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17/12/2015 | FRANCE | N°15PA00251

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 17 décembre 2015, 15PA00251


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du

16 mai 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1408848/3-1 du 30 septembre 2014, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 janvier 2015, M. E..., représenté par MeD..., dema

nde à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1408848/3-1 du 30 septembre 2014 du tribunal administrat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du

16 mai 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1408848/3-1 du 30 septembre 2014, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 janvier 2015, M. E..., représenté par MeD..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1408848/3-1 du 30 septembre 2014 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté 16 mai 2014 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de vingt euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour portant autorisation de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à

M. E...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et la somme de 1 500 euros à verser à MeD..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté est signé par une autorité incompétente, la délégation de signature établie au profit de M. C...étant insuffisamment précise faute d'indiquer les attributions générales de ce dernier ;

- il méconnait les stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- il viole son droit au respect de sa vie privée et familiale tel que protégé par l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il vit en France depuis dix ans, travaille depuis neuf ans au sein de la même entreprise, est intégré à la société française, a une grande partie de sa famille en France et est atteint d'un kératocône qui ne pourrait être soigné dans son pays d'origine ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

- l'arrêté méconnait les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il est atteint d'un kératocône dont le défaut de traitement entrainerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que le traitement correspondant n'est pas disponible en Algérie.

La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris du 11 décembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Terrasse a été présenté au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.E..., ressortissant algérien né le 5 septembre 1977, est entré en France le 10 janvier 2003 sous couvert d'un visa Schengen de court séjour délivré par les autorités françaises ; qu'il a sollicité en vain l'asile territorial le 25 février 2003 ; qu'il a demandé pour la première fois la délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale " en 2013 ; que, par un arrêté du 16 mai 2014, le préfet de police, qui a examiné sa situation au regard des dispositions des articles 6 (1) et 7 (b) de l'accord franco-algérien et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a opposé un refus assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. E...relève appel du jugement du 30 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des dispositions de l'arrêté n° 2012-01202 du 24 décembre 2012 relatif aux missions et à l'organisation de la Direction de la Police Générale que le 9ème bureau, notamment, est chargé de l'application de la réglementation relative aux étrangers ; qu'aux termes de l'article 8 de l'arrêté préfectoral n° 2014-00285 du 7 avril 2014, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 11 avril 2014, " En cas d'absence ou d'empêchement des chefs des 6e, 7e, 8e, 9e et 10e bureaux, la délégation qui leur est consentie est exercée, dans la limite de leurs attributions respectives, par : (...) M. B...C..., attaché principal d'administration de l'Etat (...) " ; qu'ainsi le préfet de police a donné délégation à M. B... C..., attaché principal d'administration de l'intérieur et de l'outre mer, adjoint au chef du 9ème bureau pour signer tous les actes dans la limite des attributions du chef de bureau ; que le champ de cette délégation est ainsi suffisamment précisé ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le signataire de la décision litigieuse n'aurait pas été titulaire d'une délégation régulière parce qu'insuffisamment précise manque en fait ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1. Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) " ;

4. Considérant que si M. E...soutient résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté litigieux en faisant valoir qu'il y est entré le 10 janvier 2003 et s'y est maintenu depuis, les pièces qu'il verse aux débats au titre des années 2004, 2005 et 2008 sont trop peu nombreuses et, pour certaines dépourvues de valeur probante, pour établir sa résidence continue et habituelle en France au titre de ces années ; qu'ainsi c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'il n'établissait pas résider habituellement et de manière continue sur le territoire français depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué ; que les cinq attestations qu'il produit en appel qui sont très peu circonstanciées et n'ont été établies qu'en 2015, ne permettent pas de remettre en cause cette appréciation ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la violation des stipulations précitées doit être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, où à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant que M. E...fait valoir, outre la durée de sa présence en France, les circonstances qu'il travaille depuis neuf ans comme opérateur de télécinéma au sein de la même entreprise, a une grande partie de sa famille en France, a noué des relations privées sur le territoire et souffre d'un kératocône qui ne pourrait pas être soigné en Algérie ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que, comme il l'a déjà été dit au point 4, il n'établit pas la durée et la continuité de son séjour sur le territoire français ; qu'en se bornant à produire des fiches de paye depuis 2014 et des attestations peu circonstanciées de personnes qu'il déclare comme ses collègues sans le démontrer, il n'établit pas plus l'expérience professionnelle qu'il invoque ; qu'il est célibataire, sans charge de famille en France et a déclaré sur sa fiche de salle que l'ensemble de sa famille, parents et fratrie, réside en Algérie ; que dans ces circonstances, l'arrêté litigieux n'a pas été pris en violation de son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales précitées ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que, pour les mêmes motifs, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté litigieux serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.E... ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ;

9. Considérant que si le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut être utilement invoqué à l'encontre d'un arrêté portant refus de titre de séjour, ce moyen doit être regardé comme dirigé contre la décision distincte portant obligation de quitter le territoire ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du courrier du

21 août 2013 du docteur Mihai, ophtalmologue, et du certificat médical du 9 décembre 2013 établi par le docteur Temstet, assistant au centre hospitalier national d'ophtalmologie des Quinze-Vingts produit en appel, que M. E...souffre d'un kératocône diagnostiqué en 2013, se traduisant par la déformation de la cornée de ses deux yeux ; que si M. E...établit ainsi la nécessité d'une prise en charge médicale, il ne démontre pas, en revanche, l'exceptionnelle gravité des conséquences liées à sa pathologie ni l'absence de traitement approprié dans son pays d'origine, aucune pièce suffisamment circonstanciée n'étant versée au dossier ; qu'en particulier, un certificat médical du 30 mai 2014 du docteur Temstet indique qu'aucune opération n'est envisagée pour l'instant, l'oeil droit du requérant n'étant pas très affecté et son oeil gauche étant stable depuis une opération effectuée en 2013, étant précisé qu'équipé de lentilles l'acuité visuelle en binoculaire de M. E...est à 10/10ème ; que si dans les deux certificats établis par ce médecin, il est indiqué que le traitement est indisponible en Algérie, ces documents, rédigés en des termes très généraux, alors même qu'aucune prescription opératoire n'est prévue ne suffisent pas à le démontrer dès lors qu'il existe un nombre important d'établissements hospitaliers spécialisés en ophtalmologie en Algérie ; qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que le préfet de police aurait méconnu les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M.A... E..., au ministre de l'intérieur et à

MeD....

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- Mme Terrasse, président assesseur,

- Mme Amat, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 décembre 2015.

Le rapporteur,

M. TERRASSELa présidente,

S. PELLISSIERLe greffier,

F. TROUYETLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA00251


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15PA00251
Date de la décision : 17/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Marianne TERRASSE
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : BROCARD

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-12-17;15pa00251 ?
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