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08/04/2003 | FRANCE | N°00PA00130

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4eme chambre, 08 avril 2003, 00PA00130


VU l'ensemble des pièces jointes et produites au dossier ;

VU le décret n° 95-408 du 18 avril 1995 ;

VU le code de la santé publique ;

VU le code général des collectivités territoriales ;

VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

VU le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2003 :

- le rapport de M. COIFFET, premier conseiller,

- les observations de Me Z..., a

vocat, pour la commune de Chessy, et celles de Me B..., avocat, pour la société Eurodisney,

- et les conclusions...

VU l'ensemble des pièces jointes et produites au dossier ;

VU le décret n° 95-408 du 18 avril 1995 ;

VU le code de la santé publique ;

VU le code général des collectivités territoriales ;

VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

VU le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2003 :

- le rapport de M. COIFFET, premier conseiller,

- les observations de Me Z..., avocat, pour la commune de Chessy, et celles de Me B..., avocat, pour la société Eurodisney,

- et les conclusions de M. HEU, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que, par un arrêté-cadre du 4 juillet 1997, le sous-préfet de Meaux agissant par délégation du préfet de Seine-et-Marne a fixé les conditions dans lesquelles Disneyland Paris pourrait être autorisé à tirer des feux d'artifice ; qu'aux termes de l'article 8 dudit arrêté : Lorsque le pas de tir bunker principal sera mis en oeuvre, compte tenu des risques de retombées d'artifices incandescents sur la portion de route dénommée boulevard du Grand Fossé entre les giratoires D et E, cette voie sera interdite à la circulation 20 minutes avant le tir : elle sera rendue à la circulation après une inspection, suivie d'un nettoyage lorsque celui-ci apparaîtra nécessaire, et après un délai qui ne sera pas inférieur à 5 minutes après le dernier tir ; que, par le recours susvisé, le MINISTRE DE L'INTERIEUR fait appel du jugement du tribunal administratif de Melun du 7 septembre 1999 en tant qu'il a, d'une part, annulé à la demande de la commune de Chessy et de divers habitants de cette commune les dispositions précitées de l'article 8 de l'arrêté-cadre du 4 juillet 1997, d'autre part, condamné l'Etat à payer aux requérants une somme de 4 000 F au titre des frais irrépétibles ; qu'en réponse à la communication qui lui a été donnée du recours du ministre, la société Euro Disney a déclaré en appuyer les conclusions ; que, par la voie du recours incident, la commune de Chessy sollicite l'annulation de la totalité de l'arrêté-cadre du 4 juillet 1997 ;

Sur la recevabilité de l'appel du MINISTRE DE L'INTERIEUR :

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que le jugement attaqué a été notifié le 19 novembre 1999 au MINISTRE DE L'INTERIEUR ; qu'il s'ensuit que le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR enregistré au greffe de la cour le 17 janvier 2000 n'est pas tardif ;

Considérant, d'autre part, qu'en vertu de l'arrêté ministériel du 15 septembre 1999, régulièrement publié au Journal officiel du 19 septembre 1999, portant délégation de signature, le recours dirigé contre le jugement dont s'agit est signé de M. C. Jardin, administrateur civil, chef du bureau du contentieux des libertés publiques et de la police administrative ; que si la commune de Chessy soutient que M. A... n'était fondé à intervenir qu'en cas d'absence ou d'empêchement du directeur des libertés publiques et des affaires juridiques et du sous-directeur du contentieux et des affaires juridiques au ministère de l'intérieur, elle n'établit pas qu'à la date de la signature dudit recours, les supérieurs hiérarchiques du signataire du recours n'aient pas été effectivement absents ou empêchés ;

