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06/03/2014 | FRANCE | N°13PA02616

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 06 mars 2014, 13PA02616


Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2013, présentée pour Mme C... B...épouseA..., demeurant..., par Me D... ; Mme A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005692/5 du 30 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 27 juillet 2010 par laquelle le président du conseil général de Seine-et-Marne a prononcé la fermeture totale et définitive d'une structure accueillant des personnes âgées et handicapées ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;
>3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 6 000 euros sur le fon...

Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2013, présentée pour Mme C... B...épouseA..., demeurant..., par Me D... ; Mme A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005692/5 du 30 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 27 juillet 2010 par laquelle le président du conseil général de Seine-et-Marne a prononcé la fermeture totale et définitive d'une structure accueillant des personnes âgées et handicapées ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 février 2014 :

- le rapport de M. Roussel, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Macaud, rapporteur public,

- les observations de Me Lafaye, avocat de Mme A...,

- et les observations de Me Papon, avocat du département de Seine-et-Marne ;

1. Considérant que le département de Seine-et-Marne a adressé à Mme A..., les 24 mars 2009, 15 mai 2009 et 26 avril 2010, des injonctions de cesser tout hébergement de personnes handicapées ou vulnérables dans un délai de deux mois, sur le site d'un pavillon sis 33 rue de Paris à Mitry-Mory dont elle est propriétaire, aux motifs qu'elle ne disposait pas de l'autorisation requise pour créer un établissement social et médico-social et que les conditions de fonctionnement et d'installation ne répondaient pas aux normes de qualité et de sécurité exigées pour la prise en charge de personnes handicapées ; que Mme A...n'ayant pas donné suite à ces injonctions, le président du conseil général de Seine-et-Marne a décidé, par arrêté du 27 juillet 2010, la fermeture totale et définitive de l'établissement ouvert sans autorisation et la nomination d'un administrateur provisoire, chargé d'organiser la réorientation des personnes hébergées ; que par le jugement attaqué du 30 avril 2013, le Tribunal administratif de Melun a rejeté la requête introduite par Mme A...tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'en jugeant que le président du conseil général, après avoir constaté qu'un établissement social ou médico-social avait été ouvert sans autorisation, pouvait légalement, en application de l'article L. 313-15 du code de l'action sociale et des familles, enjoindre à Mme A...de procéder à la fermeture de l'établissement, le Tribunal administratif de Melun a répondu au moyen tiré de ce que le département ne pouvait prononcer, à supposer les faits établis, qu'une injonction de cesser l'assistance aux personnes handicapées ou vulnérables et non une injonction de cesser l'hébergement des intéressés ;

Sur la légalité de l'arrêté du 27 juillet 2010 :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles : " Sont des établissements et services sociaux et médico-sociaux, au sens du présent code, les établissements et les services, dotés ou non d'une personnalité morale propre, énumérés ci-après : (...) 6° Les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale ; 7° Les établissements et les services, y compris les foyers d'accueil médicalisé, qui accueillent des personnes adultes handicapées, quel que soit leur degré de handicap ou leur âge, ou des personnes atteintes de pathologies chroniques, qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale ou bien qui leur assurent un accompagnement médico-social en milieu ouvert ; (...) " ; qu'aux termes du I de l'article

L. 313-1-1 de ce code : " Les projets, y compris expérimentaux, de création, de transformation et d'extension d'établissements ou de services sociaux et médico-sociaux relevant de l'article L. 312-1 ainsi que les projets de lieux de vie et d'accueil sont autorisés par les autorités compétentes en vertu de l'article L. 313-3 " ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-3 de ce code : " L'autorisation est délivrée : a) Par le président du conseil général, pour les établissements et services mentionnés aux 1°, 6°, 7°, 8°, 11° et 12° du I et au III de l'article L. 312-1 lorsque les prestations qu'ils dispensent sont susceptibles d'être prises en charge par l'aide sociale départementale ou lorsque leurs interventions relèvent d'une compétence dévolue par la loi au département ; b) Par le directeur général de l'agence régionale de santé pour les établissements et services mentionnés aux 2°, 3°, b du 5°, 6°, 7°, 9°, 11° et 12° du I de l'article L 312-1 et pour les lieux de vie et d'accueil mentionnés au III du même article, lorsque les prestations qu'ils dispensent sont susceptibles d'être prises en charge par les organismes d'assurance maladie, ainsi que pour les établissements et services mentionnés au a du 5° du I du même article ; (...) d) Conjointement par le président du conseil général et le directeur général de l'agence régionale de santé pour les établissements et services dont l'autorisation relève simultanément du a et du b du présent article ainsi que ceux dont l'autorisation relève du 3° du I et du III de l'article L. 312-1 ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-15 de ce code : " L'autorité compétente met fin à l'activité de tout service ou établissement créé, transformé ou ayant fait l'objet d'une extension sans l'autorisation prévue à cet effet. (...) Lorsque l'activité relève d'une autorisation conjointe du directeur général de l'agence régionale de santé et du président du conseil général, la décision de fermeture est prise conjointement par ces deux autorités et mise en oeuvre par le directeur général de l'agence régionale de santé avec le concours du président du conseil général. (...) " ;

