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08/02/2016 | FRANCE | N°15PA00848

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 08 février 2016, 15PA00848


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de la Ferté-Gaucher a demandé au Tribunal administratif de Melun d'interpréter la convention de délégation de service public conclue le 31 mai 2007 avec la société Co Lou Lan pour l'exploitation d'un aérodrome et de déclarer que les articles 2.1 et 2.2 de cette convention signifient que les biens nécessaires au service public sont des biens de retour, nonobstant l'absence de procès-verbal d'incorporation, et que le hangar construit par cette société sur le domaine de la commune est un bien d

e retour au sens de ces articles.

Par un jugement n° 1310735 du 24 décemb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de la Ferté-Gaucher a demandé au Tribunal administratif de Melun d'interpréter la convention de délégation de service public conclue le 31 mai 2007 avec la société Co Lou Lan pour l'exploitation d'un aérodrome et de déclarer que les articles 2.1 et 2.2 de cette convention signifient que les biens nécessaires au service public sont des biens de retour, nonobstant l'absence de procès-verbal d'incorporation, et que le hangar construit par cette société sur le domaine de la commune est un bien de retour au sens de ces articles.

Par un jugement n° 1310735 du 24 décembre 2014, le Tribunal administratif de Melun a jugé, en premier lieu, que les articles 2.1 et 2.2 de cette convention doivent être interprétés comme prévoyant, d'une part, que les biens nécessaires à l'exécution du service public doivent revenir automatiquement et gratuitement, sous réserve de leur complet amortissement, à la commune à l'issue de la convention, quels que soient la date et l'auteur de leur acquisition, et sans que la rédaction ou non d'un procès-verbal d'incorporation ait une incidence sur leur qualification et, d'autre part, que ces mêmes biens sont la propriété de la commune dès leur achèvement ou leur acquisition. En second lieu, il a jugé que le hangar d'une surface de 800 m² construit par la société Co Lou Lan est un bien de retour.

Procédure devant la Cour :

Par un requête enregistrée le 20 février 2015 et un mémoire enregistré le 4 décembre 2015, la société Co Lou Lan, présentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) de réformer ce jugement du Tribunal administratif de Melun du 24 décembre 2014 ;

2°) d'interpréter les articles 2.1 et 2.2 de la convention du 31 mai 2007 comme conférant la qualité de bien de reprise au hangar en litige ;

3°) de mettre à la charge de la commune de la Ferté-Gaucher la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le hangar n'était pas nécessaire à l'exploitation de l'aérodrome et qu'il correspond ainsi à un bien de reprise au sens de la convention du 31 mai 2007.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juin 2015, la commune de La Ferté-Gaucher, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5000 euros soit mise à la charge de la Sarl Co Lou Lan au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le moyen soulevé par la requête n'est pas fondé.

Par ordonnance du 6 novembre 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 décembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Petit,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- les observations de Me B...pour la Sarl Co Lou Lan,

- et les observations de Me A...pour la commune de la Ferté-Gaucher.

1. Considérant qu'à la suite d'un avis d'appel public à la concurrence, la commune de la Ferté-Gaucher a signé une convention avec la société Co Lou Lan le 31 mai 2007, ayant pour objet la gestion et la promotion de son aérodrome ; que par une délibération du 11 septembre 2012, le conseil municipal de la commune de la Ferté-Gaucher a décidé la reprise en régie de cette activité et la résiliation de la convention pour un motif d'intérêt général ; qu'en conséquence de cette résiliation, la commune a demandé à la société de libérer les terrains occupés par celle-ci et de lui remettre les clés des bâtiments édifiés sur le site, en particulier celle d'un hangar d'une surface de 800 m² construit en 2010 ; que la société Co Lou Lan a toutefois refusé de remettre à la commune les clés de ce hangar et de le libérer sans proposition d'indemnisation de la part de la commune, en faisant valoir que ce hangar constituait " un bien de reprise " au sens de la convention ; que la commune de la Ferté-Gaucher, considérant au contraire ce hangar comme un " bien de retour " lui revenant de plein droit, a demandé au Tribunal administratif de Melun d'interpréter les termes des articles 2.1 et 2.2 de la convention du 31 mai 2007 et de se prononcer sur la nature juridique du hangar ; que par un jugement du 24 décembre 2014, le Tribunal administratif de Melun a estimé, en premier lieu, que les articles 2.1 et 2.2 de la convention doivent être interprétés comme prévoyant, d'une part, que les biens nécessaires à l'exécution du service public doivent revenir automatiquement et gratuitement, sous réserve de leur complet amortissement, à la commune à l'issue de la convention, quels que soient la date et l'auteur de leur acquisition, et sans que la rédaction ou non d'un procès-verbal d'incorporation ait une incidence sur leur qualification et, d'autre part, que ces mêmes biens sont la propriété de la commune dès leur achèvement ou leur acquisition ; qu'en second lieu, il a jugé que le hangar d'une surface de 800 m² construit par la société Co Lou Lan est un bien de retour, dès lors qu'il est nécessaire au service public délégué ;

