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07/12/2015 | FRANCE | N°14PA05243

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 07 décembre 2015, 14PA05243


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 24 décembre 2014, l'association Oxygène, représentée par la S.C.P. David Gaschignard, demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler la décision du 21 octobre 2014 par laquelle le président du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel - CSA - a refusé d'intégrer les fréquences 89,3 MHz et 107MHz à Fontainebleau au plan de fréquences du prochain appel à candidatures dans le ressort du comité territorial de l'audiovisuel de Paris ;

2°) à titre subsidiaire, de désigner un expert, qui déposera so

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Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 24 décembre 2014, l'association Oxygène, représentée par la S.C.P. David Gaschignard, demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler la décision du 21 octobre 2014 par laquelle le président du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel - CSA - a refusé d'intégrer les fréquences 89,3 MHz et 107MHz à Fontainebleau au plan de fréquences du prochain appel à candidatures dans le ressort du comité territorial de l'audiovisuel de Paris ;

2°) à titre subsidiaire, de désigner un expert, qui déposera son rapport dans un délai de 4 mois à compter de la notification de sa désignation, avec pour mission d'examiner la ressource radiophonique disponible dans la zone de Fontainebleau et de donner à la Cour tous éléments utiles pour apprécier s'il est possible d'ouvrir de nouvelles fréquences à l'exploitation ;

3°) de mettre à la charge du CSA la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la décision attaquée a été prise en méconnaissance des articles 3 et 5 du règlement intérieur du CSA ;

- le motif tiré de ce que la fréquence 89,3 MHz à Fontainebleau serait de nature à perturber la réception de Radio Libertaire autorisée sur 89,4 MHz à Paris n'est pas justifié ;

- la direction générale de l'aviation civile - DGAC - ne s'est jamais opposée à une utilisation de la fréquence 107,9 MHz ;

- le CSA s'est abstenu d'examiner si hormis les fréquences 89,3 MHz et 107,9 MHz, il n'existait pas d'autres possibilités afin d'ouvrir l'éventail à Fontainebleau et de permettre au secteur associatif d'y avoir une présence.

Par un mémoire, enregistré le 24 avril 2015, le CSA conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par un mémoire, enregistré le 4 novembre 2015, lequel n'a pas été communiqué, l'association Oxygène, représentée par la SCP David Gaschignard, conclut aux mêmes fins que précédemment.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;

- la délibération du 9 avril 2014 fixant le règlement intérieur du Conseil supérieur de l'audiovisuel ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot,

- les conclusions de M. Sorin, rapporteur public,

- et les observations de Me A...de la SCP David Gaschignard, avocat de l'association Oxygène.

Considérant ce qui suit :

1. L'association Oxygène, qui a été autorisée par le C.S.A. à exploiter un service de radiodiffusion sonore par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence intitulé " Oxygène " sur les zones de Montereau-Fault-Yonne, Nemours et Provins, dans le département de Seine-et-Marne, a, le 15 mars 2014, sollicité l'ouverture de deux nouvelles fréquences, 89,3 MHz et 107,9 MHz, sur la zone de Fontainebleau. Par une décision du 21 octobre 2014, le président du CSA a refusé d'intégrer ces fréquences au plan de fréquences du prochain appel à candidatures dans le ressort du comité territorial de l'audiovisuel de Paris. L'association Oxygène doit être regardée comme demandant l'annulation pour excès de pouvoir de la décision par laquelle le président du CSA a refusé de lancer un appel à candidatures sur la zone de Fontainebleau.

En ce qui concerne la légalité externe de la décision attaquée :

2. Aux termes de l'article de la délibération du 9 avril 2014 : " L'ordre du jour des réunions du conseil est arrêté par le président sur proposition du directeur général. [...] ". Aux termes de l'article 5 de ladite délibération : " Le Conseil ne peut délibérer que si au moins six conseillers sont présents. [...] ". Il ressort des pièces versées au dossier et plus particulièrement du procès-verbal de séance du 15 octobre 2014, que, d'une part, la demande de l'association Oxygène a effectivement été examinée et figurait bien à l'ordre du jour de ladite séance et que, d'autre part, le CSA comptait la présence de six conseillers au moins pour délibérer. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles 3 et 5 de la délibération du 9 avril 2014 ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.

En ce qui concerne la légalité interne de la décision attaquée :

3. En premier lieu, s'il appartient au CSA de veiller, en application des missions qui lui ont été confiées par le législateur, lorsqu'il arrête la liste des fréquences pouvant être attribuées, à ce que les critères fixés par les articles 1er, 3-1 et 29 de la loi du 30 septembre 1986 soient respectés, il n'est pas tenu d'inscrire sur cette liste la totalité des fréquences inutilisées ou disponibles et, par suite, de lancer un appel à candidatures si cette abstention trouve sa justification dans les limites que fixent à la liberté de communication les dispositions de l'article 1er de la loi susmentionnée ou résulte de la nécessité de concilier les différents éléments techniques qui concourent à la diffusion de services de télévision par voie hertzienne terrestre.

4. Il ressort de la décision attaquée que, pour rejeter la demande de l'association Oxygène, le CSA s'est fondé sur les motifs tirés, d'une part, s'agissant de la fréquence 89,3 MHz, de ce que son attribution était de nature à perturber la réception de Radio Libertaire autorisée sur la ressource 89,4 MHz depuis Paris et, d'autre part, s'agissant de la fréquence 107,9 MHz, de ce que des contraintes importantes tirées de la proximité avec la bande de fréquences affectée à la DGAC et au ministère de la défense ne permettait pas son exploitation pérenne.

