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21/11/2005 | FRANCE | N°04PA01716

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5eme chambre - formation b, 21 novembre 2005, 04PA01716


Vu la requête enregistrée le 18 mai 2004, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Hoin ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 993418 en date du 18 mars 2004 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1992, 1993 et 1994 ;

2) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 15 000 euros au titre de l'article L.

761-1 du code de justice administrative ;

...........................................

Vu la requête enregistrée le 18 mai 2004, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Hoin ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 993418 en date du 18 mars 2004 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1992, 1993 et 1994 ;

2) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, modifiée, portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques ;

Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 novembre 2005 :

- le rapport de M. Pailleret, rapporteur,

- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. et Mme X étaient associés de la société en nom collectif Lagon d'Or dont le siège social est à Pointe-à-Pitre (Guadeloupe) ayant notamment pour activité la recherche, l'acquisition et l'exploitation de tous navires de plaisance ; qu'à la suite d'une vérification de la comptabilité de cette société qui a conduit le service à remettre en cause le régime de déduction prévu à l'article 238 bis HA du code général des impôts en faveur de certains investissements réalisés dans les départements d'outre-mer, ainsi que les déficits d'exploitation déclarés par ladite société, M. et Mme X, ont été assujettis à des suppléments d'impôt sur le revenu au titre des années 1992, 1993 et 1994 à raison de leur quote-part dans les résultats de ladite société ; qu'ils font appel du jugement en date du 18 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne la procédure de vérification de comptabilité de la SNC Lagon d'Or :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 du même livre : Un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification (...) ;

Considérant que, si l'administration a recherché, avant l'envoi de l'avis de vérification prévu par l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, des renseignements relatifs à l'activité de la SNC Lagon d'Or et au bateau du même nom auprès des services des douanes et des affaires maritimes, il résulte de l'instruction que ces recherches ponctuelles, compte tenu de la nature des informations sur lesquelles elles ont porté, doivent être regardées comme l'exercice par l'administration du droit de communication prévu par les articles L. 81 et suivants du livre des procédures fiscales et non comme l'engagement d'une vérification de comptabilité ; que les requérants ne sont, dès lors, pas fondés à soutenir que la vérification de comptabilité de la SNCLagon d'Or aurait débuté avant l'envoi d'un avis de vérification, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables ; que si ces dispositions ont pour conséquence que toute vérification de comptabilité doit en principe se dérouler dans les locaux de l'entreprise vérifiée, la vérification n'est toutefois pas nécessairement entachée d'irrégularité du seul fait qu'elle ne s'est pas déroulée dans ces locaux ; qu'il en va ainsi lorsque, notamment, la comptabilité ne se trouve pas dans l'entreprise et que, d'un commun accord entre le vérificateur et les représentants de l'entreprise, les opérations de vérification se déroulent au lieu où se trouve la comptabilité, dès lors que cette circonstance ne fait, par elle-même, pas obstacle à ce que la possibilité d'engager avec le vérificateur un débat oral et contradictoire demeure offerte aux représentants de l'entreprise vérifiée ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SNC Lagon d'Or a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices clos en 1992, 1993 et 1994 dont elle a été informée par deux avis notifiés le 2 octobre 1995 à la gérante de la société, respectivement à l'adresse indiquée comme étant celle de son siège social et au domicile personnel de la gérante situé dans l'Ain ; que, par lettre du 12 octobre 1995, à laquelle était joint un mandat de représentation donné par Me Y, administrateur de la SNC Lagon d'Or et par Mme Z, gérante de ladite société, Me Moulinier, avocat, a demandé à ce que les opérations de contrôle aient lieu à son cabinet situé à Bourg en Bresse ; que ces derniers ont expressément confirmé cette demande par une lettre du 17 octobre 1995 transmise par Me Moulinier ; que le vérificateur a effectué, les 24 et 25 octobre 1995, deux interventions au cabinet du conseil de la société, la première en présence de la gérante et de Me Moulinier, la seconde en présence uniquement de celui-ci ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions des articles 4 et 6 de la loi susvisée du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques que, sous réserve des dispositions législatives et réglementaires excluant l'application d'un tel principe dans les cas particuliers qu'elles déterminent, les avocats ont qualité pour représenter leurs clients devant les administrations publiques sans avoir à justifier du mandat qu'ils sont réputés avoir reçu de ces derniers dès lors qu'ils déclarent agir pour leur compte ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire applicable au déroulement de la procédure d'imposition ne subordonne la possibilité pour un avocat de représenter un contribuable à la justification du mandat qu'il a reçu ; que, par suite, la circonstance que le mandat donné à un avocat par le contribuable pour le représenter au cours d'une procédure d'imposition serait irrégulier, ou celle que cet avocat aurait outrepassé le mandat ainsi donné, sont inopposables à l'administration devant laquelle cet avocat s'est présenté comme le représentant du contribuable, et ne sont pas de nature à affecter la validité des actes accomplis par celui-ci ou par l'administration dans le cadre de cette procédure ; qu'il suit de là que les requérants ne peuvent utilement invoquer la circonstance que le mandat avait été donné à une société civile professionnelle dont cet avocat était membre et non à celui-ci personnellement, que ce mandat n'aurait pas été régulièrement délivré et n'aurait pas été parfait faute d'acceptation et, que l'avocat n'aurait pas eu qualité pour conduire les entretiens ou pour remettre au vérificateur des documents comptables ; que les requérants ne sauraient, en tout état de cause, utilement se prévaloir du paragraphe 6 de la documentation administrative 13 L-1312 à jour au 15 août 1994 et de l'instruction 13 M-1-00 du 16 juin 2000 qui, en tant qu'ils exigent des avocats représentant leurs clients la production d'un mandat écrit au cours de la procédure, concernent la procédure d'imposition, et ne contiennent ainsi aucune interprétation formelle de la loi fiscale au sens de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales susceptible d'être opposée à l'administration ;

