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06/05/2015 | FRANCE | N°14PA03230

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 06 mai 2015, 14PA03230


Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2014, présentée pour M. D... A..., demeurant..., par MeB... ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1311511 et 1315041/3-3 du 20 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision en date du 24 décembre 2012 de l'inspecteur du travail accordant à la Régie autonome des transports parisiens (RATP) l'autorisation de le licencier, de la décision implicite du ministre du travail du 26 juin 2013 rejetant son recours hiérarchique formé contre la première

décision et de la décision du ministre du travail du 26 août 2013 annu...

Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2014, présentée pour M. D... A..., demeurant..., par MeB... ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1311511 et 1315041/3-3 du 20 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision en date du 24 décembre 2012 de l'inspecteur du travail accordant à la Régie autonome des transports parisiens (RATP) l'autorisation de le licencier, de la décision implicite du ministre du travail du 26 juin 2013 rejetant son recours hiérarchique formé contre la première décision et de la décision du ministre du travail du 26 août 2013 annulant la décision de l'inspecteur du travail et autorisant son licenciement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 26 août 2013 ;

3°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la RATP une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la décision ministérielle est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne contient pas les raisons pour lesquelles aucun lien n'existe entre le licenciement et ses fonctions représentatives ; que l'inspecteur du travail n'a pas procédé à une enquête contradictoire en méconnaissance de l'article R. 2421-11 du code du travail ; qu'à cet égard, les pièces communiquées par le ministre n'ont été réceptionnées que postérieurement à sa décision et ne lui ont donc pas permis de préparer utilement sa défense ; que la procédure de licenciement est irrégulière du fait de l'absence de convocation à un nouvel entretien préalable à la consultation du comité d'entreprise ; que les fautes reprochées étaient prescrites en application des articles L. 1332-4 et L. 1332-2 du code du travail et que le délai imparti par l'article R. 2421-10 du code du travail pour saisir l'inspecteur du travail après l'avis du comité d'entreprise a été largement dépassé ; que les griefs retenus par le ministre du travail sont infondés ; qu'il existe un lien entre la mesure de licenciement et ses mandats de représentant du personnel ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 septembre 2014, présenté pour la Régie autonome des transports parisiens (RATP) ; elle conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge du requérant au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle fait valoir que les moyens de légalité externe manquent en fait dès lors, d'une part, que la décision relève l'absence de tout lien entre la mesure de licenciement et l'exercice du mandat et qu'elle n'avait pas à être plus motivée sur ce point ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat et, d'autre part, que le requérant n'établit pas ne pas avoir reçu les pièces en temps utile pour présenter ses observations, alors qu'il les a réceptionnées le 14 août, soit 12 jours avant la décision attaquée ; que la procédure préalable au licenciement a été respectée dès lors que le comité a été de nouveau convoqué et que les motifs étant identiques, il n'était pas tenu de convoquer à nouveau le salarié pour un entretien ; que les faits reprochés n'étaient pas prescrits lors de l'engagement de la procédure disciplinaire ; que le délai de saisine de l'inspecteur du travail a été respecté ; que les faits reprochés sont avérés et d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement du salarié concerné ; qu'il n'y a aucun lien entre la mesure de licenciement et les mandats détenus par l'intéressé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 avril 2015 :

- le rapport de M. Polizzi, président assesseur,

- les conclusions de M. Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me Pelletier, avocat de la RATP ;

1. Considérant que M.A..., machiniste receveur, délégué du personnel au sein de la RATP, demande notamment l'annulation du jugement en date du 20 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête dirigée contre la décision du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 26 aout 2013 annulant la décision de l'inspecteur du travail du 20 décembre 2012 et autorisant son licenciement ;

2. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis du mandat de délégué du personnel, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque leur licenciement est envisagé,

celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec leur appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte-tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exercice normal du mandat dont il est investi ; qu'il leur appartient également de vérifier la régularité des phases de la procédure de licenciement antérieures à la saisine de l'administration ;

Sur les conclusions principales :

