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29/09/2011 | FRANCE | N°08PA04231

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 29 septembre 2011, 08PA04231


Vu la requête, enregistrée le 7 août 2008, présentée pour la société à responsabilité limitée BRENCO FRANCE, dont le siège est 64, avenue Kléber à Paris (75116), par la société CMS Bureau Francis Lefebvre ; la société BRENCO FRANCE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0100889/2-0100906/2 du 5 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes de décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1996 et des compléments d'impôt sur les s

ociétés et de retenue à la source auxquels elle a été assujettie au titre des années...

Vu la requête, enregistrée le 7 août 2008, présentée pour la société à responsabilité limitée BRENCO FRANCE, dont le siège est 64, avenue Kléber à Paris (75116), par la société CMS Bureau Francis Lefebvre ; la société BRENCO FRANCE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0100889/2-0100906/2 du 5 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes de décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1996 et des compléments d'impôt sur les sociétés et de retenue à la source auxquels elle a été assujettie au titre des années 1995 et 1996, ainsi que des pénalités afférentes à ces impositions ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 septembre 2011 :

- le rapport de M. Bossuroy, rapporteur,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,

- et les observations de Me Donguy, pour la société BRENCO FRANCE ;

Considérant qu'à la suite d'une vérification de sa comptabilité la société BRENCO FRANCE, qui exerce une activité de négoce international, a été soumise à des compléments d'impôt sur les sociétés et de retenue à la source au titre des années 1995 et 1996 ainsi qu'à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1996 ; qu'elle relève appel du jugement du 5 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de décharge de ces impositions et des pénalités y afférentes ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que lorsqu'il est saisi, postérieurement à la clôture de l'instruction et au prononcé des conclusions du rapporteur public, d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, il appartient dans tous les cas au juge administratif d'en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision ; que, s'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré, il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si cette note contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office ;

