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31/05/2013 | FRANCE | N°12PA04956

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 31 mai 2013, 12PA04956


Vu la requête, enregistrée le 17 décembre 2012, présentée pour M. D...B..., demeurant..., par Me E...-A...C... ; M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102695 du 19 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 décembre 2010 du conseil national pour l'accès aux origines personnelles (CNAOP) refusant de lui communiquer des informations sur l'identité de sa mère biologique et ses conclusions à fin d'injonction ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre au C

NAOP de lui communiquer l'intégralité de son dossier, y compris les éléments concern...

Vu la requête, enregistrée le 17 décembre 2012, présentée pour M. D...B..., demeurant..., par Me E...-A...C... ; M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102695 du 19 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 décembre 2010 du conseil national pour l'accès aux origines personnelles (CNAOP) refusant de lui communiquer des informations sur l'identité de sa mère biologique et ses conclusions à fin d'injonction ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre au CNAOP de lui communiquer l'intégralité de son dossier, y compris les éléments concernant l'identité de sa mère biologique ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2013 :

- le rapport de M. Even, rapporteur,

- les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public,

- et les observations de Me A...C...pour M.B... ;

1. Considérant que, par jugement du 19 octobre 2012, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. B...tendant à l'annulation de la décision du 22 décembre 2010 par laquelle le conseil national pour l'accès aux origines personnelles (CNAOP) a refusé de lui communiquer des informations sur l'identité de sa mère biologique ; que M. B...relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 147-2 du code de l'action sociale et des familles dans sa rédaction applicable issue de la loi du 22 janvier 2002 : " Le Conseil national pour l'accès aux origines personnelles reçoit : / 1° La demande d'accès à la connaissance des origines de l'enfant formulée : / - s'il est majeur, par celui-ci (...) / 2° La déclaration de la mère ou, le cas échéant, du père de naissance par laquelle chacun d'entre eux autorise la levée du secret de sa propre identité (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 147-6 du même code : " Le conseil communique aux personnes mentionnées au 1° de l'article L. 147-2, après s'être assuré qu'elles maintiennent leur demande, l'identité de la mère de naissance :- s'il dispose déjà d'une déclaration expresse de levée du secret de son identité ;- s'il n'y a pas eu de manifestation expresse de sa volonté de préserver le secret de son identité, après avoir vérifié sa volonté ;- si l'un de ses membres ou une personne mandatée par lui a pu recueillir son consentement exprès dans le respect de sa vie privée ;- si la mère est décédée, sous réserve qu'elle n'ait pas exprimé de volonté contraire à l'occasion d'une demande d'accès à la connaissance des origines de l'enfant. Dans ce cas, l'un des membres du conseil ou une personne mandatée par lui prévient la famille de la mère de naissance et lui propose un accompagnement. Si la mère de naissance a expressément consenti à la levée du secret de son identité ou, en cas de décès de celle-ci, si elle ne s'est pas opposée à ce que son identité soit communiquée après sa mort, le conseil communique à l'enfant qui a fait une demande d'accès à ses origines personnelles l'identité des personnes visées au 3° de l'article L. 147-2... Le conseil communique aux personnes mentionnées au 1° de l'article L. 147-2 les renseignements ne portant pas atteinte à l'identité des père et mère de naissance, transmis par les établissements de santé, les services départementaux et les organismes visés au cinquième alinéa de l'article L. 147-5 ou recueillis auprès des père et mère de naissance, dans le respect de leur vie privée, par un membre du conseil ou une personne mandatée par lui " ; qu'aux termes de l'article L. 222-6 du même code : " Toute femme qui demande, lors de son accouchement, la préservation du secret de son admission et de son identité par un établissement de santé est informée des conséquences juridiques de cette demande et de l'importance pour toute personne de connaître ses origines et son histoire. Elle est donc invitée à laisser, si elle l'accepte, des renseignements sur sa santé et celle du père, les origines de l'enfant et les circonstances de la naissance ainsi que, sous pli fermé, son identité. Elle est informée de la possibilité qu'elle a de lever à tout moment le secret de son identité et, qu'à défaut, son identité ne pourra être communiquée que dans les conditions prévues à l'article L. 147-6. Elle est également informée qu'elle peut à tout moment donner son identité sous pli fermé ou compléter les renseignements qu'elle a donnés au moment de la naissance. Les prénoms donnés à l'enfant et, le cas échéant, mention du fait qu'ils l'ont été par la mère, ainsi que le sexe de l'enfant et la date, le lieu et l'heure de sa naissance sont mentionnés à l'extérieur de ce pli. Ces formalités sont accomplies par les personnes visées à l'article L. 223-7 avisées sous la responsabilité du directeur de l'établissement de santé. À défaut, elles sont accomplies sous la responsabilité de ce directeur... Pour l'application des deux premiers alinéas, aucune pièce d'identité n'est exigée et il n'est procédé à aucune enquête " ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que la mère de naissance de M. B...a demandé à bénéficier du secret prévu par l'article 42 du code de la famille et de l'aide sociale (CASF) alors en vigueur lors de son admission à l'hôpital Tarnier de l'Assistance Publique des Hôpitaux de Paris le 28 juillet 1962, puis de son accouchement intervenu le 29 juillet 1962 ; que les dispositions précitées de l'article L. 147-6 du code de l'action sociale et des familles imposent expressément au CNAOP de vérifier la volonté de la mère de naissance dans le cas où il n'y a pas eu de déclaration expresse de levée du secret de cette identité ni de manifestation expresse de sa volonté de préserver ce secret ; que, par suite, et nonobstant la circonstance que les articles L. 222-6 et L. 224-5 du code de l'action sociale et des familles ne visent que les renseignements et plis fermés laissés lors de l'accouchement, les courriers adressés par la mère de naissance de M. B...à l'association ayant recueilli son enfant, les 21 décembre 1962 et 7 juillet 1963, postérieurement à l'accouchement et à l'abandon de l'enfant intervenu le 12 septembre 1962 et avant son adoption plénière le 4 août 1963, relèvent du champ d'application de la procédure spécifique d'accès aux renseignements d'état civil incombant au CNAOP ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort de l'analyse du contenu des quatre correspondances adressées par la mère de naissance de M. B...les 6 août 1962, 11 septembre 1962, 21 décembre 1962 et 7 juillet 1963, versées au dossier, que cette dernière s'est inquiétée à plusieurs reprises du sort de son enfant, et a souhaité expliquer les circonstances de sa décision d'abandon et remercier ceux qui s'en occupaient, en mentionnant son nom et son adresse, mais n'a pas ainsi entendu procéder à une déclaration expresse de levée du secret de son identité au sens des dispositions susmentionnées de l'article L. 147-6 du code de l'action sociale et des familles ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les investigations réalisées par le CNAOP dans le cadre d'une double instruction, après sa première saisine par M. B...le 24 octobre 2007 et avant sa réunion plénière du 9 décembre 2010, auprès de l'association Les Nids de Paris, du service des archives de l'Assistance Publique des Hôpitaux de Paris, des répertoires nationaux de la sécurité sociale, dont le régime national inter-régimes des bénéficiaires de l'assurance maladie, et des mairies, auraient été insuffisantes ; que si ces recherches n'ont pas permis d'identifier la mère de naissance, de vérifier si elle est toujours vivante, et dans l'affirmative de la localiser et de prendre contact avec elle afin d'examiner sa volonté actuelle de préserver le secret de son identité, cette circonstance n'est pas de nature à entacher la décision contestée d'une erreur d'appréciation ;

