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30/06/2004 | FRANCE | N°00PA03185

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2eme chambre - formation a, 30 juin 2004, 00PA03185


Vu, enregistrée au greffe de la cour le 26 octobre 2000, la requête présentée pour M. Daniel X, demeurant ... par la SCP BERNARD LAGARDE, avocat ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 22 juin 2000 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1990, 1991 et 1992 mises en recouvrement le 31 décembre 1994 et des pénalités dont elles ont été assorties ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;


3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15.000 F à titre de remboursement ...

Vu, enregistrée au greffe de la cour le 26 octobre 2000, la requête présentée pour M. Daniel X, demeurant ... par la SCP BERNARD LAGARDE, avocat ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 22 juin 2000 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1990, 1991 et 1992 mises en recouvrement le 31 décembre 1994 et des pénalités dont elles ont été assorties ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15.000 F à titre de remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ;

………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 juin 2004 :

- le rapport de M. ALFONSI, premier conseiller,

et les conclusions de M. MAGNARD, commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'à l'issue de l'examen de l'ensemble la situation fiscale personnelle de M. X, alors incarcéré, l'administration, après lui avoir demandé, sur le fondement de l'article L 16 du livre des procédures fiscales, de justifier l'origine de sommes inscrites au crédit de ses comptes bancaires puis mis en demeure l'intéressé de compléter ses réponses, a taxé d'office comme revenus d'origine indéterminée, sur le fondement de l'article L. 69 du même livre, les sommes correspondant aux crédits bancaires restés injustifiés pour les années 1990, 1991 et 1992 ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de M. X tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu correspondants et les pénalités afférentes ;

Sur l'imposition supplémentaire relative à l'année 1990 :

Considérant que pour demander la décharge des compléments d'impôts qui lui ont été assignés, M. X fait valoir que son incarcération ne lui permettait pas de disposer des éléments justificatifs utiles qu'il entendait fournir et a rendu impossible tout réel débat contradictoire et qu'en conséquence, les visites effectuées par le vérificateur ne pouvaient permettre d'engager un tel débat ;

Considérant que la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, exige que le vérificateur ait recherché un tel dialogue avant même d'avoir recours à la procédure écrite et contraignante de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ; que la méconnaissance de cette exigence a le caractère d'une irrégularité substantielle portant atteinte aux droits et garanties reconnus par la charte au contribuable vérifié ;

Considérant que, dans le cadre de l'examen contradictoire de l'ensemble de sa situation fiscale personnelle dont a fait l'objet M. X, alors incarcéré à la maison d'arrêt de Fresnes, l'administration a adressé au requérant le 24 août 1993 sur le fondement de l'article L.16 du livre des procédures fiscales une demande de justifications concernant ses revenus au cours de l'année 1990 ; que si, préalablement à cette demande de justifications, le vérificateur a fait parvenir au requérant une demande d'information datée du 29 juillet 1993 reçue par l'intéressé le 2 août 1993, ladite demande, eu égard, d'une part, à la nature et au nombre des informations sollicitées, et, d'autre part, au délai, inférieur à trente jours, dans lequel a été ensuite mise en oeuvre la procédure prévue à l'article L. 16, ne tenait pas lieu de l'engagement d'un dialogue contradictoire avec le contribuable ; qu'il n'est ni établi ni allégué que le vérificateur aurait effectué avant le 24 août 1993 d'autres démarches permettant d'établir un tel dialogue ; que, par suite, alors même que le requérant n'aurait pas usé de la faculté dont il disposait de se faire assister par un mandataire au cours des opérations de contrôle, il est fondé à soutenir pour ce motif que la procédure à l'issue de laquelle a été établi le complément d'impôt sur le revenu pour l'année 1990 auquel il a été assujetti est entaché d'irrégularité ;

Sur les impositions supplémentaires relatives aux années 1991 et 1992 :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

S'agissant de l'application de la loi fiscale :

