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19/01/2012 | FRANCE | N°11PA02540

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 19 janvier 2012, 11PA02540


Vu la requête, enregistrée le 31 mai 2011, présentée pour M. Harouna A, demeurant ..., par Me Delanoë-Daoud ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005360/7 en date du 18 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 7 juin 2010 du préfet du Val-de-Marne refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français en fixant le pays de destination, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte d

e séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notific...

Vu la requête, enregistrée le 31 mai 2011, présentée pour M. Harouna A, demeurant ..., par Me Delanoë-Daoud ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005360/7 en date du 18 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 7 juin 2010 du préfet du Val-de-Marne refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français en fixant le pays de destination, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification dudit jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, enfin, de lui délivrer, dans l'intervalle, une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa situation administrative dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'intervalle, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 janvier 2012 :

- le rapport de Mme Julliard, rapporteur,

- et les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public ;

Considérant que M. A, de nationalité mauritanienne, est entré en France le 10 octobre 2008 selon ses déclarations ; que sa demande de reconnaissance de la qualité de réfugié a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par décision du 24 août 2009, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 20 avril 2010 ; que, par arrêté en date du 7 juin 2010, le préfet du Val-de-Marne a refusé son admission au séjour au titre de l'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que l'intéressé relève régulièrement appel du jugement du 18 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté susmentionné ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le requérant soutient que les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré du défaut de motivation de la décision de refus de titre de séjour qu'il avait soulevé devant eux ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que l'intéressé avait soulevé, en première instance, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français était insuffisamment motivée dès lors que le refus de titre de séjour l'était lui-même insuffisamment ; que les premiers juges, pour écarter ce moyen, ont considéré que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement ; que si le requérant soutient que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est insuffisamment motivée, faute pour la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour d'être elle-même motivée, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que le moyen tiré de l'omission de statuer par les premiers juges sur le moyen tiré du défaut de motivation du refus de titre de séjour ne peut donc qu'être écarté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, que la décision de refus de titre de séjour contestée vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative aux réfugiés, et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle mentionne que la demande d'asile de l'intéressé a été rejetée par une décision du Directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 24 août 2009 confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 20 avril 2010 ; qu'elle précise en outre que M. A ne peut prétendre à la délivrance ni d'une carte de résident au titre du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni d'une carte de séjour temporaire au titre de l'article L. 313-13 dudit code et que l'intéressé n'entre dans aucun autre cas d'attribution d'un titre de séjour en application de ce code ; qu'enfin, elle mentionne qu'elle n'est pas contraire aux articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi, et nonobstant la circonstance que certaines mentions sont rédigées à l'aide de formulations stéréotypées, le préfet du Val-de-Marne a suffisamment motivé la décision de refus de titre de séjour contestée au regard des exigences de motivation des actes administratifs ; que ce moyen doit donc être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre, doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI. ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du même code : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ;

Considérant que M. A se borne à reprendre dans sa requête le moyen invoqué devant les premiers juges, tiré de ce que le préfet du Val-de-Marne était tenu d'examiner s'il pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur un autre fondement du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que sa qualité de réfugié, et en particulier sur le fondement de l'article L. 313-14 de ce code, sans toutefois apporter à l'appui de ses allégations d'autres éléments que ceux produits en première instance ; que ce moyen a été écarté à bon droit par le tribunal administratif ; que, par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ... L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation... ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le préfet du Val-de-Marne ne se serait pas livré à un examen approfondi de la situation de l'intéressé en prenant la décision portant obligation de quitter le territoire français contestée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est célibataire et sans charge de famille en France, où il déclare être entré en 2008 à l'âge de 20 ans, et que ses parents et sa soeur vivent au Sénégal où il a lui-même résidé de 1989 à 2008 ; qu'il ne démontre pas avoir noué de liens intenses et stables sur territoire français ; que dans ces conditions, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a donc pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de ce qui a été précédemment dit que M. A ne saurait utilement se prévaloir, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, enfin, qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la décision contestée serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, que la décision par laquelle le préfet fixe le pays de destination auprès duquel sera reconduit l'étranger s'il ne satisfait pas à l'obligation de quitter le territoire français constitue une mesure de police qui doit, en principe, être motivée en fait comme en droit en vertu des dispositions de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;

Considérant que, si la motivation de fait de la décision fixant le pays de destination ne se confond pas nécessairement avec celle obligeant l'étranger à quitter le territoire, la motivation en droit de ces deux décisions est identique et résulte des termes mêmes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le législateur ayant décidé par l'article 41 de la loi susvisée du 20 novembre 2007 de dispenser l'administration de viser la disposition législative qui fonde l'obligation de quitter le territoire, cette dispense s'attache, dans la même mesure, à la décision fixant le pays de destination, fondée sur la même disposition législative ; qu'ainsi, le requérant n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination n'est pas suffisamment motivée en droit, les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ayant pas, quant à elles, à être visées dès lors qu'elles ne s'attachent qu'aux modalités d'exécution de la mesure ; que cette décision est, en outre, suffisamment motivée en fait, dès lors qu'elle mentionne la nationalité mauritanienne de M. A, laquelle mention constitue le fondement nécessaire et suffisant de la désignation du pays dont il a la nationalité comme pays de destination ; qu'ainsi, la motivation, qui est claire et précise, de la décision fixant la destination de l'éventuel éloignement d'office de M. A satisfait aux exigences de la loi précitée du 11 juillet 1979 ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger (...) qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; que ce dernier texte énonce que : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que M. A soutient avoir fui la Mauritanie, son pays d'origine, à l'âge de 18 mois, avec ses parents aujourd'hui réfugiés au Sénégal dans un camp du Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, que ni lui, ni aucun membre de sa famille n'est jamais retourné en Mauritanie et qu'il y serait exposé à des risques de persécutions en raison de ses origines peuls et des soupçons d'appartenance à un groupe d'opposants politiques visant son père ; qu'il ne démontre toutefois pas, par les pièces qu'il produit, consistant en des lettres qui auraient selon lui été rédigées par son père et l'ancien chef du village dans lequel il vivait en Mauritanie, qui ne présentent aucune garantie d'authenticité, et en de la documentation générale relative à la situation politique en Mauritanie, qu'il serait personnellement exposé à des risques en cas de retour dans ce pays ; que ce moyen doit, par suite, être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision fixant le pays de destination et doit par suite être écarté ;

Considérant, enfin, que compte tenu de ce qui a été dit, aucune circonstance particulière propre au pays à destination duquel sera éloigné M. A ne peut permettre d'établir que la décision distincte fixant ce pays serait entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que le présent arrêt n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions aux fins d'injonction de la requête, ainsi que celles tendant au versement de frais irrépétibles doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 10PA03855

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N° 11PA02540


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA02540
Date de la décision : 19/01/2012
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: M. JARRIGE
Avocat(s) : DELANOË-DAOUD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-01-19;11pa02540 ?
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