5. Considérant, en troisième lieu, que les stipulations de l'article 7 de la convention susvisée relative aux droits de l'enfant créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés ; que M B...ne peut donc utilement se prévaloir de ces prescriptions pour demander l'annulation de la décision litigieuse ;

6. Considérant, enfin, que la Cour européenne des droits de l'homme a jugé, par l'arrêt Odièvre c/ France (n° 42326/98) du 13 février 2003, que si les personnes ont un intérêt primordial protégé par la Convention à recevoir des renseignements qu'il leur faut connaître, à comprendre leur enfance et leurs années de formation, le système mis en place par la France à travers la loi du 22 janvier 2002 n'est pas contraire à l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que s'il conserve le principe de l'admission de l'accouchement sous X, il renforce la possibilité de lever le secret de l'identité en permettant de solliciter la réversibilité du secret de l'identité de sa mère sous réserve de l'accord de celle-ci de manière à assurer équitablement la conciliation entre la protection de cette dernière et la demande légitime de l'intéressé, et tente ainsi d'atteindre un équilibre et une proportionnalité suffisante entre les intérêts en cause ; qu'il ressort des pièces du dossier que si l'application de la loi française n'a pas permis à M. B...de se voir communiquer le nom, le prénom et les adresses que sa mère biologique avait indiqués dans ses courriers envoyés à l'association l'ayant recueilli, il est constant que le requérant a obtenu une copie anonymisée de ces courriers ainsi que des documents conservés dans les archives de l'Assistance Publique des Hôpitaux de Paris, contenant des informations sur l'apparence physique et la situation sociale de ses parents biologiques, ainsi que sur les motifs de son abandon ; qu'il a donc eu accès à des informations non identifiantes sur sa mère et sa famille biologique lui permettant d'établir quelques racines de son histoire dans le respect de la préservation des intérêts des tiers ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir que les dispositions du code de l'action sociale et des familles issues de la loi n° 2002-93 du 22 janvier 2002 relative à l'accès aux origines des personnes adoptées et pupilles de l'Etat, en particulier celles de l'article L. 147-6, méconnaîtraient les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 décembre 2010 par laquelle le conseil national pour l'accès aux origines personnelles a refusé de lui communiquer des informations sur l'identité de sa mère biologique ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

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N° 12PA04956


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12PA04956
Date de la décision : 31/05/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: M. Bernard EVEN
Rapporteur public ?: Mme VIDAL
Avocat(s) : CORBEAU - DI PALMA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-05-31;12pa04956 ?
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