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21/10/2005 | FRANCE | N°05PA02225

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites a la frontiere, 21 octobre 2005, 05PA02225


Vu, enregistrée le 2 juin 2005 au greffe de la cour d'appel sous le n° 05PA02225, la requête présentée pour M. Louis Renald X, élisant domicile ..., par Me Roufiat, avocat à la cour ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler la décision du 28 avril 2005 du juge délégué du Tribunal administratif de Paris rejetant sa demande à l'annulation de l'arrêté du 18 décembre 2003 du préfet de police de Paris ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté ainsi que la décision initiale de refus de titre de séjour en date du 19 février 2003 et de con

damner l'Etat à lui verser une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 76...

Vu, enregistrée le 2 juin 2005 au greffe de la cour d'appel sous le n° 05PA02225, la requête présentée pour M. Louis Renald X, élisant domicile ..., par Me Roufiat, avocat à la cour ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler la décision du 28 avril 2005 du juge délégué du Tribunal administratif de Paris rejetant sa demande à l'annulation de l'arrêté du 18 décembre 2003 du préfet de police de Paris ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté ainsi que la décision initiale de refus de titre de séjour en date du 19 février 2003 et de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu 'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret du 30 juin 1946 modifié ;

Le requérant ayant été averti du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 octobre 2005 :

- le rapport de M. Estève, magistrat délégué,

- les observations de M. X et de Me Roufiat, pour M. X,

- et les conclusions de M. Bataille, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants :…3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait… ;

Considérant que M. X, qui est de nationalité mauricienne, s'est maintenu en France après avoir reçu notification le 10 mars 2003 de la décision en date du 19 février 2003 par laquelle le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour ; que, dès lors ; le préfet de police pouvait, le 18 décembre 2003, ordonner, sur le fondement des dispositions législatives précitées, la reconduite à la frontière du requérant ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 19 février 2003 :

Considérant qu'il n'appartient pas au juge délégué pour le contentieux des arrêtés de reconduite à la frontière de connaître des conclusions tendant à l'annulation de la décision par laquelle un préfet refuse de délivrer un titre de séjour à un étranger mais seulement, si la décision n'est pas devenue définitive, de statuer sur l'exception tirée de l'illégalité de cette décision ; que les conclusions de M. X tendant à l'annulation de la décision du 19 février 2003, ne peuvent donc, en tout état de cause, qu'être rejetées par le jugement d'appel ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Considérant que M. Croone, sous-directeur de l'administration des étrangers, et signataire de la décision attaquée, a reçu délégation de signature à l'effet de signer les actes de la nature de la décision attaquée par arrêté n° 2003-15000du préfet de police en date du 2 janvier 2003 modifié par l'arrêté n° 2003-15596 en date du 26 mai 2003, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris le 6 juin 2003, qu'ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir que cette décision aurait été prise par une autorité incompétente ;

Considérant que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. X le 18 décembre 2003, comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de cette décision ; qu'ainsi, ledit arrêté répond aux exigences de motivation des actes administratifs ;

Considérant qu'indépendamment de l'énumération donné par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre un arrêté de reconduite à la frontière à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour des étrangers en France ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant » ;

Considérant que pour prouver la réalité d'un séjour en France depuis plus de dix ans, le requérant, qui soutient être entré en France en novembre 1990 et y résider depuis, ne produit, pour les années 1990 à 1998, que des courriers, des factures, une ordonnance, des attestations et des photographies ; que ces documents sont dépourvus d'un caractère probant suffisant pour établir la réalité et la durée du séjour allégué ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il pouvait recevoir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des dispositions susrappelées ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et des libertés d'autrui » ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis 7° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit (…) à l'étranger (…) dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus » ;

Considérant que M. X était âgé de 66 ans au moment de la décision attaquée, que son épouse dont il n'est pas séparé, réside régulièrement en France de même que trois de ses enfants et quatre de ses petits enfants, dont certains sont de nationalité française ; que dans les circonstances particulières de l'espèce, et alors même que son épouse pouvait demander à bénéficier du regroupement familial, l'arrêté attaqué a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue desquels il a été pris ; qu'il a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, par suite, que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser 500 euros à M. X, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 28 avril 2005 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : L'Etat versera à M. X en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative une somme de 600 €.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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PA0

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N° 05PA02225


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05PA02225
Date de la décision : 21/10/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Marc ESTEVE
Rapporteur public ?: M. BATAILLE
Avocat(s) : ROUFIAT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-10-21;05pa02225 ?
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