La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/10/2023 | FRANCE | N°22NT00537

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 31 octobre 2023, 22NT00537


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler :

I - l'arrêté du 30 août 2017 par lequel le président du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de Loire-Atlantique a mis fin à ses fonctions de pharmacien gérant ainsi que l'arrêté du 6 septembre 2017 par lequel le président du SDIS de Loire-Atlantique l'a affectée sur un poste de pharmacien chef adjoint ;

II - l'arrêté n°2018-917 du 31 août 2018 par lequel le président du SDIS de Loire-Atlantique l

'a affectée, à compter du 1er septembre 2018, sur le poste de pharmacien chef adjoint ;

-...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler :

I - l'arrêté du 30 août 2017 par lequel le président du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de Loire-Atlantique a mis fin à ses fonctions de pharmacien gérant ainsi que l'arrêté du 6 septembre 2017 par lequel le président du SDIS de Loire-Atlantique l'a affectée sur un poste de pharmacien chef adjoint ;

II - l'arrêté n°2018-917 du 31 août 2018 par lequel le président du SDIS de Loire-Atlantique l'a affectée, à compter du 1er septembre 2018, sur le poste de pharmacien chef adjoint ;

- l'arrêté n°2018-918 du 31 août 2018 par lequel le président du SDIS de Loire-Atlantique a abrogé, à compter du 1er septembre 2018, l'arrêté du 6 septembre 2017 l'affectant sur le poste de pharmacien chef adjoint ;

- l'arrêté n°2018-919 du 31 août 2018 par lequel le président du SDIS de Loire-Atlantique a abrogé, à compter du 1er septembre 2018, l'arrêté du 30 août 2017 ayant mis fin à ses fonctions de pharmacien gérant de la pharmacie à usage intérieur (PUI) ;

- l'arrêté n°2018-920 du 31 août 2018 par lequel le président du SDIS de Loire-Atlantique a mis fin, à compter du 1er septembre 2018, à ses fonctions de pharmacien gérant de la PUI.

Par un jugement n°1709848, 1811793 du 22 décembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 février 2022 et le 4 juillet 2023, Mme B..., représentée par Me Barichard, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 22 décembre 2021 ;

2°) d'annuler les arrêtés n°2017-2006 du 30 août 2017 et n°2017-2068 du 6 septembre 2017 par lesquels le président du SDIS de Loire-Atlantique a mis fin à ses fonctions de pharmacien gérant et l'a affectée sur un poste de pharmacien chef adjoint, ainsi que les arrêtés n°2018-917, n°2018-918, n°2018-919 et n°2018-920 du 31 aout 2018 du président du SDIS de Loire-Atlantique ;

3°) d'enjoindre au président du SDIS de Loire-Atlantique, sous astreinte de 200 euros par jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir, de la réintégrer sur son poste de pharmacien chargé de la gérance de la pharmacie à usage intérieur et de procéder au rappel des primes non versées ;

4°) de mettre à la charge du SDIS de Loire-Atlantique une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a estimé que son changement d'affectation présentait le caractère d'une mesure d'ordre intérieur qui ne lui faisait pas grief :

* elle a subi une perte de responsabilités dès lors qu'elle est passée d'un poste de pharmacien gérant de la PUI, où elle assurait seule les fonctions de la gérance, à un poste de pharmacie chef adjoint dépourvu de fonctions de gérance ;

* elle a subi une perte de rémunération à hauteur de 236,59 euros, le taux de son indemnité de responsabilité est passé de 34 % à 31% et elle a perdu le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) ;

- il n'est pas justifié de la compétence des signataires des arrêtés contestés ;

- les arrêtés contestés ne sont pas motivés ;

- sa réaffectation a provoqué une modification de sa situation professionnelle, laquelle ne pouvait, en vertu de l'article 52 de la loi du 26 janvier 1984, être régulièrement prononcée sans que le SDIS ait préalablement consulté pour avis la commission administrative paritaire ;

- elle n'a pas pu consulter son dossier individuel ;

- la procédure de création d'emploi et de déclaration de vacance, prévue par l'article 41 de la loi du 26 janvier 1984, a été méconnue ;

- le délai entre la date de publicité de la déclaration de création ou de vacance d'emploi et la décision de l'autorité territoriale a été trop court ;

- le comité technique n'a pas été consulté sur la suppression de son emploi, en méconnaissance de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 ;

- les deux arrêtés d'affectation de 2017 et 2018 ne visent pas la saisine du comité technique du 23 mai 2017 ;

- le poste de pharmacien chef adjoint créé ne correspond pas aux statuts particuliers du cadre d'emploi des pharmaciens de sapeurs-pompiers professionnels, l'agent placé sur le poste de pharmacien chef ne peut assurer un temps complet ;

- sa mutation interne aboutit à un déclassement et constitue une sanction déguisée et un détournement de pouvoir ;

- la réorganisation du service santé de la PUI et notamment la suppression des emplois de pharmacien chef et pharmacien gérant afin qu'ils soient regroupés, a méconnu l'article R. 5126-19 du code de la santé publique qui précise qu'une modification de la PUI suppose une nouvelle procédure d'autorisation administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2022, le SDIS de Loire-Atlantique, représenté par Me Bernot, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme B... une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n°2016-1236 du 20 septembre 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pons,

