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10/05/2005 | FRANCE | N°01PA04316

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3eme chambre - formation b, 10 mai 2005, 01PA04316


Vu la requête, enregistrée le 27 décembre 2001, présentée pour Mme Kenza X, Mme Ghita X, M. Mohamed Ali X et M. Ghali X, élisant domicile ..., par la SCP Leclerc et associés ; les consorts X demande à la cour :

1°)l'annulation de la décision du 10 avril 1997 par laquelle l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris a refusé d'indemniser M. X Azzedine en réparation des préjudices causés par deux interventions chirurgicales effectuées le 12 décembre 1994 à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière ;

2°) la condamnation de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris au ve

rsement de la somme de 12 292 560, 16 F (1 873 988, 7 euros) au titre des divers pr...

Vu la requête, enregistrée le 27 décembre 2001, présentée pour Mme Kenza X, Mme Ghita X, M. Mohamed Ali X et M. Ghali X, élisant domicile ..., par la SCP Leclerc et associés ; les consorts X demande à la cour :

1°)l'annulation de la décision du 10 avril 1997 par laquelle l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris a refusé d'indemniser M. X Azzedine en réparation des préjudices causés par deux interventions chirurgicales effectuées le 12 décembre 1994 à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière ;

2°) la condamnation de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris au versement de la somme de 12 292 560, 16 F (1 873 988, 7 euros) au titre des divers préjudices subis tant par eux-mêmes que par M. X, décédé ;

3°) subsidiairement, d'ordonner une nouvelle expertise ;

Les consorts X font valoir que c'est en dénaturant les pièces du dossier que les premiers juges ont écarté la responsabilité sans faute de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris dans la paraplégie dont M. X a été victime suite aux interventions chirurgicales que ce dernier a subies le 12 décembre 1994 à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière ; que les conditions sont réunies pour que la responsabilité sans faute de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris soit engagée ; que l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris n'a pas satisfait à son obligation d'information des risques connus de paraplégie que présentait l'intervention chirurgicale subie par M. X ; que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que cette absence d'information n'avait pas eu pour effet de faire perdre à M. X une chance de se soustraire au risque qui s'est réalisé ; qu'en effet, contrairement aux conclusions de l'expert, l'état de santé de M. X n'était pas tel que, en l'absence de l'intervention chirurgicale, une paraplégie serait inévitablement survenue dans un délai de quatre à six semaines ; que, d'ailleurs, M. X n'est décédé qu'en mars 1999 ; qu'une faute, qui a été la cause directe de la paraplégie dont M. X est demeuré atteint, a été commise lors de l'intervention chirurgicale pratiquée au sein du service de la Pitié-Salpêtrière ; que cette faute résulte d'une part de la décision de pratiquer une opération qui n'était pas nécessaire, compte tenu de son état antérieur qui s'était trouvé amélioré par l'intervention en urologie et le traitement hormonal qu'il avait subi, et, d'autre part, de la conduite de ladite opération qui a entraîné une lésion de la moelle épinière de M. X ; que si la cour ne s'estimait pas suffisamment informée sur ce point, il y aurait lieu d'ordonner une expertise de nature à établir la réalité et l'importance des fautes commises ; que les consorts X en raison des fautes commises par l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris sont fondés à solliciter l'indemnisation qu'ils réclament du préjudice professionnel et du préjudice moral subi par M. X, du remboursement des frais hospitaliers et des frais médicaux de ce dernier ainsi que du préjudice personnel qu'ils ont subi du fait de la faute de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 avril 2005 :

- le rapport de M. Amblard, rapporteur,

- les observations de Me Simon, pour les consorts X, et celles de Me Tsouderos, pour l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris,

- les conclusions de Mme Adda, commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité sans faute :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport de l'expert, que l'intervention décompressive de la moelle épinière pratiquée le 12 décembre 1994 sur M. X était nécessaire au traitement des troubles neurologiques liés au cancer de la prostate dont ce dernier souffrait ; qu'une telle intervention présente des risques connus dont la réalisation, estimée à 20 % des cas, ne peut être considérée comme exceptionnelle ; que, de plus, la paraplégie dont M. X est demeuré atteint après l'opération du 12 décembre 1994 ne peut être considérée comme sans rapport avec l'état initial de ce dernier qui était affecté par des troubles neurologiques se traduisant notamment par des douleurs lombaires nocturnes avec engourdissement des membres inférieurs ; que, dans ces circonstances, les premiers juges ont pu, sans dénaturer les faits de l'espèce, considérer que, malgré son extrême gravité, la paraplégie dont M. X est resté atteint n'était pas de nature à engager la responsabilité sans faute de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris ;

