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14/11/2005 | FRANCE | N°05PA00772

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3eme chambre - formation b, 14 novembre 2005, 05PA00772


Vu, I, sous le n° 05PA00772, la requête et le mémoire ampliatif enregistrés les 24 février et 8 avril 2005 présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS, dont le siège est 15 rue des Chaudins, B.P. 98 à Nemours (77796) cedex, par Me Le Prado ; le CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS demande à la cour d'annuler le jugement en date du 21 décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Melun, après l'avoir déclaré responsable des fautes médicales commises dans les soins dispensés à son agent, Mme X, l'a condamné à payer à cette dernière une somme de 134 369, 65 euros en rép

aration des divers préjudices ayant résulté desdites fautes ;

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Vu, I, sous le n° 05PA00772, la requête et le mémoire ampliatif enregistrés les 24 février et 8 avril 2005 présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS, dont le siège est 15 rue des Chaudins, B.P. 98 à Nemours (77796) cedex, par Me Le Prado ; le CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS demande à la cour d'annuler le jugement en date du 21 décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Melun, après l'avoir déclaré responsable des fautes médicales commises dans les soins dispensés à son agent, Mme X, l'a condamné à payer à cette dernière une somme de 134 369, 65 euros en réparation des divers préjudices ayant résulté desdites fautes ;

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Vu, II, sous le n° 05PA01017, la requête enregistrée le 11 mars 2005 présentée pour le CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS, dont le siège est 15 rue des Chaudins, B.P. 98, à Nemours (77796) cedex, par Me Le Prado ; le CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS demande à la cour d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement en date du 21 décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Melun l'a condamné à payer à Mme X une somme de 134 369, 65 euros ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 octobre 2005 :

- le rapport de M. Amblard, rapporteur,

- les observations de Me Demailly pour le CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS,

- et les conclusions de Mme Helmlinger, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, qui était au moment des faits, agent de service hospitalier au CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS, a été victime, le 15 septembre 1992, d'un accident de service qui a provoqué une lésion du quatrième doigt de la main droite pour laquelle elle a été soignée dans l'établissement dont elle était l'employée ; que Mme X garde de cet accident des séquelles qu'elle impute aux soins qui lui ont été dispensés ; que, par jugement du 21 décembre 2004, le Tribunal administratif de Melun a déclaré le CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS entièrement responsable des séquelles tant physiologiques que psychologiques dont Mme X reste atteinte du fait dudit accident de service et l'a condamné à indemniser cette dernière des préjudices qui en ont résulté ; que le CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS forme appel principal sur le principe et le montant de certaines de ces indemnités ; que Mme X demande la confirmation du jugement attaqué et la majoration de l'indemnité accordée par ledit jugement des intérêts échus et capitalisés ainsi que, par la voie du recours incident, la condamnation du CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS à lui payer une somme de 5 000 euros de dommages et intérêts pour abus de droit d'agir en justice ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, que si les articles 1er et 7 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques ainsi que l'article 26 du décret du 9 septembre 1965 ouvrent à la Caisse des dépôts et consignations agissant comme gérante de la caisse nationale des retraites des personnels hospitaliers, à l'encontre du tiers responsable d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle, une action en remboursement des prestations versées à la victime, la collectivité publique employeur de l'agent n'a pas, pour l'application de ces dispositions, la qualité de tiers vis-à-vis de l'agent et de la caisse débitrice des prestations ; que Mme X imputant à la collectivité publique qui l'employait la responsabilité des dommages qu'elle a subis, la caisse des dépôts et consignations n'a pas à être mise en cause ;

Considérant, en second lieu qu'il résulte des pièces du dossier, et notamment du rapport de l'expert et du sapiteur qu'il s'est adjoint, que l'accident de service dont Mme X a été victime s'est produit alors que cette dernière présentait un terrain psychique fragile qui a constitué un élément défavorable pour une bonne prise en charge thérapeutique et qui a eu un rôle prédominant dans la gravité des séquelles qui en ont résulté ; que, pour autant, cette fragilité ne saurait être regardée comme la cause des préjudices dont l'indemnisation est demandée même si, comme le relève l'expert, du fait de l'appréciation erronée de la gravité des conséquences de l'accident de service n'ayant pas immédiatement donné lieu à un arrêt de travail et des soins appropriés, elle a pu favoriser l'apparition, après l'accident de service, de troubles psychologiques ayant aggravé les séquelles qui auraient dû résulter de l'infection du doigt blessé qui a nécessité son amputation ; que, dans ces circonstances, le CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS, qui ne conteste pas que des fautes ont été commises par ses services dans les soins prodigués à Mme X, n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif, en motivant sa décision par le fait que (les préjudices invoqués)... ne sont pas les conséquences directes de l'accident de service (... mais qu'ils) s'expliquent avant tout par l'inadaptation et l'insuffisance des soins initiaux donnés audit CENTRE HOSPITALIER et, à titre second par l'existence d'une fragilité psychique constitutionnelle et que cette fragilité ne pouvant être ni assimilée à un état antérieur, ni être imputé à faute à la victime , aurait dénaturé les faits de l'espèce en jugeant qu'il était entièrement responsable des conséquences de l'accident ;

Sur le principe et l'étendue du droit à indemnisation :