Considérant, enfin, que le MINISTRE DE L'INTERIEUR a, dans son recours sommaire enregistré dans le délai d'appel, d'abord énoncé l'objet de la demande de première instance qui tendait à l'annulation de l'arrêté-cadre du 4 juillet 1997 du sous-préfet de Meaux, puis, après avoir rappelé la motivation des premiers juges, soutenu, d'une part, que ces derniers avaient fait une inexacte interprétation des textes applicables, le préfet pouvant prescrire sans mise en demeure préalable l'ensemble des dispositions destinées à prévenir les troubles à l'ordre public résultant de tirs de feux d'artifice, d'autre part, que l'article 8 de l'arrêté attaqué avait été édicté dans un but se rattachant à l'exercice des pouvoirs de police administrative ; que ce recours sommaire contenait ainsi l'exposé des faits et moyens prévu par l'article R. 87 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors applicable, lequel n'exigeait pas que les faits et les moyens soient exposés de manière distincte ; qu'il s'ensuit que la commune de Chessy n'est pas fondée à soutenir que le recours serait irrecevable faute d'être motivé ;

Sur la légalité de l'article 8 de l'arrêté-cadre du 4 juillet 1997 :

Considérant que les dispositions précitées de l'article 8 de l'arrêté-cadre du 4 juillet 1997 ont été annulées par le tribunal administratif, d'une part, pour avoir été prises par une autorité incompétente, d'autre part, comme entachées de détournement de pouvoir ;

En ce qui concerne l'incompétence du préfet :

Considérant, qu'aux termes de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales : La police municipale est assurée par le maire, toutefois :...3° Le représentant de l'Etat dans le département est seul compétent pour prendre les mesures relatives à l'ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, dont le champ d'application excède le territoire d'une commune ; qu'aux termes de l'article L. 2215-3 du même code : Les pouvoirs confiés au maire par l'article L. 2213-4 ne font pas obstacle à ce que le représentant de l'Etat dans le département puisse, pour plusieurs communes ou pour une seule commune après mise en demeure adressée au maire et restée sans résultat, interdire, par arrêté motivé, l'accès de certaines voies ou de certaines portions de voies ou de certains secteurs de la ou des communes ( ... ) ;

Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier, en particulier du plan de situation produit par l'administration, que la partie du boulevard du Grand Fossé situé entre les giratoires D et E, dont la plus grande partie de tronçon se trouve sur la commune de Chessy, s'étend également sur le territoire des communes de Coupvray et Montevrain ; que notamment le giratoire E situé sur la commune de Coupvray dessert la route nationale 34 et le boulevard de l'Europe lesquels traversent ladite commune alors que le giratoire D permet de desservir la commune de Montevrain ; que le sous-préfet de Meaux, agissant par délégation du préfet de Seine-et-Marne, était ainsi compétent, sur le seul fondement des dispositions précitées de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, pour interdire temporairement la circulation sur cette voie pendant la durée des tirs de feux d'artifice et ce, sans qu'il soit besoin dans cette hypothèse de mettre en demeure le maire de la commune de Chessy conformément aux dispositions sus-énoncées de l'article L. 2215-3 du code général des collectivités territoriales, lesquelles ne trouvaient pas à s'appliquer ;

En ce qui concerne le détournement de pouvoir :

Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que si les mesures prévues par l'article 8 de l'arrêté-cadre du 4 juillet 1997 ont été rendues nécessaires par l'activité du parc de loisirs de la société Euro Disney, lesdites mesures étaient exclusivement motivées par la volonté d'assurer de façon préventive la sécurité des usagers du boulevard du Grand Fossé au cas où des déchets pyrotechniques tomberaient sur cette voie ; que c'est par suite à tort que les premiers juges ont estimé que le sous-préfet de Meaux avait fait de ses pouvoirs de police un usage détourné ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour annuler les dispositions de l'article 8 de l'arrêté-cadre du 4 juillet 1997 réglementant la circulation sur le boulevard du Grand Fossé, le tribunal administratif s'est fondé sur ce que ces dispositions étaient tout à la fois entachées d'incompétence et de détournement de pouvoir ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les demandeurs devant le tribunal administratif ;

Considérant qu'eu égard au caractère très limité des restrictions apportées à la circulation par l'article 8 de l'arrêté-cadre du 4 juillet 1997, cette mesure ne porte atteinte ni à la liberté de la circulation ni à l'égalité des usagers ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a annulé l'article 8 de l'arrêté-cadre du 4 juillet 1997, en tant qu'il prévoit des interdictions de circulation sur le boulevard du Grand Fossé ; que, par voie de conséquence, le ministre est également fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 du jugement attaqué, le tribunal administratif a condamné l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, à verser aux demandeurs de première instance une somme de 4 000 F au titre des frais irrépétibles ;