Considérant, d'autre part, que, comme il a été dit ci-dessus, la vérification de comptabilité s'est déroulée, à la demande écrite des représentants qualifiés de la société, dans les locaux professionnels du conseil désigné par celle-ci ; que ces conditions d'intervention ne peuvent être regardées, par elles-mêmes, comme de nature à faire obstacle à la possibilité d'engager un débat oral et contradictoire ; qu'il appartient, dès lors, aux requérants d'apporter la preuve que la société a été privée des garanties ayant pour objet d'assurer aux contribuables des possibilités d'un débat oral et contradictoire ; que ni la circonstance que la première intervention sur place, en présence de la gérante et de l'avocat, n'aurait duré que deux heures, ni celle, à la supposer établie, que la seconde intervention en présence de l'avocat n'aurait comporté que la remise de documents demandés par la vérificatrice ne sont, eu égard à la nature des investigations menées en l'espèce par le service qui n'ont portées que sur la déductibilité des investissements productifs outre-mer prévue par l'article 238 bis HA du code général des impôts, de nature à établir que la société aurait été privée de la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur, lors de sa première intervention, a dressé une liste de documents à présenter par la société ; qu'une partie de ces documents lui a été remise lors de sa seconde intervention avec une lettre d'accompagnement de l'avocat précisant que les documents remis sont des copies que l'administration peut conserver ; que cette lettre et cette mention manuscrite ont été signées par l'avocat ; que, si M. et Mme X soutiennent que certains documents comptables remis étaient des originaux ou des copies dont la société ne détenait qu'un seul exemplaire et que cette mention manuscrite ne s'applique qu'à certains des documents remis, ils n'apportent, à l'appui de leurs allégations contraires à la mention précitée et qui ne comporte, même implicitement, aucune distinction entre les différents documents remis, aucun élément de nature à en établir la réalité ; qu'à supposer même que l'avocat ayant déclaré agir pour la SNC Lagon d'Or, qui n'avait pas à justifier de son mandat, se serait mépris sur l'étendue de ce mandat quant à la remise de documents à l'administration fiscale, cette mention est opposable à M. et Mme X ; que ces derniers ne peuvent, par suite, se prévaloir d'un emport irrégulier de documents comptables résultant de l'absence de reçu dressé par la vérificatrice, ni de ce que ces documents n'auraient pas été restitués avant l'envoi de la notification de redressements ; que la documentation administrative 13 L 1313 n° 16 du 15 août 1994 traitant de la procédure d'imposition ne contient pas d'interprétation formelle de la loi fiscale qui soit opposable à l'administration sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne l'exercice du droit de communication :

Considérant, d'une part, que s'il incombe à l'administration fiscale d'informer le contribuable de l'origine, de la nature et de la teneur des renseignements qu'elle a pu recueillir dans l'exercice de son droit de communication et qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux redressements, afin que l'intéressé ait la possibilité de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition, cette obligation d'information ne s'étend pas à la justification des conditions dans lesquelles le droit de communication, qui n'est assujetti à aucune formalité particulière, a été exercé ;

