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14/12/2005 | FRANCE | N°02PA01459

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites a la frontiere, 14 décembre 2005, 02PA01459


Vu enregistrée le 25 avril 2002 au greffe de la cour, la requête présentée pour M. Yves X, élisant domicile ..., par Me Marsaudon, avocat ; M. X demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 9507816 en date du 14 janvier 2000 par lequel le Tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à sa demande de décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1989 à 1991 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de

5 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu enregistrée le 25 avril 2002 au greffe de la cour, la requête présentée pour M. Yves X, élisant domicile ..., par Me Marsaudon, avocat ; M. X demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 9507816 en date du 14 janvier 2000 par lequel le Tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à sa demande de décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1989 à 1991 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 5 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 novembre 2005 :

- le rapport de M. Bossuroy, rapporteur,

- les observations de Me Marsaudon pour M. et Mme X,

- et les conclusions de M. Magnard, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par une décision du 26 septembre 2003 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'une somme de 399 502, 41 €, des impositions en litige, pour faire droit au moyen tiré du défaut de motivation de la contribution fiscale de 1% et du prélèvement fiscal de 1% ainsi qu'au moyen relatif à l'absence de justification des pénalités de mauvaise foi afférentes au redressement portant sur les revenus distribués par la société ATM ; que les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X, ce dégrèvement n'avait pas pour objet de procéder à l'exécution des réductions d'imposition prononcées par le tribunal administratif et notamment de corriger une erreur matérielle contenue dans le dispositif du jugement attaqué, qui, selon les indications non contestées du ministre, a déjà été corrigée par l'administration en exécution dudit jugement ; que le requérant ne peut dès lors utilement soutenir que la décision de dégrèvement du 26 septembre 2003 n'a pas corrigé cette erreur ; que, compte tenu notamment des réductions d'imposition prononcées par le tribunal administratif, la seule comparaison du montant des droits dégrevés et des droits afférents à la contribution fiscale de 1% et au prélèvement fiscal de 1% ne peut apporter la preuve que ces impositions n'auraient pas fait l'objet d'un dégrèvement total ;

Sur le surplus des conclusions de la requête :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

Considérant, que, contrairement à ce que soutient le requérant, le tribunal a suffisamment répondu aux moyens qu'il avait soulevés en première instance à propos de la compétence de la direction nationale des enquêtes fiscales et de la motivation des redressements relatifs aux revenus de capitaux mobiliers ;

