La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/07/1999 | FRANCE | N°95PA02899

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 01 juillet 1999, 95PA02899


(2ème chambre A)
VU, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel le 20 juillet 1995, la requête présentée pour les héritiers de M. Gilbert Y..., domiciliés ..., par Me X..., avocat ; les consorts Y... demandent à la cour :
1 ) d'annuler l'article 4 du jugement n 90 01462/2 en date du 7 février 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande en réduction des compléments d'impôt sur le revenu auxquels M. Gilbert Y... a été assujetti au titre des années 1982 , 1983 et 1984 ;
2 ) de prononcer la réduction de ces impositions et des pé

nalités dont elles sont assorties ;
3 ) de leur accorder le remboursement...

(2ème chambre A)
VU, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel le 20 juillet 1995, la requête présentée pour les héritiers de M. Gilbert Y..., domiciliés ..., par Me X..., avocat ; les consorts Y... demandent à la cour :
1 ) d'annuler l'article 4 du jugement n 90 01462/2 en date du 7 février 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande en réduction des compléments d'impôt sur le revenu auxquels M. Gilbert Y... a été assujetti au titre des années 1982 , 1983 et 1984 ;
2 ) de prononcer la réduction de ces impositions et des pénalités dont elles sont assorties ;
3 ) de leur accorder le remboursement des frais de timbre ;
4 ) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 100.000 F ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU, enregistré successivement les 6 mai et 1er juin 1999, le rapport à la commission départementale des impôts directs et les taxes sur le chiffre d'affaires produit par les consorts Y..., puis par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU la loi de finances rectificative pour 1986, loi n 86-824 du 11 juillet 1986 ;
VU la loi n 87-502 du 8 juillet 1987 modifiant les procédures fiscales et douanières ;
VU la loi de finances rectificative pour 1989, loi n 89-936 du 29 décembre 1989 ;
VU la loi de finances pour 1993, loi n 92-1376 du 30 décembre 1992 ;
VU l'arrêté du 17 mars 1983 portant réorganisation de certaines directions des services extérieurs de la direction générale des impôts ;
VU l'arrêté du 28 septembre 1992 modifiant l'arrêté du 17 mars 1983 portant réorganisation de certaines directions des services extérieurs de la direction générale des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 1999 :
- le rapport de M. MORTELECQ, premier conseiller,
- les observations de la SCP THESIS-BANCEL, avocat, pour les consorts Y...,
- et les conclusions de Mme MARTEL, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que M. Gilbert Y..., gérant de la société Nouvelle ALT, a fait l'objet au cours des années 1985 et 1986 d'un contrôle fiscal diligenté par les services de la direction nationale des vérifications de situations fiscales à l'issue duquel il a été assujetti, au titre des années 1982, 1983 et 1984, à des compléments d'impôt sur le revenu mis en recouvrement le 31 mai 1989 ; que ses héritiers, les consorts Y..., contestent ces impositions complémentaires en tant qu'elles résultent de la taxation d'office sur le fondement de l'article L.69 du livre des procédures fiscales de crédits inexpliqués ainsi que de soldes créditeurs de balances-espèces et qu'elles concernent des revenus de capitaux mobiliers et en demandent la décharge ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne le moyen relatif à la compétence de la direction nationale des vérifications de situations fiscales :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 17 mars 1983 portant réorganisation de certaines directions des services extérieurs de la direction générale des impôts : "Il est créé une direction nationale des vérifications de situations fiscales. Cette direction assure pour l'ensemble du territoire national, conformément aux directives du directeur général des impôts et concurremment avec les autres services des impôts compétents : la vérification approfondie des situations fiscales d'ensemble des contribuables, quel que soit le lieu de leur domicile ; en tant que de besoin, la vérification de la comptabilité des entreprises et des exploitations qui sont dirigées, en droit ou en fait, directement ou par personne interposée et sous quelque forme que ce soit, par ces contribuables ; le contrôle de tous impôts dus par les personnes physiques et morales" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Y... a fait l'objet d'une vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble effectuée par les services de la direction nationale des vérifications de situations fiscales ; qu'en vertu des dispositions précitées de l'article 2 de l'arrêté du 17 mars 1983 les agents de cette direction étaient compétents pour procéder à cette vérification ; que la circonstance qu'une vérification de la comptabilité de la société nouvelle ALT, dont M. Y... était le gérant, ait été entreprise par un agent de la même direction parallèlement à la vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble est sans influence sur la compétence du vérificateur en ce qui concerne le contrôle fiscal de M. Y... ;
Considérant que si les consorts Y... se prévalent d'instructions administratives qui limiteraient la compétence de cette direction à l'examen de certaines catégories de contribuables, dans lesquelles M. Y... ne rentrerait pas, ils ne précisent pas les références de ces instructions et ne mettent pas la cour en mesure de se prononcer sur la pertinence du moyen invoqué ; que celui-ci doit donc, en tout état de cause, être rejeté ;

Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la notification des redressements, établie le 12 décembre 1986 par un agent agissant dans l'exercice de ses compétences, a régulièrement interrompu la prescription ;
En ce qui concerne le moyen tiré de l'envoi simultané de l'avis de vérification et de la demande de relevé de comptes bancaires en méconnaissance de l'article L.47 du livre des procédures fiscales :
Considérant qu'aux termes de l'article L.47 du livre des procédures fiscales : "Une vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix" ; que l'article 35 II de la loi de finances rectificative pour 1989 dispose par ailleurs qu'"en cas d'examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle visé à l'article L.12 du livre des procédures fiscales ou de vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble mentionnée à l'article 67 de la loi de finances pour 1976 (n 75-1278 du 30 décembre 1975), la demande au contribuable des relevés de comptes dans l'avis de vérification ou simultanément à l'envoi ou à la remise de cet avis, ainsi que l'envoi ou la remise de toute demande de renseignements en même temps que cet avis sont sans influence sur la régularité de ces procédures lorsque celles-ci ont été engagées avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que si l'administration fiscale, lorsqu'elle avise un contribuable qu'elle entreprend la vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble, ne peut effectuer aucune opération de contrôle sans lui avoir laissé un délai suffisant pour lui permettre de s'assurer l'assistance d'un conseil de son choix, elle est en revanche en droit, s'agissant des procédures engagées avant l'entrée en vigueur de la loi du 29 décembre 1989, de lui demander immédiatement la production des relevés de ses comptes bancaires ; qu'ainsi, le moyen invoqué par les consorts Y... et tiré de ce que l'administration fiscale aurait irrégulièrement envoyé simultanément à M. Y... un avis de vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble et une demande de production des relevés de ses comptes bancaires doit être rejeté ;
En ce qui concerne les moyens relatifs à la régularité de la mise en oeuvre de la procédure de l'article L.16 du livre des procédures fiscales :

Considérant qu'aux termes de l'article L.12 du livre des procédures fiscales : "L'administration des impôts peut procéder à la vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues au présent livre. A l'occasion de cette vérification l'administration peut contrôler la cohérence entre, d'une part, les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments de train de vie des membres du foyer fiscal ... ; qu'aux termes de l'article L.16 du même livre : "En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. Les demandes visées aux alinéas précédents doivent indiquer explicitement les points sur lesquels elles portent et fixer à l'intéressé, pour fournir sa réponse, un délai qui ne peut être inférieur au délai de trente jours prévu à l'article L.11 ..." ; que l'article L.16-A de ce livre, issu de l'article 9 III de la loi n 87-502 du 8 juillet 1987 entré en vigueur le 11 juillet 1987, dispose que "lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite" ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que si le vérificateur a effectivement demandé à M. Y... de se présenter à son bureau et d'y apporter tous les relevés de ses comptes bancaires aux fins de procéder à la vérification de sa situation fiscale d'ensemble, cette circonstance ne peut, à elle seule, être regardée comme ayant entaché d'irrégularité la vérification en cause qui, en application des articles L.12 et L.16 précités du livre des procédures fiscales, ne revêt aucun caractère contraignant ; qu'il ne résulte pas des éléments du dossier et qu'il n'est au demeurant pas même expressément allégué que M. Y... aurait accepté sous la contrainte de fournir ses relevés de comptes ; que le moyen ainsi invoqué par les consorts Y... doit, en conséquence, être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, que si les requérants font valoir que le vérificateur n'était pas en droit d'interroger M. Y... sur l'ensemble des crédits figurant sur ses comptes bancaires sans avoir, préalablement, éliminé "ceux qui, manifestement, ne pouvaient être considérés comme des revenus", et relèvent que le montant des crédits demeurés inexpliqués qui ont été en définitive taxés est faible au regard des revenus déclarés, les dispositions de l'article L.16 du livre des procédures fiscales qui permettent à l'administration de comparer les crédits figurant sur les comptes bancaires d'un contribuable au montant brut de ses revenus déclarés, pour établir l'existence d'indices de revenus dissimulés l'autorisant à demander des justifications à l'intéressé, ne l'obligent pas à procéder à un examen critique de ces crédits, ni, quand elle l'a fait, à se référer comme terme de comparaison aux seuls crédits dont l'origine n'est pas justifiée après le premier examen ; que le moyen ainsi invoqué ne peut donc être accueilli ;