- les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique,

- et les observations de Me William, substituant Me Bernot, représentant le SDIS de Loire-Atlantique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a été recrutée, en octobre 2008, par le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de Loire-Atlantique, en qualité de sapeur-pompier professionnel titulaire, au grade de pharmacien de classe normale. Par un premier arrêté du 30 août 2017, le président du SDIS de Loire-Atlantique a mis fin à ses fonctions de pharmacien gérant à compter du 1er septembre 2017, et par un deuxième arrêté du 6 septembre 2017, a affecté l'intéressée sur un poste de pharmacien chef adjoint à compter du 1er septembre 2017. Par courrier du 25 septembre 2017, Mme B... a sollicité le retrait de ces deux arrêtés. Par deux arrêtés, n° 2018-918 et n° 2018-919 du 31 août 2018, le président du SDIS de Loire-Atlantique a abrogé, à compter du 1er septembre 2018, les deux arrêtés précités. Par deux autres arrêtés n°2018-917 et n° 2018-920, du 31 août 2018, le président du SDIS de Loire-Atlantique a mis fin aux fonctions de pharmacien gérant de la pharmacie à usage intérieur de Mme B... et affecté cette dernière sur le poste de pharmacien chef adjoint, à compter du 1er septembre 2018. Par courrier du 4 décembre 2018, Mme B... a sollicité le retrait de ces quatre arrêtés. Elle a ensuite saisi le tribunal administratif de Nantes de demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 30 août 2017 et du 6 septembre 2017, ainsi que des quatre arrêtés du 31 août 2018. Par un jugement du 22 décembre 2021, dont Mme B... relève appel, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours. Il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou de leur contrat ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent de perte de responsabilités ou de rémunération. Le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination ou une sanction, est irrecevable.

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., pharmacien sapeur-pompier titulaire, en fonction SDIS de Loire-Atlantique, a été affectée, par un arrêté n°2018-917 du 31 août 2018, à la pharmacie du SDIS de Loire-Atlantique pour exercer les fonctions de pharmacien chef adjoint. Cette mesure a été prise, dans l'intérêt du service, en vue de réorganiser le service de santé et de secours médical du SDIS, afin de renforcer l'unité de fonctionnement et la cohérence des missions de la pharmacie.

4. En premier lieu, ce changement d'affectation est intervenu au sein du même service, sans modification du lieu d'exercice professionnel ou d'atteinte aux droits et libertés fondamentaux de la requérante. Il ne présente pas, au regard des éléments du dossier, le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée ou d'un détournement de pouvoir, ni ne traduit une discrimination, ni établie, ni même alléguée.

5. En deuxième lieu, si la requérante fait valoir qu'elle a subi une perte de responsabilités dès lors qu'elle est passée d'un poste de pharmacien gérant de la pharmacie à usage interne, où elle assurait seule les fonctions de la gérance, à un poste de pharmacien chef adjoint dépourvu de fonctions de gérance, il ressort des pièces du dossier, notamment de la délibération du conseil d'administration du SDIS en date du 13 juin 2017 et de la nouvelle fiche de poste de l'intéressée, que le poste de pharmacien-chef adjoint comprend l'exercice de fonctions de gérance, puisqu'il assiste le pharmacien-chef chargé de la gérance de la pharmacie à usage interne. En outre, les fonctions de pharmacien chef adjoint de la pharmacie départementale du SDIS comportent une dimension managériale correspondant, notamment, à la conduite et à l'animation d'une équipe technique pluridisciplinaire, à l'accompagnement des agents dans l'exercice de leur mission ainsi qu'à la coordination de l'activité des agents de l'unité pharmaco-secouriste. Enfin, les nouvelles fonctions de Mme B..., en qualité de pharmacien chef adjoint, se traduisent par une extension de ses missions, cette dernière étant amenée à intervenir dans tous les domaines relevant de la compétence d'un pharmacien chef pour le fonctionnement du service départemental en cause. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'a pas vu de diminution de ses responsabilités à l'occasion de son changement d'affectation.

6. En dernier lieu, ce changement d'affectation n'a entraîné pour Mme B... aucune perte de rémunération globale. Il a été l'occasion d'un changement de grade favorable, cette dernière étant passée du grade de pharmacien de classe normale à celui de pharmacien hors classe. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'augmentation de la rémunération de l'intéressée serait une conséquence statutaire du déroulement de sa carrière et ne serait pas liée à sa prise de poste de pharmacien-chef adjoint. Mme B... ne produit aucun élément permettant d'attester que ce changement d'affectation ce serait traduit pas une perte du bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire. Dans ces conditions, les arrêtés contestés n'entraînent, pour la requérante, ni réduction de sa rémunération ou de ses perspectives de carrière, ni atteinte aux droits et prérogatives qu'elle tient de son statut. Par suite, ces mesures présentent le caractère de mesures d'ordre intérieur, qui ne font pas grief et ne sont donc pas susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Dès lors, la demande de Mme B... est irrecevable et doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 22 décembre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes comme irrecevables.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du SDIS de Loire-Atlantique, qui n'est pas dans la présente instance partie perdante, la somme demandée par Mme B..., au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du SDIS de Loire-Atlantique présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du service départemental d'incendie et de secours de Loire-Atlantique tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Mme A... B... et au service départemental d'incendie et de secours de Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 octobre 2023.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°22NT00537


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT00537
Date de la décision : 31/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE
Avocat(s) : CABINET ERWAN BARICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-10-31;22nt00537 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award