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07/12/2015 | FRANCE | N°14PA04308

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 07 décembre 2015, 14PA04308


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler le titre de perception du 14 octobre 2011 émis à son encontre par le directeur de l'agence nationale des fréquences (ANFR) d'un montant de 1 138 euros, au titre de la redevance d'utilisation des fréquences radioélectriques pour l'année 2008, ensemble la décision du 20 mars 2012 rejetant son recours gracieux, de le décharger de l'obligation de payer ladite somme et, à titre subsidiaire, de le décharger, en réparation du préjudice subi du

fait des fautes commises par l'ANFR, de l'obligation de payer ladite somme ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler le titre de perception du 14 octobre 2011 émis à son encontre par le directeur de l'agence nationale des fréquences (ANFR) d'un montant de 1 138 euros, au titre de la redevance d'utilisation des fréquences radioélectriques pour l'année 2008, ensemble la décision du 20 mars 2012 rejetant son recours gracieux, de le décharger de l'obligation de payer ladite somme et, à titre subsidiaire, de le décharger, en réparation du préjudice subi du fait des fautes commises par l'ANFR, de l'obligation de payer ladite somme et de ramener la somme due à un montant maximum de 113,80 euros.

Par un jugement n° 1204784 du 18 juillet 2014, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par des mémoires enregistrés le 22 octobre 2014 et le 13 novembre 2015, lequel n'a pas été communiqué, M.C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 1204784 du 18 juillet 2014 du Tribunal administratif de Melun ainsi que le titre de perception n° 0003642 du 14 octobre 2011 émis par l'ANFR pour la somme de 1 138 euros, ensemble la décision du 20 mars 2012 rejetant son recours préalable et de le décharger de l'obligation de payer ladite somme ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler le jugement n° 1204784 du 18 juillet 2014 du Tribunal administratif de Melun, de le décharger, en réparation du préjudice subi du fait des fautes commises par l'ANFR, de l'obligation de payer la somme de 1 138 euros et de ramener la somme due à un montant maximum de 113,80 euros ;

3°) en tout état de cause, de mettre à la charge de l'ANFR la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué a été rendu au terme d'une procédure ayant méconnu le principe du contradictoire ;

- le jugement attaqué méconnaît les dispositions du 2ème alinéa de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ;

- le titre de perception méconnaît les dispositions de l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 ;

- le courrier du 7 novembre 2007 comportait l'engagement explicite de l'ANFR de fournir, au cours du 2ème trimestre 2008, une information sur la mise en place du nouveau dispositif permettant de connaître le montant des redevances dues ;

- il aurait pu renoncer plus tôt à l'usage du radiotéléphone si l'ANFR avait respecté son engagement ;

- l'ANFR a méconnu les dispositions de l'article 17 du décret du 24 octobre 2007 ;

- le titre de perception critiqué est entaché d'illégalité en ce qu'il est fondé sur des règles qui n'ont pu entrer en vigueur compte tenu de la carence de l'ANFR dans l'exécution de ses obligations ;

- il a perdu une chance de renoncer dès le début de l'année 2008 à l'usage du radiotéléphone ;

- les dispositions de l'article 12 de la directive n° 2002/20/CE du 7 mars 2002 ont été méconnues.

Par un mémoire, enregistré le 28 juillet 2015, l'ANFR conclut au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à l'annulation du titre de perception en tant qu'il porte sur la seule redevance de gestion.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive n° 2002/20/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à l'autorisation de réseaux et de services de communications électroniques ;

- le code du domaine de l'Etat ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code des postes et des communications électroniques ;

- la loi n° 92-1476 du 31 décembre 1992 ;

- la loi n° 96-659 du 26 juillet 1996, notamment son article 14, et le décret n° 96-1178 du 27 décembre 1996 pris pour son application ;

- le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 ;

- le décret n° 92-1369 du 29 décembre 1992 modifiant le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 ;

- le décret du 3 février 1993 modifié relatif aux redevances de mise à disposition de fréquences radioélectriques et de gestion dues par les titulaires d'autorisations délivrés en application des articles L. 42-1 et L. 42-2 du code des postes et des communications électroniques ;

- le décret n° 2007-1531 du 24 octobre 2007 ;

- le décret n° 2007-1532 du 24 octobre 2007 modifié, et l'arrêté du 24 octobre 2007 portant application du décret n° 2007-1532, relatifs aux redevances d'utilisation des fréquences radioélectriques dues par les titulaires d'autorisations d'utilisation de fréquences délivrées par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot,

