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07/07/2023 | FRANCE | N°22NT01577

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 07 juillet 2023, 22NT01577


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... et M. C... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2018.

Par un jugement n° 1906141 du 23 mars 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 mai 2022 Mme B... et M. C..., représentés par Me Nahon, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de

prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... et M. C... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2018.

Par un jugement n° 1906141 du 23 mars 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 mai 2022 Mme B... et M. C..., représentés par Me Nahon, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- il y a lieu de prendre en compte la grossesse de Mme B... en 2017, soit une interruption de travail de 167 jours, et de retenir un bénéfice non commercial de 44 517 euros et non de 24 149 euros ; ainsi, le revenu réalisé en 2018 par Mme B... correspondait à un revenu courant et non exceptionnel ; il n'y a pas lieu de plafonner ce revenu pour le calcul du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement, ce qui entraîne le dégrèvement total de l'imposition de 12 542 euros ;

- l'administration a commis une erreur dans le calcul du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement ; le revenu de 2017 à retenir est de 44 517 euros, soit 24 517 euros multipliés par 365 jours et divisés par 198 jours, compte tenu de l'inclusion des 167 jours d'inactivité du fait de la grossesse ;

- l'administration a porté atteinte au principe d'égalité entre contribuables du fait de l'existence d'une discrimination à l'égard des périodes de grossesse qui ne sont pas prises en compte dans le calcul du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 novembre 2022 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... et M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n°2016-1917 du 29 décembre 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Geffray,

- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le foyer fiscal composé de Mme B..., qui exerce, outre une activité de médecin salarié au centre hospitalier de Saint-Brieuc, l'activité de médecin libéral depuis le 1er octobre 2016, et de M. A... C..., a été imposé sur leurs revenus de l'année 2018 pour un montant de 12 542 euros après l'application d'un crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement de 25 027 euros. Mme B... et M. C... ont contesté le plafonnement retenu dans le calcul de ce crédit d'impôt et estiment que les revenus déclarés de Mme B... dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ne doivent pas être regardés comme des revenus exceptionnels et donc imposables au titre de l'année 2018 dès lors que l'écart de revenus entre les années est dû à

167 jours d'inactivité du fait de sa grossesse en 2017. Ils relèvent appel du jugement du 23 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre des revenus de l'année 2018.