Considérant que, comme il a été dit précédemment il incombe au vérificateur de rechercher un dialogue contradictoire avec le contribuable faisant l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu avant d'avoir recours à la procédure contraignante de demande de justifications visée à l'article L. 16 du même livre ; que le caractère oral d'un tel débat n'est pas exigé à peine d'irrégularité de la procédure suivie ; qu'à la suite de l'avis de vérification reçu par M. X, le vérificateur a adressé au contribuable, en l'absence de mandat donné par celui-ci à son conseil, une demande de renseignements le 8 avril 1994 ; que le vérificateur a en outre effectué les 12 et 29 avril 1994 deux visites à la maison d'arrêt de Fresnes où l'intéressé était détenu ; qu'ainsi, l'incarcération du contribuable durant la période de contrôle n'a pas fait obstacle à l'engagement d'un débat contradictoire, conformément aux garanties reconnues par la charte du contribuable vérifié, avant que l'administration ne fasse usage de la procédure prévue par l'article L. 16 du livre des procédures fiscales en adressant au requérant deux demandes de justifications concernant respectivement l'origine et la nature des crédits figurant sur ses comptes bancaires au cours des années 1991 et 1992 reçues par l'intéressé le 24 mai 1994 ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L 12 du livre des procédures fiscales «...Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification. / La période mentionnée au troisième alinéa est portée à deux ans en cas de découverte, en cours de contrôle , d'une activité occulte. Il en est de même lorsque, dans le délai initial d'un an, les articles L.82 C ou L.101 ont été mis en oeuvre » ; que ni ces dispositions ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'imposent à l'administration, dans le cas où elle fait usage du droit de communication qu'elle détient en vertu des articles L.82 C et L.101 du livre des procédures fiscales, d'informer le contribuable de la prorogation du délai d'examen de l'ensemble de sa situation fiscale personnelle et de ses motifs avant l'expiration du délai d'un an à compter de la réception de l'avis de vérification ; qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'avis de vérification portant examen de situation fiscale personnelle en date du 6 avril 1993, l'administration a mis en oeuvre le 25 juin 1993 le droit de communication à l'égard de l'autorité judiciaire qu'elle tient des articles L.82 C et L.101 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, et en admettant même que l'examen d'ensemble de la situation fiscale personnelle du requérant ait débuté dès le 7 avril 1993, date à laquelle il soutient avoir reçu cet avis de vérification, la période d'un an à compter de cette date n'était pas expirée lorsque l'administration a fait usage de son droit de communication ; que, par suite, bien que le contribuable n'ait eu connaissance de la prorogation de ce délai que le 24 mai 1994, le moyen tiré de ce que la durée de l'examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle de M. X aurait été irrégulièrement prolongée au regard des dispositions précitées de l'article L.47 du livre des procédures fiscales doit être écarté ;

S'agissant de la doctrine administrative :

Considérant que si l'instruction du 15 avril 1988 reprise par la doctrine administrative 13 L 1314 en date du 1er juillet 1989 prévoient qu'en cas de prorogation au delà d'un an d'un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle, le contribuable doit être informé par écrit avant l'expiration du délai d'un an de la poursuite des opérations de contrôle et des motifs de droit de celle-ci, ces dispositions qui traitent de questions touchant à la procédure d'imposition, ne peuvent être regardées comme comportant une interprétation de la loi fiscale au sens de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ni, par suite, être opposées à l'administration sur le fondement dudit article ;

En ce qui concerne le bien fondé des impositions :

Considérant que M. X supporte la charge de la preuve de l'exagération des bases d'impositions qui lui ont été assignées pour les années 1991 et 1992 en application des dispositions des articles L. 193 et R.193-1 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'il a fait l'objet d'une taxation d'office régulière ;

Considérant que si l'attestation établie le 16 mai 1995 par le Cercle de l'industrie et du commerce et produite au dossier des premiers juges comporte, pour des montants supérieurs aux crédits bancaires d'origine inexpliquée pour lesquels il a été taxé d'office, une estimation des gains de jeu que le requérant aurait réalisés au cours des trois années en litige, elle ne mentionne ni la date ni le montant des règlements auxquels il aurait été effectivement procédé au profit de M. X par le service de la comptabilité de ce cercle de jeux ; que ni ce document, dont le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conteste d'ailleurs devant la cour le caractère probant, ni l'ordonnance rendue le 8 avril 1993 par laquelle le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Meaux a ordonné la restitution à M. X de diverses sommes placées sous scellés ne sont de nature à établir que les sommes inscrites au crédit de ses comptes bancaires pour 650.641 F en 1991 et 336.560 F en 1992 auraient pour origine des gains de jeu ; que, par suite, M. X n'apporte pas, en se bornant à produire ces deux documents, la preuve qui lui incombe, en raison de la situation de taxation d'office dans laquelle il s'est placé, de l'exagération des bases d'imposition qui lui ont été assignées ;

Considérant qu'il suit de là que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément d'impôt auquel il a été assujetti en droits et pénalités au titre de l'année 1990 ; que le surplus des conclusions de sa requête doit être rejeté ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions susvisées et de condamner l'Etat à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : M. X est déchargé du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti, en droits et pénalités au titre de l'année 1990.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Melun en date du 22 juin 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

2

00PA03185

Classement CNIJ : 19-01-03-01-03

C


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2eme chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 00PA03185
Date de la décision : 30/06/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés FARAGO
Rapporteur ?: M. Jean ALFONSI
Rapporteur public ?: M. MAGNARD
Avocat(s) : MOSSER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2004-06-30;00pa03185 ?
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