Considérant en troisième lieu, que les consorts Y... soutiennent qu'en raison de l'évaluation forfaitaire des dépenses de train de vie, l'administration ne pouvait mettre en oeuvre la procédure de demande de justifications du solde inexpliqué des balances espèces ; qu'il résulte de l'instruction que les soldes créditeurs de ces balances, telles qu'établies par le vérificateur, s'élevaient, pour les années 1982 à 1984, respectivement à 217.800 F, 381.500 F et 273.000 F alors que les dépenses en espèces représentatives du train de vie du foyer de M. Y... avaient été évaluées, pour deux personnes, à 190.000 F, 210.000 F et 230.000 F en fonction de différents postes de dépenses de nourriture, transports, loisirs, vêtements et frais divers retenus dans les demandes de justifications adressées ; que, dans ces conditions, pour ce qui concerne les années 1982 et 1984, dès lors que les soldes créditeurs des balances espèces proviennent essentiellement d'une évaluation forfaitaire ayant eu un caractère approximatif des dépenses de train de vie, le vérificateur n'était pas en droit d'avoir recours à la procédure de l'article L.16 du livre des procédures fiscales ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'accorder aux consorts Y... décharge de l'imposition à laquelle M. Y... a été assujetti à ce titre ; qu'en revanche, pour ce qui concerne l'année 1983, le solde créditeur de la balance espèces ne provenant pas essentiellement de l'évaluation forfaitaire des dépenses du train de vie, le vérificateur a pu, à bon droit, mettre en oeuvre la procédure de l'article L.16 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en quatrième lieu, que si les requérants font valoir que l'administration aurait dû, préalablement à l'envoi de la notification de redressements, adresser à M. Y... une demande de renseignements complémentaires, ils n'indiquent pas sur quels points les réponses auraient été suffisamment précises et vérifiables pour nécessiter, avant la mise en oeuvre de la taxation d'office, que la procédure soit poursuivie par l'envoi d'une telle demande ; qu'il résulte au demeurant de l'instruction qu'au titre de l'année 1982 une nouvelle demande de justifications a été adressée, le 7 mai 1986, concernant les crédits qui, à cette date, restaient inexpliqués ;
Considérant, enfin, que les consorts Y... relèvent que c'est à tort que le vérificateur, jugeant insuffisantes les réponses faites aux demandes de justifications, a notifié le 12 décembre 1986 la taxation d'office des sommes dont l'origine restait indéterminée, sans avoir mis préalablement en demeure M. Y..., en application des dispositions précitées de l'article L.16-A du livre des procédures fiscales, d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours ;