Considérant, d'autre part, que la notification de redressements adressée à la SNC Lagon d'Or le 9 novembre 1985 mentionnait que l'administration avait obtenu, dans le cadre de l'exercice de son droit de communication l'information selon laquelle la société Unicar, propriétaire du navire pris en crédit-bail par la SNC Lagon d'Or, était le troisième propriétaire du navire, le contrat de commercialisation du navire, le certificat de jaugeage et l'acte de francisation du navire et, enfin, l'information selon laquelle le navire pris en crédit-bail était inconnu du service des affaires maritimes ; que si l'origine de la première information n'a pas été précisée, il ne résulte pas de l'instruction que cette information aurait servi à l'établissement des redressements fondés sur l'absence d'agrément de l'investissement résultant de l'acquisition du navire Lagon d'Or et d'exploitation effective de celui-ci ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la référence au permis de navigation délivré le 30 décembre 1992 procéderait de l'exercice du droit de communication ; qu'aucun droit de communication n'a été exercé auprès des sociétés Unicar et Jet Sea ; que l'absence d'indication de l'origine du contrat de commercialisation du navire, auquel la société Lagon d'or était partie, n'a, en l'espèce, privé le contribuable d'aucune garantie dès lors que ce document a été joint à la notification de redressements adressée à la société et qu'en tout état de cause, il lui a été communiqué, à nouveau et à sa demande, par lettre du 16 mars 1998, soit antérieurement à la mise en recouvrement des impositions litigieuses, le 29 décembre 1998 ; qu'il résulte de l'instruction que l'administration a transmis à la société par lettre du 28 mars 1996, en réponse à une première demande tendant à la production des documents recueillis dans l'exercice du droit de communication, l'acte provisoire de francisation du navire du 17 décembre 1992 ainsi que le certificat de jaugeage de celui-ci ; que le 14 janvier 1998, la SNC Lagon d'Or a présenté une demande tendant notamment à obtenir la copie de pièces du dossier de vérification que l'administration était fondée à regarder comme tendant à la communication de documents administratifs dans le cadre de la loi du 17 juillet 1978 ; que le représentant de la société a attesté sans réserve le 26 mai 1998 la réception des pièces demandées dans ce cadre ; qu'en ce qui concerne les modalités d'exercice du droit de communication, elle s'est bornée à demander, outre la communication du contrat de commercialisation entre la SNC Lagon d'Or et la société Jet Sea, la justification de l'exercice régulier de ce droit ; qu'il résulte de l'attestation susmentionnée qu'il a été fait droit à cette demande par courrier du 16 mars 1998 ; que si elle a formulé une nouvelle demande le 24 décembre 1998 et fait état, dans ce courrier, d'une incomplète communication des documents relatifs à l'exercice du droit de communication, elle n'a toutefois expressément demandé que la communication du permis de navigation du 30 décembre 1992 qui, ainsi que cela a été précisé ci-dessus, a été obtenu par l'administration lors des opérations de contrôle de la vérification de comptabilité de la société et non dans le cadre du droit de communication ; que l'administration pouvait, par suite, s'abstenir de le communiquer ; que, si la télécopie en date du 11 octobre 1994 par laquelle l'administration des affaires maritimes a fait savoir aux services fiscaux que le navire Lagon d'Or, était inconnu de ses services n'a été communiquée à la société que postérieurement à la mise en recouvrement des impositions, il résulte de l'instruction que ce document ne contient aucun élément autre que ceux portés à la connaissance de la société dans la notification de redressements laquelle était suffisamment motivée ; que, par suite, l'ensemble des moyens relatifs au droit de communication doit être écarté ;