Sur la responsabilité pour faute :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte du rapport de l'expert que M. X présentait des métastases vertébrales et épidurales résultant d'un cancer de la prostate généralisé ; que le scanner pratiqué le 17 novembre 1994 montrait l'existence d'une volumineuse masse tumorale intracanalaire en regard de la onzième vertèbre dorsale ainsi que des lésions osseuses multiples envahissant toutes les vertèbres de D 12 à 0 S1 ; que cette observation avait conduit les neurochirurgiens marocains qui soignaient M. X à envisager une intervention d'urgence de décompression de la moelle épinière ; que, toutefois, M. X avait préféré qu'une telle opération soit effectuée au sein de l'hôpital la Pitié-Salpêtrière ; qu'en l'absence d'une telle opération, le risque d'une paraplégie brutale était inéluctable à court terme ; que dans ces circonstances, et nonobstant le fait que, d'une part, une légère amélioration de l'état de santé de M. X avait été constatée, amélioration qui ne pouvait résulter que de l'effet d'une corticothérapie et non d'une diminution des métastases qui n'aurait pu intervenir, à supposer que le cancer dont M. X était atteint soit hormono-dépendant, que 3 à 6 mois après la pulpectomie testiculaire réalisée le 25 novembre 1994, et que, d'autre part, ce dernier pouvait marcher lorsqu'il est entré à l'hôpital pour y subir l'opération du 12 décembre 1994, l'existence d'une faute résultant d'une erreur de diagnostic quant à la nécessité et à l'urgence d'entreprendre l'opération suite à laquelle l'intéressé est resté paraplégique n'est pas établie ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort du rapport de l'expert que la paraplégie dont M. X est resté atteint provient du fait comme c'est le cas une fois sur cinq, (...) d'un phénomène vasculaire intramédullaire (...) dont le mécanisme (...) n'est pas connu à l'heure actuelle ; que l'existence (des) métastases épidurales entraîne une modification de la vascularisation artérielle, susceptible d'altérer le fonctionnement de la partie de la moelle épinière située en regard ; c'est ce qui explique les 20 % de paraplégies postopératoire qui ne sont pas dues à 20 % de fautes opératoires ; (qu')on ne trouve pas à la lecture des compte-rendus opératoire et anatomopathologique d'éléments montrant qu'il y a eu faute durant les deux interventions (pratiquées le 12 décembre 1994) ; qu'il ne ressort pas dudit rapport et qu'il n'est pas établi par les pièces produites par les requérants que, comme ces derniers l'affirment, en l'absence de paraplégie constatée avant l'opération et de compression réelle de la moelle épinière, comme cela aurait été le cas en l'espèce, les lésions ischémiques à l'origine de la paraplégie postopératoire dont M. X est resté atteint résulteraient nécessairement d'une faute commise au cours de l'intervention chirurgicale ;

Considérant, en troisième lieu, que l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris ne produit aucun élément de nature à infirmer les allégations des requérants selon lesquelles M. X n'aurait pas été informé des risques de paraplégie pouvant résulter de l'opération qui lui était proposée ; que, dès lors, l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris, qui n'était pas dispensé par la seule qualité de chirurgien expérimenté de M. X de fournir une telle information, a ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; que, toutefois, ainsi que l'ont exactement relevé les premiers juges, eu égard au caractère inéluctable de la paraplégie complète et définitive à laquelle l'affection dont M. X était atteint devait conduire à très court terme, la faute de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris n'a pas entraîné pour ce dernier une perte de chance de se soustraire au risque qui s'est réalisé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les consorts X ne sont pas fondés à demander l'annulation du jugement entrepris ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer aux consorts X la somme qu'ils réclament à ce titre ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner les consorts X à payer à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris la somme qu'elle réclame en remboursement des frais irrépétibles qu'elle a engagés ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête des consorts X est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris est rejeté.

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N° 01PA04316


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 01PA04316
Date de la décision : 10/05/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FOURNIER DE LAURIERE
Rapporteur ?: M. François AMBLARD
Rapporteur public ?: Mme ADDA
Avocat(s) : SCP LECLERC et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-05-10;01pa04316 ?
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