Considérant, qu'alors même qu'elle bénéficie, au titre de son accident du travail, d'une pension d'invalidité qui lui a été accordée dans les conditions prévues par les articles 30 et 31 du décret du 9 septembre 1965, Mme X conserve le droit de demander au CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS, en l'absence même d'une faute de cet établissement public, la réparation des souffrances physiques et morales et des préjudices esthétique et d'agrément pouvant résulter de son accident de service ; qu'en établissant que celle-ci trouve son origine, comme elle le soutient, dans une faute de l'administration, Mme X peut prétendre, en outre, au versement d'une indemnité réparant ses autres chefs de préjudice, dans la mesure où ils ne seraient pas entièrement réparés par le versement de la pension et de la rente viagère d'invalidité ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est pas contesté, que le CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS a commis une faute dans le traitement de la blessure de Mme X résultant de l'accident de service du 15 septembre 1992 ; que, ainsi qu'il a été dit plus haut, le terrain psychologique fragile que présentait Mme X ne peut être, dans les circonstances de l'espèce, regardé comme étant de nature à justifier une atténuation de la responsabilité dudit CENTRE HOSPITALIER ;

Sur les préjudices :

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut que Mme X est fondée à solliciter la réparation des souffrances physiques et morales et des préjudices esthétique et d'agrément qui ont résulté de son accident de service ainsi que de ses autres chefs de préjudice non entièrement réparés par le versement de la pension et de la rente viagère d'invalidité ; que toutefois doivent être retranchées des indemnités auxquelles elle peut prétendre à ces divers titres la fraction de la pension d'invalidité qui lui est servie par la caisse des dépôts et consignations et qui est destinée à en assurer la réparation ; que Mme X perçoit une pension d'invalidité correspondant à un taux global d'IPP de 65 % indemnisant les suites de plusieurs accidents de service ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier la part de cette pension destinée à assurer la réparation des seules suites de l'accident de service du 15 septembre 1992 ; qu'il y a lieu en conséquence d'ordonner un supplément d'instruction et de demander à la Caisse des dépôts et consignations de produire, dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt, un état faisant apparaître la date de la décision fixant le taux de l'IPP résultant directement des suites du seul accident de service du 15 septembre 1992, le taux d'invalidité reconnu de ce fait et la part du montant total de la pension servie à Mme X qui lui est versée à ce titre ;

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-14 du code de justice administrative : Sauf dispositions particulières, le recours en appel n'a pas d'effet suspensif s'il n'en est autrement ordonné par le juge d'appel ; qu'aux termes de l'article R. 811-16 du même code : Lorsqu'il est fait appel par une personne autre que le demandeur en première instance, la juridiction peut, à la demande de l'appelant, ordonner sous réserve des dispositions des articles R. 533-2 et R. 541-5 qu'il soit sursis à l'exécution du jugement déféré si cette exécution risque d'exposer l'appelant à la perte définitive d'une somme qui ne devrait pas rester à sa charge dans le cas où ses conclusions d'appel seraient accueillies ;

Considérant que, par le jugement litigieux, il a été accordé à Mme X une indemnité totale d'un montant de 134 369,65 euros ; que cette somme est accordée en réparation des divers préjudices suivants ayant résulté de la faute commise par l'hôpital de Nemours dans le traitement de la blessure de Mme X : pretium doloris, préjudice esthétique, préjudice moral né des séquelles psychiatriques de l'accident, préjudices physiologiques et psychologiques subis pendant la période d'ITT et obligation d'avoir recours à une aide ménagère ; que toutefois il n'a pas été déduit de cette somme la part de la pension d'invalidité indemnisant éventuellement les mêmes chefs de préjudice ; que les premiers juges, faute d'avoir retranché ladite part de la pension d'invalidité indemnisant les même préjudices que ceux justifiant l'indemnité totale de 134 369,65 euros par eux allouée à Mme X ont commis une erreur de droit de nature à justifier la réformation du jugement entrepris ; qu'il résulte des pièces du dossier que le capital représentatif de la pension d'invalidité servie à Mme X en réparation, notamment, des conséquences de l'accident de service du 15 septembre 2002 est de 186.422,73 euros ; que, dans ces circonstances, le CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS est fondé à solliciter le sursis à l'exécution du jugement rendu par le Tribunal administratif de Melun en date du 21 décembre 2004 dont l'exécution l'exposerait à la perte définitive d'une somme qui est susceptible de ne rester que partiellement à sa charge ;

Sur les conclusions reconventionnelles de Mme X tendant à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS pour abus de droit :

Considérant que Mme X n'est pas fondée à solliciter le payement d'une somme de 5 000 euros au titre de ses conclusions susanalysées ;

D E C I D E :

Article 1 : Il est sursis à l'exécution du jugement rendu par le Tribunal administratif de Melun en date du 21 décembre 2004.

Article 2 : Les conclusions présentées par Mme X et tendant à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS pour abus de droit sont rejetées.

Article 3 : Avant de statuer sur les droits à indemnité de Mme X, il sera procédé contradictoirement à un supplément d'instruction aux fins de déterminer la date et le montant de la part de la pension d'invalidité servie par la caisse des dépôts et consignations à la requérante indemnisant le seul accident de service du 15 septembre 1992.

Article 4 : Il est accordé à la Caisse des dépôts et consignations un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt pour faire parvenir au greffe de la Cour les informations définies à l'article 3 ci-dessus.

Article 5 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

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N° 05PA00772, 05PA01017


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 05PA00772
Date de la décision : 14/11/2005
Sens de l'arrêt : Avant dire-droit
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FOURNIER DE LAURIERE
Rapporteur ?: M. François AMBLARD
Rapporteur public ?: Mme HELMLINGER
Avocat(s) : DELECROIX

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-11-14;05pa00772 ?
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