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08/07/2004 | FRANCE | N°01PA01697

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2eme chambre - formation b, 08 juillet 2004, 01PA01697


Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2001 au greffe de la cour, présentée pour le TERRITOIRE DE LA POLYNESIE FRANCAISE, représenté par le président du gouvernement, dont le siège social est ... par la SCP de Chaisemartin-Courjon, avocat au Conseil d'Etat ; le TERRITOIRE DE LA POLYNESIE FRANCAISE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99-459 en date du 19 décembre 2000 en tant que le tribunal administratif de Papeete a prononcé de la décharge des cotisations à l'impôt foncier sur les propriétés bâties mises à la charge de M. Pierre Z... au titre des années

1998 et 1999 dans les rôles de la commune de Pirae ainsi que les centimes ...

Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2001 au greffe de la cour, présentée pour le TERRITOIRE DE LA POLYNESIE FRANCAISE, représenté par le président du gouvernement, dont le siège social est ... par la SCP de Chaisemartin-Courjon, avocat au Conseil d'Etat ; le TERRITOIRE DE LA POLYNESIE FRANCAISE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99-459 en date du 19 décembre 2000 en tant que le tribunal administratif de Papeete a prononcé de la décharge des cotisations à l'impôt foncier sur les propriétés bâties mises à la charge de M. Pierre Z... au titre des années 1998 et 1999 dans les rôles de la commune de Pirae ainsi que les centimes additionnels y afférents et l'a condamné à lui payer la somme de 30 000 FCP au titre des frais irrépétibles ;

2°) de rétablir les impositions en cause et rejeter l'ensemble des conclusions de première instance de M. Z... ;

…………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Classement CNIJ : 46-01-02-02

B 19-01-01-01-04

Vu la décision n° 2002-458 DC du Conseil constitutionnel en date du 17 février 2002 ;

Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie Française

Vu le code des impôts de la Polynésie française ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 juin 2004 :

- le rapport de Mme de LIGNIERES, premier conseiller,

- les observations de Me de X..., avocat au Conseil d'Etat, pour la POLYNESIE FRANCAISE,

- et les conclusions de M. BATAILLE, commissaire du Gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'appel :

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort de l'examen de la minute du jugement du 19 décembre 2000 que, contrairement à ce qu'affirme la POLYNESIE FRANÇAISE, les visas de ce jugement comportent l'analyse des moyens et des conclusions présentés par les parties conformément aux dispositions de l'article R. 200 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel aujourd'hui reprises à l'article R. 741-2 du code de justice administrative ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 221-1 du code des impôts de la Polynésie française : « L'impôt foncier est établi annuellement sur les propriétés bâties sises dans le territoire… » ; qu'aux termes de l'article 225-2 : « … La valeur locative est déterminée au moyen des baux authentiques ou des locations verbales passées dans les conditions normales. En l'absence d'actes de l'espèce, la valeur locative est déterminée par la méthode d'évaluation directe : /-évaluation de la valeur vénale foncière du bien ; /-détermination du taux d'intérêt, pour chaque nature de propriété dans la région considérée ; /-application du taux d'intérêt à la valeur vénale./ Les règles pratiques d'application de la méthode d'évaluation directe pour les locaux à usage d'habitation d'une part, et les locaux commerciaux, industriels et à usage professionnel d'autre part, sont définis dans un arrêté pris en conseil des ministres qui pourra, le cas échéant, fixer un coefficient de réévaluation des valeurs locatives calculées par la méthode./ En tout état de cause, les valeurs locatives ainsi déterminées ne pourront dépasser les taux généraux des loyers pratiqués pour des immeubles semblables d'une même agglomération…. » ; qu'aux termes de l'article 225-3, l'imposition « est due pour l'année entière par le propriétaire au 1er janvier de l'année de l'imposition » ; et qu'en vertu de l'article 225-4, elle « est calculée par application d'un taux de 10% à la valeur locative déterminée selon les prescriptions des articles 225-1 et 225-2… » ;

Considérant que pour accorder à M. Z... la décharge des cotisations à l'impôt foncier sur les propriétés bâties auxquelles il demeurait assujetti au titre des années 1998 et 1999 après le dégrèvement partiel décidé en cours d'instance, le tribunal administratif de Papeete s'est fondé sur l'illégalité de l'arrêté n° 1274/CM du 17 septembre 1999 du président du gouvernement de la Polynésie Française pris en conseil des ministres pour l'application de l'article 225-2 précité du code des impôts ; que cet arrêté étant, en tout état de cause, insusceptible de s'appliquer à des impositions dont le fait générateur était antérieur à son entrée en vigueur, la POLYNESIE FRANÇAISE soutient à bon droit que les premiers juges se sont fondés sur un moyen inopérant pour prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour saisie de l'ensemble du litige en vertu de l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M. Z... devant le tribunal administratif ;

