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26/01/2012 | FRANCE | N°10PA01677

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 26 janvier 2012, 10PA01677


Vu la requête, enregistrée le 2 avril 2010, présentée pour M. Benoît A et Mme Anne A, demeurant ..., M. et Mme C, demeurant ..., par Me Le Port ; M. A et autres demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0714637 en date du 28 janvier 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris du 9 juillet 2007 déclarant d'utilité publique au profit de la société d'économie mixte de la ville de Paris (S.E.M.A.V.I.P.) l'aménagement de l'ensemble immobilier 25

rue Stephenson, 2 rue Cavé à Paris 18ème arrondissement ;

2°) d'annuler, ...

Vu la requête, enregistrée le 2 avril 2010, présentée pour M. Benoît A et Mme Anne A, demeurant ..., M. et Mme C, demeurant ..., par Me Le Port ; M. A et autres demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0714637 en date du 28 janvier 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris du 9 juillet 2007 déclarant d'utilité publique au profit de la société d'économie mixte de la ville de Paris (S.E.M.A.V.I.P.) l'aménagement de l'ensemble immobilier 25 rue Stephenson, 2 rue Cavé à Paris 18ème arrondissement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) de mettre à la charge de la S.E.M.A.V.I.P., de la ville de Paris et de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le décret n° 86-455 du 14 mars 1986 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 janvier 2012 :

- le rapport de Mme Briançon, rapporteur,

- les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public,

- et les observations de Me Chamas pour la Société d'économie mixte de la ville de Paris (S.E.M.A.V.I.P.) ;

Considérant que, par arrêté en date du 9 juillet 2007, le préfet de Paris a déclaré d'utilité publique l'acquisition par la Société d'économie mixte de la ville de Paris (S.E.M.A.V.I.P.), par voie d'expropriation, l'aménagement de l'ensemble immobilier 25 rue Stephenson - 2 rue Cavé à Paris (75018) ; que M. A et autres relèvent appel du jugement du 28 janvier 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : La décision mentionne que l'audience a été publique, sauf s'il a été fait application des dispositions de l'article L. 731-1. Dans ce dernier cas, il est mentionné que l'audience a eu lieu ou s'est poursuivie hors la présence du public. Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application.... ;

Considérant que les requérants soutiennent que le jugement qui leur a été notifié ne comporte pas l'analyse des mémoires produits par les parties, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ; que, toutefois, il ressort de la minute du jugement que le tribunal a visé et analysé l'ensemble des mémoires présentés par les parties, ainsi que les autres pièces du dossier ; que ces visas sont signés par le président, le rapporteur et le greffier d'audience ; que, par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative manque en fait et doit être écarté ;

Au fond :

Considérant, en premier lieu, que l'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative que si cette dernière a été prise pour son application ou s'il en constitue la base légale ; que la procédure par laquelle une opération est déclarée d'utilité publique est sans lien avec celle par laquelle est décidée la signature d'un contrat de concession ; que l'arrêté du 9 juillet 2007 déclarant d'utilité publique au profit de la S.E.M.A.V.I.P. l'aménagement de l'ensemble immobilier 25 rue Stephenson - 2 rue Cavé à Paris ne constitue pas un acte d'exécution de la convention publique d'aménagement susvisé ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'avenant n° 5 du 26 mai 2006 à la convention d'aménagement en date du 11 juin 2002 n'aurait pas été précédé de mesures de publicité et de mise en concurrence est inopérant ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 11-5 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : Le commissaire enquêteur ou les membres de la commission d'enquête sont choisis parmi les personnes figurant sur l'une des listes d'aptitude prévues au deuxième alinéa de l'article L. 123-4 du code de l'environnement. / Ne peuvent être désignées pour exercer les fonctions de commissaire enquêteur les personnes appartenant à l'administration de la collectivité ou de l'organisme expropriant ou participant à son contrôle ou les personnes intéressées à l'opération soit à titre personnel, soit en raison des fonctions qu'elles exercent ou ont exercées depuis moins de cinq ans ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le commissaire enquêteur a été choisi sur la liste départementale d'aptitude aux fonctions de commissaire enquêteur ; qu'il n'exerce aucune responsabilité et aucun contrôle au sein de la ville de Paris ; que ni sa qualité de représentant en tant que conseiller municipal de Vaucresson au sein du syndicat intercommunal de traitement des ordures ménagères qui regroupe 85 communes de la région parisienne, ni son statut de salarié de la société Dexia Crédit local de France, dont la Caisse des dépôts et consignations, qui détient une part du capital de la S.E.M.A.V.I.P., est actionnaire minoritaire, ne constituent, en l'espèce, des indices suffisants permettant de remettre en cause l'indépendance du commissaire enquêteur pour conduire l'enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique de l'opération d'aménagement en cause ; qu'ainsi, il n'est pas établi que l'avis rendu le 6 mai 2007 n'aurait pas été pris pour des motifs d'intérêt général ; que, par suite, le moyen tiré de l'absence d'impartialité et d'indépendance du commissaire enquêteur doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 11-10 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête rédige des conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables ou non à l'opération. Le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête transmet le dossier avec ses conclusions soit au préfet si l'enquête est ouverte à la préfecture, soit au sous-préfet dans les autres cas. Le dossier est transmis, le cas échéant, par le sous-préfet au préfet avec son avis ; qu'il résulte de ces dispositions que l'obligation qui pèse sur le commissaire enquêteur consiste à apprécier les avantages et inconvénients de l'opération et à indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis ;

