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30/12/2011 | FRANCE | N°09PA07195

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 30 décembre 2011, 09PA07195


Vu la requête, enregistrée le 24 décembre 2009, présentée pour la SOCIETE BOTTE FONDATIONS, dont le siège est situé Zac du Petit Le Roy au 5 rue Ernest Flammarion à Chevilly-Larue (94550), par la SCP Claudon ; la SOCIETE BOTTE FONDATIONS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501115/6-3 en date du 15 octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de Réseau ferré de France (RFF) et de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) à lui régler la somme de 1 388 406,73 euros, augmentée de la

taxe sur la valeur ajoutée, des intérêts moratoires à compter du 2 mai 20...

Vu la requête, enregistrée le 24 décembre 2009, présentée pour la SOCIETE BOTTE FONDATIONS, dont le siège est situé Zac du Petit Le Roy au 5 rue Ernest Flammarion à Chevilly-Larue (94550), par la SCP Claudon ; la SOCIETE BOTTE FONDATIONS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501115/6-3 en date du 15 octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de Réseau ferré de France (RFF) et de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) à lui régler la somme de 1 388 406,73 euros, augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée, des intérêts moratoires à compter du 2 mai 2004 et de leur capitalisation, en réparation du préjudice résultant de l'exécution du marché notifié le 13 février 2003 ayant pour objet la réalisation de travaux de confortation de plates-formes par injection sur les lignes Amiens-Laon et Saint-Just-Douai ;

2°) de condamner les établissements publics RFF et SNCF à lui régler cette somme, augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée, des intérêts moratoires à compter du 2 mai 2004 et de leur capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de RFF et de la SNCF les sommes de 10 000 euros, au titre de ses frais irrépétibles de première instance, et 5 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 décembre 2011 :

- le rapport de M. Dellevedove, rapporteur,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- et les observations de Me Bonnet-Cerisier, substituant Me Claudon, pour la SOCIETE BOTTE FONDATIONS ;

Considérant que, à la suite de l'appel d'offres du 22 octobre 2002, la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), agissant comme maître d'ouvrage délégué de Réseau ferré de France (RFF) au nom et pour le compte de celui-ci, a confié, par l'ordre de service en date du 18 décembre 2002, à la société Botte Sade Fondations, dénommée désormais BOTTE FONDATIONS, le marché de travaux de consolidation par injection des sols de plates-formes ferroviaires sur les lignes Amiens-Laon et Saint-Just-Douai, marché notifié le 13 février 2003, la SNCF assurant également la maîtrise d'oeuvre de l'opération ; que les travaux, commencés le 19 décembre 2002, pour un délai contractuel de 133 jours calendaires, ont été réceptionnés le 3 décembre 2003 avec effet au 8 août 2003 ; qu'en raison des difficultés rencontrées par l'entreprise lors des premiers forages, en cours de chantier, il a été décidé d'un commun accord entre les parties de mettre en oeuvre la technique du forage avec fluide au lieu du forage avec air ; que, par lettre en date du 10 décembre 2003, la société adressait au maître d'ouvrage son projet de décompte final ainsi qu'un mémoire de réclamation pour un montant total de 2 344 553,42 euros HT, dont 917 942,69 euros HT correspondant aux attachements acceptés par le maître d'ouvrage, et 1 426 610,73 euros, à titre d'indemnisation compensatoire du préjudice par elle subi en raison des sujétions imprévues, des fautes de la SNCF et des événements imputables au maître d'ouvrage invoqués dans ce mémoire ; que, par l'ordre de service en date du 3 mars 2004, reçu par la société Botte Sade Fondations le 4 mars 2004, le maître d'ouvrage notifiait à cette entreprise le décompte général du marché d'un montant de 900 652,26 euros HT, faisant état d'un trop-perçu sur acompte de la part de l'entreprise d'un montant de 17 290,44 euros HT ; que, par lettre en date du 16 avril 2004, notifiée à la SNCF le 19 avril 2004, la société Botte Sade Fondations refusait d'accepter le décompte général et réitérait ses réclamations ; que, par lettre en date du 20 octobre 2004, le maître d'ouvrage rejetait expressément ces réclamations, ramenant, toutefois, le montant du trop-perçu par la société au montant de 15 940 euros HT ; que la SOCIETE BOTTE FONDATIONS fait appel du jugement en date du 15 octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, dans le dernier état de ses écritures, à la condamnation de Réseau ferré de France et de la Société nationale des chemins de fer français à lui régler la somme, au principal, de 1 388 406,73 euros, en réparation du préjudice ainsi subi ; que, par la voie de l'appel incident, la SNCF demande à la Cour de condamner la société requérante à rembourser au maître d'ouvrage la somme de 15 940,44 euros correspondant au trop-perçu susmentionné ;

