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19/10/2010 | FRANCE | N°09PA02717

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 19 octobre 2010, 09PA02717


Vu la requête, enregistrée le 12 mai 2009, présentée pour M. Philippe A, demeurant ...), par Me Parras ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0904250/3 en date du 7 avril 2009 par laquelle le vice-président de la troisième section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 18 mars 2008 portant récapitulation et notification de l'ensemble des retraits de points affectant son permis de conduire et portant interdiction de conduire, ensemble chacune des décisions de

retraits de points irrégulièrement opérés ; d'autre part, à ce qu'il...

Vu la requête, enregistrée le 12 mai 2009, présentée pour M. Philippe A, demeurant ...), par Me Parras ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0904250/3 en date du 7 avril 2009 par laquelle le vice-président de la troisième section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 18 mars 2008 portant récapitulation et notification de l'ensemble des retraits de points affectant son permis de conduire et portant interdiction de conduire, ensemble chacune des décisions de retraits de points irrégulièrement opérés ; d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au ministre de reconstituer le capital de points initial de son permis de conduire ;

2°) d'annuler la décision susmentionnée du 18 mars 2008, ensemble les décisions successives par lesquelles le ministre de l'intérieur lui a retiré respectivement un, deux, deux, un, un, un, un et six points à la suite des infractions commises les 22 avril 2004, 11 mars 2005, 18 novembre 2005, 27 janvier 2006, 24 juin 2006, 15 janvier 2007, 25 août 2007 et 21 mai 2007 ;

3°) d'enjoindre à l'administration de restituer les points illégalement retirés à la suite desdites infractions et de reconstituer le capital de 12 points affectés à son permis de conduire dans le délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 900 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 octobre 20010 :

- le rapport de M. Dellevedove, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Descours-Gatin, rapporteur public ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au premier juge que, par une décision en date du 18 mars 2008, le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales a, en application de l'alinéa 3 de l'article L. 223-3 du code de la route, informé M. A du retrait de 6 points de son permis de conduire en raison d'une infraction commise le 21 mai 2007, rappelé à l'intéressé les décisions de retraits de un, deux, deux, un, un, un et un points à la suite des infractions commises respectivement les 22 avril 2004, 11 mars 2005, 18 novembre 2005, 27 janvier 2006, 24 juin 2006, 15 janvier 2007 et 25 août 2007, puis constaté que le nombre de points affecté à son permis de conduire était nul et que celui-ci avait, en application de l'article L. 223-1 du code de la route, perdu sa validité ; que M. A fait appel de l'ordonnance en date du 7 avril 2009 par laquelle le vice-président de la troisième section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation desdites décisions ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant, qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) /4°Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser (...) ; qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code précité : Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ; qu'aux termes de l'article R. 421-5 du même code : Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ;

Considérant que les conditions de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire, prévue par les dispositions de l'article L. 223-3 du code de la route, ne conditionnent pas la régularité de la procédure suivie et partant, la légalité de ces retraits ; que cette procédure a pour seul objet de rendre ceux-ci opposables à l'intéressé et de faire courir le délai dont il dispose pour en contester la légalité devant la juridiction administrative ; que la circonstance que le ministre ne soit pas en mesure d'apporter la preuve que la notification des retraits successifs, effectuée par lettre simple, a bien été reçue par son destinataire, ne saurait lui interdire de constater que le permis a perdu sa validité, dès lors que, dans la décision procédant au retrait des derniers points, il récapitule les retraits antérieurs et les rend ainsi opposables au conducteur qui demeure recevable à exciper de l'illégalité de chacun de ces retraits ;

Considérant, toutefois, qu'il incombe à l'administration, quand elle oppose une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'action introduite devant un tribunal administratif, d'établir que le requérant a reçu notification régulière de la décision contestée ;

Considérant, d'une part, qu'en cas de retour à l'administration du pli contenant la notification, cette preuve peut résulter, soit des mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe et l'avis de réception, soit, à défaut, d'une attestation de la Poste ou d'autres éléments de preuve établissant la première présentation du pli et la délivrance, par le préposé du service postal, conformément à la réglementation en vigueur, d'un avis d'instance prévenant le destinataire que le pli était à sa disposition au bureau de poste ; que, d'autre part, aucun principe général, ni aucune disposition législative ou réglementaire, ne fait obligation au titulaire d'un permis de conduire de déclarer à l'autorité administrative sa nouvelle adresse en cas de changement de domicile ; qu'il en résulte qu'alors même qu'il n'aurait pas signalé ce changement aux services compétents, la présentation à une adresse où il ne réside plus du pli notifiant une décision relative à son permis de conduire et prise à l'initiative de l'administration n'est pas de nature à faire courir à son encontre le délai de recours contentieux ; que la circonstance qu'il serait également titulaire du certificat d'immatriculation d'un véhicule, et soumis en cette qualité, par les dispositions de l'article R. 322-7 du code de la route, à l'obligation de signaler ses changements de domicile aux services compétents en la matière, est à cet égard sans incidence ;