5. L'association Oxygène soutient, à l'appui d'une étude réalisée en décembre 2013 par un cabinet indépendant, que ces motifs sont erronés.

6. D'une part, s'agissant de la fréquence 89,3 MHz, il ressort de cette étude que sa disponibilité pourrait être planifiée dans le respect de certaines contraintes en terme de site de diffusion et de puissance compte tenu des situations existantes pour lesquelles des écarts de 100 kHz et de puissance limitée entre 200 W et 2 kW ne sont pas significatifs. Toutefois, ainsi que le fait valoir le CSA, dans ses observations en défense, cette étude, qui repose sur une méthode comparative inappropriée alors que la planification d'une fréquence dépend de multiples critères variant en fonction de l'environnement de la zone considérée, des brouilleurs présents et de la distance entre l'émetteur et le récepteur, n'a pas examiné les risques de brouillage entre les fréquences de Radio Libertaire et la fréquence dont l'association intéressée demande l'exploitation commerciale. Or, le CSA produit, au soutien de son argumentation, un document graphique estimant le risque de brouillage de la fréquence 89,3 MHz sur Radio Libertaire émettant sur la fréquence 89,4 MHz à Paris à deux millions de personnes environ.

7. D'autre part, s'agissant de la fréquence 107,9 MHz, il ressort de la même étude que cette fréquence ne devrait pas perturber le service 107.7 MHz de l'autoroute A5 et de l'autoroute A6, déjà très perturbé, si la planification retient une puissance omnidirectionnelle de 100 W. Cependant, il ressort des écritures du CSA, qui persiste à critiquer la méthode choisie, que la fréquence 107,9 MHz présente des caractéristiques particulières en raison de sa proximité avec la bande de fréquences " Radio navigation Aéronautique " gérée par la DGAC, utilisée pour les équipements d'aide à l'atterrissage, et d'un risque de brouillage important, compte tenu de la plage de la bande du signal FM en région parisienne et en Ile-de-France, laquelle supporte un important trafic aérien. Compte tenu de ces contraintes techniques auxquelles s'ajoutent des conditions drastiques posées par la DGAC relatives à la coupure, étrangère aux pouvoirs dont dispose le CSA, de toute diffusion du service dans les quinze minutes en cas de troubles constatés, l'usage de cette fréquence ne peut être autorisée de manière générale. Dans ces circonstances, l'association Oxygène ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que de nombreux services ont été autorisés sur cette fréquence à proximité d'aéroports et que, par une décision du 15 octobre 2014, le CSA a autorisé l'association " Bleu Pomme " à diffuser, sur cette fréquence, un service de radio par voie hertzienne terrestre dénommé " La radio du Père Noël " dès lors que cette autorisation a été délivrée à titre temporaire sur le fondement de l'article 28-3 de la loi du 30 septembre 1986 et sous des conditions spécifiques, soit une diffusion monophonique sans sous-porteuse RDS afin de ne pas dépasser la bande de fréquence affectée à " Radio navigation Aéronautique ".

8. Il résulte de ce qui vient d'être dit et sans qu'il soit nécessaire de désigner un expert que les motifs retenus par le CSA, qui ne sont entachés ni d'une inexactitude matérielle ni d'une erreur d'appréciation, étaient de nature à justifier légalement le refus de lancer un appel à candidatures sur la zone de Fontainebleau.

9. En second lieu, le CSA, qui doit veiller à une utilisation optimale de la ressource radioélectrique, détermine, sur le fondement des dispositions de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 susvisée, à partir d'un travail de planification des fréquences, des zones géographiques ainsi que les catégories de services au titre desquelles il publie une liste de fréquences disponibles ainsi qu'un appel à candidatures. Dans le cadre de ce travail d'identification de fréquences, qui suppose des choix tenant compte, notamment, de contraintes techniques, le CSA a entendu exclure, au titre du calendrier des appels à candidatures de l'année 2013, la zone de Fontainebleau des secteurs géographiques qu'il avait fixés afin d'affecter prioritairement ses moyens aux études de fréquences sur d'autres comités territoriaux de l'audiovisuel de Paris au sein desquelles l'offre radiophonique était manifestement inférieure à celle de Fontainebleau. Dans ces circonstances, il n'appartenait pas au CSA de procéder systématiquement à une recherche sur l'ensemble du spectre hertzien de la zone de Fontainebleau, ainsi que cela est allégué par l'association Oxygène, afin de rechercher d'autres solutions permettant d'ouvrir l'éventail de fréquences sur cette zone et de permettre au secteur associatif d'y avoir une présence.

10. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de l'association Oxygène dirigées contre la décision du CSA du 21 octobre 2014 rejetant sa demande tendant à lancer un appel à candidatures sur la zone de Fontainebleau ne peuvent être accueillies. Par voie de conséquence, les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être écartées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association Oxygène est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Oxygène, au Conseil supérieur de l'audiovisuel et au Premier ministre.

Copie en sera adressée au ministre de la culture et de la communication.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2015 à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Luben, président-assesseur,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 décembre 2015.

Le rapporteur,

S. BONNEAU-MATHELOTLe président,

J. LAPOUZADELe greffier,

Y. HERBERLa République mande et ordonne au Premier ministre en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA05243


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA05243
Date de la décision : 07/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

56-04-01 Radio et télévision. Services privés de radio et de télévision. Services de radio.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : SCP DAVID GASCHIGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-12-07;14pa05243 ?
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