- et les conclusions de M. Sorin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., qui exerce la profession de vétérinaire dans le département du Cher, a bénéficié, à compter de l'année 2004, de la mise à disposition d'un radiotéléphone fonctionnant, en dernier lieu, sur 2 fréquences radioélectriques utilisables sur une surface de plus de 5 600 km². L'ANFR lui a adressé, le 16 octobre 2008, au titre de la redevance 2008, un relevé de 1 413 euros, complété d'un titre de perception émis le 21 octobre suivant pour le même montant. A cette même date, M. C...a sollicité une remise gracieuse du différentiel de redevance entre le montant dû en 2007 et celui réclamé pour 2008 ainsi que la résiliation de son autorisation d'utilisation des fréquences. Sa réclamation préalable a été rejetée le 12 janvier 2009. Par un arrêt de la Cour de céans du 2 mai 2011, le titre de perception a été annulé au motif qu'il méconnaissait les dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 à défaut de comporter la signature ainsi que l'identité de l'autorité administrative de laquelle il émanait. L'ANFR a, dans ces conditions, adressé à M.C..., le 6 octobre 2011, un nouveau relevé de redevance d'un montant de 1 138 euros pour la période courant du 1er janvier au 21 octobre 2008, complété d'un titre de perception émis le 14 octobre suivant pour la même somme. Par une décision du 20 mars 2012 le directeur général de l'ANFR a rejeté son opposition à exécution. Par un jugement du 18 juillet 2014, dont M. C...relève appel, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant, d'une part à être déchargé de l'obligation de payer et, d'autre part, à être indemnisé du préjudice subi.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il résulte de l'application combinée des dispositions des articles R. 611-1, R. 611-11-1, R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative que, lorsque, postérieurement à la clôture de l'instruction, le juge est saisi d'un mémoire émanant de l'une des parties à l'instance, il lui appartient, en vertu du principe selon lequel il dirige l'instruction, dans tous les cas, de prendre connaissance de ce mémoire avant de rendre sa décision, ainsi que de le viser sans l'analyser. Si le juge a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, d'en tenir compte - après l'avoir visé et, cette fois, analysé -, il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si ce mémoire contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction écrite et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office.

3. Il ressort des pièces du dossier que, postérieurement à la clôture de l'instruction fixée au 25 juin 2014, l'ANFR a produit un premier mémoire en défense dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait contenu l'exposé de circonstances de droit ou de fait qui aurait exigé d'en tenir compte et de rouvrir l'instruction en vue de le soumettre au débat contradictoire ainsi que de l'analyser en vertu des dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative alors que le tribunal disposait de tous les éléments nécessaires pour apprécier le bien-fondé de la demande dont il avait été saisi. Dans ces conditions, les premiers juges pouvaient faire mention de ce mémoire, dans les visas du jugement attaqué, sans l'avoir analysé. Il ne ressort pas davantage du jugement attaqué que le tribunal se serait fondé sur des moyens qu'il aurait relevés d'office sans en informer préalablement les parties, ou sur des circonstances de faits contenues dans le mémoire en défense de l'ANFR. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit être écarté comme manquant en fait.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les conclusions tendant à la décharge de l'obligation de payer :

4. En premier lieu, aux termes de l'article 12 de la directive n° 2002/20/CE du 7 mars 2002 susvisée : " 1. Les taxes administratives imposées aux entreprises fournissant un service ou un réseau au titre de l'autorisation générale ou auxquelles un droit d'utilisation a été octroyé : / a) couvrent exclusivement les coûts administratifs globaux qui seront occasionnés par la gestion, le contrôle et l'application du régime d'autorisation générale, des droits d'utilisation et des obligations spécifiques visées à l'article 6, paragraphe 2, qui peuvent inclure les frais de coopération, d'harmonisation et de normalisation internationales, d'analyse de marché, de contrôle de la conformité et d'autres contrôles du marché, ainsi que les frais afférents aux travaux de réglementation impliquant l'élaboration et l'application de législations dérivées et de décisions administratives, telles que des décisions sur l'accès et l'interconnexion, et / b) sont réparties entre les entreprises individuelles d'une manière objective, transparente et proportionnée qui minimise les coûts administratifs et les taxes inhérentes supplémentaires. / 2. Lorsque les autorités réglementaires nationales imposent des taxes administratives, elles publient un bilan annuel de leurs coûts administratifs et de la somme totale des taxes perçues. Les ajustements nécessaires sont effectués en tenant compte de la différence entre la somme totale des taxes et les coûts administratifs ". Aux termes de l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 : " Tout ordre de recette doit indiquer les bases de liquidation. [...] ".

