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13/05/2013 | FRANCE | N°12PA04462

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 13 mai 2013, 12PA04462


Vu la requête, enregistrée le 15 novembre 2012, présentée pour M. C...A..., demeurant..., par MeB... ; M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1206989 du 14 août 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 10 août 2012 lui ayant fait obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination et, d'autre part, de l'arrêté du même jour par lequel ce préfet l'a plac

é en rétention administrative ;

2°) d'annuler ces deux arrêtés ;

3°) d'en...

Vu la requête, enregistrée le 15 novembre 2012, présentée pour M. C...A..., demeurant..., par MeB... ; M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1206989 du 14 août 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 10 août 2012 lui ayant fait obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination et, d'autre part, de l'arrêté du même jour par lequel ce préfet l'a placé en rétention administrative ;

2°) d'annuler ces deux arrêtés ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience publique ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 avril 2013, le rapport de Mme Sirinelli, rapporteur ;

1. Considérant que M. C...A..., ressortissant ivoirien né le 4 mars 1974, a fait l'objet, le 10 août 2012, d'un arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis qui, sur le fondement de l'article L 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui faisait obligation de quitter le territoire français sans délai et fixait le pays de destination ; que, par un arrêté distinct du même jour, ce préfet a placé l'intéressé en rétention administrative ; que M. A... relève régulièrement appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens dirigés contre l'arrêté du 10 août 2012 faisant obligation à M. A...de quitter sans délai le territoire français ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces produites devant le tribunal et devant la Cour que M. A...est le père d'une enfant née en juillet 2012, dont la mère est une compatriote titulaire d'une carte de séjour valable jusqu'au 23 novembre 2012 ; qu'en outre, M. A...fait valoir sans être contredit qu'il vit depuis 2009 en concubinage avec la mère de cette enfant, qui produit une attestation à ce sujet, et qu'ils sont également parents d'un enfant né en 2006, au sujet duquel il verse un certificat de scolarité pour l'année 2011-2012 ; qu'en outre, il ressort des documents médicaux figurant au dossier que la compagne du requérant fait l'objet d'un traitement médical dans le cadre d'une infection à VIH ; qu'enfin, M. A...est titulaire d'une promesse d'embauche, datée du 2 novembre 2011, en tant que manoeuvre dans le bâtiment ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des conditions de son séjour en France, le requérant est fondé à soutenir que l'arrêté du 10 août 2012 lui faisant obligation de quitter le territoire sans délai a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, et qu'il méconnaît, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; que cet arrêté, ainsi que, par voie de conséquence, celui du même jour pris sur son fondement aux fins de placement de M. A...en rétention administrative, sont donc illégaux ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à demander l'annulation du jugement du 14 août 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux arrêtés du 10 août 2012 ; qu'il est également fondé, dès lors qu'il ressort des termes de ses écritures devant la Cour qu'il réitère cette demande devant elle, à demander l'annulation de ces deux arrêtés ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ; que l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée [...] l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas " ;

6. Considérant que l'annulation d'une décision portant obligation de quitter le territoire français n'implique pas nécessairement la délivrance d'un titre de séjour ; que, toutefois, à la suite de l'annulation d'une telle décision, il incombe à l'autorité administrative, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais également, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'une obligation de quitter le territoire et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée ; qu'il y a lieu, en l'espèce, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de se prononcer sur la situation de M. A...dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, et de lui octroyer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de sa décision ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Melun n°1206989/9 en date du 14 août 2012 est annulé.

Article 2 : Les arrêtés du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 10 août 2012 faisant obligation à M. A...de quitter le territoire français sans délai et prononçant son placement en rétention sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la situation de M. A...dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, en lui délivrant dans l'intervalle une autorisation provisoire de séjour.

Article 4 : L'Etat versera à M. C...A...une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 12PA04462


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA04462
Date de la décision : 13/05/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FOURNIER DE LAURIERE
Rapporteur ?: Mme Marie SIRINELLI
Rapporteur public ?: M. DEWAILLY
Avocat(s) : RIGHI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-05-13;12pa04462 ?
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