Considérant qu'aux termes de l'article 74 de la Constitution dans sa rédaction alors en vigueur : « …Les statuts des territoires d'outre-mer sont fixés par des lois organiques qui définissent, notamment, les compétences de leur institutions propres… » ; qu'en vertu du premier alinéa de l'article 5 de la loi organique du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie Française alors en vigueur : Nonobstant toutes dispositions contraires, les autorités de la Polynésie Française sont compétentes dans toutes les matières qui ne sont pas dévolues à l'Etat par les dispositions de l'article 6 de la présente loi ou aux communes par la législation applicable sur le territoire ; qu'aux termes de l'article 60 de la même loi : …Toutes les matières qui sont de la compétence du territoire relèvent de l'assemblée de la Polynésie française, à l'exception de celles qui sont attribuées par la présente loi au conseil des ministres ou au président du gouvernement de la Polynésie Française » ; qu'aux termes de l'article 26 de ladite loi : « …Le conseil des ministres prend les règlements nécessaires à la mise en oeuvre des délibérations de l'assemblée de la Polynésie française ou de sa commission permanente » ; qu'il résulte de l'ensemble des dispositions précitées d'une part que la détermination des règles fiscales n'est pas au nombre des compétences énumérées par l'article 6 de la loi organique et ressortit par conséquent aux compétences des autorités de la Polynésie Française, d'autre part que seule l'assemblée de la Polynésie Française a le pouvoir de voter des dispositions réglementaires à caractère fiscal concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ; qu'aucune disposition de la loi organique n'a autorisé l'assemblée à déléguer au conseil des ministres la compétence qui lui a ainsi été attribuée ; que l'article 26 de la loi organique n'autorise le conseil des ministres qu'à prendre des mesures d'application, lesquelles ne peuvent inclure des dispositions portant sur la définition même des bases d'imposition ;

Considérant qu'il ressort des dispositions précitées de l'article 225-2 du code des impôts que la valeur locative des propriétés passibles de l'impôt foncier, calculée selon la méthode d'évaluation directe, résulte de l'application du taux d'intérêt, déterminé pour chaque nature de propriété dans la région considérée, à la valeur vénale foncière du bien ; qu'en s'abstenant de fixer elle-même ce taux d'intérêt qui est l'un des éléments constitutifs de la base d'imposition à l'impôt foncier à laquelle s'applique le taux de 10% fixé par l'article 225-4 précité du même code, l'assemblée de la Polynésie Française a méconnu l'étendue de sa compétence ; qu'il suit de là, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens soulevés en première instance, d'une part, que l'article 225-2 du code des impôts est, dans cette mesure, entaché d'illégalité, d'autre part, que l'impôt foncier sur les propriétés bâties auquel M. Z... demeure assujetti au titre des années 1998 et 1999 sur la base d'un taux d'intérêt de 4% qui résulte d'une simple pratique administrative du service des contributions de la Polynésie française est dépourvu de base légale ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la POLYNESIE FRANÇAISE n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Papeete a déchargé M. Y... du surplus des cotisations à l'impôt foncier sur les propriétés bâties mises à sa charge au titre des années 1998 et 1999 dans les rôles de la commune de Pirae ainsi que des centimes additionnels y afférents ;

Sur les conclusions de M. Z... tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. Z... se borne à demander par voie d'appel incident, que la somme de 30 000 F CFP que la POLYNESIE FRANÇAISE a été condamnée à lui verser au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, par l'article 5 du jugement attaqué, soit portée à 150 000 F CFP ; qu'il ne résulte, toutefois, pas de l'instruction que les premiers juges aient fait une appréciation inexacte des frais exposés par M. Z... en première instance ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la POLYNESIE FRANÇAISE est rejetée.

Article 2 : L'appel incident de M. Z... est rejeté.

2

N° 01PA01697


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 01PA01697
Date de la décision : 08/07/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-01-01-0446-01-02-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES. - GÉNÉRALITÉS. - TEXTES FISCAUX. - LÉGALITÉ DES DISPOSITIONS FISCALES. - DISPOSITIONS CONCERNANT L'ASSIETTE DE L'IMPÔT - COMPÉTENCE DE L'ASSEMBLÉE DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE (ART. 26 ET 60 DE LA LOI ORGANIQUE DU 12 AVRIL 1996) - PORTÉE DES DÉLÉGATIONS POUVANT ÊTRE CONSENTIES.

z19-01-01-01-04z46-01-02-02z En vertu des dispositions de l'article 74 de la Constitution de 1958 et de celles des articles 26 et 60 de la loi organique du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, alors en vigueur, seule l'assemblée de la Polynésie française a le pouvoir de voter des dispositions réglementaires à caractère fiscal concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature. Aucune disposition de la loi organique n'a autorisé l'assemblée de la Polynésie française à déléguer au conseil des ministres la compétence qui lui a été ainsi attribuée. L'article 26 de la loi organique n'autorise le conseil des ministres qu'à prendre des mesures d'application, lesquelles ne peuvent inclure des dispositions portant sur la définition même des bases d'imposition. En s'abstenant de fixer, elle-même le taux d'intérêt prévu par les dispositions de l'article 225-2 du code des impôts de la Polynésie française et permettant de déterminer la valeur locative des propriétés passibles de l'impôt foncier calculé selon la méthode d'évaluation directe, alors pourtant que ce taux est au nombre des éléments constitutifs de la base d'imposition à l'impôt foncier sur les propriétés bâties, l'assemblée de la Polynésie française a méconnu l'étendue de sa compétence.


Composition du Tribunal
Président : M. COUZINET Test
Rapporteur ?: Mme Frédérique DE LIGNIERES
Rapporteur public ?: M. BATAILLE
Avocat(s) : DE CHAISEMARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2004-07-08;01pa01697 ?
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