Considérant que la note en délibéré produite par l'administration le 22 mai 2008, après l'audience publique du Tribunal administratif de Paris mais avant la lecture de la décision ne contenait ni l'exposé d'une circonstance de fait dont l'administration n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction ni d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge aurait dû relever d'office ; que les premiers juges n'étaient dès lors pas tenus de rouvrir l'instruction pour soumettre cette note au débat contradictoire ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 164 de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie susvisée : IV. - 1. Pour les procédures de visite et de saisie prévues à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales pour lesquelles le procès-verbal ou l'inventaire mentionnés au IV de cet article a été remis ou réceptionné antérieurement à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, un appel contre l'ordonnance mentionnée au II de cet article, alors même que cette ordonnance a fait l'objet d'un pourvoi ayant donné lieu à cette date à une décision de rejet du juge de cassation, ou un recours contre le déroulement des opérations de visite ou de saisie peut, dans les délais et selon les modalités précisés au 3 du présent IV, être formé devant le premier président de la cour d'appel dans les cas suivants : ... d) Lorsque, à partir d'éléments obtenus par l'administration dans le cadre d'une procédure de visite et de saisie, des impositions ont été établies ou des rectifications ne se traduisant pas par des impositions supplémentaires ont été effectuées et qu'elles font ou sont encore susceptibles de faire l'objet, à la date de l'entrée en vigueur de la présente loi, d'une réclamation ou d'un recours contentieux devant le juge, sous réserve des affaires dans lesquelles des décisions sont passées en force de chose jugée. Le juge, informé par l'auteur de l'appel ou du recours ou par l'administration, sursoit alors à statuer jusqu'au prononcé de l'ordonnance du premier président de la cour d'appel... 3. Dans les cas mentionnés aux 1 et 2, l'administration informe les personnes visées par l'ordonnance ou par les opérations de visite et de saisie de l'existence de ces voies de recours et du délai de deux mois ouvert à compter de la réception de cette information pour, le cas échéant, faire appel contre l'ordonnance ou former un recours contre le déroulement des opérations de visite ou de saisie. Cet appel et ce recours sont exclusifs de toute appréciation par le juge du fond de la régularité du déroulement des opérations de visite et de saisie. Ils s'exercent selon les modalités prévues respectivement aux articles L. 16 B et L. 38 du livre des procédures fiscales et à l'article 64 du code des douanes. En l'absence d'information de la part de l'administration, ces personnes peuvent exercer, selon les mêmes modalités, cet appel ou ce recours sans condition de délai ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il n'appartient pas au juge de l'impôt de contrôler la régularité de l'ordonnance autorisant les opérations de visite et de saisie prévues par l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ; que, par suite, les moyens tirés par la société BRENCO FRANCE de ce que les juges qui ont autorisé la visite de ses locaux n'auraient pas réellement examiné les pièces qui leur étaient soumises par l'administration, de ce que les ordonnances auraient été rédigées à l'avance par les services fiscaux et que l'existence d'un recours en cassation ne permet pas un contrôle suffisant de la régularité des ordonnances ne peuvent qu'être écartés ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les compléments d'impôt sur les sociétés et de retenue à la source :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 209 du code général des impôts : I ... les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés... en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France ; qu'il résulte de l'instruction que le siège social de la société BRENCO FRANCE était situé en France où elle exerçait son activité et notamment, comme elle le soutient, celle de représentation des société du groupe Brenco établies à l'étranger ; que, par suite, la société BRENCO FRANCE devait être imposée en France sur l'ensemble de ses bénéfices ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 155 A du même code : I. Les sommes perçues par une personne domiciliée ou établie hors de France en rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières : - soit, lorsque celles-ci contrôlent directement ou indirectement la personne qui perçoit la rémunération des services ; - soit, lorsqu'elles n'établissent pas que cette personne exerce, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale, autre que la prestation de services ; - soit, en tout état de cause, lorsque la personne qui perçoit la rémunération des services est domiciliée ou établie dans un Etat étranger ou un territoire situé hors de France où elle est soumise à un régime fiscal privilégié au sens mentionné à l'article 238 A ; qu'il résulte de l'instruction et notamment de diverses pièces saisies par les services fiscaux dans les locaux de la requérante que les prestations d'intermédiation en matière de commerce international de matériels de maintien de l'ordre et de sécurité publique offertes par la société BRENCO FRANCE étaient réalisées en France par son salarié, , alors que les sociétés Brenco Investment Inc., Brenco Limited et Brenco Trading Limited, dont les sièges sociaux se situaient respectivement au Canada, au Royaume Uni et dans l'île de Man, ne disposaient pas de moyens propres à la réalisation de telles prestations ; qu'il suit de là que les sommes reçues par les sociétés dont les sièges sociaux étaient à l'étranger doivent être regardées comme la rémunération des services rendus en France par la société BRENCO FRANCE ; que la société BRENCO FRANCE n'établit pas que lesdites sociétés exerçaient, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale autre que la prestation de services ; qu'en outre, il résulte de l'instruction et notamment du rôle dirigeant joué par dans les sociétés étrangères, que celles-ci étaient sous le contrôle de la société établie en France et que la société Brenco Trading Limited avait son siège dans un territoire disposant d'un régime fiscal privilégié ; que, dès lors, les sommes reçues par les sociétés étrangères étaient imposables en France au nom de la société BRENCO FRANCE ;