2. Aux termes de l'article 60 de la loi du 29 décembre 2016 susvisée : " (...) II. - A. - Les contribuables bénéficient, à raison des revenus non exceptionnels entrant dans le champ du prélèvement mentionné à l'article 204 A du code général des impôts, tel qu'il résulte de la présente loi, perçus ou réalisés en 2018, d'un crédit d'impôt modernisation du recouvrement destiné à assurer, pour ces revenus, l'absence de double contribution aux charges publiques en 2019 au titre de l'impôt sur le revenu. / B. - Le crédit d'impôt prévu au A du présent II est égal au montant de l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 2018 résultant de l'application des règles prévues aux 1 à 4 du I de l'article 197 du code général des impôts ou, le cas échéant, à l'article 197 A du même code multiplié par le rapport entre les montants nets imposables des revenus non exceptionnels mentionnés au 1 de l'article 204 A dudit code, les déficits étant retenus pour une valeur nulle, et le revenu net imposable au barème progressif de l'impôt sur le revenu, hors déficits, charges et abattements déductibles du revenu global. Le montant obtenu est diminué des crédits d'impôt prévus par les conventions fiscales internationales afférents aux revenus mentionnés au 1 du même article 204 A. / (...) / E. - 1. Le montant net imposable des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux à retenir au numérateur du rapport prévu au B du présent II pour le calcul du crédit d'impôt prévu au A est déterminé, pour chaque membre du foyer fiscal et pour chacune de ces catégories de revenus, dans les conditions prévues à l'article 204 G du code général des impôts, à l'exception du 6° du 2 et du 4 du même article 204 G. / 2. Le montant défini au 1 du présent E, le cas échéant après application des abattements prévus aux articles 44 sexies à 44 septdecies du code général des impôts, est retenu dans la limite du plus faible des deux montants suivants : / 1° Le bénéfice imposable au titre de l'année 2018, déterminé selon les règles prévues au 1 du présent E, avant application des éventuels abattements prévus aux mêmes articles 44 sexies à 44 septdecies ; / 2° Le plus élevé des bénéfices imposables au titre des années 2015,2016 ou 2017, déterminé selon les règles prévues au 1 du présent E, avant application des éventuels abattements prévus audits articles 44 sexies à 44 septdecies. / Le présent 2 n'est pas applicable lorsque le bénéfice imposable en 2018 est le premier bénéfice déclaré à la suite d'une création d'activité en 2018. Toutefois, lorsque le bénéfice réalisé en 2019 par le membre concerné du foyer, majoré le cas échéant des traitements et salaires, des bénéfices qu'il a réalisés relevant des autres catégories mentionnées au 1 du présent E et des revenus des gérants et associés mentionnés à l'article 62 du code général des impôts qu'il a perçus, imposables au titre de la même année 2019, est inférieur au bénéfice réalisé en 2018, majoré le cas échéant de ses revenus relevant des autres catégories précitées réalisés en 2018, le crédit d'impôt est remis en cause à hauteur de la différence constatée, dans la limite de la différence, lorsqu'elle est positive, entre le bénéfice réalisé en 2018 et le bénéfice réalisé en 2019, sauf si le contribuable justifie que la baisse de son bénéfice en 2019 résulte uniquement de la variation de son activité par rapport à 2018. / 3. En cas d'application du 2° du 2 du présent E, le contribuable peut obtenir un crédit d'impôt complémentaire dans les conditions suivantes : / 1° Lorsque le bénéfice imposable au titre de l'année 2019, déterminé selon les règles prévues au 1, est supérieur ou égal au bénéfice imposable au titre de l'année 2018, déterminé selon les mêmes règles, le contribuable bénéficie d'un crédit d'impôt complémentaire, lors de la liquidation du solde de l'impôt sur le revenu dû au titre de 2019, égal à la fraction du crédit d'impôt dont il n'a pas pu bénéficier en application du 2 ; / 2° Lorsque le bénéfice imposable au titre de l'année 2019, déterminé selon les règles prévues au 1, est inférieur au bénéfice imposable au titre de l'année 2018, déterminé selon les mêmes règles, mais supérieur au plus élevé des bénéfices imposables au titre des années 2015,2016 ou 2017 retenus en application du 2° du 2, le contribuable bénéficie, lors de la liquidation du solde de l'impôt sur le revenu au titre de 2019, d'un crédit d'impôt complémentaire égal à la différence entre : / a) Le crédit d'impôt calculé en retenant au numérateur du rapport prévu au B du présent II le bénéfice imposable au titre de l'année 2019, déterminé selon les règles prévues au 1 du présent E ; / b) Et le crédit d'impôt déjà obtenu en application du 2 du présent E ; / 3° Lorsque le bénéfice imposable au titre de l'année 2019, déterminé selon les règles prévues au 1, est inférieur au bénéfice imposable au titre de l'année 2018, déterminé selon les mêmes règles, le contribuable peut bénéficier, par voie de réclamation, d'un crédit d'impôt complémentaire égal à la fraction du crédit d'impôt dont il n'a pas pu bénéficier en application du 2 ou du 2° du présent 3, s'il justifie que la hausse de son bénéfice déclaré en 2018 par rapport aux trois années précédentes et à l'année 2019 résulte uniquement d'un surcroît d'activité en 2018. / 4. Pour l'application des 1 et 2, si le bénéfice imposable au titre des années 2015,2016 et 2017 s'étend sur une période de moins de douze mois, il est ajusté prorata temporis sur une année. / 5. Les contribuables mentionnés à l'article 151-0 du code général des impôts qui ont dénoncé leur option en 2017 pour 2018 et qui ont exercé une nouvelle option pour le versement libératoire en 2018 pour 2019 ne bénéficient pas du crédit d'impôt prévu au A du présent II. (...). ".