En ce qui concerne la saisine de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le siège social de la SNC Lagon d'Or était en Guadeloupe où se situait également le lieu présumé d'exploitation du navire ; qu'elle déposait ses déclarations de résultats auprès des services fiscaux de ce département ; qu'elle n'a par la suite pas fait connaître à l'administration un changement d'adresse, notamment vers le lieu de la direction effective de la société qui aurait été situé dans l'Ain où résidait sa gérante ; que la circonstance que la vérification de comptabilité se soit déroulée, à la demande des représentants qualifiés de la société, à Bourg-en-Bresse, ville du siège de la société d'avocats désignée comme conseil, ne peut être regardée comme emportant reconnaissance de la part du service d'un changement d'adresse ; que si la vérificatrice a estimé que la société n'avait aucune activité réelle, cette observation n'emporte aucune conséquence en ce qui concerne la compétence de la commission départementale des impôts susceptible d'être saisie ; que l'administration a pu, dès lors, régulièrement donner suite à la demande du représentant de la société du 23 mai 1996 en saisissant la commission départementale des impôts de la Guadeloupe, et rejeter une demande ultérieure tendant à la saisine de la commission départementale de l'Ain ; que les requérants ne peuvent utilement se prévaloir des documentations administratives 3 F-2322 n° 24 du 1er janvier 1993, 4 G-3232 n° 19 du 15 mai 1993, 4 G-21 n°s 3 et 4 du 30 avril 1998, et 4 H-1412 n°s 6 à 8 du 1er mars 1995 qui, traitant de la procédure d'imposition, ne contiennent pas d'interprétation formelle de la loi fiscale au sens de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne l'absence de saisine du comité consultatif pour la répression des abus de droit :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses ... qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus ... L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de la notification adressée à la SNC Lagon d'Or que, lors du contrôle sus-évoqué, l'administration n'a pas écarté des contrats ou des actes au motif qu'ils auraient été conclus de manière fictive ou dans le seul but d'éluder l'impôt, mais a fait valoir que le contrat de commercialisation n'avait jamais reçu exécution, que la SNC Lagon d'or, qui n'a retiré, durant les exercices vérifiés, aucun produit de l'exploitation du bateau pris en crédit-bail, ne pouvait être regardée comme ayant exploité ce bateau et que, par suite, l'investissement réalisé et les dépenses y afférentes étaient dépourvus de contreparties ; que, ce faisant, elle ne s'est pas placée sur le terrain de l'abus de droit ; que, dès lors, elle n'a pas entaché la procédure d'imposition d'irrégularité en refusant de saisir le comité consultatif pour la répression des abus de droit ;

En ce qui concerne la saisine de l'interlocuteur départemental :

Considérant, qu'aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : ... Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration ; que le paragraphe 5 du chapitre III de ladite charte indique que : Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal ... Si après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental ou régional qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur ; que, si la méconnaissance de l'exigence d'une rencontre avec l'interlocuteur départemental posée par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié a le caractère d'une irrégularité substantielle portant atteinte aux droits et garanties reconnus par la charte au contribuable, celle-ci n'impose ni que l'interlocuteur départemental informe le contribuable des résultats de sa démarche ni, lorsqu'il délivre une telle information, qu'il motive son courrier en cas de maintien du redressement notifié ; que, par suite, l'absence de motivation de la lettre du 21 juillet 1998 par laquelle l'interlocuteur départemental a indiqué à l'avocat de la SNC Lagon d'Or qu'il entendait confirmer le redressement notifié n'a privé ladite société d'aucune des garanties prévues par la charte ; qu'eu égard à l'obligation faite à l'administration d 'établir les impôts dus par tous les contribuables d'après leur situation au regard de la loi fiscale, les décisions afférentes à la mise d'une imposition à la charge d'une personne physique ou morale ne peuvent, en dépit de la sujétion qui en résulte pour cette dernière, être regardées comme des décisions administratives individuelles défavorables au sens de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ; que, par suite, M. et Mme X ne peuvent utilement invoquer les dispositions de ladite loi ;

