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09/08/2006 | FRANCE | N°03PA02652

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6eme chambre, 09 août 2006, 03PA02652


Vu la requête, enregistrée le 4 juillet 2003, présentée pour la SOCIETE BEC FRERES, dont le siège est ... d'Orgues (34680), par la SELARL ISEE, par Me X... ; La SOCIETE BEC FRERES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9803469/6-2 du 22 avril 2003 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société nationale des chemins de fer français (SNCF) à lui verser, dans le cadre d'un marché de travaux portant sur la construction du pont-rail au lieudit du Fossé-des-Terriers sur la commune de Vions, d'une part, la som

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Vu la requête, enregistrée le 4 juillet 2003, présentée pour la SOCIETE BEC FRERES, dont le siège est ... d'Orgues (34680), par la SELARL ISEE, par Me X... ; La SOCIETE BEC FRERES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9803469/6-2 du 22 avril 2003 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société nationale des chemins de fer français (SNCF) à lui verser, dans le cadre d'un marché de travaux portant sur la construction du pont-rail au lieudit du Fossé-des-Terriers sur la commune de Vions, d'une part, la somme de 510 611,80 F hors taxes au titre de sujétions imprévues, d'autre part, celle de 256 422,19 F hors taxes au titre du surcoût généré par la méthode retenue pour le blindage des culées compte tenue des contraintes imposées par la SNCF et, enfin, la somme de 1 072 119,50 F hors taxes au titre du remboursement des pénalités de retard indues ;

2°) de condamner la SNCF à lui payer à titre principal, la somme de 510 611,80 F HT, soit 610 691,71 F TTC (93 099,35 euros) ou, à titre subsidiaire, la somme de 414 863,85 F HT soit 495 863,85 F TTC (75 593,96 euros) au titre des surcoûts engendrés par les inondations de chantier et une somme de 256 422,19 F HT, soit 306 680,94 F TTC (46 753,21 euros) au titre des travaux supplémentaires de blindage à l'arrière des culées ;

3°) de laisser à la charge de la SNCF une part de responsabilité au moins équivalente à 50 % dans la reddition tardive des voies à la suite de l'incident de ripage du tablier et de réduire en conséquence les pénalités de retard infligées à la SOCIETE BEC FRERES et en tout état de cause, de juger inapplicables les pénalités calculées sur le fondement de l'article 6.4 du cahier des prescriptions spéciales et de condamner la SNCF à lui rembourser la somme de 326 119,50 F (49 176,60 euros) ;

4°) de majorer les sommes auxquelles la SNCF sera condamnée des intérêts moratoires à compter du 9 mai 1996, lesdits intérêts étant capitalisés ;

5°) de mettre à la charge de la SNCF une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 juin 2006 :

- le rapport de M. Marino, rapporteur,

- les observations de Me Y..., pour la SOCIETE BEC FRERES,

- et les conclusions de M. Coiffet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par une lettre de commande en date du 11 octobre 1994, la société nationale des chemins de fer français (SNCF) a confié au groupement d'entreprises BEC FRERES - SFET - CIVAD les travaux de construction des pont-rails aux lieudits Fossé-des-Terriers et Marais de Chautagne dans la commune de Vions sur la ligne ferroviaire Culoz-Modane ; que la SOCIETE BEC FRERES était en charge des travaux du lot A « appuis et fondations » du pont-rail de Fossé-des-Terriers ; que lors de l'établissement du décompte général des travaux, la SOCIETE BEC FRERES a sollicité le versement d'une somme de 510 611,80 F HT correspondant au surcoût auquel elle avait dû faire face pour procéder aux travaux eu égard à la montée brutale des eaux en cours de chantier, ainsi qu'une somme de 256 422,19 F HT au titre des dépenses supplémentaires qu'elle avait engagées pour réaliser les travaux de blindage des culées et enfin, a contesté les pénalités de retard de 1 072 119,50 F HT qui lui avaient été infligées par la SNCF pour reddition tardive des voies ; que, par le jugement dont la SOCIETE BEC FRERES relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que la SNCF forme un appel incident contre ce même jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions reconventionnelles tendant à la condamnation de la SOCIETE BEC FRERES à lui payer la somme de 220 948,76 euros en réparation du préjudice qu'elle estimait avoir subi à la suite de l'incident de ripage survenu les 18 et 19 septembre 1995 ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que, contrairement à ce que soutient la société requérante, il résulte de l'examen du jugement attaqué qu'il a été rendu par une formation de trois membres conformément aux dispositions de l'article R. 222-18 du code de justice administrative ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article 49-5 du cahier des clauses et conditions générales applicable aux marchés de travaux de la SNCF : « Si dans le délai de six mois après notification de la décision intervenue sur les réclamations remises valablement sur le décompte général et définitif, l'entrepreneur n'a point porté ses réclamations devant le tribunal compétent, il est considéré comme ayant adhéré à cette décision et toute réclamation se trouve éteinte » ; qu'il résulte de l'instruction que la SOCIETE BEC FRERES a transmis sa demande tendant à la condamnation de la SNCF par une télécopie enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Paris le 9 mars 1998, soit dans le délai de six mois suivant la notification intervenue le 11 septembre 1997 du rejet de sa réclamation par lettre du 9 septembre précédent ; que cette télécopie a été régularisée par l'envoi de l'original du recours dans les formes traditionnelles ; que la SNCF n'est donc pas fondée à soutenir que la demande de la SOCIETE BEC FRERES était tardive ;

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne le surcoût causé par la montée des eaux :