Sur la légalité du surplus de l'arrêté-cadre du 4 juillet 1997 :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du code de la santé publique, dans sa rédaction alors applicable : Sans préjudice de l'application de législations spéciales et des pouvoirs reconnus aux autorités locales, des décrets en Conseil d'Etat, pris après consultation du Conseil supérieur d'hygiène publique de France, fixent les règles générales et toutes autres mesures propres à préserver la santé de l'homme, notamment en matière... de lutte contre les bruits de voisinage... ; qu'aux termes de l'article L. 2 du même code : Les décrets mentionnés à l'article L. 1er peuvent être complétés par des arrêtés du représentant de l'Etat dans le département ou par des arrêtés du maire ayant pour objet d'édicter des dispositions particulières en vue d'assurer la protection de la santé publique dans le département ou la commune ; et qu'aux termes de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales : La police municipale est assurée par le maire, toutefois... 3° le représentant de l'Etat dans le département est seul compétent pour prendre les mesures relatives à l'ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, dont le champ d'application excède le territoire d'une commune ;

Considérant que les dispositions précitées du code de la santé publique donnent compétence au représentant de l'Etat dans le département et au maire pour édicter des dispositions particulières complétant celles résultant du décret du 18 avril 1995 relatif à la lutte contre les bruits de voisinage, qui a été codifié sous les articles R. 48-1 à R. 48-5 du code de la santé publique ; que l'arrêté-cadre du sous-préfet de Meaux en date du 4 juillet 1997 fixant les conditions dans lesquelles Disneyland Paris pourrait être autorisé à tirer des feux d'artifice a été pris dans le cadre de ces dispositions ;

Considérant que les tirs de feux d'artifice dont s'agit, s'ils sont effectués depuis le territoire de la commune de Chessy, entraînent des nuisances excédant le territoire de la seule commune de Chessy ; qu'ainsi le sous-préfet de Meaux agissant par délégation du préfet de Seine-et-Marne était compétent, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, pour prendre l'arrêté-cadre du 4 juillet 1997 ;

Considérant que l'article 3 dudit arrêté indique les pas de tir autorisés et prévoit qu'à titre exceptionnel certains tirs pourront être autorisés à partir d'autres lieux lorsque des circonstances exceptionnelles le justifieront ; que, contrairement à ce que soutient la commune de Chessy, le fait que les circonstances exceptionnelles ainsi visées ne soient pas autrement précisées n'est pas constitutif d'une illégalité ;

Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir et de procédure, allégué d'ailleurs sans précision par la commune de Chessy, n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Chessy n'est pas fondée à demander, par la voie du recours incident, l'annulation du surplus de l'arrêté-cadre du 4 juillet 1997 ;

Sur les frais irrépétibles :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit allouée à la commune de Chessy, qui succombe dans la présente instance, la somme qu'elle réclame au titre des frais irrépétibles ;

Considérant qu'il n 'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la commune de Chessy à indemniser la société Euro Disney au titre des frais irrépétibles ;

D E C I D E :

Article 1er : Les articles 1er et 3 du dispositif du jugement du tribunal administratif de Melun du 7 septembre 1999 sont annulés.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Chessy, M. Olivier Y..., M. et Mme Marc X..., M. Claude C... et M. Pierre Y... devant le tribunal administratif de Melun et tendant, d'une part, à l'annulation des dispositions de l'article 8 de l'arrêté-cadre du sous-préfet de Meaux du 4 juillet 1997 prévoyant des interdictions de circulation sur le boulevard du Grand Fossé, d'autre part, à la condamnation de l'Etat au titre des frais irrépétibles, sont rejetées.

Article 3 : Le recours incident de la commune de Chessy est rejeté.

Article 4 : Les conclusions à fin d'indemnisation au titre des frais irrépétibles présentées par la commune de Chessy et par la société Euro Disney sont rejetées.

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N° 00PA00130


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 00PA00130
Date de la décision : 08/04/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JANNIN
Rapporteur ?: M. COIFFET
Rapporteur public ?: M. HEU
Avocat(s) : SCP DELAPORTE et BRIARD ; BINETEAU ;

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2003-04-08;00pa00130 ?
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