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21/01/2016 | FRANCE | N°15PA01131

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 21 janvier 2016, 15PA01131


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 19 août 2014 par lequel la préfète de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un certificat de résidence et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1407984/3 du 5 février 2015, le Tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 mars 2015, M. B..., représenté

par Me C...A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1407984/3 en date du 5 février 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 19 août 2014 par lequel la préfète de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un certificat de résidence et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1407984/3 du 5 février 2015, le Tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 mars 2015, M. B..., représenté par Me C...A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1407984/3 en date du 5 février 2015 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de Seine-et-Marne du 19 août 2014 lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre à la préfète de Seine-et-Marne de lui délivrer un titre de séjour d'un an renouvelable, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut, de procéder au réexamen de sa situation sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la décision refusant son certificat de résidence :

- elle a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle a été prise à la suite d'une procédure irrégulière, la commission du titre de séjour n'ayant pas été saisie préalablement ;

- elle méconnait les dispositions du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- elle méconnait les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est signée par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est, par voie d'exception, illégale, du fait de l'illégalité de la décision lui refusant un certificat de résidence ;

- elle méconnait les dispositions du 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet de Seine-et-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Julliard a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. D...B..., ressortissant algérien né le 1 3 février 1973, a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence dans le cadre des dispositions du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que par une décision du 19 août 2014, la préfète de Seine-et-Marne a opposé un refus à sa demande et l'a assorti d'une obligation de quitter le territoire français en fixant le pays de destination ; que M. B...relève appel du jugement du 5 février 2015 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;

Sur la légalité de la décision de refus de certificat de résidence :

2. Considérant que M. de Maistre, secrétaire général de la préfecture de Seine-et-Marne, qui a signé l'arrêté litigieux bénéficiait d'une délégation de signature de la préfète de Seine-et-Marne en date du 31 juillet 2014, régulièrement publiée le 4 août 2014 au recueil des actes administratifs n° 32 " à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département de Seine-et-Marne ", à l'exclusion de certains actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions de refus de séjour, les obligations de quitter le territoire français pas plus que les décisions fixant le pays de destination ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué contesté manque en fait ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que l'arrêté litigieux vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ainsi que les stipulations de l'accord franco-algérien ; qu'en outre, cette décision mentionne de manière précise les conditions de séjour et la situation personnelle de M.B... ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes de, l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans (...) " ;

5. Considérant que si M. B...justifie de son entrée régulière sur le sol national en 2001, il ne conteste pas les affirmations du préfet en première instance selon lesquelles certaines des pièces produites au dossier revêtent un caractère frauduleux, notamment des factures, comptes rendus opératoires et analyses médicales ou encore des bulletins de salaire de l'entreprise " CIP BAT " aux numéros de Siren et de Siret répertoriés comme appartenant aux entreprises " AGL Cuisines " et " Garage mécanique Auto " ; qu'il ressort également de ces pièces, qui sont peu nombreuses et non probantes, que l'intéressé ne justifie pas sa présence en France au cours des dix années précédant la décision attaquée ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien doit être écarté ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour [...] " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 de ce même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. " ; que selon l'article L. 313-14 de ce même code : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans " ;

7. Considérant qu'au nombre des dispositions procédurales applicables aux ressortissants algériens figurent notamment celles de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient que le préfet doit consulter la commission du titre de séjour lorsqu'il envisage de refuser de délivrer un titre de séjour temporaire aux étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou, dans le cas d'un ressortissant algérien, par les stipulations de portée équivalente de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié ; qu'en revanche, la procédure de saisine pour avis de cette commission dans les conditions prévues par l'article L. 313-14 n'est pas applicable aux ressortissants algériens, dès lors qu'ils ne peuvent utilement invoquer les dispositions de cet article à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M.B..., de nationalité algérienne, ne peut utilement se prévaloir de l'article L. 313-14 pour soutenir que le préfet de police aurait dû préalablement saisir la commission du titre de séjour ; qu'il résulte par ailleurs de ce qui a été dit au point 5 que le requérant n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un certificat de résidence sur le fondement des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien, le préfet de police n'était pas tenu, en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande et n'a pas, dès lors, entaché la décision de refus de séjour contestée d'un vice de procédure ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance/ 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sureté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des éléments produits par le préfet de Seine-et-Marne, que M. B...s'est marié en Algérie le 3 juin 2003, contrairement à la mention de " célibataire " figurant sur la fiche de salle qu'il a lui-même remplie le 24 juillet 2012 et que ses parents, ses quatre frères et ses deux soeurs résident en Algérie ; qu'ainsi le requérant n'est pas dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant ait été effectivement présent sur le territoire national durant dix ans ; que par suite, l'arrêté par lequel la préfète de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un certificat de résidence n'a pas porté atteinte au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, cette décision n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il résulte de ce qui précède que la préfète de Seine-et-Marne n'a pas entaché la décision attaquée d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle et familiale du requérant ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :

11. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède, que les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'obligation de quitter le territoire français attaquée, de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de

M.B..., ainsi que celui tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de certificat de résidence, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés ;

12. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L.121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré / (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsque l'obligation de quitter le territoire français vise un étranger faisant l'objet d'un refus de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences posées par les dispositions des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 ; qu'en l'espèce l'ensemble de ces conditions étant satisfaites, la circonstance que la préfète n'a pas spécifiquement motivé l'obligation de quitter le territoire français, dont il a assorti le refus de séjour opposé à M.B..., est sans incidence sur la légalité de cette obligation ;

13. Considérant, en dernier lieu, que M. B...soutient qu'à la date de l'arrêté attaqué, il était en situation de se voir délivrer de plein droit un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance, s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales " ; qu'en ce qui concerne les ressortissants algériens, les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles ils peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France ; que M. B..., de nationalité algérienne, ne peut, dès lors, utilement se prévaloir, pour contester le refus opposé à sa demande de titre de séjour, des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne lui sont pas applicables ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B...et au ministre de l'Intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 15 décembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Polizzi, président assesseur,

- Mme Julliard, première conseillère,

Lu en audience publique, le 21 janvier 2016.

La rapporteure,

M. JULLIARDLe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 15PA01131


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01131
Date de la décision : 21/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : GUETTA

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-01-21;15pa01131 ?
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