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31/12/2014 | FRANCE | N°14PA01891

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 31 décembre 2014, 14PA01891


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 14 juin 2013 du préfet de police lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à la frontière à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1310058 du 22 janvier 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant l

a Cour :

Par une requête et un mémoire ampliatif, enregistrés le 28 avril 2014 et le 15 ma...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 14 juin 2013 du préfet de police lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à la frontière à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1310058 du 22 janvier 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire ampliatif, enregistrés le 28 avril 2014 et le 15 mai 2014, Mme C..., représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1310058 du 22 janvier 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 14 juin 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de sa demande de renouvellement de titre de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et de lui délivrer, durant la période de l'instruction, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat, MeA..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité dès lors que les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'auteur de l'acte était incompétent en l'absence d'une délégation régulière de signature ;

- les décisions sont entachées d'un vice de procédure pour défaut de saisine de la commission du titre de séjour ;

- l'arrêté est entaché d'un défaut de motivation ;

- le préfet a commis une erreur de fait en affirmant qu'elle était entrée en France le 2 avril 2010 alors qu'elle réside sur le territoire depuis le 1er janvier 2003 ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile eu égard à l'ancienneté de son séjour, à son intégration professionnelle, à la présence en France de sa fratrie et à l'absence de toute attache familiale dans son pays d'origine ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête et le mémoire ampliatif ont été communiqués au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par une décision du 27 mars 2014, le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris a admis Mme C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle, à hauteur de 85%.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Dhiver.

1. Considérant que MmeC..., ressortissante camerounaise, titulaire d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " valable jusqu'au 27 décembre 2011, a sollicité le renouvellement de son titre de séjour dans le cadre des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle relève appel du jugement du 22 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 juin 2013 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office à l'issue de ce délai ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que s'il ressort de la demande présentée par Mme C...devant le Tribunal administratif de Paris qu'elle avait soulevé un moyen tiré de ce qu'elle pouvait prétendre de plein droit à un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce moyen était inopérant dès lors que la requérante avait sollicité un titre de séjour en qualité de salarié, sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-10 du code ; que, par suite, en ne répondant pas à ce moyen, les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité ;

Sur la légalité de l'arrêté du 14 juin 2013 :

3. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté n° 2013-00003 du 4 janvier 2013, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 11 janvier 2013, le préfet de police a donné à M. B...D...délégation pour signer notamment les décisions de refus de titre de séjour assorties de l'obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le signataire de l'arrêté contesté n'aurait pas été titulaire d'une délégation régulière manque en fait ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté contesté énonce de façon suffisamment précise les considérations de fait et de droit sur lesquelles il se fonde ; qu'il est ainsi suffisamment motivé au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;

5. Considérant, en troisième lieu, que le préfet de police indique dans son arrêté du 14 juin 2013 que Mme C...est entrée en France le 2 avril 2010 ; qu'il ressort des pièces du dossier que cette date correspond, ainsi que l'avait elle-même indiqué l'intéressée lors de son entretien en préfecture, à sa dernière entrée sur le territoire ; qu'ainsi, le préfet n'a pas commis d'erreur de fait en mentionnant cette date ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;

7. Considérant que Mme C...fait valoir que le centre de ses intérêts familiaux et privés est désormais en France où elle est installée de façon habituelle depuis 2003, où elle exerce une activité professionnelle, et où réside sa fratrie qui la soutient depuis le décès de son fils en 2011 ; que, toutefois, la requérante est célibataire et si son frère et deux de ses soeurs résident régulièrement sur le territoire, il ressort des pièces du dossier qu'une autre de ses soeurs vit hors de France ; que la requérante n'établit pas qu'elle entretiendrait avec les membres de sa famille présents en France une relation étroite telle que leur présence à ses côtés lui serait indispensable ; que si Mme C...démontre, par les pièces qu'elle produit, sa présence habituelle sur le territoire depuis 2005 et si elle justifie être employée depuis décembre 2010, d'abord en qualité d'auxiliaire de vie, ensuite d'agent d'entretien puis d'employée de maison, cette activité professionnelle était encore, à la date à laquelle le préfet s'est prononcé, récente ; que, dans les circonstances de l'espèce, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'ainsi, cet arrêté n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni, en tout état de cause, les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet n'a pas non plus commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa mesure sur la situation personnelle de l'intéressée ;

8. Considérant, en troisième lieu, que le préfet n'est tenu, en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions permettant d'obtenir de plein droit un titre de séjour, et non de tous les étrangers qui sollicitent un tel titre ; que Mme C...n'établissant pas être en situation de bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en France, le préfet de police n'était en tout état de cause pas tenu de saisir la commission du titre de séjour ;

9. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'en faisant uniquement valoir qu'en raison du décès de son fils unique en France en 2011 et de son besoin d'être soutenue par sa famille, son retour dans son pays d'origine l'exposerait à d'importantes souffrances morales, Mme C... n'établit pas qu'elle serait soumise à des peines ou traitements inhumains ou dégradants en cas de retour au Cameroun ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination est contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Marino, président assesseur,

- Mme Dhiver, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 décembre 2014.

Le rapporteur,

M. DHIVERLe président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

A. CLEMENT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA01891


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA01891
Date de la décision : 31/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : BERA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-12-31;14pa01891 ?
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