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20/10/2015 | FRANCE | N°15PA01069

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 20 octobre 2015, 15PA01069


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 12 février 2015 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé le pays de destination, ne lui a pas accordé de délai de départ volontaire et a décidé de le placer en rétention administrative.

Par un jugement n° 1502314/8 du 16 février 2015, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour

:

Par une requête, enregistrée le 10 mars 2015, M. A..., représenté par MeB..., demande à la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 12 février 2015 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé le pays de destination, ne lui a pas accordé de délai de départ volontaire et a décidé de le placer en rétention administrative.

Par un jugement n° 1502314/8 du 16 février 2015, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 mars 2015, M. A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1502314/8 du 16 février 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 février 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet de police a méconnu les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il n'a pas mis en oeuvre le droit de l'Union européenne ;

- le préfet de police a méconnu les dispositions de la directive du Conseil de l'Europe n°2003/86/CE du 22 septembre 2003, dès lors qu'il est marié avec une ressortissante européenne résidant en France ;

- le préfet de police n'a pas procédé à l'examen particulier de sa situation personnelle, dès lors qu'il est marié à une ressortissante de l'Union, qu'il a déposé un dossier auprès de la préfecture du Val-de-Marne et qu'il est entré régulièrement sur le territoire français ;

- le préfet de police a méconnu les dispositions de l'article L. 121-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et R. 621-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que son épouse travaille régulièrement en France ;

- le préfet de police a entaché sa décision d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'obligation de quitter le territoire sur sa situation personnelle ;

- le préfet de police a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que l'obligation de quitter le territoire français constitue une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale normale.

La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès,

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public.

1. Considérant que par un arrêté en date du 12 février 2015, le préfet de police a obligé M. A..., ressortissant algérien, né le 19 septembre 1988, entré en France en octobre 2011 selon ses déclarations muni d'un passeport revêtu d'un visa espagnol de court séjour, à quitter sans délai le territoire français, et a décidé de placer M. A...en centre de rétention administrative dans l'attente de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ; que par le jugement en date du 16 février 2015, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté le recours de l'intéressé contre cet arrêté ; que par une requête enregistrée à la Cour le 10 mars 2015, M. A...relève régulièrement appel de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...)" ; qu'aux termes de l'article L. 121-1 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; 3° S'il est inscrit dans un établissement fonctionnant conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur pour y suivre à titre principal des études ou, dans ce cadre, une formation professionnelle, et garantit disposer d'une assurance maladie ainsi que de ressources suffisantes pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 5° afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale ; 4° S'il est un descendant direct âgé de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendant direct à charge, conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° ; 5° S'il est le conjoint ou un enfant à charge accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées au 3°. " ;

3. Considérant que M. A...soutient qu'il est marié à une ressortissante suédoise depuis le 19 décembre 2014 qui réside en France et n'a pas divorcé ; qu'il produit à cet effet une copie intégrale de son acte de mariage en date du 19 décembre 2014 ; que M.A..., en établissant ainsi que son éloignement aurait pour effet le risque d'obliger un conjoint citoyen d'un pays membre de l'Union Européenne et, de ce fait, citoyen de l'Union Européenne au sens du droit pertinent de cette Union, de fixer sa résidence hors de l'Union Européenne, doit être regardé, au sens des dispositions de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile venant transposer la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, comme un membre de famille d'un ressortissant de l'Union européenne qui a le droit, en raison de ce risque pour le conjoint citoyen de l'Union Européenne, de résider sur le territoire d'un des états de l'Union Européenne ; qu'ainsi le préfet de police a commis une erreur de droit en appliquant à M. A...les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant que le présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet de police délivre une carte de séjour temporaire à M.A... ; qu'en revanche, il implique nécessairement que le préfet de police réexamine sa situation administrative ; qu'il y a lieu, dès lors, en vertu de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de police de procéder à un tel réexamen, en délivrant à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sans qu'il soit nécessaire en l'espèce d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°1502314/8 du 16 février 2015 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté en date du 12 février 2015 par lequel le préfet de police a obligé M. A...à quitter le territoire français, a fixé le pays de destination, ne lui a pas accordé de délai de départ volontaire et a décidé de le placer en rétention administrative sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la situation administrative de M. A... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour durant ce réexamen.

Article 3 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 29 septembre 2015 à laquelle siégeaient :

M. Krulic, président de chambre,

M. Auvray, président assesseur,

M. Pagès, premier conseiller,

Lu en audience publique le 20 octobre 2015.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

J. KRULIC

Le greffier,

C. RENE-MINE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA01069


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01069
Date de la décision : 20/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : MIKOWSKI

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-10-20;15pa01069 ?
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