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17/10/2013 | FRANCE | N°12PA04899

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 17 octobre 2013, 12PA04899


Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 2012, présentée pour M. C... B..., demeurant..., par le cabinet ARPEJ; M. B... demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1015682/6-3 du 11 octobre 2012 du Tribunal administratif de Paris, en ce qu'il a limité à la somme de 5 236 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4 mars 2009 et de la capitalisation des intérêts à compter du 31 août 2010, la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices résultant de sa prise en charge à l'Hôpital d'instruction des armées (HIA) du Val de Grâce, le 11 oct

obre 2005 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme totale de 80 085,11 eu...

Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 2012, présentée pour M. C... B..., demeurant..., par le cabinet ARPEJ; M. B... demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1015682/6-3 du 11 octobre 2012 du Tribunal administratif de Paris, en ce qu'il a limité à la somme de 5 236 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4 mars 2009 et de la capitalisation des intérêts à compter du 31 août 2010, la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices résultant de sa prise en charge à l'Hôpital d'instruction des armées (HIA) du Val de Grâce, le 11 octobre 2005 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme totale de 80 085,11 euros en réparation desdits préjudices, avec les intérêts au taux légal et leur capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.7611 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le rapport établi le 18 août 2008 par l'expert désigné le 28 mai 2008 par la Commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CRCI) d'Ile de France ;

Vu l'avis de la Commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux d'Ile de France du 30 octobre 2008 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2013 :

- le rapport de Mme Julliard, rapporteur,

- les conclusions de Mme Macaud, rapporteur public,

- les observations de MeA..., pour M.B... ;

1. Considérant que, par un jugement du 11 octobre 2012, le Tribunal administratif de Paris a reconnu la responsabilité de l'Etat dans la prise en charge fautive, par l'équipe chirurgicale de l'Hôpital d'instruction des armées du Val de Grâce le 18 août 2005, des lombalgies dont souffrait M. B... à la suite d'une chute et a fixé à 20% la part lui incombant dans la réparation de la totalité des préjudices résultant pour l'intéressé de cet accident ; que M. B... relève appel de ce jugement, en ce qu'il a limité à la somme de 5 236 euros la condamnation de l'Etat à l'indemniser desdits préjudices ; que ce dernier, qui ne conteste pas la part de responsabilité mise à sa charge par les premiers juges, demande par la voie de l'appel incident que le montant des indemnisations allouées à M. B... soit réduit à de plus justes proportions ;

Sur l'évaluation des préjudices de M. B... :

En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial :

S'agissant des frais liés au handicap :

2. Considérant que M. B...sollicite l'indemnisation des frais d'assistance par une tierce personne, à raison de deux heures pendant un mois ; que, toutefois et nonobstant la circonstance que le rapport d'expertise précité précisait que son état de santé avait nécessité une telle aide, il ne précise pas s'il en a effectivement bénéficié et dans quelles conditions ; que par suite, et alors même qu'il serait recevable à solliciter l'indemnisation des frais d'assistance par une personne de sa famille si elle était justifiée, la demande présentée au titre de ce chef de préjudice ne peut qu'être rejetée ;

S'agissant des pertes de revenus :

3. Considérant que M. B...est parti à la retraite le 1er décembre 2008 alors qu'il aurait eu 60 ans le 21 mars 2012 ; qu'il résulte de l'instruction que ce départ anticipé est la conséquence directe des séquelles de la prise en charge médicale défaillante de son accident ; qu'il est donc fondé à solliciter l'indemnisation des pertes de revenus professionnels résultant de la cessation anticipée de son activité de médecin du travail contractuel ;

4. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction, en particulier des fiches de paye émanant du ministère des transports et du Centre hospitalier des quatre villes qui l'employaient en 2008 que les revenus professionnels de M. B... s'élevaient au moment de son départ à la retraite à 8 427 euros par mois ; qu'il établit bénéficier depuis le 1er décembre 2008 d'une retraite d'un montant mensuel de 3 965,82 euros et d'une rente d'accident du travail d'un montant annuel de 9 236,80 euros, soit 769,73 euros par mois, versée depuis le 1er juin 2007 par le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ; qu'eu égard à sa finalité de réparation d'une incapacité permanente de travail et à son mode de calcul, appliquant au salaire de référence de la victime le taux d'incapacité permanente la rente d'accident du travail doit être regardée comme ayant pour objet exclusif de réparer, sur une base forfaitaire, les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle en conséquence de l'accident, c'est-à-dire ses pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité ; qu'ainsi la perte de revenus professionnels de M. B... s'élève à 147 658 euros sur la période de 40 mois courant du 1er décembre 2008 au 31 mars 2012 ;