Considérant que si les requérants soutiennent que, d'une part, le commissaire enquêteur n'a répondu que de façon sommaire aux propositions et aux arguments qui lui ont été transmis par courrier, et d'autre part, que le commissaire enquêteur aurait déformé le contenu des observations dont il avait été saisi en se bornant à reprendre sans même les discuter les observations de la ville de Paris, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'après avoir fait une présentation détaillée du projet et résumé les observations du public, le commissaire enquêteur a, conformément aux prescriptions du code précité, donné son avis personnel sur les raisons qui l'ont conduit à émettre un avis favorable sans réserve ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement :... 5° L'appréciation sommaire des dépenses ; II.- Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de l'acquisition d'immeubles, ou lorsqu'elle est demandée en vue de la réalisation d'une opération d'aménagement ou d'urbanisme importante et qu'il est nécessaire de procéder à l'acquisition des immeubles avant que le projet n'ait pu être établi : ... 4° L'estimation sommaire des acquisitions à réaliser. ... ; que si l'article R. 11-3 précité prévoit que le dossier soumis à l'enquête comporte une appréciation sommaire des dépenses, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que ce dossier d'enquête comprenne le détail des éléments retenus pour aboutir à l'appréciation sommaire ni n'oblige l'administration à annexer au dossier l'avis du service des domaines ; que contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'article 6 du décret n° 86-455 du 14 mars 1986 portant suppression des commissions des opérations immobilières et de l'architecture et fixant les modalités de consultation des services des domaines ne peut être utilement invoqué dans le cadre d'une opération dont la maîtrise d'ouvrage relève d'une collectivité publique autre que l'Etat ; qu'en outre, il ressort des pièces du dossier que la demande d'évaluation des acquisitions a été sollicitée par le maire de Paris le 28 novembre 2005 et que le service des domaines a, par courrier du 23 décembre 2005, transmis l'évaluation de l'ensemble immobilier cadastré CG n° 83 pour 611 m² sis 25 rue Stephenson - 2 rue Cavé à Paris ; que par suite le moyen manque en fait et doit être écarté ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 11-1-1 3° du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : Lorsqu'un projet public de travaux, d'aménagements ou d'ouvrages constitue une des opérations mentionnées à l'article L. 123-1 du code de l'environnement et que sa réalisation rend nécessaire l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, la déclaration de projet prévue à l'article L. 126-1 du code de l'environnement intervient, au vu des résultats de l'enquête prévue à l'article L. 11-1 du présent code, selon les modalités et dans les conditions suivantes :... 3/ L'acte déclarant l'utilité publique est accompagné d'un document qui expose les motifs et considérations justifiant le caractère d'utilité publique de l'opération. ; que l'article L. 123-1 renvoie à des décrets en Conseil d'Etat pour établir la liste limitative des opérations qui en relèvent ;

Considérant, d'une part, que l'opération projetée n'appartient pas à la catégorie des opérations visées à l'article L. 123-1 du code de l'environnement et dont la liste est fixée par l'annexe à l'article R. 123-1 du même code ; que, d'autre part, l'acte déclaratif d'utilité publique ne présente pas le caractère d'une décision administrative individuelle et, dès lors, n'a pas à être motivé ; qu'enfin, si les requérants soutiennent que l'arrêté en date du 9 juillet 2007, déclarant d'utilité publique au profit de la société d'économie mixte de la ville de Paris, l'aménagement de l'ensemble immobilier 25 rue Stephenson - 2 rue Cavé à Paris n'indique pas les caractéristiques du projet, aucune disposition réglementaire n'impose d'indiquer dans cet arrêté, la nature et les caractéristiques dudit projet ;

Considérant, enfin, qu'une opération ne peut légalement être déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'escalier A de l'ensemble immobilier sis 25 rue Stephenson - 2 rue Cavé, a fait l'objet, depuis 2002, de plusieurs arrêtés préfectoraux prescrivant la mise en oeuvre de mesure de sécurité prévues aux articles L. 511-1 à L. 511-6 du code de la construction et de l'habitation ; que 6 lots sont définitivement interdits d'occupation par application d'arrêtés en date du 17 novembre 2005 constatant leur insalubrité irrémédiable et qu'en application d'un arrêté de péril en date du 29 septembre 2006, les habitations situées aux 3ème, 4ème et 5ème étages sont interdites ; que l'état de l'escalier B nécessite également des travaux de confortement de l'immeuble et du sous-sol ; que si les requérants soutiennent que l'opération aurait pu être réalisée sans recourir à une expropriation totale en excluant notamment les lots desservis par l'escalier B, l'état de cet escalier est également préoccupant et nécessite des travaux de confortement de l'immeuble et du sous-sol ; que l'importance des travaux à réaliser et la nature du projet justifiaient que l'immeuble soit traité dans son ensemble ; qu'ainsi, compte tenu de l'état général de l'ensemble immobilier, de l'obligation qui est faite au bénéficiaire de la déclaration d'utilité publique de reloger les locataires et occupants de bonne foi en application de l'article L. 314-2 du code de l'urbanisme, et de l'objet même du projet de rénovation comportant la création de 20 logements sociaux, les inconvénients qu'il comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt général que présente l'opération en cause ; que, par suite, le moyen tiré du défaut d'utilité publique du projet ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. A et autres doivent dès lors être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge des requérants, la somme que demande la S.E.M.A.V.I.P. au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A, de Mme A et de M. et Mme C est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la S.E.M.A.V.I.P. tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 10PA01677


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10PA01677
Date de la décision : 26/01/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme LACKMANN
Rapporteur ?: Mme Claudine BRIANÇON
Rapporteur public ?: Mme VIDAL
Avocat(s) : LE PORT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-01-26;10pa01677 ?
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