Considérant que si l'ouvrage, objet du marché, était situé en zone inondable servant de déversoir aux eaux du Rhône et du lac du Bourget, les intempéries survenues au cours des mois de janvier et de février 1995 ont eu pour effet d'augmenter soudainement, de façon très importante et totalement imprévisible le niveau des eaux ; qu'elles ont ainsi constitué pour l'entreprise requérante des sujétions imprévues dans l'exécution des travaux dont elle était en charge ;

Considérant, toutefois, que les difficultés exceptionnelles et imprévisibles rencontrées dans l'exécution d'un marché ne peuvent ouvrir droit à une indemnité au profit des entrepreneurs, lorsque le marché est conclu à forfait, que dans la mesure où ceux-ci justifient soit que ces difficultés ont eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, soit qu'elles sont imputables à un fait de l'administration ; que le bouleversement doit s'apprécier au regard de l'économie générale du contrat et non par lot ; qu'il résulte des termes mêmes de la requête de la SOCIETE BEC FRERES que les sujétions en cause ont eu pour effet d'augmenter les prestations d'installation de chantier et de réalisation d'une plateforme de préfabrication faisant l'objet du prix PB4 ; que ledit prix est mentionné dans le bordereau des prix du lot A comme étant forfaitaire ; que le surcoût généré par la montée des eaux et qui s'élevait à la somme de 510 611,80 F HT pour un marché total de plus de quatorze millions de francs n'était pas de nature à bouleverser l'économie générale du contrat ; que, par suite, c'est à juste titre que le tribunal a écarté les conclusions de la SOCIETE BEC FRERES ;

En ce qui concerne les dépenses supplémentaires engagées pour le blindage des culées :

Considérant qu'aux termes de l'article 30 du cahier des clauses et conditions générales précité : « L'entrepreneur ne peut, de lui-même, apporter aucun changement aux dispositions techniques prévues par le marché… Toutefois, l'ingénieur peut accepter les changements effectués par l'entrepreneur et les dispositions suivantes sont alors appliquées pour le règlement des comptes : si les dimensions ou les caractéristiques des ouvrages sont supérieurs à celles que prévoit le marché, les métrés restent fondés sur les dimensions et caractéristiques prescrites par le marché et l'entrepreneur n'a droit à aucune augmentation des prix ; si elles sont inférieures, les métrés sont fondés sur les dimensions et les caractéristiques constatées des ouvrages et les prix sont réduites en conséquence. » ;

Considérant que ces stipulations qui s'appliquent tant aux modifications apportées aux ouvrages qu'à celles apportées aux techniques de construction, font obstacle à ce que la SOCIETE BEC FRERES puisse obtenir l'indemnisation des dépenses supplémentaires qu'elle a engagées pour réaliser les travaux de blindage des culées selon une méthode proposée par elle, différente de celle mentionnée dans les documents contractuels, dès lors, notamment, qu'elle n'établit pas que les travaux ne pouvaient pas être réalisés conformément au procédé technique initialement prévu ;

En ce qui concerne les pénalités de retard :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que lors des opérations de substitution par ripage de l'ancien tablier du pont, le nouveau tablier s'est déporté longitudinalement d'une trentaine de centimètres et ne s'est remis en position transversale correcte qu'au bout d'un mois ; que ce déport a eu pour effet d'interrompre la circulation des trains, puis de la ralentir fortement ; que la SNCF a appliqué à l'entreprise BEC FRERES les pénalités prévues à l'article 1.4.2 du cahier des prescriptions spéciales à raison du dépassement du temps d'interruption de la circulation ferroviaire contractuellement prévu pour procéder aux opérations de ripage, ainsi que les pénalités mentionnées à l'article 6.4 du même cahier, dues en cas de perturbations dans la circulation des trains à la suite de la reddition tardive des voies ;

Considérant en premier lieu qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise dont la société ne démontre pas le caractère partial, que les faits trouvent leur origine dans un vice de conception du procédé de ripage mis en oeuvre et dans la réalisation des opérations de ripage ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, il n'appartenait pas à la SNCF, agissant en qualité de maître d'oeuvre, de définir le procédé de conception du ripage ; que si l'expert a indiqué que la SNCF avait commis une faute de discernement en validant un plan d'assurance qualité précisant à tort que « les écarts », s'ils se manifestaient, seraient résorbés, il ressort du même rapport que les opérations de ripage auraient pu être menées à bon terme nonobstant les défaillances de conception du système de ripage ; que, par suite, la SOCIETE BEC FRERES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a estimé qu'elle devait être tenue pour seule responsable du retard pour lequel les pénalités litigieuses lui ont été appliquées ;

Considérant en second lieu que les pénalités susmentionnées prévues par les articles 1.4.2 et 6.4 du cahier des prescriptions spéciales correspondent à des manquements distincts par l'entreprise à ses obligations contractuelles et ne sont pas exclusives l'une de l'autre ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que SOCIETE BEC FRERES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur l'appel incident :

Considérant que la SNCF n'établit pas davantage en appel qu'en première instance qu'elle aurait subi du fait de l'incident survenu le 18 et 19 septembre 1995 lors des opérations de ripage, un préjudice distinct de celui réparé par les pénalités de retard ; que son appel incident doit être rejeté ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SNCF, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par SOCIETE BEC FRERES, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, en l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la SOCIETE BEC FRERES la somme demandée par la SNCF, au même titre ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SOCIETE BEC FRERES et l'appel incident de la SNCF sont rejetés.

Article 2 : Les conclusions de la SNCF tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 0PA0

M.

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N° 03PA02652


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6eme chambre
Numéro d'arrêt : 03PA02652
Date de la décision : 09/08/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés MOREAU
Rapporteur ?: M. Yves MARINO
Rapporteur public ?: M. COIFFET
Avocat(s) : SCP GUIMET AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-08-09;03pa02652 ?
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