2. Considérant que la société requérante conteste ce jugement uniquement en tant qu'il a qualifié de bien de reprise le hangar en litige ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article l de la convention du 31 mai 2007 : " La présente convention a pour objet de confier au délégataire la réalisation, l'entretien, le renouvellement, l'exploitation, le développement et la promotion d'ouvrages, terrain, bâtiments, installations, matériels, réseaux et services nécessaires au fonctionnement de l'aérodrome conformément à sa situation administrative. Le délégataire peut également, avec l'accord de l'autorité délégante, prendre part à des activités annexes à ces missions compatibles avec le service public dans un but d'animation et de développement de l'aérodrome " ; qu'aux termes de l'article 2. 2 de cette convention : " (...) Les biens exploités par le délégataire sont classés en trois catégories : a) Les biens de retour. Ils se composent des terrains, bâtiments, ouvrages, installations, matériels et objets mobiliers nécessaires à l'exploitation de l'aérodrome, réalisés, acquis ou mis à disposition par l'autorité délégante ou le délégataire. Ces biens appartiennent à l'autorité délégante dès leur achèvement, acquisition ou mise à disposition et s'incorporent parallèlement au domaine public de la Commune. En fin de délégation, ils reviennent obligatoirement à l'autorité délégante. / b) Les biens de reprise. Ils se composent de biens utiles à l'exploitation de l'aérodrome, qui peuvent être repris par l'autorité délégante en fin de délégation. Ces biens appartiennent au délégataire tant que l'autorité délégante n'a pas usé de son droit de reprise. c) Les biens propres. Ils se composent des biens non financés même pour partie par des ressources de la délégation et qui ne sont grevés d'aucune clause de retour obligatoire ou facultatif car ni nécessaires ni utiles à la poursuite de l'exploitation de la délégation. Ils appartiennent en pleine propriété au délégataire pendant toute la durée de la délégation et en fin d'exploitation, dans les limites fixées par le droit domanial. " ; que selon l'article 7 de cette convention : " Dans le cadre de la réglementation en vigueur et dans le respect des obligations de service public susvisées ainsi que des prescriptions imposées par la convention de transfert, le délégataire peut autoriser ou organiser la pratique d'activités annexes sur le site de l'aérodrome. Ces activités doivent être de nature à contribuer à l'animation ou au développement de l'aérodrome " ;

4. Considérant que la société Co Lou Lan a obtenu, le 26 novembre 2009, un permis de construire pour l'édification, sur le site de l'aérodrome, d'un hangar d'une surface de 800 m² ; qu'il résulte de l'instruction que ce hangar a pour destination principale l'accueil d'hélicoptères, appartenant à une société privée et proposés au public par une autre société pour des vols de loisirs ; que ce hangar, situé sur l'emprise de l'aérodrome, est implanté sur le domaine public aéroportuaire, celui-ci étant notamment constitué, en vertu de l'article L. 2111-16 du code général de la propriété des personnes publiques, par les emprises des aérodromes ; que l'article 3 de la convention rappelle d'ailleurs que celle-ci est conclue sous le régime de l'occupation du domaine public ; que, toutefois, le hangar en litige ne peut, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, être regardé comme " nécessaire à l'exploitation de l'aéroport ", dès lors que l'activité consistant à abriter des hélicoptères servant à des vols de loisirs correspond, au sens de la convention, à une " activité annexe " présentant un caractère facultatif pour le délégataire, et ne se rattachant pas directement aux besoins de la circulation aérienne publique ; que, par suite, ce hangar, utile à l'exploitation de l'aérodrome dans la mesure où il favorise sa fréquentation, doit être regardé comme un bien de reprise au sens des stipulations précitées de l'article 2.2 de la convention du 31 mai 2007 ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a estimé que le hangar en litige devait être regardé comme un bien de retour au sens de l'article 2.2 de la convention du 31 mai 2007 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de la Ferté-Gaucher le versement à la société Co Lou Lan de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les conclusions présentées au titre de ces mêmes dispositions par la commune de la Ferté Gaucher, partie perdante dans le présent litige, ne peuvent en revanche qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le hangar d'une surface de 800 m² construit par la société Co Lou Lan en exécution du permis de construire PC 077 182 09 00068 est un bien de reprise au sens de la convention du 31 mai 2007.

Article 2 : La commune de la Ferté-Gaucher versera à la société Co Lou Lan la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de la Ferté-Gaucher au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le jugement n° 1310735 du Tribunal administratif de Melun du 24 décembre 2014 est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Co Lou Lan et à la commune de la Ferté-Gaucher.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- Mme Petit, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 février 2016.

Le rapporteur,

V. PETITLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

A-L. CHICHKOVSKY-PASSUELLOLa République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA00848


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA00848
Date de la décision : 08/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-02-03 Procédure. Diverses sortes de recours. Recours en interprétation.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Valérie PETIT
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : SCP PINSON SEGERS DAVEAU et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-02-08;15pa00848 ?
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