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10/11/2006 | FRANCE | N°04PA02320

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2eme chambre - formation b, 10 novembre 2006, 04PA02320


Vu la requête, enregistrée le 2 juillet 2004, présentée pour M. ou Mme Michaël X, élisant domicile ...), par Me Poirier ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°9709349 du 3 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu qui ont été mises à leur charge au titre des années 1991 à 1993 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une som

me de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée le 2 juillet 2004, présentée pour M. ou Mme Michaël X, élisant domicile ...), par Me Poirier ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°9709349 du 3 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu qui ont été mises à leur charge au titre des années 1991 à 1993 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 octobre 2006 :

- le rapport de Mme Isidoro, rapporteur,

- et les conclusions de M. Bataille, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les époux X ont fait l'objet d'un examen de leur situation fiscale personnelle au titre des années 1991, 1992 et 1993 ; qu'à l'issue de cet examen, l'administration a taxé d'office, sur le fondement des dispositions de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, des crédits bancaires dont l'origine demeurait indéterminée ; que les requérants demandent l'annulation du jugement en date du 3 mai 2004 en tant qu'il a rejeté leurs conclusions à fin de décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des trois années précitées et des pénalités y afférentes ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que les époux X ne sont pas fondés à soutenir que les premiers juges auraient omis de tirer les conséquences des compensations qui seraient intervenues entre les prêts et les emprunts allégués pour l'application de la jurisprudence relative aux prêts familiaux ; qu'en effet, les incidences éventuelles de la compensation ne constituent pas un moyen mais un argument au soutien du moyen tiré du caractère familial du prêt allégué, argument auquel les premiers juges, qui ont répondu au moyen, n'avaient pas à répondre ; qu'enfin, il ne résulte pas de l'instruction que les premiers juges ont mal apprécié la portée des pièces du dossier contrairement à ce que soutiennent les requérants ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Sur le caractère oral et contradictoire de la procédure

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des deux notifications de redressements en date du 15 novembre 1994 et du 11 janvier 1995, que les époux X ont été invités à apporter des éclaircissements à l'administration relativement à certains crédits bancaires dont l'origine était indéterminée par des demandes d'éclaircissements en date du 22 juillet 1994 relatives aux trois années en litige et des mises en demeure en date du 3 octobre 1994 ; qu'ils ont été reçus à plusieurs reprises par le vérificateur et qu'ils ont été mis en mesure de présenter leurs observations relativement aux chefs de redressements envisagés par l'administration ; qu'ils ne sont par suite pas fondés à soutenir qu'ils auraient été privés d'un débat oral et contradictoire au cours de la procédure de contrôle de leurs revenus au titre des années 1991 à 1993 ; que la circonstance qu'ils ne maîtriseraient pas bien la langue française, à la supposer établie, n'est pas de nature à démontrer qu'un tel débat n'aurait pas eu lieu, d'autant qu'ils ont eu la possibilité de se faire assister par le conseil de leur choix ; qu'en outre, dans sa version remise aux époux X, la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, exige que le vérificateur ait recherché un tel dialogue avant même d'avoir recours à la procédure contraignante de demande de justifications visée à l'article L. 16 du livre précité ; que, toutefois, il ne résulte pas davantage de l'instruction que l'administration se soit soustraite à un tel dialogue avant d'engager la procédure prévue à l'article L. 16 du livre précité ; qu'ainsi, les époux X ne sont pas fondés à soutenir que la procédure serait irrégulière en l'absence de débat oral et contradictoire ni à soutenir que les premiers juges n'auraient pas répondu au moyen susanalysé ;

Sur le recours à la procédure de taxation d'office :

Considérant que les époux X soutiennent que le recours à la procédure de taxation d'office est irrégulier dès lors qu'ils ont répondu aux demandes d'éclaircissements formulées par l'administration et que leurs réponses étaient vraisemblables ;

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : « En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements (…). Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (…) » ; qu'aux termes de l'article L. 16 A du même livre : « (…) Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite » ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : « Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu, les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16. » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a adressé aux époux X le 22 juillet 1994 des demandes d'éclaircissements portant sur des sommes d'origine indéterminée au titre des années 1991, 1992 et 1993 ; qu'à ces demandes, les époux X se sont bornés à répondre de façon très succincte sur l'origine et l'affectation des sommes litigieuses ; que s'agissant en particulier, d'une part, des dons qui leur auraient été consentis par Y, leur employeur, ils n'ont produit qu'une déclaration de don manuel, datée du 3 novembre 1994, mentionnant leur employeur en double qualité de donataire et donateur et par conséquent dépourvue de toute valeur probante et, d'autre part, des prêts qui seraient d'origine familiale, les requérants ont produit des documents émanant de résidents chiliens qui leur auraient prêté les sommes en cause mais qui ne sont pas signées par M. ou Mme X ; que l'administration a par ailleurs relevé, sans que les requérants puissent expliquer l'origine de cette anomalie, que la date du premier remboursement est antérieure à celle à laquelle aurait été accordé le prêt ; qu'ainsi, l'administration était fondée à considérer que les réponses données par les contribuables étaient insuffisantes au sens de l'article L. 16 A du livre précité, sans d'ailleurs remettre en cause leur caractère vraisemblable ; que les époux X ne sont pas fondés à soutenir que l'administration ne leur aurait pas demandé d'explications complémentaires avant de recourir à la procédure de taxation d'office dès lors qu'il résulte également de l'instruction que l'administration les a mis en demeure le 3 octobre 1994 de compléter leurs explications, ce qu'ils n'ont pas fait ; qu'ils ne sont donc pas davantage fondés à soutenir que c'est à tort que l'administration aurait taxé d'office les crédits bancaires dont l'origine demeurait indéterminée sur le fondement des dispositions de l'article L. 69 du livre précitées ;