Sur le bien fondé des impositions :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 238 bis HA du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : I. Les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés ou assujetties à un régime réel d'imposition peuvent déduire de leurs résultats imposables une somme égale au montant total des investissements productifs réalisés dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion à l'occasion de la création ou l'extension d'exploitations appartenant aux secteurs d'activité de l'industrie, de la pêche, de l'hôtellerie, du tourisme, des énergies nouvelles, de l'agriculture, du bâtiment et des travaux publics, des transports et de l'artisanat. La déduction est opérée sur le résultat de l'exercice au cours duquel l'investissement est réalisé, le déficit éventuel de l'exercice étant reporté dans les conditions prévues au I des articles 156 et 209 (...) III bis. Pour ouvrir droit à déduction, les investissements mentionnés au I réalisés à compter du 1er janvier 1992 dans les secteurs de l'hôtellerie, du tourisme, des transports et de la production et de la diffusion audiovisuelle et cinématographique doivent avoir reçu l'agrément préalable du ministre de l'économie, des finances et du budget ; que toutefois, en vertu du dernier alinéa du même article, cet agrément n'est pas exigé lorsque les biens mobiliers ont été commandés et ont fait l'objet de versements d'acomptes au moins égaux à 10 % de leur prix, avant le 1er décembre 1991 ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que la demande d'agrément présentée par la SNC Lagon d'Or au titre de l'investissement qu'elle a réalisé en acquérant le navire de ce nom, a été rejetée par décision du 3 septembre 1992 ; que si M. et Mme X font valoir que l'investissement était, en application de dispositions précitées, dispensé d'agrément, ils n'établissent pas que ce navire aurait fait l'objet d'une acquisition par ladite société ou pour son compte avant le 1er septembre 1991, alors d'ailleurs qu'il résulte de l'instruction que la SNC Lagon d'Or n'a été constituée que le 27 juillet 1992 et que l'administration fait valoir, sans être contredite, d'une part, que tant le contrat de crédit-bail signé entre la société en nom collectif et la société Unicar que le bon de commande du bateau par cette dernière auprès de la société Jet Sea, sont datés du 14 août 1992 et, d'autre part, qu'aucune trace correspondant à ce versement de 10 % n'a été trouvée dans la comptabilité de la société ; que la condition d'agrément, requise pour bénéficier de la déduction litigieuse et dont la SNC Lagon d'Or n'était pas dispensée, n'étant pas remplie, l'administration était, par suite, fondée, en tout état de cause, à remettre en cause la déduction de l'investissement opérée par la société de ses résultats de l'exercice clos en 1992 ; que les moyens tirés de ce que les actes passés seraient opposables à l'administration, qu'il n'y aurait pas eu de sous-location, ou que la société aurait été victime d'une carence de ses fournisseurs sont, dans ces conditions, inopérants ; que l'instruction administrative 4.A.8.86 du 7 novembre 1986 invoquée par les requérants ne contient pas d'interprétation formelle de la loi fiscale contraire à celle dont il est fait application ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que le navire à l'origine de la déduction n'est pas le même que celui mentionné dans les documents comptables présentés lors du contrôle ; que le navire Lagon d'Or, acquis par la société et qui devait être basé à Saint-Martin en vue d'être offert à des locations touristiques, est demeuré aux Etats-Unis pendant toute la période vérifiée, et n'a donné lieu, nonobstant un contrat de commercialisation du 14 août 1992 qui n'a jamais été appliqué, à aucune exploitation effective ni même à aucune démarchage en vue de son exploitation ; que, d'ailleurs, le permis de navigation valable jusqu'au 29 décembre 1993 n'a pas été renouvelé ; que les seuls produits enregistrés par la société, qui n'ont fait l'objet d'aucun encaissement, ont porté, d'une part, sur la somme de 341 250 F enregistrée au titre de l'exercice clos en 1992 et correspondant à une avance dont le risque de remboursement a entraîné la constitution concomitante d'une provision et, d'autre part, sur la somme de 1 000 F enregistrée au titre de l'exercice clos en 1993 dont l'administration établit, en l'absence de tout élément fourni par le contribuable sur ce point, qu'elle ne correspond pas à une exploitation du navire ; que, pour apporter la preuve de ce que ces charges étaient justifiées dans leur principe, les contribuables se bornent à soutenir que la société souhaitait exploiter effectivement le navire, se fondant notamment sur le contrat de commercialisation sus-évoqué, et à faire référence à l'engagement, après les années vérifiées, d'une action en justice ; que, dans ces conditions, l'administration était fondée à considérer que ces charges dénuées de contreparties n'avaient pas été exposées dans l'intérêt de l'exploitation au sens de l'article 39 du code général des impôts, ni pour l'acquisition d'un revenu au sens de l'article 13-1 du code général des impôts ; que la réponse ministérielle faite à M. A, député, publiée au JOAN du 22 novembre 1982 est relative à la déduction de charges afférentes à une construction immobilière en vue d'un accroissement d'activité, dont la réalisation a été abandonnée et qui n'ont, en conséquence, pas eu pour contrepartie une augmentation de l'actif ; que, cette réponse n'ayant pas pour objet de permettre la déduction de dépenses qui n'ont pas été exposées dans l'intérêt d'une exploitation, M. et Mme X ne peuvent utilement s'en prévaloir dans le présent litige ; que les documentations administratives 5 B-212 du 1er juillet 1978 et 5 B-212 du 15 juin 1993 ne contiennent pas d'interprétation formelle de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application ; que la position adoptée par l'administration à l'égard d'autres contribuables en ce qui concerne la déductibilité de charges afférentes à un autre navire inexploité ne constitue pas une prise de position formelle susceptible de lui être opposée sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; que, par suite, l'administration a pu remettre en cause les déficits déclarés par la SNC Lagon d'Or qui, dès lors, ne peuvent donner lieu à déduction du revenu global des requérants ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre des années 1992, 1993 et 1994 ;

Sur les conclusions de M. et Mme X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. et Mme X la somme que ceux-ci demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

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N° 04PA01716


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 04PA01716
Date de la décision : 21/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés SOUMET
Rapporteur ?: M. Bruno PAILLERET
Rapporteur public ?: M. ADROT
Avocat(s) : CABINET 2CFR - CABINET CONSEILS FISCAUX REUNIS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-11-21;04pa01716 ?
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