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07/12/2011 | FRANCE | N°10PA03492

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 07 décembre 2011, 10PA03492


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 juillet 2010, présentée pour M. Ibrahim A, élisant domicile ... par Me Pouly ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000993/3-3 du 25 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 7 janvier 2010 lui refusant l'admission au séjour au titre de l'asile et ordonnant sa remise aux autorités grecques ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de l'admettre a

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 juillet 2010, présentée pour M. Ibrahim A, élisant domicile ... par Me Pouly ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000993/3-3 du 25 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 7 janvier 2010 lui refusant l'admission au séjour au titre de l'asile et ordonnant sa remise aux autorités grecques ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de l'admettre au séjour au titre de l'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et l'article 53-1 ;

Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York de 1967 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil de l'Union européenne du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2011 :

- le rapport de Mme Dhiver, rapporteur,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

Considérant que le droit constitutionnel d'asile, qui a le caractère d'une liberté fondamentale, a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié ; que, si ce droit implique que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit en principe autorisé à demeurer sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande, ce droit s'exerce dans les conditions définies par l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le 1° de cet article permet de refuser l'admission en France d'un demandeur d'asile lorsque l'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat en application des dispositions du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 ; que, conformément au paragraphe 2 de l'article 3 du règlement précité et à l'article L. 741-4 du code précité, les autorités françaises ont la faculté d'examiner une demande d'asile, même si cet examen relève normalement de la compétence d'un autre Etat ; qu'il appartient, en particulier, à ces autorités, sous le contrôle du juge, de faire usage de cette faculté, lorsque les règles et les modalités en vertu desquelles un autre Etat examine les demandes d'asile méconnaissent les règles ou principes que le droit international et interne garantit aux demandeurs d'asile et aux réfugiés ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ressortissant afghan, a sollicité auprès des services de la préfecture de police son admission au séjour afin de déposer une demande d'asile ; que la consultation du fichier Eurodac des empreintes digitales a permis de constater que l'intéressé avait transité par la Grèce après son départ d'Afghanistan ; que le préfet de police, qui a estimé que le traitement de la demande d'asile du requérant relevait de la compétence de la Grèce, a, après avoir constaté l'accord implicite des autorités grecques de le prendre en charge, refusé de délivrer à M. A un document provisoire de séjour et a ordonné sa réadmission vers la Grèce par un arrêté du 7 janvier 2010 ;

Considérant que l'existence de déficiences dans le traitement des demandes d'asile présentées auprès des autorités grecques, parfois aggravées par des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du fait des conditions de détention de demandeurs d'asile, ou de leurs conditions d'existence en Grèce dans l'attente de l'examen de leur demande, a été réaffirmée par la Cour européenne des droits de l'homme dans un arrêt de sa Grande chambre du 21 janvier 2011, lequel fait référence à de nombreux rapports précis et concordants d'associations de défense des droits de l'homme ou d'organismes publics chargés de leur protection, tel le Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, qui témoignent de ces lacunes dans la garantie des droits fondamentaux, en particulier par rapport aux ressortissants afghans ; que le même arrêt a également condamné les autorités belges pour avoir renvoyé un demandeur d'asile en Grèce en application du règlement communautaire Dublin II, au motif qu'en le renvoyant en Grèce, les autorités belges ont exposé le requérant à des risques résultant des défaillances de la procédure d'asile dans cet Etat ; que ce demandeur d'asile était originaire d'Afghanistan comme M. A ; que ce dernier fait valoir qu'il serait exposé à des risques comparables en cas de remise aux autorités grecques et de reprise en charge par la Grèce de sa demande d'asile ; que le préfet de police, qui avait la faculté de faire usage de la clause dérogatoire prévue par les dispositions du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (CE) n° 343-2003 du 18 février 2003, ne justifie pas avoir apporté une attention particulière aux conditions dans lesquelles la demande d'asile de M. A serait examinée en Grèce au vu de son passage antérieur dans ce pays et des démarches entreprises à cet effet par ses services auprès des autorités grecques ; que, par suite, son arrêté du 7 janvier 2010 refusant à M. A l'admission au séjour et sa remise aux autorités grecques doit être annulé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 7 janvier 2010 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit par la même décision cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant qu'eu égard au délai écoulé supérieur à six mois depuis l'acceptation implicite de la Grèce de prendre en charge M. KARIMI, le présent arrêt implique que le préfet de police délivre à l'intéressé un document provisoire de séjour lui permettant de solliciter la reconnaissance de la qualité de réfugié auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'enjoindre au préfet de police de délivrer à M. A un tel document, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1000993/3-3 du 25 mai 2010 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet de police du 7 janvier 2010 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. A un document provisoire de séjour lui permettant de solliciter la reconnaissance de la qualité de réfugié auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt. Le préfet de police tiendra le greffe de la Cour (service de l'exécution) immédiatement informé des dispositions prises pour répondre à cette injonction.

Article 3 : L'Etat versera à M. A une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 08PA04258

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N° 10PA03492


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA03492
Date de la décision : 07/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : POULY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-12-07;10pa03492 ?
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