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06/03/2014 | FRANCE | N°12PA02929

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 06 mars 2014, 12PA02929


Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2012, présentée pour M. C... A..., demeurant..., par Me B... ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1020423/2-2 du 18 juin 2012 du Tribunal administratif de Paris en tant que, par ce jugement, celui-ci a partiellement rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2006 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;<

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3°) à titre subsidiaire, d'appliquer les dispositions de l'article 163-0 A du co...

Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2012, présentée pour M. C... A..., demeurant..., par Me B... ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1020423/2-2 du 18 juin 2012 du Tribunal administratif de Paris en tant que, par ce jugement, celui-ci a partiellement rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2006 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) à titre subsidiaire, d'appliquer les dispositions de l'article 163-0 A du code général des impôts ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'intérêts moratoires ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 février 2014 :

- le rapport de Mme Versol, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A..., salarié en qualité de chauffeur-livreur par la société Espace Pompadour, a perçu à l'occasion de son licenciement en novembre 2006 une indemnité transactionnelle d'un montant de 50 756 euros ; que l'administration a considéré que cette indemnité était constitutive d'une libéralité, imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ; que M. A... relève appel du jugement du 18 juin 2012 du Tribunal administratif de Paris en tant que, par ce jugement, celui-ci a partiellement rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2006 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 29 mai 2008 mentionne l'impôt concerné, l'année d'imposition, le montant du rappel opéré et expose les raisons pour lesquelles le service a regardé la somme de 50 756 euros comme irrégulièrement désinvestie de la société Espace Pompadour et celles pour lesquelles cette somme a été regardée comme un revenu distribué au profit de M. A... ; que le vérificateur a notamment retranscrit les éléments de la proposition de rectification adressée à la société Espace Pompadour se rapportant à l'indemnité transactionnelle versée à M. A... le 11 novembre 2006, à l'occasion de son licenciement, en reprenant des extraits d'un procès-verbal d'audition de M. A... par les services de police ainsi que des extraits d'un procès-verbal d'audition de la comptable de la société Espace Pompadour ; que le requérant ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que la proposition de rectification du 29 mai 2008 ne reproduit pas les éléments de la proposition de rectification adressée à la société Espace Pompadour relatifs à une dissimulation de recettes non déclarées, rectification sans lien avec celle notifiée à M. A..., pour soutenir que la proposition de rectification en cause est insuffisamment motivée ; que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification du 29 mai 2008 ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : " Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : / (...)b) Ou qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus (...) / L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. (...) / Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification " ;

5. Considérant qu'à l'appui de son moyen tiré de ce que la procédure d'imposition aurait méconnu les garanties légales attachées aux dispositions précitées de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, le requérant soutient que l'administration a invoqué implicitement mais nécessairement un abus de droit, sans appliquer la procédure de répression des abus de droit ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que, pour établir que l'indemnité en litige est constitutive d'une libéralité imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, l'administration a relevé que la somme en litige avait été irrégulièrement désinvestie par la société Espace Pompadour à seule fin d'éviter que M. A... ne révèle aux autorités compétentes des pratiques irrégulières de la société et qu'en tant que libéralité, elle devait être imposée, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, entre les mains du contribuable ; qu'ainsi, l'administration n'a ni écarté le protocole signé le 14 novembre 2006 entre M. A... et son employeur au motif qu'il serait fictif, ni estimé que l'opération litigieuse a été inspirée par un but exclusivement fiscal ; que, par suite, M. A... ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) " ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du procès-verbal d'audition de M. A... par les services de police le 13 novembre 2006 qu'il a déclaré avoir, au cours du mois précédent, menacé le gérant de la société Espace Pompadour de dénoncer à l'inspection du travail que des salariés de l'entreprise n'étaient pas régulièrement déclarés et annoncé qu'il allait quitter la société ; que, selon ses propres déclarations, M. A... a ensuite obtenu, à l'occasion de son licenciement, le versement d'une indemnité de 50 000 euros, le gérant ayant accepté devant sa menace de se rendre à l'inspection du travail ; que, par ailleurs, lors de son audition par les services de police le 5 décembre 2006, la comptable de la société Espace Pompadour, également épouse du gérant de cette société, a déclaré que la société avait versé à l'un de ses livreurs la somme de 350 000 francs (53 357 euros) au motif du chantage exercé par celui-ci et que cette somme a été comptabilisée en indemnité de licenciement, après un protocole d'accord ; qu'il est constant que, par un protocole d'accord signé le 14 novembre 2006, la société Espace Pompadour a accepté de verser la somme de 50 756,18 euros à M. A... à titre de dommages et intérêts et de " règlement transactionnel de toute contestation née ou à naître du chef de l'exécution et de la cessation du contrat de travail " ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que le service a requalifié l'indemnité de licenciement litigieuse en libéralité et a imposé cette somme entre les mains de M. A..., dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement des dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, alors même que l'intéressé n'aurait pas participé à la dissimulation de recettes reprochée à la société Espace Pompadour ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 163-0 A du code général des impôts :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 163-0 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " Lorsqu'au cours d'une année un contribuable a réalisé un revenu qui par sa nature n'est pas susceptible d'être recueilli annuellement et que le montant de ce revenu exceptionnel dépasse la moyenne des revenus nets d'après lesquels ce contribuable a été soumis à l'impôt sur le revenu au titre des trois dernières années, l'intéressé peut demander que l'impôt correspondant soit calculé en ajoutant le quart du revenu exceptionnel net à son revenu net global imposable et en multipliant par quatre la cotisation supplémentaire ainsi obtenue (...) " ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par réclamation du 19 avril 2010, M. A... a demandé à l'administration l'application de ces dispositions ; qu'il n'est pas contesté que les revenus distribués en cause ne sont pas, par nature, susceptibles d'être recueillis annuellement par M. A..., qui n'a pas perçu ces revenus en tant qu'associé ou porteur de parts de la société, et ne proviennent pas de l'activité professionnelle normale du contribuable ; qu'il résulte de l'instruction que ces revenus exceptionnels dépassent la moyenne des revenus nets d'après lesquels le contribuable a été soumis à l'impôt sur le revenu au titre des trois années précédentes ; que, par suite, les conclusions de M. A... tendant à l'application des dispositions de l'article 163-0 A du code général des impôts doivent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales :

10. Considérant que les intérêts moratoires, prévus par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, sont, en vertu des dispositions de l'article R. 208-1 du même code, " payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement des impôts " ; qu'il n'existe aucun litige né et actuel entre le comptable et le requérant au sujet de ces intérêts ; que, dès lors, les conclusions de la requête qui tendent au versement par l'Etat d'intérêts moratoires ne sont pas recevables ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 163-0 A du code général des impôts ;

DÉCIDE :

Article 1er : La cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. A... a été assujetti au titre de l'année 2006 sera calculée en application des dispositions de l'article 163-0 A du code général des impôts.

Article 2 : Il est accordé décharge à M. A... de la différence entre le montant de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2006 et celui qui résulte de l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris n°1020423/2-2 du 18 juin 2012 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

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N° 12PA02929


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA02929
Date de la décision : 06/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. DALLE
Rapporteur ?: Mme Françoise VERSOL
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : ROGUET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-03-06;12pa02929 ?
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