3. Considérant, en premier lieu, que la décision ministérielle contestée mentionne notamment l'absence de lien entre la mesure de licenciement et le mandat de M.A... ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, elle n'avait pas à contenir les raisons pour lesquelles le ministre a estimé que ce lien n'existait pas ; que, par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que le caractère contradictoire de l'enquête préalable à la délivrance d'une autorisation administrative de licenciement, menée conformément aux dispositions de l'article R. 2421-11 du code du travail, implique que le salarié protégé soit mis à même de prendre connaissance de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande, sans que la circonstance que le salarié est susceptible de connaître le contenu de certaines de ces pièces puisse exonérer l'inspecteur du travail de cette obligation ; que la communication de l'ensemble de ces pièces doit intervenir avant que l'administration ne statue sur la demande d'autorisation de licenciement présentée par l'employeur, dans des conditions et des délais permettant au salarié de présenter utilement sa défense ; que M. A...soutient que le ministre ne l'a pas mis à même de le faire en ne lui communiquant l'ensemble des pièces produites par son employeur et accompagnant la demande d'autorisation de licenciement que par un courrier du 14 août 2013, soit durant les congés estivaux ; que, toutefois, dès lors qu'il a réceptionné ces pièces douze jours avant l'édiction de la décision attaquée du 26 août 2013, la circonstance que cette réception ayant eu lieu " en pleine période estivale " étant sans influence, il n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas reçu ces pièces en temps utile pour présenter sa défense ; que, par suite, le moyen tiré du non-respect de la procédure contradictoire préalable à l'autorisation de licenciement doit être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, que M. A...fait valoir qu'il aurait dû être à nouveau convoqué à un entretien avant une nouvelle consultation du comité d'établissement, le 24 octobre 2012, effectuée à la suite du rejet par l'inspecteur du travail de la demande initiale d'autorisation de licenciement, il est constant que les motifs de licenciement soumis à l'avis du comité d'établissement du 24 octobre 2012, comme ceux de la seconde demande d'autorisation de licenciement, étaient identiques aux motifs de la première consultation du comité d'entreprise et de ceux de la demande initiale d'autorisation de licenciement ; que, dans ces conditions et bien qu'un délai d'un peu plus de trois mois se soit écoulé entre les deux demandes d'autorisation de licenciement, le tribunal a jugé à bon droit que la circonstance que M. A... n'ait pas été convoqué à un nouvel entretien préalable avant la consultation du comité d'établissement le 24 octobre 2012 est sans incidence sur la régularité de la procédure suivie par l'employeur préalablement à la saisine de l'administration ;

6. Considérant, en quatrième lieu, d'une part, qu'en application de l'article L. 1332-4 du code, les faits reprochés à M.A..., commis à compter du 11 décembre 2011, pouvaient donner lieu à l'engagement de poursuites jusqu'au 11 février 2012 pour les plus anciens ; qu'il ressort des pièces du dossier que les poursuites disciplinaires ont été engagées au plus tard le 6 février 2012 ; que, d'autre part, si, en vertu des dispositions de l'article R. 2421-10 du code du travail, la demande d'autorisation de licenciement d'un délégué du personnel est adressée à l'inspecteur du travail dans les quinze jours suivant la date à laquelle a été émis l'avis du comité d'entreprise, ce délai n'est toutefois pas prescrit à peine de nullité, comme le reconnaît d'ailleurs le requérant lui-même ; qu'en tout état de cause, l'inspecteur du travail a été saisi de la demande de licenciement ayant donné lieu à l'autorisation contestée une semaine après la consultation du comité d'établissement le 24 octobre 2012 ; qu'il résulte de tout ce qui précède que le moyen tiré de la prescription des faits poursuivis doit en tout état de cause être écarté ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que les faits retenus par le ministre pour accorder l'autorisation de licencier M.A..., à savoir l'exercice abusif du droit de retrait le 4 janvier 2012 et les propos injurieux et menaçants à l'encontre d'une autre salariée le 28 janvier 2012, sont avérés par les pièces du dossier et, comme l'ont estimé à bon droit le ministre et le tribunal sans même examiner les absences du mois de décembre 2011, d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;

8. Considérant, en dernier lieu, que, contrairement à ce qu'il soutient, l'existence d'un lien entre la mesure de licenciement litigieuse et le mandat de délégué du personnel ou l'activité syndicale de M. A... ne ressort pas des pièces du dossier ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 août 2013 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social accordant à la RATP l'autorisation de le licencier ;

Sur les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que l'Etat ou la RATP, qui ne sont pas les parties perdantes en l'instance, versent à M. A...une somme au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge du requérant, partie perdante, une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la RATP et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : M. A...versera à la RATP une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la Régie autonome des transports parisiens.

Délibéré après l'audience du 9 avril 2015, à laquelle siégeaient :

M. Bouleau, premier vice-président,

M. Polizzi, président assesseur,

Mme Julliard, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 6 mai 2015.

Le rapporteur,

F. POLIZZILe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 14PA03230


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA03230
Date de la décision : 06/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: M. Francis POLIZZI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : MAGNON

Origine de la décision
Date de l'import : 23/09/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-05-06;14pa03230 ?
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