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 376 de l'annexe II au code général des impôts, alors applicable : « … Les fonctionnaires territorialement compétents pour vérifier la situation fiscale d'une exploitation ou d'une entreprise, ou celle qui résulte d'une activité professionnelle, qu'un contribuable ou l'un des membres de son foyer fiscal dirige ou exerce, en droit ou en fait, directement ou par personne interposée et sous quelque forme juridique que ce soit, peuvent également contrôler les déclarations de revenu global souscrites par ce contribuable « ; qu'aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 31 janvier 1969, dans sa rédaction alors en vigueur, issue de l'article 1er de l'arrêté du 17 mars 1983 : « … La direction nationale des enquêtes fiscales assure pour l'ensemble du territoire national, conformément aux directives fixées par le directeur général des impôts et concurremment avec les autres services des impôts compétents : … En tant que de besoin, la vérification de la situation fiscale des entreprises et des exploitations, quels que soient leur statut juridique et leur activité, ainsi que le contrôle des déclarations de revenu global des contribuables et des membres de leur foyer fiscal qui dirigent, en droit ou en fait, directement ou par personne interposée et sous quelque forme juridique que ce soit, ces entreprises et ces exploitations » ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 8 quater du code général des impôts : « Chaque membre des copropriétés de navires régies par le chapitre IV de la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967 modifiée portant statut des navires et autres bâtiments de mer est personnellement soumis à l'impôt sur le revenu à raison de la part correspondant à ses droits dans les résultats déclarés par la copropriété » ; qu'aux termes de l'article 35 du même code : « Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : ... 7° membres des copropriétés de navires mentionnées à l'article 8 quater » ; qu'aux termes de l'article 61 A du même code : « Les résultats à déclarer par les copropriétés mentionnées aux articles 8 quater et 8 quinquies sont déterminés dans les conditions prévues pour les exploitants individuels soumis au régime du bénéfice réel, avant déduction respectivement de l'amortissement du navire, du cheval de course ou de l'étalon. Les copropriétés sont tenues aux obligations qui incombent à ces exploitants » ; qu'enfin aux termes de l'article 39 E du même code : « Chaque membre des copropriétés de navire mentionnées à l'article 8 quater amortit le prix de revient de sa part de propriété suivant les modalités prévues à l'égard des navires ; pour la détermination des plus values, les amortissements pratiqués viennent en déduction du prix de revient... » ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les bénéfices industriels et commerciaux imposables d'un copropriétaire de navire doivent être déterminés en deux étapes, d'abord au niveau de la copropriété, laquelle doit tenir la comptabilité des opérations d'exploitation du navire, dont elle n'a que la jouissance et qui ne figure donc pas à l'actif de son bilan, ensuite au niveau du copropriétaire, lequel doit comptabiliser, outre sa quote-part des résultats de l'exploitation de la copropriété, ses propres opérations patrimoniales d'acquisition des quirats, les charges d'amortissement et le cas échéant d'emprunt supportées à ce titre, ainsi que le produit de leur cession éventuelle ; qu'il suit de là que le propriétaire d'un quirat doit être regardé comme se livrant à une exploitation, au sens des dispositions précitée de l'article 3 de l'arrêté du 31 janvier 1969 ; que la direction nationale d'enquêtes fiscales était par suite compétente pour procéder au contrôle des déclarations souscrites par M. X en sa qualité de quirataire ; qu'en vertu des dispositions tant de l'article 376 de l'annexe II au code général des impôts que de l'arrêté du 31 janvier 1969, cette direction pouvait étendre légalement ses opérations de contrôle aux autres éléments du revenu global du contribuable ; que les moyens tirés de ce qu'en l'absence de recherches préalables de renseignements, la direction nationale d'enquêtes fiscales n'aurait pas été compétente pour contrôler la société ATM et que les fonctions dirigeantes de M. X dans la société ATM n'auraient pas autorisé les agents de cette direction à procéder au contrôle de ses déclarations catégorielles sont par suite inopérants ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

S'agissant des revenus de capitaux mobiliers :

Considérant qu'à l'occasion de la vérification de comptabilité de la société Antillaise de Tourisme Maritime (ATM), l'administration a constaté que cette société avait cédé le 23 novembre 1989 et le 28 décembre 1990 à plusieurs de ses associés, dont M. X, des actions de la société anonyme SIRETO, aux prix unitaires respectifs de 187,50 F et 100 F ; que le service a estimé que ces actions ayant été vendues à un prix inférieur à leur valeur vénale, évaluée respectivement à 6 250 F et 19 516 F, la société avait accompli un acte anormal de gestion et a réintégré aux résultats imposables de l'entreprise la différence entre le prix de cession et la valeur vénale ; que cette différence a par ailleurs été qualifiée de revenu distribué entre les mains des associés acquéreurs des titres ; que M. X, qui avait acquis 225 titres en 1989 et 625 titres en 1990, a ainsi été imposé sur les sommes respectives de 1 364 062 F et 12 135 000 F ; que le tribunal administratif, réduisant à 14 874 F l'évaluation des titres en 1990, a diminué de 2 901 250 F la base d'imposition de ladite année, ainsi ramenée à 9 233 750 F ;