Considérant que le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales soutient que la décision susmentionnée référencée 48 S du 18 mars 2008, récapitulant l'ensemble des infractions imputées à M. A et des retraits de points dont celui-ci a en conséquence fait l'objet X, lui a été notifiée par lettre recommandée présentée le 31 mars 2008 à son domicile, ...; qu'il ressort des pièces du dossier, d'une part, que le pli recommandé a été renvoyé à l'administration, assorti de la mention non réclamé, retour à l'envoyeur ; qu'il n'est pas établi que, pendant le délai réglementaire avant le renvoi à l'administration, l'intéressé aurait été avisé de sa mise en instance au bureau de poste par le dépôt à son domicile d'un avis de passage ; qu'ainsi, il n'est pas établi que la décision lui a été régulièrement notifiée le 31 mars 2008 à l'adresse susmentionnée ; qu'au surplus, l'intéressé, à cette date, ne résidait plus à cette adresse, mais au ... ; que la circonstance que, sur demande du conseil de l'intéressé ayant pris connaissance des informations figurant sur son relevé d'information intégral du permis de conduire, le ministre ait, par lettre en date du 22 octobre 2008, adressé audit conseil copie de cette décision et indiqué que le délai de recours avait été déclenché par la présentation du pli contenant la décision le 31 mars 2008, n'est pas davantage de nature à avoir fait courir à partir du 22 octobre 2008 le délai de recours contentieux de deux mois contre ladite décision ministérielle 48 S , insusceptible, dans ces conditions, d'avoir rendu opposables à l'intéressé à compter de cette date les décisions de retrait de points querellées; qu'il s'ensuit que, contrairement aux motifs de l'ordonnance attaquée, les conclusions de M. A dirigées contre les décisions susmentionnées n'étaient pas tardives ; que, dès lors, l'ordonnance litigieuse du vice-président de la troisième section du Tribunal administratif de Paris en date du 7 avril 2009 a été prise en méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 222-1 du code de justice administrative et doit être annulée ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 223-1 du code de la route, le nombre de points dont est affecté le permis de conduire est réduit de plein droit lorsque est établie, par le paiement d'une amende forfaitaire ou par une condamnation définitive, la réalité de l'infraction donnant lieu à retrait de points ; que l'article L. 223-3 du même code dispose : Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé du retrait de points qu'il est susceptible d'encourir, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. Le retrait de points est porté à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand il est effectif ; et qu'aux termes de l'article R. 223-3 de ce code : I. - Lors de la constatation d'une infraction, l'auteur de celle-ci est informé que cette infraction est susceptible d'entraîner la perte d'un certain nombre de points si elle est constatée par le paiement d'une amende forfaitaire ou par une condamnation devenue définitive. II. - Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. Le droit d'accès aux informations ci-dessus mentionnées s'exerce dans les conditions fixées par les articles L. 225-1 à L. 225-9 (...) ;

Considérant qu'aux termes de l'article 537 du code de procédure pénale : Les contraventions sont prouvées soit par procès-verbaux ou rapports, soit par témoins (...) / Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les procès-verbaux ou rapports établis par les officiers et agents de police judiciaire (...) font foi jusqu'à preuve contraire ; que si les procès-verbaux établis par les officiers ou agents de police judiciaire pour constater des infractions au code de la route font foi jusqu'à preuve contraire en ce qui concerne la constatation des faits constitutifs des infractions, il appartient au juge d'apprécier, au vu des divers éléments du dossier et notamment des mentions du procès-verbal, si le contrevenant a reçu l'information prévue par l'article L. 223-3 du code de la route ;

Considérant que le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ne produit aucun élément de nature à apporter la preuve, qui lui incombe, que le requérant a bénéficié de l'information préalable prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route lors de la constatation des infractions susmentionnées ; que, dès lors, M. A est fondé à demander l'annulation des décisions susmentionnées portant retrait de points de son permis de conduire ainsi que, par voie de conséquence, de la décision 48 S susmentionnée en date du 18 mars 2008 portant invalidation de son permis de conduire ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que l'administration reconstitue à 12 points le capital de points affectés au permis de conduire de M. A, sous réserve que l'intéressé n'ait pas commis de nouvelles infractions ayant entraîné des retraits de points à la date de notification du présent arrêt ; qu'il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales de reconstituer le capital de points du permis de conduire de M. A dans ce sens afin de rétablir à 12 points son capital, sous réserve des conditions précitées, dans un délai de deux mois ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros, au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'ordonnance susvisée en date du 7 avril 2009 du vice-président de la troisième section du Tribunal administratif de Paris est annulée.

Article 2 : Les décisions du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales portant retraits de points du permis de conduire de M. A, consécutives aux infractions commises les 22 avril 2004, 11 mars 2005, 18 novembre 2005, 27 janvier 2006, 24 juin 2006, 15 janvier 2007, 21 mai 2007 et 25 août 2007, ainsi que la décision du ministre du 18 mars 2008 constatant la perte de validité de son permis de conduire, sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales de reconstituer le capital de points du permis de conduire de M. A afin de porter à douze points son capital, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous réserve que l'intéressé n'ait pas commis de nouvelles infractions ayant entraîné des retraits de points à cette date. Le ministre tiendra le greffe de la Cour (service de l'exécution) immédiatement informé des dispositions prises pour répondre à cette injonction.

Article 4 : L'État versera à M. A la somme de 1 000 ( mille) euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 09PA02717


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA02717
Date de la décision : 19/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Ermès DELLEVEDOVE
Rapporteur public ?: Mme DESCOURS GATIN
Avocat(s) : PARRAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-10-19;09pa02717 ?
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