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04/12/2007 | FRANCE | N°07PA01361

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 04 décembre 2007, 07PA01361


Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2007, présentée pour M. B...D..., demeurant..., par MeC... ; M. D... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603693/7-2 en date du 9 février 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à annuler la décision en date du 3 janvier 2006 par laquelle le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a abrogé l'arrêté d'assignation à résidence pris à son encontre le 27 avril 2004 ; à enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer une assignation à rési

dence avec autorisation de travailler sous astreinte de 1 000 euros par jour d...

Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2007, présentée pour M. B...D..., demeurant..., par MeC... ; M. D... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603693/7-2 en date du 9 février 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à annuler la décision en date du 3 janvier 2006 par laquelle le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a abrogé l'arrêté d'assignation à résidence pris à son encontre le 27 avril 2004 ; à enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer une assignation à résidence avec autorisation de travailler sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir, en application des articles L. 911-1 à L. 911-3 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler la décision en date du 3 janvier 2006 par laquelle le ministre de l'intérieur a abrogé l'arrêté l'assignant à résidence ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer une assignation à résidence avec autorisation de travailler sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir, en application des articles L. 911-1 à L. 911-3 du code de justice administrative ;

4°) de condamner le ministre de l'intérieur à lui verser une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'arrêté du 3 janvier 2006 venant abroger l'arrêté d'assignation à résidence du 27 avril 2004 a été pris sur le fondement de la décision du médecin-chef de la préfecture de police en date du 22 septembre 2005 qui, faute de pouvoir en identifier le signataire, méconnaît les dispositions de l'article R. 4127-76 du code de la santé publique et qu'ainsi, le ministre de l'intérieur a commis une erreur de droit ; que le ministre de l'intérieur, en considérant qu'il pouvait être soigné en Turquie, a commis une erreur manifeste d'appréciation ; que l'arrêté attaqué porte atteinte à sa vie privée et le prive de son emploi ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu enregistré le 29 octobre 2007, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales tendant au rejet de la requête ; le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales soutient que l'avis a bien été émis le 22 septembre 2005 par le médecin-chef de la préfecture de police ainsi que le confirme le courrier électronique de ce dernier ; qu'au regard du bilan médical concernant M. D..., la nécessité de son séjour en France n'était plus avérée ; que les fiches CIMED produites permettent de constater que les structures sanitaires actuelles de la Turquie lui autorisent, au regard de l'évolution de son état de santé, une réelle prise en charge ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne est inopérant, la mesure d'abrogation ne visant qu'à permettre l'exécution de la peine d'interdiction définitive du territoire prononcée par le juge pénal ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945, alors en vigueur ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2007 :

- le rapport de Mme Monchambert, rapporteur,

- les observations de MeC..., pour M.D...,

- et les conclusions de Mme Régnier-Birster, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 28 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, alors en vigueur : " L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion ou qui doit être reconduit à la frontière et qui justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français en établissant qu'il ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays peut, par dérogation à l'article 35 bis, être astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés, dans lesquels il doit se présenter périodiquement aux services de police et de gendarmerie" ; que l'état de santé d'un étranger à l'encontre duquel est pris une décision d'expulsion peut fonder une mesure d'assignation à résidence en tant que cet état de santé rend impossible l'exécution de la mesure ;

Considérant que M.D..., de nationalité turque, est entré en France en 1988 ; qu'il a été condamné, le 20 janvier 1999, pour importation non autorisée de stupéfiants, transport non autorisé de stupéfiants, détention non autorisée de stupéfiants, cession ou offre non autorisée de stupéfiants et acquisition non autorisée, par le Tribunal correctionnel de Paris à une peine de

six ans de prison et à une peine judiciaire d'interdiction définitive du territoire français ; qu'il a fait l'objet, le 6 novembre 2001, d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière qui n 'a pas été exécuté en raison de son état de santé ; que par arrêté du 27 avril 2004,

M. D...a été assigné à résidence jusqu'à ce que la mesure d'éloignement puisse être exécutée ; que par arrêté du 3 janvier 2006, le ministre de l'intérieur a abrogé l'arrêté du 27 avril 2004 ; que par un jugement rendu le 9 février 2007, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté susmentionné ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 4127-76 du code de la santé publique : " Tout certificat, ordonnance, attestation ou document délivré par un médecin doit (...) permettre l'identification du praticien dont il émane et être signé par lui (... ) " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'avis du médecin-chef de la préfecture de Police du 25 septembre 2005, au vu duquel a été pris l'arrêté du ministre de l'intérieur du 3 janvier 2006 abrogeant l'arrêté du 27 avril 2004 assignant M. D... à résidence, comporte la mention " P.O ", ( pour ordre ), une signature illisible et ne mentionne pas les nom et prénom de son auteur ; que par suite, aucune mention ne permet d'identifier l'auteur de cette avis, lequel est, dès lors entaché d'irrégularité au regard des dispositions précitées de l'article R. 4127-76 du code de la santé publique ; que, par suite, l'arrêté du ministre de l'intérieur du 3 janvier 2006, qui a été pris au vu dudit avis, est entaché d'illégalité ; qu'ainsi M. D...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande et à demander l'annulation dudit arrêté ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution" ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application de l'article L. 911-1 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet " ;

Considérant que M. D...demande à ce qu'il soit ordonné au ministre de l'intérieur de lui délivrer un arrêté d'assignation à résidence avec autorisation de travailler ; que si la présente décision rend impossible l'exécution de l'arrêté du 3 janvier 2006, elle n'implique pas par elle-même qu'il soit enjoint au ministre de prendre un arrêté d'assignation à résidence à l'encontre de M. D...mais seulement que l'administration reprenne la procédure au stade où elle est viciée ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement en date du 9 février 2007 du Tribunal administratif de Paris ainsi que l'arrêté du ministre de l'intérieur du 3 janvier 2006 sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D...est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

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N° 07PA01361


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 07PA01361
Date de la décision : 04/12/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Sabine MONCHAMBERT
Rapporteur public ?: Mme REGNIER-BIRSTER
Avocat(s) : ABAHRI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/08/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2007-12-04;07pa01361 ?
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