3. D'une part, il résulte de ces dispositions que les contribuables bénéficient, à raison des revenus non exceptionnels entrant dans le champ du prélèvement à la source perçus ou réalisés en 2018, d'un crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement destiné à assurer, pour ces revenus, l'absence de double contribution aux charges publiques en 2019, année de transition, au titre de l'impôt sur le revenu. Pour le calcul du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement, l'appréciation du caractère non exceptionnel des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices non commerciaux et des bénéfices agricoles repose à la fois sur la nature des revenus ainsi que sur un dispositif pluriannuel d'appréciation du bénéfice consistant à comparer le bénéfice réalisé au titre de l'année 2018 à ceux réalisés au titre des années 2015, 2016 et 2017. Le montant du bénéfice réalisé au titre de l'année 2018 est qualifié de bénéfice non exceptionnel ouvrant droit au bénéfice du crédit d'impôt à hauteur du plus élevé des bénéfices réalisés au titre des années 2015, 2016, 2017, puis, le cas échéant, au titre de l'année 2019. Seul le surplus éventuel du bénéfice réalisé au titre de l'année 2018 par rapport au plus élevé des bénéfices réalisés au titre de ces années est qualifié de revenu exceptionnel n'ouvrant pas droit au bénéfice du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement, sauf justification d'un surcroît d'activité.

4. D'autre part, les dispositions précitées ne prévoient pas de modalités particulières de détermination des bénéfices non commerciaux ou de l'impôt sur le revenu autre que celles qu'elles définissent pour la détermination des bénéfices de référence et en particulier ne prévoient pas de tenir compte d'un ajustement prorata temporis de ces derniers en fonction des périodes d'inactivité, quel que soit leur motif, à l'exception de l'année de création de l'activité dès lors que le bénéfice imposable s'étend sur une période de moins de douze mois.

5. En l'espèce, Mme B... a déclaré des bénéfices non commerciaux de 14 724 euros et de 36 590 euros selon le régime dit " micro-BNC " respectivement au titre de la période du 1er octobre au 31 décembre 2016 et de l'année 2017 ainsi que de 96 636 euros au titre de l'année 2018 selon le régime réel. L'administration a retenu, pour le calcul du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement, les montants de 38 872 euros pour 2016 (montant de

14 724 euros ramené de 3 à 12 mois) et de 24 149 euros pour 2017. Comme il a été dit au point 3, le montant du bénéfice réalisé au titre de l'année 2018, qui doit être qualifié de bénéfice non exceptionnel ouvrant droit au bénéfice du crédit d'impôt, est égal au plus élevé des bénéfices réalisés au cours de l'une des années 2016 et 2017, soit 38 872 euros au titre de l'année 2016. Compte tenu de ce qui a été dit au point 4, il n'y a pas lieu de prendre en compte la période d'inactivité du fait de la grossesse de Mme B... en 2017 dans le calcul du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement. Il n'y a pas davantage lieu de prendre en compte ou d'ajuster les revenus perçus en 2019, également affectés par une période d'inactivité pour grossesse, en vue du calcul d'un crédit d'impôt complémentaire. C'est donc à bon droit que l'administration a plafonné le crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement à 38 872 euros et a estimé, sans commettre d'erreur, de discrimination ou d'atteinte au principe d'égalité entre contribuables, que le solde, qui est égal à la différence entre 96 636 euros et 38 872 euros, soit 57 764 euros, constituait un revenu exceptionnel et, par voie de conséquence, imposable au titre de l'année 2018.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme B... et M. C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... et M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B..., à M. A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 22 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur

- M. Penhoat, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2023.

Le rapporteur

J.E. GeffrayLa présidente

I. Perrot

La greffière

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT01577


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NT01577
Date de la décision : 07/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : NAHON

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-07-07;22nt01577 ?
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