Considérant, toutefois, que l'article L.284 du même livre, issu de l'article 108 de la loi de finances n 92-1376 pour 1993 du 30 décembre 1992, précise que : "Sauf disposition contraire, les règles de procédure fiscale ne s'appliquent qu'aux formalités accomplies après leur date d'entrée en vigueur, quelle que soit la date de mise en recouvrement des impositions - Ces dispositions s'appliquent aux formalités accomplies avant la publication de la loi n 92-1376 du 30 décembre 1992" ; que ces dispositions de portée rétroactive font obstacle, alors même que la mise en recouvrement des impositions est intervenue le 31 mai 1989, à ce que la procédure d'imposition puisse être regardée comme irrégulière au motif de l'absence d'envoi d'une mise en demeure prévue par des dispositions entrées en vigueur le 11 juillet 1987, soit postérieurement à la notification le 12 décembre 1986 des redressements ;
En ce qui concerne le moyen relatif à la régularité du recours à la procédure de taxation d'office prévue à l'article L.69 du livre des procédures fiscales :
Considérant qu'aux termes dudit article : "Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L.16" ;
Considérant qu'aucun élément du dossier n'établit que le vérificateur connaissait l'origine de tout ou partie des sommes pour lesquelles des justifications ont été demandées ; que le seul fait qu'il ait également, à la même époque, procédé à la vérification de la comptabilité de la société ALT ne peut suffire à établir que les crédits en cause provenaient de revenus distribués ; que les consorts Y... ne sont donc pas fondés à soutenir que ces sommes auraient dû faire l'objet d'une imposition au titre d'un revenu catégoriel et non en tant que revenus d'origine indéterminée en application des dispositions de l'article L.69 du livre des procédures fiscales ;
En ce qui concerne le moyen relatif à la motivation de la notification de redressements :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de la demande de justification qui lui a été adressée le 28 janvier 1986, concernant une somme de 100.000 F portée le 8 novembre 1983 au crédit de son compte privé ouvert auprès du CCF, M. Y... a répondu qu'elle correspondait à un prélèvement direct sur son compte courant au sein de la société nouvelle ALT ; qu'en raison de cette explication, le vérificateur a procédé au redressement de cette somme de 100.000 F dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en précisant, dans la notification de redressements envoyée le 12 décembre 1986 : "Par ailleurs les virements effectués en 1983 par la société à la responsabilité limitée ALT sur votre compte privé CCF : ... le 8 novembre : 100.000 F constituent des revenus de capitaux mobiliers. Au surplus, ils n'apparaissent pas sur votre compte courant dont le relevé a été effectué" ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutiennent les consorts Y..., une telle notification de redressements est suffisamment motivée ;

Considérant, en second lieu, que la circonstance que la notification de redressements du 22 décembre 1986 ne mentionne pas les montants des revenus déclarés par M. Y... est sans influence sur la régularité de la motivation de cette notification de redressements dès lors que l'intéressé avait nécessairement connaissance de ses propres déclarations et, qu'au surplus, ses revenus déclarés avaient été précisés dans les demandes de justifications antérieures ;
En ce qui concerne le moyen relatif au rapport soumis à la commission départementale des impôts :
Considérant que les consorts Y... soutiennent que la procédure suivie devant la commission départementale des impôts est irrégulière au motif que le rapport soumis à cet organisme est incomplet et imprécis ; qu'il ressort de l'examen de ce rapport produit au dossier qu'il comporte tous les éléments nécessaires permettant à la commission départementale des impôts de se prononcer en connaissance de cause ; qu'ainsi, le moyen invoqué par les consorts Y... manque en fait ;
En ce qui concerne les autres moyens invoqués relatifs à la régularité de la procédure :
Considérant, en premier lieu, que pour faire échec à l'application tant de l'article 108 de la loi de finances pour 1993 que de l'article 35 II de la loi de finances rectificative pour 1989, les requérants ne sauraient utilement soutenir qu'en raison des irrégularités commises la notification de redressements du 12 décembre 1986 serait privée de son caractère interruptif de la prescription, laquelle serait donc acquise et ferait obstacle à la possibilité de toute mesure ultérieure de régularisation, dès lors que les dispositions de portée rétroactive d'une loi de régularisation ont précisément pour objet et pour effet de rendre la procédure régulière et qu'au demeurant seuls les vices entachant la notification elle-même ou les conditions dans lesquelles elle est portée à la connaissance du contribuable sont de nature à priver cette notification de son effet interruptif, à l'exclusion de ceux relatifs aux formalités antérieures à l'établissement de ce document ;
Considérant, en second lieu, que si les requérants invoquent l'instruction administrative n 13-A-1-92 par laquelle, antérieurement à l'entrée en vigueur de l'article 108 de la loi de finances pour 1993, la direction générale des impôts a commenté la jurisprudence du Conseil d'Etat relative à l'entrée en vigueur des règles de procédure et soutiennent que les principes qui y sont exposés auraient dû conduire l'administration à dégrever les impositions mises à leur charge avant que le tribunal ne se soit prononcé, cette instruction ne contient aucune indication en ce sens dont les requérants seraient fondés à se prévaloir ; que ce moyen doit donc être rejeté ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers :

Considérant, ainsi qu'il a été dit précédemment, qu'à la suite de la demande de justification qui lui a été adressée le 28 janvier 1986, concernant une somme de 100.000 F portée le 8 novembre 1983 au crédit de son compte privé ouvert auprès du CCF, M. Y... a répondu qu'elle correspondait à un prélèvement direct sur son compte courant au sein de la société nouvelle ALT ; qu'en raison de cette explication, le vérificateur a procédé au redressement de cette somme de 100.000 F dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que si, désormais, les consorts Y... soutiennent que la somme de 100.000 F en cause, de même qu'une somme de 130.000 F créditée sur le même compte le 14 avril, correspondraient au remboursement d'une avance que M. Y... avait consentie à la société nouvelle ALT pour être remise à la caisse des dépôts et consignations, cette allégation n'est pas appuyée de pièces justificatives probantes, la lettre produite de la caisse des dépôts faisant état de reçus de caution à des dates différentes ; que ce moyen doit, par suite, être écarté ;
En ce qui concerne les dépenses de train de vie de l'année 1983 :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les dépenses de train de vie payées en espèces correspondant aux dépenses de nourriture, de transports, de loisirs, de vêtements et de frais divers effectuées par M. et Mme Y... ont été fixées, en définitive, conformément à l'avis émis par la commission départementale des impôts, à la somme de 105.000 F pour l'année 1983 ; que, compte tenu des éléments du dossier, cette évaluation ne paraît pas excessive ; que les consorts Y... n'apportent pas la preuve, qui leur incombe, de l'exagération de celle-ci ; que s'ils allèguent que l'administration fiscale n'aurait pas tenu compte de ce que certaines de ces dépenses auraient été réglées par chèque, ils n'apportent aucune pièce justificative à l'appui de cette allégation ;
Sur les pénalités de mauvaise foi relatives aux redressements opérés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, qu'ainsi qu'il a été dit ci-avant, M. Y... a appréhendé au sein de la société nouvelle ALT, dont il était le gérant, une somme de 100.000 F sans que son compte courant dans cette société en soit affecté ; que cette appropriation, en toute connaissance de cause, justifie l'application des pénalités de mauvaise foi infligées par le vérificateur ; que la contestation des consorts Y... de la nature des pénalités appliquées doit, en conséquence, être rejetée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les consorts Y... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris n'a pas fait droit à leur demande de décharge des cotisations complémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. Y... a été assujetti au titre des années 1982 et 1984 résultant des redressements de 122.800 F et 158.000 F afférents aux soldes créditeurs des balances espèces établies pour ces années ; qu'il y a lieu, en conséquence, de réformer sur ce point le jugement attaqué et de rejeter le surplus des conclusions de la requête ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :

Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, de condamner l'Etat à payer aux consorts Y... une somme de 5.000 F au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les consorts Y... sont déchargés des compléments d'impôt sur le revenu auxquels M. Y... a été assujetti au titre des années 1982 et 1984 à concurrence, en base, des redressements de 122.800 F et 158.000 F résultant des soldes créditeurs des balances espèces établies au titre desdites années.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 7 février 1995 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera aux consorts Y... une somme de 5.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête des consorts Y... est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 95PA02899
Date de la décision : 01/07/1999
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - TEXTE APPLICABLE (DANS LE TEMPS ET DANS L'ESPACE).

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL - VERIFICATION APPROFONDIE DE SITUATION FISCALE D'ENSEMBLE (OU ESFP).

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - AMENDES - PENALITES - MAJORATIONS - PENALITES POUR MAUVAISE FOI.


Références :

Arrêté du 17 mars 1983 art. 2
CGI Livre des procédures fiscales L69, L47, L16, L12, L11, L284
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Instruction 1992-XX-XX 13A-1-92
Loi 89-936 du 29 décembre 1989
Loi 92-1376 du 30 décembre 1992 art. 108


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. MORTELECQ
Rapporteur public ?: Mme MARTEL

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1999-07-01;95pa02899 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award