5. Considérant que la décision litigieuse est fondée sur la circonstance que Mme A...héberge au 33 rue de Paris à Mitry-Mory des personnes handicapées ou vulnérables réclamant une aide permanente, en leur fournissant des prestations de repas et de ménage ; que ces prestations d'accueil de personnes adultes handicapées étaient susceptibles d'être prises en charge par l'aide sociale départementale ; que dès lors, il résulte de la combinaison des dispositions précitées du a) de l'article L. 313-3 et de l'article L. 313-15 du code de l'action sociale et des familles que le président du conseil général était compétent pour prendre seul la décision litigieuse, portant fermeture totale et définitive d'un établissement social et médico-social ouvert sans autorisation ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'action sociale et des familles : " Dès que sont constatés dans l'établissement ou le service des infractions aux lois et règlements ou des dysfonctionnements dans la gestion ou l'organisation susceptibles d'affecter la prise en charge ou l'accompagnement des usagers ou le respect de leurs droits, l'autorité qui a délivré l'autorisation adresse au gestionnaire de l'établissement ou du service une injonction d'y remédier, dans un délai qu'elle fixe. Ce délai doit être raisonnable et adapté à l'objectif recherché. Elle en informe les représentants des usagers, des familles et du personnel et, le cas échéant, le représentant de l'Etat dans le département. (...) S'il n'est pas satisfait à l'injonction, l'autorité compétente peut désigner un administrateur provisoire de l'établissement pour une durée qui ne peut être supérieure à six mois renouvelable une fois. Celui-ci accomplit, au nom de l'autorité compétente et pour le compte de l'établissement ou du service, les actes d'administration urgents ou nécessaires pour mettre fin aux dysfonctionnements ou irrégularités constatés. Dans le cas des établissements et services soumis à autorisation conjointe, la procédure prévue aux alinéas précédents est engagée à l'initiative de l'une ou de l'autre des autorités compétentes. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-17 de ce code : " En cas de fermeture d'un établissement ou d'un service, l'autorité ou les autorités qui ont délivré l'autorisation prennent les mesures nécessaires au placement des personnes qui y étaient accueillies. Elles peuvent mettre en oeuvre la procédure prévue à l'article L. 313-14. " ;

7. Considérant que Mme A...fait valoir que la procédure ayant conduit à l'édiction de la décision litigieuse est entachée d'irrégularités dès lors que les trois injonctions qui lui avaient été préalablement adressées, les 24 mars 2009, 9 mai 2009 et 26 avril 2010, n'ont pas été régulièrement émises ; que le département de Seine-et-Marne était, ainsi qu'il a été dit, compétent en application de l'article L. 313-15 du code de l'action sociale et des familles, pour mettre fin à l'activité de l'établissement ; qu'il lui était également loisible, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 313-14 et L. 313-17 de ce code, de faire précéder cette décision d'injonctions tendant à ce que sa propriétaire mette fin, par elle-même, à son activité dans un délai donné ; que les injonctions prises, qui comportent les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, étaient suffisamment motivées ; que contrairement à ce que soutient la requérante, le département de Seine-et-Marne, après avoir constaté que le lieu de vie dirigé par Mme A...accueillait des personnes adultes handicapées ou vulnérables et devait donc être qualifié d'établissement de fait créé sans autorisation, ne pouvait se borner à lui enjoindre uniquement de cesser les prestations offertes aux personnes hébergées, la seule mesure de nature à remédier à cette situation illégale étant de faire cesser l'hébergement des personnes intéressées ; que le délai de deux mois que le département de Seine-et-Marne a choisi de consentir, à trois reprises, à Mme A...pour se conformer à ses obligations, à la suite des constatations réalisées dès 2006, ne présentait pas, dans les circonstances de l'espèce, un caractère déraisonnable ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des constatations réalisées le 25 avril 2006 par les agents du département de Seine-et-Marne que Mme A...héberge essentiellement dans son pavillon des personnes handicapées, placées sous tutelle ou sous curatelle, parmi lesquelles certaines sont, en outre, âgées de plus de soixante ans ; que si la plupart des chambres sont équipées de salles de bains individuelles, la cuisine relève des parties communes ; qu'une employée assure les prestations de repas et de ménage pour les résidents ; que les pensionnaires, alors même qu'ils ont conclu des contrats de bail avec la propriétaire, ne peuvent, en raison de leur état, vivre de façon indépendante ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'enquête préliminaire menée en mai 2008 par le parquet du Tribunal de grande instance de Meaux, des témoignages recueillis par le département et de la main courante établie par les sapeurs pompiers le 14 août 2009 à la suite d'une intervention sur place que cette situation n'avait pas changé à la date à laquelle la décision litigieuse a été prise, en dépit des injonctions adressées à la requérante ; qu'il résulte de ces éléments que Mme A...accueille dans son pavillon des personnes âgées et des personnes adultes handicapées, au sens des dispositions précitées des 6° et 7° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles et que le lieu de vie qu'elle dirige peut être qualifié d'établissement de fait ouvert sans autorisation ; que la circonstance que les résidents ne seraient pas dépendants médicalement est juridiquement sans incidence ; que le moyen tiré de ce que la décision litigieuse serait entachée d'erreur de qualification juridique doit donc être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...le versement de la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par le département de Seine-et-Marne et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Mme A...versera au département de Seine-et-Marne la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 10PA03855

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N° 13PA02616


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA02616
Date de la décision : 06/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. MOREAU
Rapporteur ?: M. Florian ROUSSEL
Rapporteur public ?: Mme MACAUD
Avocat(s) : SCP PINSON SEGERS DAVEAU et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-03-06;13pa02616 ?
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