Considérant, en troisième lieu, que le vérificateur a constaté que, selon les contrats conclus entre la société BRENCO FRANCE et les sociétés étrangères, les recettes déclarées par la société BRENCO FRANCE correspondaient à un pourcentage des recettes versées aux sociétés Brenco Investment Inc., Brenco Limited et Brenco Trading Limited par le client final ; qu'il a pu ainsi déterminer la somme des recettes réalisées par ces sociétés et, après déduction de la part qui était reversée à la société BRENCO FRANCE et déclarée par celle-ci, le montant des recettes des sociétés étrangères qui devaient être imposées au nom de la requérante en application des dispositions précitées de l'article 155 A ; que le vérificateur, n'ayant pas obtenu le contrat applicable aux encaissements de l'année 1996, a utilisé pour ladite année la moyenne des pourcentages constatés pour huit autres contrats conclus entre 1987 et 1993 ; que dès lors que, selon les relations contractuelles existant en la société BRENCO FRANCE et les sociétés étrangères, le versement de sommes à la requérante résultait des encaissements effectifs obtenus par les sociétés étrangères, la société BRENCO FRANCE ne saurait utilement soutenir que le vérificateur n'a pas vérifié que les contrats conclus par les sociétés Brenco Investment Inc., Brenco Limited et Brenco Trading avec le client final avaient été réalisés et avaient donné lieu à rémunération ; que les versements effectués au profit des sociétés Brenco Investment Inc., Brenco Limited et Brenco Trading doivent être ainsi regardés comme établis, sans que la requérante puisse se prévaloir d'un arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris en matière correctionnelle le 29 avril 2011 dont il ne ressort pas, contrairement à ce qu'elle soutient, que les sommes effectivement reçues de la société Sofremi seraient d'un montant inférieur aux montant retenus par l'administration ; que la double circonstance que la société Sofremi, bénéficiaire des prestations de la société BRENCO FRANCE, a indiqué à l'administration qu'elle avait versé à la société Brenco Trading Limited une somme inférieure aux recettes déclarées par la requérante et que le vérificateur a lui-même indiqué dans les réponses aux observations du contribuable que la société Sofremi a déclaré n'avoir versé des sommes qu'à cette société ne suffit pas à contredire l'évaluation du service dès lors que les informations de la partie versante ne portent pas sur l'ensemble de la période vérifiée mais seulement sur la période du 23 décembre 1994 au 15 janvier 1996 ;

Considérant, enfin, si, par l'arrêt précité, la Cour d'appel de Paris a jugé que les actes de commerce de matériel de guerre pour lesquels , dirigeant de fait de la société BRENCO FRANCE, était poursuivi, ont été accomplis en tant que mandataire de l'Etat angolais, il n'est pas établi que les sommes imposées au nom de la société requérante constituaient la rémunération de cette activité de mandataire ; qu'en tout état de cause, il n'en résulterait pas que cette rémunération devrait échapper à l'imposition en France ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant qu'aux termes de l'article 267 du code général des impôts : II Ne sont pas à comprendre dans la base d'imposition :... 2° Les sommes remboursées aux intermédiaires, autres que les agences de voyage et organisateurs de circuits touristiques, qui effectuent des dépenses au nom et pour le compte de leurs commettants dans la mesure où ces intermédiaires rendent compte à leurs commettants portent ces dépenses dans leur comptabilité dans des comptes de passage, et justifient auprès de l'administration des impôts de la nature ou du montant exact de ces débours ; que la société BRENCO FRANCE n'a pas inclus dans la base de son imposition à la taxe sur la valeur ajoutée les sommes reçues des sociétés étrangères apparentées qu'elle a regardées comme le remboursement de débours exposés pour celles-ci ; que, toutefois, elle n'est pas en mesure de d'établir qu'elle procédait à une reddition de compte à l'attention desdites sociétés et n'a pas justifié la nature et le montant exact de ces prétendus débours ; que, pour ce dernier motif, elle ne peut, en tout état de cause, demander que les dépenses qu'elle a exposées lui ouvrent droit à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui les ont grevées ;

Sur les pénalités de mauvaise foi :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie... ; que l'administration apporte la preuve que, comme il a été dit ci-dessus, la société BRENCO FRANCE n'a déclaré qu'une partie des sommes lui revenant en contrepartie des services d'intermédiation qu'elle offrait, en recourant à la création de sociétés étrangères chargées de l'encaissement d'une partie de ses recettes qu'elle aurait dû percevoir en France ; que si la société soutient que la mise en place d'une telle structure répondait aux exigences particulières du commerce international des matériels de maintien de l'ordre et de sécurité, elle ne donne aucune précision sur la nature de ces exigences ; qu'ainsi le comportement de la société révèle une intention manifeste d'éluder une partie de l'impôt dû en France par la requérante ; que le moyen tiré de ce que l'administration lui aurait à tort infligé des pénalités de mauvaise foi doit par suite être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société BRENCO FRANCE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes ; que les conclusions de la requérante tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;

D E C I D E

Article 1er : La requête de la société BRENCO FRANCE est rejetée.

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