée réitère en appel, sans apporter de précisions nouvelles.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 12 du règlement du 26 juin 2013 : " (...) 4. Si le demandeur est seulement titulaire (...) d'un ou de plusieurs visas périmés depuis moins de six mois lui ayant effectivement permis d'entrer sur le territoire d'un État membre, les paragraphes 1, 2 et 3 sont applicables aussi longtemps que le demandeur n'a pas quitté le territoire des États membres. Lorsque le demandeur est titulaire (...) d'un ou plusieurs visas périmés depuis plus de six mois lui ayant effectivement permis d'entrer sur le territoire d'un État membre et s'il n'a pas quitté le territoire des États membres, l'État membre dans lequel la demande de protection internationale est introduite est responsable. (...) ".

4. Il ressort du résumé de son entretien individuel qui s'est tenu le 22 août 2022 à la préfecture de Maine-et-Loire que Mme A... a déclaré avoir quitté son pays d'origine le 1er novembre 2021 et avoir traversé le Maroc puis l'Espagne avant de rejoindre la France. Elle a cependant précisé qu'elle ne se souvenait pas de sa date d'entrée et de sortie du territoire espagnol. Elle a reconnu avoir obtenu un visa des autorités portugaises tout en indiquant qu'elle ne souhaitait pas être transférée au Portugal car elle ne connaissait pas la langue de ce pays. L'intéressée produit une fiche d'évaluation de vulnérabilité faisant apparaître les mêmes informations. L'arrêté contesté précise toutefois que Mme A..., qui serait entrée en France le 15 juillet 2022, était, selon les données figurant dans le fichier Visabio, titulaire d'un visa délivré par les autorités portugaises, périmé depuis moins de six mois à la date de sa demande d'asile présentée en France le 22 août 2022. Le préfet ajoute que les autorités portugaises saisies le 26 août 2022 ont fait connaître le 28 septembre 2022 leur accord pour la reprise en charge de l'intéressée. Il ressort donc des pièces produites et de ses propres déclarations que Mme A... doit être regardée comme étant entrée au Portugal sous couvert du visa qu'elle détenait. Par suite, en estimant que ce pays était responsable de l'examen de sa demande d'asile, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 12 du règlement du 26 juin 2013.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'Etat membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'Etat membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". Il résulte de ces dispositions que si une demande d'asile est examinée par un seul Etat membre et qu'en principe cet Etat est déterminé par application des critères d'examen des demandes d'asile fixés par son chapitre III, dans l'ordre énoncé par ce chapitre, l'application de ces critères est toutefois écartée en cas de mise en œuvre de la clause dérogatoire énoncée au paragraphe 1 de l'article 17 du règlement, qui procède d'une décision prise unilatéralement par un Etat membre. Cette faculté laissée à chaque Etat membre est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile. Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. Lors de son entretien individuel, Mme A... a déclaré ne pas avoir de problème de santé. Pour établir sa vulnérabilité, elle se borne à invoquer son parcours migratoire, sa situation de femme isolée et la présence en France de compatriotes. Ces seuls éléments ne suffisent toutefois pas à démontrer qu'en ne dérogeant pas aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et en prononçant son transfert aux autorités portugaises, le préfet de Maine-et-Loire aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Par suite ce moyen ne peut qu'être écarté.

7. En quatrième lieu, eu égard à ce qui vient d'être dit au point 6, le moyen tiré de ce que le préfet, qui a procédé à un examen particulier de la demande présentée par Mme A..., se serait estimé en situation de compétence liée manque en fait et ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur le surplus des conclusions :

9. Les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par Mme A... et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence du rejet de ses conclusions principales.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera adressée, pour information, au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 7 avril 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 avril 2023.

La rapporteure,

V. GELARDLe président,

O. GASPON

La greffière,

P. BONNIEU

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT03793


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03793
Date de la décision : 25/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: Mme MALINGUE
Avocat(s) : CHATELAIS MELANIE

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-04-25;22nt03793 ?
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