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19/03/2024 | FRANCE | N°23NT00840

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 1ère chambre, 19 mars 2024, 23NT00840


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 28 janvier 2021 par laquelle le préfet de la Mayenne a classé sans suite sa demande tendant à la délivrance d'un certificat de résidence d'algérien.



Par un jugement n° 2103184 du 22 février 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire enregistrés les

23 et 27 mars 2023 M. A..., représenté par Me l'Helias, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement du 22 févrie...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 28 janvier 2021 par laquelle le préfet de la Mayenne a classé sans suite sa demande tendant à la délivrance d'un certificat de résidence d'algérien.

Par un jugement n° 2103184 du 22 février 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 23 et 27 mars 2023 M. A..., représenté par Me l'Helias, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 février 2023 ;

2°) d'annuler la décision du 28 janvier 2021 du préfet de la Mayenne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Mayenne de lui délivrer, à titre principal, un certificat de résidence d'un an sur le fondement de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article 6-5 du même accord et, à titre encore plus subsidiaire, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou de procéder au réexamen de sa demande dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué méconnaît les stipulations de l'accord franco-algérien et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien ;

- elle méconnaît les dispositions de la circulaire Valls du 28 novembre 2012, relative à l'admission exceptionnelle au séjour, qui indique de quelle manière l'étranger doit justifier de l'ancienneté de son séjour en France ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 novembre 2023 la préfète de la Mayenne conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Penhoat a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien né le 15 novembre 1960, est entré en France le 25 juillet 2004 sous couvert d'un visa de court séjour valable trente jours. Le 1er septembre 2014, il a sollicité un certificat de résidence valable un an sur le fondement des articles 6-1 et 6-5 de l'accord franco-algérien. Par arrêté du 14 octobre 2014, le préfet de la Mayenne a rejeté sa demande. Le tribunal administratif puis la cour administrative d'appel de Nantes ont rejeté les recours dirigés contre cet arrêté les 23 janvier 2015 et 19 mai 2015. Le 23 janvier 2019, M. A... a de nouveau sollicité la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien. Par un arrêté du 5 juillet 2019, le préfet de la Mayenne a rejeté cette demande et fait obligation à M. A... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Les recours dirigés contre cet arrêté ont été rejetés par le tribunal administratif puis la cour administrative d'appel de Nantes respectivement les 19 juin 2020 et 3 décembre 2020. Par un courrier du 18 janvier 2021, M. A... a sollicité son admission exceptionnelle au séjour et subsidiairement, la délivrance d'un certificat de résidence d'algérien. Par une décision du 28 janvier 2021, le préfet de la Mayenne a classé sans suite cette demande au motif que l'intéressé, faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, n'a présenté aucun élément nouveau par rapport à sa précédente demande de titre de séjour. M. A... relève appel du jugement du 22 février 2023 du tribunal administratif de Nantes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si M. A... soutient que le jugement attaqué a méconnu l'accord franco-algérien et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, de tels moyens concernent le bien-fondé du jugement attaqué et sont, par suite, sans incidence sur sa régularité.

Sur la légalité de la décision du 28 janvier 2021 :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) ".

4. M. A... soutient résider de manière continue en France depuis 2004. Toutefois, ainsi que l'a relevé à bon droit le tribunal, les éléments qu'il produit ne permettent de démontrer qu'une présence ponctuelle en France. Les pièces produites notamment au titre des années 2010 à 2018 ne comportent que des avis d'impôt sur le revenu d'un montant nul, des courriers émanant de l'assurance maladie relatifs à l'aide médicale d'Etat et des documents de nature médicale épars. L'ensemble de ces documents ainsi que les attestations rédigées dans des termes stéréotypés ne démontrent pas la présence habituelle en France de l'intéressé au cours de cette période. Dès lors, le requérant ne peut être regardé comme apportant la preuve qu'il remplissait, à la date de l'arrêté contesté, la condition de séjour habituel en France depuis plus de dix ans prévue par les stipulations précitées du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations ne peut qu'être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (....) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

6. Ainsi qu'il vient d'être dit, M. A... n'établit pas la réalité du caractère habituel de sa résidence en France depuis plus de dix ans. Il ressort des pièces du dossier que le requérant a déjà fait l'objet de deux mesures d'éloignement, les 9 mars 2010 et 14 octobre 2014, qu'il n'a pas exécutées. Il est célibataire, sans enfant et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident neuf de ses frères et sœurs et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de quarante-quatre ans. En outre, il ne justifie pas d'une intégration particulière en France, pays dont il ne maîtrise toujours pas la langue. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, la décision contestée n'a pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît donc ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien.

7. En dernier lieu, la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne comporte que des orientations générales que le ministre de l'intérieur a adressées aux préfets pour les éclairer dans la mise en œuvre de leur pouvoir de régularisation et qui ne sont pas utilement invocables à l'appui d'un recours dirigé contre une décision portant refus de titre de séjour. Par suite, M. A... ne peut utilement se prévaloir de cette circulaire.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Mayenne.

Délibéré après l'audience du 23 février 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Couvert-Castéra, président de la cour,

- M. Geffray, président-assesseur,

- M. Penhoat, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 mars 2024.

Le rapporteur

A. PENHOATLe président

O. COUVERT-CASTÉRA

La greffière

H. DAOUD

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00840
Date de la décision : 19/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. COUVERT-CASTERA
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : SCP BARBARY MORICE L'HELIAS

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-19;23nt00840 ?
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