En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine :

Considérant que les époux X se prévalent des paragraphes 3, 4, 13 et 14 de la doctrine administrative 5 B 8221 relative à la taxation d'office pour défaut de réponse aux demandes d'éclaircissements ou de justifications qui subordonneraient la mise en oeuvre de la procédure de taxation d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales à la circonstance que les réponses apportées par les contribuables aux demandes d'éclaircissements équivalent à des défauts de réponse en raison de l'imprécision de leur contenu ; que toutefois, cette instruction ne peut, en tout état de cause, être utilement invoquée dès lors qu'elle concerne la procédure d'imposition ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les impositions litigieuses auraient été établies selon une procédure irrégulière ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : « Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. » ;

En ce qui concerne les sommes qualifiées de dons de Y :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

Considérant que les requérants n'invoquent aucun autre moyen au soutien de leurs conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu résultant de la taxation des sommes que l'administration a refusé de reconnaître comme étant des dons en provenance de Y ; qu'ils ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que c'est à tort que l'administration a taxé lesdites sommes dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée ;

En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine :

Considérant que M. et Mme X soutiennent que les dons que leur aurait consentis Y ne sont pas imposables dès lors qu'ils n'ont pas été révélés à l'administration par la procédure de contrôle en application de la doctrine administrative 7 G 3161 du 20 décembre 1996 relative aux dons manuels, qui n'a pas la portée qu'ils lui prêtent ; que, toutefois, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de cette doctrine qui est, en tout état de cause, postérieure aux avis de mise en recouvrement en date du 31 août 1995 ; qu'ils ne sauraient davantage utilement soutenir que les premiers juges n'auraient pas répondu à ce moyen qui n'était pas expressément soulevé en première instance ;

En ce qui concerne les sommes qualifiées de prêt familial :

Considérant que les requérants soutiennent que la somme de 447 061 francs portée au crédit de leur compte bancaire le 20 juillet 1993 correspond à un prêt familial qui leur a été accordé par Z, le beau-frère de Mme X ; qu'ils fournissent à l'appui de cette allégation deux déclarations établies devant notaire datées du 1er septembre 1994 et du 16 août 2000 qui font état d'un prêt accordé par Z conjointement avec un de ses cousins également parent de Mme X, aux époux X pour un montant de 77 000 dollars ; que s'ils font valoir que des compensations auraient été effectuées entre des prêts et des emprunts à caractère familial qui expliqueraient l'absence de concordance parfaite entre les sommes empruntées et les sommes remboursées, il résulte toutefois de l'instruction que les premiers juges ont pu considérer à bon droit, comme l'avait fait l'administration, que le caractère familial du prêt n'est pas établi par les époux X qui supportent la charge de la preuve dans la présente espèce conformément aux dispositions de l'article L. 193 du livre précitées ; qu'en effet, les deux déclarations susmentionnées, bien qu'établies sous serment devant notaire, sont dépourvues de caractère probant dès lors qu'elles ne sont pas signées par les prétendus bénéficiaires du prêt ; que les requérants n'apportent aucun élément de nature à établir l'existence de compensations alléguées entre différents prêts et emprunts à caractère prétendument familial ; que l'administration soutient sans être contredite que le premier remboursement du prêt allégué aurait été effectué avant que le prêt soit accordé ; que les requérants ne sont dès lors pas fondés à soutenir que c'est à tort que l'administration a considéré que les sommes concernées ne présentaient pas le caractère d'un prêt familial et les a, de ce fait, taxées d'office ;

En ce qui concerne la double imposition alléguée :

Considérant que les époux X font valoir que l'administration aurait imposé les mêmes sommes d'un montant de 11 720 francs au titre de l'année 1992 et de 101 605 francs au titre de l'année 1993, d'une part, dans la catégorie des salaires et, d'autre part, dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée alors que ces sommes correspondraient uniquement à des salaires ; que, toutefois, comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, les requérants n'apportent aucun élément de nature à établir le bien-fondé de la qualification d'avances ou d'acomptes sur salaires des sommes litigieuses ; que les requérants n'établissent pas par d'autres moyens que les sommes taxées comme revenus d'origine indéterminée seraient des salaires et auraient fait l'objet d'une double imposition ; qu'au contraire, il résulte de l'instruction que seules les rémunérations imposables mentionnées sur les bulletins de paye fournis par les requérants à l'administration ont été prises en compte dans la catégorie des traitements et salaires pour le calcul des impositions en litige ; qu'enfin, les premiers juges ont suffisamment motivé leur jugement relativement au moyen tiré d'une double imposition contrairement à ce que soutiennent les requérants ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. ou Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions litigieuses ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. et Mme X la somme de 1 800 euros qu'ils réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

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N° 04PA02320


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 04PA02320
Date de la décision : 10/11/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ESTEVE
Rapporteur ?: Mme Cécile ISIDORO
Rapporteur public ?: M. BATAILLE
Avocat(s) : POIRIER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-11-10;04pa02320 ?
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