5. Considérant que M. B...est également fondé à solliciter l'indemnisation de l'incidence de son départ anticipé sur le montant de sa pension de retraite ; qu'il résulte de l'instruction, en particulier des documents produits par M. B...émanant de l'IRCANTEC, de l'AGIRC et de l'ARRCO, ainsi que du document récapitulatif de l'offre d'indemnisation du 11 septembre 2009 de l'assureur MMA, dont les éléments ne sont pas contestés en défense, que cette incidence en termes de décote de 15% du montant de la pension est une perte de 5 585,91 euros annuels et en termes de perte de 4 000 points annuels, est une perte annuelle de 5 874,25 euros ; qu'il y a lieu d'imputer au montant cumulé de ces deux préjudices correspondant à 11 460,16 euros par an, la rente d'accident du travail de 9 236,80 euros annuels versée à M.B..., dès lors qu'en application de l'article L. 434-6 du code de la sécurité sociale, cette rente se cumule avec la pension de retraite ; que le montant capitalisé de cette perte, évalué sur la base du barème de capitalisation publié en 2013 par la Gazette du Palais en tenant compte de l'âge de M. B...à la date de lecture du présent arrêt, soit 65 ans, est de 34 362,03 euros ;

6. Considérant que le total des pertes de gains professionnels de M. B... non réparés s'élève à 182 020,03 euros ; que, compte tenu de la part de 20 % incombant à l'Etat dans la réparation des préjudices de M. B..., ce dernier peut prétendre au remboursement d'une somme totale de 36 404 euros ;

S'agissant de l'incidence professionnelle :

7. Considérant que M. B...n'établit l'existence d'aucun dommage professionnel consécutif à sa mise à la retraite anticipée distinct de celui qui est réparé au titre des pertes de revenus ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter la demande relative à ce poste de préjudice ;

S'agissant des autres dépenses liées au dommage corporel :

8. Considérant qu'il n'est pas contesté que M. B...a été contraint d'exposer la somme de 1 180 euros au titre des frais d'assistance et de conseil devant la CRCI d'Ile de France ; que, compte tenu de la part de 20% incombant à l'Etat dans la réparation des préjudices subis par M.B..., il y a lieu de mettre à sa charge la somme de 236 euros ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère personnel :

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'intervention chirurgicale subie par M. B... et correctement menée aurait conduit à une immobilisation de 45 jours et que la période d'incapacité temporaire à prendre en compte dans le cadre du présent litige s'étend du 18 août 2005, date de son opération à l'Hôpital d'instruction des armées du Val de Grâce, au 1er juin 2007 ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'indemniser ce poste de préjudice par une somme de 1 800 euros, compte tenu de la part de 20% incombant à l'Etat dans la réparation des préjudices ; qu'il résulte du rapport d'expertise que M. B...reste atteint d'une incapacité partielle permanente de 10 %, qui sera indemnisée par une somme de 2 000 euros, compte tenu de la part de 20% incombant à l'Etat dans la réparation des préjudices ; qu'il y a également lieu d'accorder à M. B...la somme de 200 euros qu'il réclame au titre du préjudice esthétique ; qu'enfin, il sera fait une juste appréciation des souffrances endurées, évaluées à 4/7 par l'expert, en allouant à l'appelant à ce titre, et après application du taux de 20%, une somme de 1 000 euros, ainsi que 1 000 euros au titre du préjudice d'agrément, résultant du ralentissement de ses activités sociales et sportives ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'Etat est condamné à verser à M. B... une somme totale de 42 640 euros en réparation des préjudices résultant de sa prise en charge médicale à l'hôpital du Val-de-Grâce le 18 août 2005 ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

11. Considérant que M. B...a droit à ce que la somme de 42 640 euros qui lui est accordée porte intérêts à compter du 4 mars 2009, date de réception de la demande préalable d'indemnité adressée à l'Etat ; qu'il a demandé la capitalisation des intérêts dans la requête enregistrée au Tribunal administratif de Paris le 31 août 2010 ; qu'il y a lieu, dès lors que les intérêts étaient échus à cette date depuis au moins une année, d'ordonner la capitalisation des intérêts à compter du 31 août 2010 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette dernière date ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens de l'instance :

12. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts (...). / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagées entre les parties. / L'Etat peut être condamné aux dépens " ;

13. Considérant qu'en application des dispositions précitées de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, en l'absence de dispositions ou de circonstances particulières de nature à y faire obstacle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B...de la somme de 35 euros correspondant à la contribution pour l'aide juridique dont il s'est acquitté ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M.B... et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme que l'Etat est condamné à verser à M. B...est portée à 42 640 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4 mars 2009 et de la capitalisation des intérêts à compter du 31 août 2010 et à chaque échéance annuelle de cette dernière date.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 11 octobre 2012 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. B...la somme de 35 euros au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : L'Etat versera à M. B...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.

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N° 12PA04899


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA04899
Date de la décision : 17/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. MOREAU
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: Mme MACAUD
Avocat(s) : CABINET ARPEJ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-10-17;12pa04899 ?
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