Considérant qu'il appartient au juge du contrat régulièrement saisi, en l'absence de décompte général devenu définitif, de statuer sur les réclamations pécuniaires des parties ;

Sur l'appel principal :

Considérant que la SOCIETE BOTTE FONDATIONS soutient qu'elle a droit à la réparation des préjudices par elle subis imputables au maître d'ouvrage en raison des sujétions techniques imprévisibles, des fautes de la SNCF, de l'allongement des délais d'exécution, et des intempéries auxquels elle a dû faire face dans l'exécution du marché ;

En ce qui concerne les sujétions techniques imprévues :

Considérant que ne peuvent être regardées comme des sujétions techniques imprévues pour l'entrepreneur, de nature à justifier l'indemnisation de leurs conséquences dommageables, que des difficultés matérielles rencontrées lors de l'exécution d'un marché, présentant un caractère exceptionnel, imprévisibles lors de la conclusion du contrat et dont la cause est extérieure aux parties ;

Considérant qu'au terme de l'article 1er de la notice descriptive, qui figure au nombre des pièces contractuelles : Le but des travaux définis dans la présente notice est le comblement des vides et une reconsolidation des sols pour le traitement des zones décomprimées afin que l'assise des voies ne soit pas le siège d'affaissements pouvant mettre en jeu la sécurité des convois ferroviaires (...) ;

Considérant qu'en raison des mises en garde figurant ainsi dans les documents contractuels, il incombait à l'entreprise requérante de mesurer avant de s'engager l'étendue des obligations qu'elle devrait assumer et de prendre en compte les divers aléas dont elle pourrait supporter la charge, notamment en raison de la nature du terrain sur lequel les travaux devaient être effectués ; que la société requérante n'établit aucun fait du maître d'ouvrage qui l'aurait empêchée d'apprécier exactement l'étendue de ses obligations ; qu'il résulte, au contraire, de l'instruction, ainsi que le reconnaît la société requérante, que le maître d'ouvrage avait fourni des essais de sols réalisés au pressiomètre qui faisait état de pressions limites faibles confirmant la nécessité de traiter l'assise des voies ; que la société Botte Sade Fondations n'a émis aucune réserve sur ce point lors de la conclusion du marché ; que, dans ces conditions, la société requérante ne saurait se prévaloir du fait que les difficultés rencontrées dans l'exécution des travaux en raison de terrains particulièrement décomprimés , qui ne présentaient aucun caractère exceptionnel ni imprévisible, auraient excédé ses propres prévisions pour demander que leurs conséquences soient mises à la charge du maître d'ouvrage ;

En ce qui concerne les fautes de la SNCF :

Considérant, en premier lieu ' que la société requérante soutient que la SNCF aurait commis une faute en ne fournissant pas d'étude de sol dans les pièces du marché ; qu'il résulte, toutefois, de l'instruction, d'une part, que le maître d'ouvrage avait fourni des essais de sols réalisés au pressiomètre confirmant la nécessité de traiter l'assise des voies, ainsi qu'il a été dit ; que, d'autre part, il ne résulte pas de l'instruction que, dans les circonstances de l'espèce et compte tenu des mises en garde susmentionnées figurant dans les documents contractuels, ces essais eussent été insuffisants pour qu'un professionnel averti comme l'entreprise requérante, spécialisée dans le traitement des sols, puisse mesurer l'étendue des obligations qu'elle devait assumer ; que, dès lors, la SNCF n'a commis à cet égard aucune négligence ;

Considérant, en deuxième lieu, que la société requérante soutient que la SNCF aurait dû proposer une solution adaptée aux caractéristiques des sols dès la consultation des entreprises ; que, toutefois, d'une part, la société, spécialiste de la construction, n'a émis sur ce point aucune réserve lors de la conclusion du marché ; que, d'autre part, la société ne saurait démontrer l'imputabilité des difficultés dont elle fait état à la non faisabilité des travaux par la technique initialement retenue de forage par air sans apporter le moindre commencement de preuve au soutien de ses allégations ; que, si, en cours d'exécution des travaux, il fut décidé, à la suite notamment de la réunion de chantier n° 2 du 15 janvier 2003, de remplacer la technique du forage par air par la technique du forage par fluide sans remise en cause des prix unitaires du marché et que, dès lors, ce changement de technique doit être regardé, dans ces conditions, comme étant entré dans le champ contractuel, cette solution, si elle présentait des avantages, notamment en ce qu'elle pouvait éviter un trop long retard dans le déroulement du chantier, ne saurait attester d'une quelconque reconnaissance de la part de la SNCF du caractère impraticable ou inadapté de la solution technique initialement retenue du forage par air ;

