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31/12/2013 | FRANCE | N°13PA02472

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 31 décembre 2013, 13PA02472


Vu la requête, enregistrée le 25 juin 2013, présentée pour M. C... A..., demeurant..., par Me Martaguet, avocat ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1221829/3-3 du 9 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 août 2012 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé son pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
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Vu la requête, enregistrée le 25 juin 2013, présentée pour M. C... A..., demeurant..., par Me Martaguet, avocat ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1221829/3-3 du 9 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 août 2012 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé son pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Me Martaguet, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 ;

Vu la directive 2004/83 CE du Conseil du 29 avril 2004 concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d'autres raisons, ont besoin d'une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 décembre 2013 le rapport de Mme Coiffet, président ;

1. Considérant que M. A..., ressortissant sénégalais né le 2 septembre 1979, fait appel du jugement du 9 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 août 2012 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre de séjour qu'il sollicitait sur le fondement des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a enjoint de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit ;

2. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient M. A..., l'arrêté contesté comporte la mention du nom et du prénom de son signataire qui peut dès lors être aisément identifié en dépit de sa signature peu lisible ; que MmeB..., attachée d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, a, par un arrêté n° 2012-00242 du 12 mars 2012, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la Ville de Paris du 23 mars 2012, reçu délégation du préfet de police à l'effet de signer tous les actes dans la limite de ses attributions en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il n'est pas établi qu'elles n'étaient pas absentes ou empêchées lors de la signature de l'arrêté litigieux, et notamment les décisions de refus de titre de séjour assorties d'une obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ; que cette délégation, dont les termes sont suffisamment précis, donnait compétence à Mme B...pour signer l'arrêté contesté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que la décision par laquelle le préfet de police a rejeté la demande de titre de séjour de M. A...vise les textes applicables, rappelle les conditions d'entrée et du séjour de l'intéressé en France, mentionne l'objet de sa demande et expose les motifs de son rejet ; que cette motivation répond aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 ; que la décision fixant le pays de destination, qui vise l'article L. 511-1, I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, précise la nationalité de M. A...et indique que celui-ci n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, est également suffisamment motivée ;

4. Considérant, en troisième lieu, que, d'une part, il résulte des termes mêmes de l'arrêté contesté, qui mentionne que M. A... ne peut prétendre au bénéfice de la carte de séjour temporaire délivrée, en application de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire, que le préfet de police a instruit sa demande au regard des dispositions de cet article ; que, d'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen approfondi de sa situation personnelle ;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office " ; qu'aux termes du 4° de l'article L. 741-4 de ce code : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de l a convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. Constitue, en particulier, un recours abusif aux procédures d'asile la présentation frauduleuse de plusieurs demandes d'admission au séjour au titre de l'asile sous des identités différentes. Constitue également un recours abusif aux procédures d'asile la demande d'asile présentée dans une collectivité d'outre-mer s'il apparaît qu'une même demande est en cours d'instruction sans un autre Etat membre de l'Union européenne. Constitue une demande d'asile reposant sur une fraude délibérée la demande présentée par un étranger qui fournit de fausses indications, dissimule les informations concernant son identité, sa nationalité ou les modalités de son entrée en France afin d'induire en erreur les autorités. Les dispositions du présent article ne font pas obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne qui se trouverait néanmoins dans l'un des cas mentionnés aux 1° à 4° " ;

6. Considérant que M. A...est entré en France, selon ses déclarations, le 30 juin 2011 afin d'y solliciter l'asile ; que, par une décision du 26 avril 2012, le préfet de police a, par application des dispositions des 2° et 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, refusé de l'admettre provisoirement au séjour au titre de l'asile aux motifs, d'une part, qu'il s'était présenté le 1er mars 2012 devant les services de la préfecture sous une fausse identité et avait ainsi tenté d'induire en erreur les autorités françaises afin d'échapper à une prochaine mesure d'éloignement, et, d'autre part, qu'il était originaire d'un Etat, le Sénégal, figurant sur la liste des pays d'origine considérés comme sûrs ; que si le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet a estimé que sa demande était constitutive d'une fraude alors qu'ayant révélé dès le second entretien avec les agents de la préfecture sa véritable identité, qu'il avait tenu secrète afin de pouvoir quitter le Sénégal, il n'avait pas l'intention d'égarer l'administration, il résulte de l'instruction que le préfet aurait pris la même décision en se fondant sur le seul motif, non contesté, tiré de ce que M. A... émane d'un pays regardé comme sûr ; que M. A...entrant ainsi dans le cas visé au 2° de l'article L. 741-4 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet a pu légalement refuser de l'admettre au séjour pendant la durée de l'instruction de sa demande d'asile et lui enjoindre de quitter le territoire français dès la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ayant rejeté sa demande ;

7. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant que M. A...est entré en France, selon ses déclarations, le 30 juin 2011 ; qu'il était, à la date de l'arrêté contesté, célibataire et sans charge de famille ; qu'il n'établit ni même n'allègue avoir, durant son séjour en France, noué des relations personnelles durables ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il serait dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine qu'il n'a quitté qu'à l'âge de 32 ans ; que, dans ces conditions, eu égard notamment à la durée du séjour de M. A... en France, l'arrêté contesté n'a pas porté une atteinte excessive à sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

9. Considérant, en sixième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

10. Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article 10, paragraphe 1 d) de la directive 2004/83/CE du 29 avril2004 : " Motifs de la persécution 1. Lorsqu'ils évaluent les motifs de la persécution, les États membres tiennent compte des éléments suivants: (...) d) un groupe est considéré comme un certain groupe social lorsque, en particulier : ses membres partagent une caractéristique innée ou une histoire commune qui ne peut être modifiée, ou encore une caractéristique ou une croyance à ce point essentielle pour l'identité ou la conscience qu'il ne devrait pas être exigé d'une personne qu'elle y renonce, et ce groupe a son identité propre dans le pays en question parce qu'il est perçu comme étant différent par la société environnante. En fonction des conditions qui prévalent dans le pays d'origine, un groupe social spécifique peut être un groupe dont les membres ont pour caractéristique commune une orientation sexuelle. L'orientation sexuelle ne peut pas s'entendre comme comprenant des actes réputés délictueux d'après la législation nationale des États membres (...) " ; que le 2° du A de l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés prévoit que la qualité de réfugié est reconnue à " toute personne qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays " ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; que l'article 3 stipule : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'il appartient à une personne qui invoque ces dispositions et stipulations en se prévalant de son appartenance à un groupe social de fournir l'ensemble des éléments circonstanciés, notamment familiaux, géographiques, sociologiques, relatifs aux risques qu'elle encourt personnellement de manière à permettre au juge d'apprécier le bien fondé de son moyen ;

11. Considérant que si M.A..., dont la demande d'admission au statut de réfugié a d'ailleurs été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par une décision du 21 juin 2012, fait état des risques qu'il encourt au Sénégal en raison de son homosexualité, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté contesté l'exposerait à des peines ou traitements inhumains ou dégradants au sens des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir qu'en fixant le Sénégal comme pays à destination duquel il pourrait être reconduit, le préfet de police, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il se serait estimé lié par la décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, a méconnu les dispositions et stipulations précitées ;

12. Considérant, enfin, que le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas assorti des précisions nécessaires permettant au juge d'en apprécier le bien-fondé ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

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13PA02472


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA02472
Date de la décision : 31/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme ADDA
Rapporteur ?: Mme Valerie COIFFET
Rapporteur public ?: Mme DHIVER
Avocat(s) : MARTAGUET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-12-31;13pa02472 ?
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