Considérant qu'il résulte toutefois de l'instruction que les cessions en cause des actions SIRETO résultent de l'application d'une convention conclue en 1985 entre, d'une part, la société ATM et, d'autre part, ses associés et la société ORFIMAR, aux termes de laquelle il était notamment permis à ceux-ci de racheter à la société des titres qu'elle aurait acquis dans les quatre années précédentes au même prix que celui auquel la société les avait elle-même acquis ; que si cette clause était défavorable à la société ATM en ce qu'elle la privait de plus-values potentielles, il résulte de l'instruction que la société avait été amenée à y souscrire pour obtenir l'entrée dans son capital d'un investisseur extérieur, la société ORFIMAR, alors qu'elle connaissait de graves difficultés financières ; qu'il n'est pas établi que, comme le soutient le ministre, la société aurait été alors en mesure de faire appel à un autre investisseur dans des conditions plus favorables pour elle ; qu'ainsi le prix de cession des actions de la société SIRETO, dont le requérant ne conteste pas qu'il était inférieur à leur valeur vénale même si elle critique l'évaluation retenue par l'administration, ne peut être regardé, à supposer même que, comme le fait également valoir le ministre, le manque à gagner subi par la société ATM en 1989 et 1990 à l'occasion de la cession des titres SIRETO se serait avéré finalement supérieur à l'apport en capital réalisé en 1985 par la société ORFIMAR, comme un avantage consenti aux associés sans contrepartie dès lors que ce prix résulte de l'application d'une clause que la société ATM avait intérêt à accepter en 1985 ; qu'il y a lieu par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du requérant relatifs à ce chef de redressement, de réduire les bases d'impositions assignées à M. X dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers d'une somme de 1 364 062 F au titre de l'année 1989 et d'une somme de 9 233 750 F au titre de l'année 1990 et de prononcer la décharge des droits et pénalités correspondants ; que le moyen tiré de ce que le dégrèvement du 26 septembre 2003 n'aurait pas porté sur la totalité des pénalités de mauvaise foi afférentes à ce chef de redressement est par suite inopérant ;

S'agissant des autres redressements :

Considérant que M. X se contente de critiquer les autres redressements qui lui ont été notifiés au titre des années 1989 à 1991 par référence aux moyens qu'il avait soulevés en première instance ; qu'il ne permet pas ainsi à la cour de se prononcer sur les erreurs qu'aurait pu commettre le tribunal administratif en y répondant ; que la requête est par suite dépourvue de moyens d'appel relatifs auxdits redressements ;

En ce qui concerne les pénalités :

Considérant que M. X conteste les pénalités de mauvaise foi qui lui ont été infligées sur le chef de redressement relatif à l'amortissement des parts de copropriétés de navires en soutenant que la question de principe de savoir si les dispositions de l'article 31 de l'annexe II du code général des impôts sont applicables aux membres de ces copropriétés n'avait pas été tranchée par la jurisprudence lorsqu'il a procédé à la déduction des amortissements litigieux ; qu'en se bornant à faire valoir qu'une réponse ministérielle à M. Y, en date du 11 juillet 1985, s'était prononcée dans le sens de l'application des dispositions de l'article 31 aux quirataires, alors qu'une telle réponse ne constitue pas une règle de droit opposable aux contribuables, l'administration ne peut être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe que le contribuable était de mauvaise foi lorsqu'il a interprété les dispositions dudit article comme ne lui étant pas applicables ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est seulement fondé à soutenir que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a prononcé une réduction insuffisante des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1989 et 1990 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X la somme de 1 500 € sur le fondement des dispositions précitées du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Les bases d'impositions assignées à M. X au titre des années 1989 et 1990 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sont réduites respectivement des sommes de 1 364 062 F et 9 233 750 F.

Article 2 : M. X est déchargé des droits et pénalités correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 1er.

Article 3 : M. X est déchargé des pénalités de mauvaise foi mises à sa charge au titre des années 1989 à 1991 à raison des redressements relatifs aux quirats dont il était propriétaire.

Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 14 janvier 2002 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'Etat est condamné à payer à M. X la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article L. 761 du code de justice administrative.

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N°02PA01459


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 02PA01459
Date de la décision : 14/12/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. François BOSSUROY
Rapporteur public ?: M. MAGNARD
Avocat(s) : MARSAUDON

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-12-14;02pa01459 ?
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