5. D'une part, il ressort des mentions figurant sur le titre de perception en litige qu'il comporte bien l'indication du nom du redevable ainsi que son objet. Il fait, également, mention des textes applicables ainsi que du relevé de redevance détaillé qui avait été préalablement adressé à M. C... et qui comporte l'énoncé suffisamment précis des bases de liquidation de la redevance de gestion ainsi que de la redevance domaniale de mise à disposition. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions 81 du décret du 29 décembre 1962 doit être écarté.

6. D'autre part, si M. C...a entendu soutenir que les mentions du titre de perception critiqué ne permettaient pas d'établir que la redevance de gestion couvrait exactement les coûts administratifs généraux que l'ANFR avait exposés, ainsi que l'exigent les dispositions de l'article 12 de la directive n° 2002/20/CE, ce moyen ne pourra en tout état de cause qu'être écarté dès lors que l'ANFR n'a pas, dans les titres de perception qu'elle émet, à justifier que la redevance couvre exactement les coûts administratifs généraux qu'elle expose.

7. En deuxième lieu, la circonstance que l'ANFR n'aurait pas, au cours du deuxième trimestre 2008, ainsi que s'en prévaut M.C..., informé les utilisateurs de fréquences radioélectriques de la mise en place du nouveau dispositif réglementaire relatif aux redevances d'utilisation de ces fréquences et de son incidence sur le montant des redevances dues au titre de l'année 2008, ce qui l'aurait empêché de renoncer à l'usage de son radiotéléphone dès le 30 juin 2008 est, en tout état de cause, sans incidence sur l'application de ce nouveau dispositif réglementaire issu de deux décrets et d'un arrêté du 24 octobre 2007, dont l'entrée en vigueur dépendait de leur seule publication et, par suite, sur la légalité du titre de perception en litige.

8. En dernier lieu, la circonstance que le montant de la redevance 2008 n'aurait pas été portée à la connaissance de M. C...avant le 30 juin 2008, date à laquelle l'article 17 du décret du 24 octobre 2007 prévoyait que, par dérogation à l'article 14, les redevances dues pour 2008 seraient exigibles, lui permettant ainsi de renoncer à l'usage de son téléphone, est sans incidence sur la légalité du titre de perception en litige.

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires présentées à titre subsidiaire :

9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le titre de perception en litige n'est entaché d'aucun vice de forme constitutif d'une illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de l'ANFR.

10. En deuxième lieu, et contrairement à ce que soutient M.C..., le courrier du 7 novembre 2007 par lequel l'ANFR avisait les titulaires d'autorisation d'utilisation de fréquences radioélectriques d'une modification du dispositif réglementaire ne comportait aucun engagement de sa part, à défaut de toute obligation d'information prévue par les textes, duquel dépendait l'entrée en vigueur ainsi que l'opposabilité de cette nouvelle réglementation. Cette dernière, résultant de deux décrets et d'un arrêté du 24 octobre 2007, était opposable à ceux qui entraient dans son champ d'application qu'à compter de leur publication sans autre formalité et, notamment, celle d'une notification. M.C..., ayant été informé des références des nouveaux textes applicables par ce courrier, il lui appartenait, ainsi que l'a jugé le tribunal, de se rapprocher des professionnels du secteur afin d'obtenir les éléments d'information nécessaires sur le montant de la redevance à payer au titre de l'année 2008. Il est, en outre, constant que l'ANFR avait tenu une réunion d'information le 13 mars 2008 dont le contenu avait été rendu accessible au public via son site Internet ainsi que celui du SNIR. Dans ces conditions, M.C..., qui a continué à utiliser le radiotéléphone mis à sa disposition, sans avoir pris contact avec les professionnels du secteur ni, d'ailleurs, avec l'ANFR, ne peut invoquer aucune faute qui serait imputable à l'ANFR.

11. En dernier lieu, et contrairement à ce que fait valoir M.C..., il n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait perdu une chance de renoncer à l'usage de son radiotéléphone dès le début de l'année 2008 alors que le préjudice qu'il estime avoir subi ne trouve pas son origine dans les fautes commises par l'ANFR, mais dans la mise en oeuvre d'une nouvelle réglementation.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions qu'il a présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...et à l'Agence nationale des fréquences.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2015 à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 décembre 2015.

Le rapporteur,

S. BONNEAU-MATHELOTLe président,

J. LAPOUZADELe greffier,

Y. HERBERLa République mande et ordonne au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA04308


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA04308
Date de la décision : 07/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : SENEJEAN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-12-07;14pa04308 ?
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