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27/04/2012 | FRANCE | N°10PA04714

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 27 avril 2012, 10PA04714


Vu le recours, enregistré le 17 septembre 2010, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0518788 du 21 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a déchargé la société Rueil Sports, venant aux droits et obligations de la société Financière Immobilière Pettens, de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés, ainsi que de la pénalité correspondante, auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2001 ;

2°) reme

ttre cette imposition et cette pénalité à la charge de la société Rueil Sports ;

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Vu le recours, enregistré le 17 septembre 2010, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0518788 du 21 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a déchargé la société Rueil Sports, venant aux droits et obligations de la société Financière Immobilière Pettens, de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés, ainsi que de la pénalité correspondante, auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2001 ;

2°) remettre cette imposition et cette pénalité à la charge de la société Rueil Sports ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 avril 2012 :

- le rapport de M. Ladreit de Lacharrière,

- les conclusions de M. Blanc, rapporteur public ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Financière Immobilière Pettens, a acquis le 18 décembre 2001, auprès de la société " Société de Gestion Verquinoise " des titres de la société Riviere Soplia pour la valeur de 16 144 643 F ; qu'elle a perçu de cette société, trois jours après cette acquisition, des dividendes à hauteur de 9 391 525 F ; qu'elle a revendu les titres le

27 décembre 2001 à la société Sofip, appartenant au même groupe, pour la somme de 6 753 118 F ; qu'elle a bénéficié d'un avoir fiscal égal à 25 % des dividendes susmentionnés en application des dispositions de l'article 158 bis du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable ; que l'administration, constatant que les dividendes perçus n'avaient subi aucune imposition dès lors que leur montant avait été exactement neutralisé par la moins-value sur titres, a réintégré l'avoir fiscal reçu sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; qu'il en est résulté une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés qui a été assortie de l'intérêt de retard et des pénalités au taux de 80 % prévus à l'article 1729 du code général des impôts en cas d'application de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; que la société Rueil sports, venant aux droits et obligations de la société Financière Immobilière Pettens, a obtenu devant le Tribunal administratif de Paris la décharge de l'imposition correspondant à la remise en cause de l'imputation de l'avoir fiscal, après que le Tribunal ait fait droit à la demande de l'administration de substituer le fondement de la fraude à la loi à celui initialement retenu de l'abus de droit ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE relève appel du jugement du Tribunal administratif de Paris Tribunal administratif de Paris en date du 21 mai 2010 ;

Considérant que si un acte de droit privé opposable aux tiers est en principe opposable dans les mêmes conditions à l'administration tant qu'il n'a pas été déclaré nul par le juge judiciaire, il appartient à l'administration, lorsque se révèle une fraude commise en vue d'obtenir l'application de dispositions de droit public, d'y faire échec même dans le cas où cette fraude revêt la forme d'un acte de droit privé ; que ce principe peut conduire l'administration à ne pas tenir compte d'actes de droit privé opposables aux tiers ; qu'il s'applique également en matière fiscale, dès lors que le litige n'entre pas dans le champ d'application des dispositions particulières de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales qui, lorsqu'elles sont applicables, font obligation à l'administration fiscale de suivre la procédure qu'elles prévoient ; qu'ainsi, hors du champ de ces dispositions, l'administration, qui peut toujours écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors qu'elle établit que ces actes ont un caractère fictif, peut également se fonder sur le principe sus-rappelé pour écarter les actes qui, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ;

Considérant qu'aux termes de l'article 158 bis du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition en litige : " I- Les personnes qui perçoivent des dividendes distribués par des sociétés françaises disposent à ce titre d'un revenu constitué : a) par les sommes qu'elles reçoivent de la société ; b) par un avoir fiscal représenté par un crédit ouvert sur le Trésor. Ce crédit d'impôt est égal à la moitié des sommes effectivement versées par la société. Il ne peut être utilisé que dans la mesure où le revenu est compris dans la base de l'impôt sur le revenu dû par le bénéficiaire. Il est reçu en paiement de cet impôt. Il est restitué aux personnes physiques dans la mesure où son montant excède celui de l'impôt dont elles sont redevables " ; qu'aux termes de l'article 209 bis du même code dans sa rédaction en vigueur lors de cette même année : " Les dispositions des articles 158 bis et 158 ter sont applicables aux personnes morales ayant leur siège social en France, dans la mesure où le revenu distribué est compris dans la base de l'impôt sur les sociétés dû par le bénéficiaire. Le crédit d'impôt est reçu en paiement de cet impôt. Il n'est pas restituable " ;

Considérant qu'il ressort de l'ensemble des travaux préparatoires de l'article 1er de la loi du 12 juillet 1965 créant l'avoir fiscal, alors codifié à l'article 158 bis précité du code général des impôts, que le législateur a eu comme objectifs de favoriser l'actionnariat des entreprises ainsi que le développement de la place financière de Paris et d'éliminer à cet effet la double imposition qui frappait les dividendes ; qu'eu égard à l'objet de la loi, l'actionnaire, imposable à raison des dividendes qu'il perçoit, est en droit de prétendre à l'avoir fiscal qui leur est attaché, de sorte que ces dividendes ne soient pas soumis à une double imposition ; que le droit à l'avoir fiscal n'est nullement subordonné à une durée minimum de détention des titres avant ou après la mise en paiement des dividendes auxquels il est attaché ; que, s'agissant des personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés, l'avoir fiscal, s'il constitue aussi un élément du bénéfice de l'actionnaire, est essentiellement, aux termes mêmes des articles 158 bis et 209 bis du code général des impôts, un moyen de paiement de l'impôt dû par ce dernier au titre de ses résultats d'ensemble d'une année donnée ; que ces articles excluent ainsi qu'il puisse être restitué par l'administration, en particulier dans l'hypothèse où l'avoir fiscal excède l'impôt sur les sociétés dû, ainsi qu'en présence de résultats déficitaires ; que, par suite, dès lors qu'une société a effectivement la qualité d'actionnaire, les dividendes qu'elle perçoit à raison des titres qu'elle détient, ouvrent droit à son profit au bénéfice de l'avoir fiscal qui y est attaché ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les opérations en litige n'ont été ni dissimulées ni réalisées en méconnaissance d'aucune des dispositions applicables aux achats et reventes de titres et aux distributions de dividendes ; que si, dans le contexte où elles ont été réalisées, et eu égard à la brièveté de la durée de détention des titres, qui n'a pas excédé une durée de vingt jours, les opérations d'achats puis de reventes des titres effectuées par la société Financière Immobilière Pettens, à l'intérieur du même groupe de sociétés, ont été inspirées par la volonté d'acquérir les moyens de payer les charges fiscales qu'elle aurait dû normalement acquitter eu égard à sa situation et à ses activités réelles, le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ne prouve cependant pas que ces opérations, qui se sont traduites par l'élimination de la double imposition frappant les dividendes, auraient présenté un caractère artificiel et que la société n'aurait pas effectivement acquis la qualité d'actionnaire et n'aurait pas encouru les risques qui s'y attachent ; que, dès lors, le MINISTRE n'établit pas que ces opérations auraient procédé de la recherche par la contribuable du bénéfice d'une application littérale des dispositions de l'article 158 bis du code général des impôts relatifs à l'avoir fiscal, à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et de la pénalité correspondante auxquelles la société Rueil Sports a été assujettie au titre de l'année 2001 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la société Garnier Choiseul Holding une somme de 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

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