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20/06/2008 | FRANCE | N°07PA04736

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7éme chambre, 20 juin 2008, 07PA04736


Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2007, présentée pour M. Y X, élisant domicile chez ..., par Me Aucher-Fagbemi ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0710662 en date du 3 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté pris par le préfet de police le 8 juin 2007, refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois suivant sa notification et désignant le pays à destination duquel il pourrait être rec

onduit à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoi...

Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2007, présentée pour M. Y X, élisant domicile chez ..., par Me Aucher-Fagbemi ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0710662 en date du 3 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté pris par le préfet de police le 8 juin 2007, refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois suivant sa notification et désignant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour provisoire, avec autorisation de travail, dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juin 2008 :

- le rapport de M. Dalle, rapporteur ;

- et les conclusions de Mme Isidoro, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, ressortissant béninois, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade, sur le fondement du 11° de l'article L 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 8 juin 2007, le préfet de police a rejeté sa demande en assortissant sa décision d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. X relève appel du jugement du 3 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation du refus de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article L 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin inspecteur ou le médecin chef peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat » ;

Considérant, en premier lieu, que la décision attaquée de refus de titre de séjour comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent ; qu'elle est par suite suffisamment motivée au regard de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur départemental de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé et, à Paris, par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) » ; que l'arrêté du 8 juillet 1999 pris pour l'application de l'article 7-5 du décret du 30 juin 1946, dont les dispositions sont reprises par l'article R 313-22 précité, impose au médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales d'émettre un avis précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié dans son pays ; qu'il appartient ainsi au médecin inspecteur, tout en respectant le secret médical, de donner au préfet les éléments relatifs à la gravité de la pathologie présentée par l'étranger intéressé et à la nature des traitements qu'il doit suivre, nécessaires pour éclairer sa décision ;

Considérant qu'en l'espèce, le requérant indique lui-même que l'avis du médecin chef du service médical de la préfecture de police, dont les termes étaient reproduits dans la décision de refus de titre de séjour, précisait que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale, que son défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'ainsi, le préfet disposait d'éléments suffisamment précis pour éclairer sa décision, communiqués par le médecin inspecteur dans le respect du secret médical ;

Considérant, en troisième lieu, que les pièces produites par le requérant ne permettent pas de remettre en cause l'avis du médecin chef en ce qui concerne les conséquences du défaut de prise en charge médicale et l'existence d'une offre de soins appropriés au Bénin ; qu'il n'apparaît pas que l'état de santé de M. X aurait nécessité un traitement particulièrement coûteux, dont il n'aurait pu bénéficier au Bénin ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'il entrait dans le champ de l'article L 313-11, 11°, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en quatrième lieu, que l'article L. 312-1 de ce code dispose que : « Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) » ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 : « La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12. » ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers remplissant effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, et L. 314 12, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers se prévalant de ces dispositions ; que M. X qui, ainsi qu'il a été dit, ne peut prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'est donc pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait dû saisir la commission du titre de séjour ;

Considérant, en cinquième lieu, que, pour les raisons sus-indiquées, le préfet de police n'a pas entaché sa décision de refus de titre de séjour d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. X ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa du I de l'article L. 511-1 : « L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa » ; que, d'autre part, l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 dispose : « Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) » et l'article 3 de la même loi prévoit que : « La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision » ;

Considérant que la décision par laquelle l'autorité administrative oblige un étranger à quitter le territoire français en application des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, constitue une mesure de police ; qu'elle est ainsi au nombre des décisions qui doivent être motivées en application des dispositions précitées de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que cependant, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que si la décision litigieuse vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle ne comporte aucune référence au I de l'article L. 511-1 dudit code sur laquelle elle se fonde pour donner à M. X l'ordre de quitter le territoire français, à la suite du refus de titre de séjour susmentionné ; que dès lors, celui-ci est fondé à en demander l'annulation, en tant qu'elle est assortie d'une obligation de quitter le territoire français ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas » ;

Considérant que le présent arrêt n'implique pas qu'il soit enjoint au préfet de police de délivrer un titre de séjour ; qu'il implique cependant, par application des dispositions précitées, que ce même préfet délivre à M. X une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit à nouveau statué sur sa situation au regard du séjour ; qu'il y a lieu, par suite d'enjoindre au préfet de police de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. X et de statuer à nouveau sur sa situation au regard du séjour dans un délai maximum de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'en l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par M. X sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 3 octobre 2007 du Tribunal administratif de Paris, en tant qu'il a rejeté la demande de M. X tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 8 juin 2007 lui ordonnant de quitter le territoire français, ensemble les articles 2 et 3 de ce même arrêté, sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. X jusqu'à ce qu'il soit à nouveau statué sur son cas, dans le délai maximum de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Le préfet de police tiendra le greffe de la Cour (service de l'exécution) immédiatement informé des dispositions prises pour répondre à cette injonction.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

N° 07PA04736 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7éme chambre
Numéro d'arrêt : 07PA04736
Date de la décision : 20/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TRICOT
Rapporteur ?: M. David DALLE
Rapporteur public ?: Mme ISIDORO
Avocat(s) : AUCHER-FAGBEMI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2008-06-20;07pa04736 ?
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