Considérant, en troisième lieu, que la société requérante soutient que le maître d'ouvrage n'aurait pas respecté les stipulations contractuelles en raison de l'indisponibilité du personnel de la SNCF se traduisant par la diminution de l'amplitude journalière dont elle a pu effectivement disposer pour ses interventions et par des interruptions de chantier en cas de grève ; que, toutefois, elle n'apporte aucun commencement de preuve au soutien de ses allégations alors même qu'elle n'a sollicité aucune constatation contradictoire des faits en cause par la procédure des attachements, en application de l'article 12.17 du cahier des clauses et conditions générales applicables aux marchés de travaux de RFF et de la SNCF ;

En ce qui concerne les intempéries :

Considérant qu'aux termes de l'article 20.22 de ce même cahier : Dans le cas d'intempéries, au sens des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur, entraînant un arrêt total des travaux, les délais d'exécution correspondants sont prolongés du nombre de journées réellement constatées au cours desquelles le travail à été arrêté du fait des intempéries conformément aux dites dispositions, en défalquant, s'il y a lieu, le nombre de journées d'intempéries prévisible indiqué au marché. Lorsque l'arrêt des travaux n'est que partiel, l'éventuelle décision de prolongation des délais d'exécution est notifiée à l'entrepreneur par un ordre de service récapitulant les constatations faites. / Dans le cas d'intempéries non visées par une disposition légale ou réglementaire, ainsi que dans le cas d'autres phénomènes naturels entravant l'exécution des travaux, si le marché prévoit la prolongation du délai d'exécution en fonction de critères qu'il définit, cette prolongation de délai est accordée à l'entrepreneur en fonction des constatations faites et elle est notifiée à l'entrepreneur par un ordre de service récapitulant les constatations faites ;

Considérant que la société requérante n'établit ni la réalité d'un arrêt total ou partiel des travaux au sens du premier alinéa de l'article précité, ni que les intempéries et les autres phénomènes naturels qu'elle invoque ont effectivement entravé, au sens du second alinéa de cet article, l'exécution des travaux, à défaut notamment d'avoir provoqué auprès du maître d'ouvrage, comme il lui appartenait de le faire, l'établissement des constatations contradictoires des difficultés rencontrées dans l'exécution des travaux ; que, dès lors, en tout état de cause, la SOCIETE BOTTE FONDATIONS n'est pas fondée à réclamer l'indemnisation de leurs conséquences dommageables ;

En ce qui concerne l'allongement des délais d'exécution :

Considérant que la société requérante n'établit pas par ses simples allégations que l'allongement des délais d'exécution des travaux serait imputable à la SNCF ; qu'en particulier, elle ne saurait sérieusement soutenir que les pertes de cadence au cours des travaux de forage et les pertes de rendement au cours des opérations d'injection seraient imputables à la SNCF en conséquence des sujétions, fautes et événements susmentionnés dont celle-ci ne saurait être tenue pour responsable, ainsi qu'il a été dit, alors même, d'ailleurs, que la société Botte Sade Fondations avait proposé en toute connaissance de cause la technique du forage par fluide afin de réduire les délais ; que la SNCF ne saurait pas davantage être tenue pour responsable, et pour les mêmes motifs, des moyens supplémentaires que la société requérante prétend avoir mis en oeuvre alors même qu'il résulte de l'instruction que certains des moyens présentés par la société étaient non conformes aux prescriptions contractuelles ou n'ont pas été mis en oeuvre selon les règles de l'art ; que, dès lors, les conséquences dommageables des sujétions, fautes et événements susmentionnés, de l'allongement des délais d'exécution et de la mise en oeuvre de moyens supplémentaires invoqués par la société requérante ne sauraient lui ouvrir droit à l'indemnisation qu'elle réclame alors même, d'ailleurs, qu'il n'est pas contesté que les travaux effectivement réalisés lui ont été rémunérés aux prix unitaires conformes aux sous-détails de bordereau du marché et aux quantités effectivement mises en oeuvre :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de prescrire de mesure d'instruction, la SOCIETE BOTTE FONDATIONS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur l'appel incident :

Considérant que la SNCF ne justifie pas plus en appel qu'en première instance la réalité du trop-perçu d'acompte dont elle réclame le versement ; que, dès lors, ses conclusions d'appel incident tendant au remboursement de ce trop-perçu ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que, compte tenu des succombances respectives des parties, il y a lieu de mettre à la charge de la SOCIETE BOTTE FONDATIONS la somme de 2 000 euros, au titre des frais exposés par la SNCF et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête susvisée de la SOCIETE BOTTE FONDATIONS est rejetée.

Article 2 : La SOCIETE BOTTE FONDATIONS versera à la SNCF la somme de 2 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions d'appel incident de la SNCF sont rejetées.

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N° 09PA07195


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA07195
Date de la décision : 30/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Ermès DELLEVEDOVE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : SCP CLAUDON ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-12-30;09pa07195 ?
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